Le geste de sauvegarde des objets numériques: L'éditorialisation de soi à l'épreuve des réseaux( Télécharger le fichier original )par Francois Pelissolo CELSA - Master 2 Recherche 2018 |
E.3.c. - Le rapport du sujet aux objets et à l'espace« L'univers ocnophile s'attache (s'agrippe) aux objets en voie d'émergence, l'ocnophile choisit de surinvestir ses relations d'objet, alors que l'univers philobate s'attache aux espaces vides d'objet et le philobate surinvestit ses propres fonctions du moi. » (Le psychanalyste Michael Balint) Fonctions remplies par les objets dans notre rapport à l'espace et au social : - Contrôler le monde qui nous entoure (par ex. : une télécommande) - Nous signaler aux autres (un sac de marque) - Se construire un nid (meubles) Espace : problème des limites. Autrefois grandes maisons bourgeoises vs. pauvres dans un espace limité. Aujourd'hui c'est plutôt l'opposition grandes villes/province : histoires de vieilles granges où l'on retrouve des collections incroyables (exemple de la collection Baillon51) : Distinction entre l'espace de stockage (favorable) et l'espace pour retrouver un objet (défavorable si l'on s'y perd). Mobilité : réflexions de R. Debray sur le roaming (Israël : Dieu lyophilisé pour peuple nomade). A-84 51 ( Challenges.fr, 2015) A-85 E.3.d. - Les comportementsE.3.d.1 Alfred Schütz(wikipedia)(« Alfred Schütz », 2017) Schütz remarque que le monde social est constitué d'acquis dont l'intégration est implicite dans les actions et les intentionnalités pratiques. Dans son quotidien, l'individu acclimaté à une culture intègre un ensemble de savoirs et savoir-faire qui aura le caractère d'allant de soi (taken for granted), ces savoirs et savoir-faire étant tenus pour acquis - jusqu'à ce qu'il y ait altérité. Par exemple, pour l'individu acclimaté à une culture, pris par son quotidien, « que le métro fonctionne demain, comme d'habitude, est pour lui une certitude qui est presque du même ordre de vraisemblance que le lever du soleil ce même lendemain. » (L'Étranger, dans Le chercheur et le quotidien, page 221). Les analyses devront donc prendre en compte, selon Schütz, qu'un ensemble d'allants de soi est inhérent au monde vécu - ces allants de soi se reflétant aussi dans le langage. Selon Schütz, il importe de distinguer deux réseaux de concepts que le terme de motif recouvre : les motifs-en-vue-de (in-order-to motive) et les motifs parce-que (because motive) - ces deux types de motifs étant coprésent, selon Schütz. Les motifs en-vue-de (in-order-to motive) réfèrent à une fin, en vertu de laquelle une action est faite. Les intentionnalités qui leur sont associées sont des intentionnalités prospectives. Selon l'exemple de Schütz, c'est d'un motif-en-vue-de dont il est question lorsqu'est stipulé que l'action d'un meurtrier a été motivée par un appât du gain. C'est au niveau des motifs-en-vue-de, selon Schütz, que se situe un « fiat volontaire » (voluntative fiat), opérant le passage de l'état virtuel, imaginaire, de l'intentionnalité prospective à un accomplissement de l'action (la responsabilité n'étant pas abolie par les motifs-en-vue-de). Les motifs parce-que (because motive) ne sont pas prospectifs, mais réfèrent plutôt à l'intégration d'un réseau d'éléments passés - tel que soulevé par des lectures psychologiques des événements, par exemple. Ce qui est touché par les motifs parce-que, ce n'est pas l'action en tant que telle, mais plutôt le projet d'action. Toujours selon le même exemple de Schütz, c'est de motifs parce-que dont il est question lorsqu'est stipulé que l'action d'un meurtrier a été motivée par l'environnement où il a grandi, ainsi que par tel ou tel type d'expérience et telle ou telle donnée biographique. Les motifs parce-que ne constituent pas une motivation de l'action en tant que telle, mais plutôt du projet d'action : le fait que tel ou tel projet est envisagé en interaction avec tel ou tel intentionnalité prospective (afférente à un motif-en-vue-de). Les motifs parce-que demeurent fuyants au sein de l'action (Schütz entend par là l'action dans son accomplissement) et ne peuvent être délimités qu'eu égard à l'acte (c'est-à-dire l'action une fois accomplie). A-86 E.3.d.2 Travaux de Valérie Guillard « Garder à tout prix » (Guillard, 2013) et « Boulimie d'objets » (Guillard, 2014) Syndrome de Diogène ou trouble d'accumulation compulsive ? Il semble y avoir une confusion dans la littérature ainsi que sur le terrain entre le syndrome de Diogène et le trouble d'accumulation compulsive. Le syndrome de Diogène se définit par une extrême négligence de soi, des conditions de vie exécrables, un retrait social, une accumulation compulsive ainsi qu'un manque de considération pour ses conditions de vie précaires (Lebert, 2005). Le fait d'accumuler des objets n'est qu'une des composantes de ce syndrome. Celui-ci est majoritairement trouvé chez les personnes âgées ayant une démence ou une lésion fronto-temporale. Les personnes souffrant du trouble d'accumulation compulsive quant à elles sont de tous âges et ne présentent pas nécessairement une négligence de soi ou des conditions de vie exécrables. Une détresse face à leur dysfonctionnement peut aussi être vécue par les accumulateurs. Il faut aussi distinguer le collectionnisme du trouble d'accumulation compulsive d'objets. Le collectionnisme est une activité normale retrouvée chez les adultes et les enfants. Il s'agit habituellement d'une activité organisée où les objets des collectionneurs sont gardés dans des endroits spécifiques et structurés. Contrairement au trouble d'accumulation compulsive, le collectionnisme a pour but d'organiser et de hiérarchiser une série d'objets et non juste de les accumuler. Les objets des collectionneurs sont souvent appréciés des autres collectionneurs et sont échangés afin d'agrémenter leur collection (Lahera, Saiz-Gonzalez, Martin-Ballesteros, Perez-Rodriguez, & Baca-Garcia, 2006). Valérie Guillard s'appuie aussi sur deux psychanalystes anglais du XXème siècle, Donald Winnicott et Michael Balint, qui ont travaillé sur l'ensemble de leur oeuvre sur l'attachement en général, et entre autres sur celui aux objets. E.4. - Partie IV : L'éditorialisation E.4.a. - Temporalité de la médiation Les différentes temporalités définies par Régis Debray :
Régis Debray oppose la culture européenne, qui, sous l'influence catholique, se base sur l'écrit et est donc une culture cumulative, à la culture américaine qui sous l'influence protestante, serait A-87 celle du flux (travaux de Olivier Abel ?). Elle-même héritée de la religion nomade par excellence, le judaïsme, que Debray définit comme une religion lyophilisée pour un peuple errant. A l'écriture européenne s'opposent les images dans les cultures du flux (avec un rapport schizophrène : le veau d'or banni par Moïse). On pourrait aussi interroger l'opposition récréatif/distraction (immédiat) vs. culturel (patrimoine), cf. l'Ecole de Francfort (escapisme). |
|