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Le régime juridique de la double nationalité en droit burundais


par Jean-Baptiste BARUMBANZE
Université du Lac Tanganyika - Licence 2011
  

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Section 2. L'acquisition de la nationalité

La nationalité d'origine étant conservée par l'intéressé, l'acquisition d'une autre nationalité permet à ce dernier d'avoir la qualité de double national. On peut ainsi devenir double national par adoption (§1), par naturalisation (§2) et par mariage (§3).

§1. L'acquisition de la nationalité par adoption

La double nationalité étant consacrée comme principe en droit burundais, il est fort normal et logique que l'enfant étranger adopté par un Burundais ait la double nationalité s'il garde sa nationalité étrangère. En droit burundais, l'acquisition de la nationalité par adoption est prévue par l'article 5 litera b.

En vertu de cette disposition « peut acquérir la nationalité burundaise : en cas d'adoption plénière, l'enfant adopté par une personne de nationalité burundaise, à condition que l'intéressé réside au Burundi au moment de la déclaration d'option ».

La lecture de cette disposition nous amène à faire l'observation suivante : seule l'adoption plénière produit des effets en matière de nationalité. Or, la mention d'une chose implique l'exclusion d'une autre. La conclusion suivante se dégage : l'adoption simple ne permet pas, du moins en droit burundais, d'acquérir la nationalité et, par conséquent, ne confère pas la double nationalité.

Ailleurs, l'adoption simple confère la nationalité. Mais, à la différence de l'adoption plénière « l'adoption simple n'exerce de plein droit aucun effet sur la nationalité ».149 Ainsi, par exemple, en droit français, l'adoption plénière d'un enfant étranger par un Français entraîne l'attribution de la nationalité française d'origine.150

149 M. REVILLARD, Droit international privé et communautaire : pratique notariale, 6e éd., Defrénois, Paris,

2006, p. 234

150 Idem, p. 24

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En revanche, l'enfant qui a fait l'objet d'une adoption simple par une personne de nationalité française peut, jusqu'à sa majorité, déclarer qu'il réclame la qualité de Français, pourvu qu'à l'époque de sa déclaration il réside en France.151

Cependant, cette condition de résidence ne s'impose pas dans tous les cas en droit français. L'obligation de résidence est supprimée lorsque l'enfant a été adopté par une personne de nationalité française n'ayant pas sa résidence habituelle en France.152

Nous remarquons donc que le droit burundais exige la résidence au Burundi en cas d'adoption plénière alors que cette condition s'impose en cas d'adoption simple en droit français.

La naturalisation est un autre mode d'acquisition de la nationalité et peut être à l'origine de la double nationalité.

§2. L'acquisition de la nationalité par naturalisation

La double nationalité peut résulter « de ce qu'une personne acquiert du fait (...) de sa naturalisation une seconde nationalité sans que la législation de l'Etat d'origine fasse de cet événement une cause de perte de sa propre nationalité, ou que celle de l'Etat d'accueil subordonne sa faveur à une renonciation à la nationalité d'origine ».153

Le droit burundais reconnaît la double nationalité, comme le précise l'article 21 du code burundais de la nationalité. En vertu de cet article, en effet, « Tout burundais, à qui la loi attribue cette qualité à titre originaire, a le droit d'avoir une double nationalité ».

En outre, le Code prévoit que toute personne peut acquérir la nationalité burundaise par naturalisation lorsque certaines conditions de fond et de forme sont réunies.

151 En ce sens, voy., F. MELIN, op. cit., p. 221

152 M. REVILLARD, op. cit., p. 24

153 J. COMBACAU et S. SUR, op. cit., p. 333

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A. Conditions de fond de recevabilité de la requête en naturalisation

Les conditions de fond de la naturalisation sont limitativement énumérées à l'article 7 du code burundais de la nationalité et reprises à l'article 2 du Décret n°100/15 du 14 octobre 2003 portant modalités pratiques d'acquisition de la nationalité burundaise par naturalisation. La lecture de ces deux dispositions nous permet de relever cinq conditions, dont les trois premières peuvent être constatées objectivement, tandis que les deux dernières supposent une appréciation subjective de l'administration.

1. Condition d'âge

Au moment de la demande, l'intéressé doit être âgé de vingt-et-un ans au moins, ou, s'il s'agit d'un enfant dont la demande est introduite en même temps que celle de son père ou de sa mère, de vingt ans au plus.154

Pour cette condition d'âge, le droit burundais prévoit deux cas possibles : le cas où la demande est formulée à titre principal et où l'intéressé doit avoir un âge minimum de vingt-et-un ans et celui où l'intéressé introduit la demande accessoirement à celle de son père ou de sa mère. Dans ce dernier cas, un âge maximum de vingt ans est exigé.

En principe donc, ne peut acquérir la nationalité burundaise par naturalisation, toute personne qui n'a pas atteint l'âge de vingt-et-un ans, l'exception ne pouvant être admise qu'en cas de demande d'un enfant introduite accessoirement à celle de ses parents. Ici, l'âge se prouve par la production « des extraits de l'acte de naissance (...) ou, à défaut, tous documents en tenant lieu».155

154 Art. 7, lit. a, de la loi n°1/013 du 18 juillet 2000 portant réforme du Code de la nationalité, in B.O.B. n°8bis/2000

155 Art. 4 du D. n°100/156 du 14 octobre 2003 portant modalités pratiques d'acquisition de la nationalité burundaise par naturalisation, in B.O.B. n°10/2003

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2. Absence de condamnation

Le candidat à la naturalisation doit être exempt de toute condamnation résultant d'un crime ou d'un délit.156 Ici, la loi précise bien qu'il doit s'agir d'un crime ou d'un délit qui constitue un obstacle à l'acquisition de la nationalité par naturalisation.

Par conséquent, parmi les personnes ayant déjà subi une condamnation, seules celles qui l'ont été pour contravention peuvent acquérir la nationalité burundaise par naturalisation.

Selon l'esprit de la loi sous analyse, « une société a le droit de s'opposer à l'acquisition de la nationalité par une personne ayant subi des condamnations attestant un comportement gravement délictuel ».157

3. Condition de résidence permanente

L'intéressé doit avoir résidé en permanence au Burundi pendant une durée d'au moins dix ans.158 La résidence permanente au Burundi pendant ce délai est une garantie sérieuse d'assimilation à la communauté burundaise. Cette condition prévue par le droit burundais est analogue à celle que le droit français qualifie de condition de stage. En droit français, en effet, le code civil subordonne la naturalisation à l'accomplissement d'un stage antérieur, consistant en une résidence habituelle en France pendant les cinq années qui précèdent le dépôt de la demande.159

Le code civil français distingue ainsi la condition de stage et la condition de résidence. Cette dernière condition signifie, en droit français du moins, que le candidat à la naturalisation doit résider en France au moment de la signature du décret de naturalisation.160 Le droit burundais est muet à ce propos ; il ne précise pas si l'intéressé doit obligatoirement résider au Burundi, au moment de la signature du décret de naturalisation.

156 Art. 2, lit. b, du D. n°100/156, in B.O.B. n°10/2003

157 P. COURBE, op. cit., p. 240

158 Art. 2, lit. d, du D. n°100/156, in B.O.B. n°10/2003

159 P. COURBE, op. cit., p. 240

160 Ibid.

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Cependant, si, en principe, le délai de résidence est fixé à un minimum de dix ans par le droit burundais, ce dernier a prévu une exception en la matière. Le délai de dix ans est réduit à cinq ans en faveur des étrangers mariés à des burundaises ainsi qu'à des étrangers qui ont rendu des services exceptionnels au Burundi.161

4. Condition de moralité

Le requérant doit être de bonnes conduite, vie et moeurs.162 Nul ne peut donc être naturalisé, s'il n'est pas de bonnes conduite, vie et moeurs. Si la loi exige le respect de cette condition, elle veut signifier que dans l'examen de la recevabilité des demandes de naturalisation, il est tenu compte du comportement social du postulant.163

A propos de cette condition de moralité, il se pose la question de détermination de bonnes conduite, vie et moeurs. Quel est, en effet, le contenu de ce qu'il convient d'appeler moralité ? Dans la jurisprudence française, il a été jugé que le candidat à la naturalisation, divorcé ou père de trois enfants mineurs qui s'était soustrait à son obligation alimentaire ne justifie pas de bonnes vie et moeurs.164 Le droit burundais ne donne pas de précision à ce propos.

5. Condition d'attachement et d'assimilation

En vertu de l'article 7, litera c, « le requérant doit justifier de son attachement à la nation burundaise et de son assimilation aux citoyens burundais ». Mais ici se pose la question de connaître les critères de justification de cette condition. Le Décret n°100/156 du 14 octobre 2003 portant modalités pratiques d'acquisition de la nationalité burundaise par naturalisation, en son article 2, litera d y répond de la manière suivante : « Peuvent notamment être considérés comme critères de justification de l'attachement à la nation burundaise et d'assimilation aux citoyens burundais : la connaissance de la langue nationale, le Kirundi ; le fait d'être domicilié au Burundi et d'y posséder des biens ; l'exercice d'une activité professionnelle ».

161 Art. 2, lit. d, du D. n°100/156, in B.O.B. n°10/2003

162 Art. 2, lit. b, D. n°100/156, in B.O.B. n°10/2003

163 P. COURBE, op. cit., p. 240

164 Idem, pp. 240-241

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Afin de pouvoir prouver que les conditions qui viennent d'être énumérées sont réunies pour permettre à l'intéressé de se voir conférer la nationalité par le procédé de la naturalisation, certaines pièces doivent être fournies et celles-ci font l'objet du point concernant les conditions de forme et de procédure.

B. Les conditions de forme et de procédure.

Après le dépôt de la requête de l'intéressé (1) et l'enquête de l'administrateur communal (2), le dossier est transmis au Ministre de la Justice (3) qui propose à l'autorité compétente de prendre la décision de naturalisation (4). Cette dernière, une fois prise, doit être signifiée à l'intéressé (5) avant de faire objet de l'enregistrement et de la publication (6).

1. Dépôt de la requête.

Toute requête en naturalisation portant la signature de celui qui la forme165

« doit être adressée au Ministre de la Justice sous couvert du Procureur de la République compétent. Celui-ci en informe l'administrateur communal du lieu de résidence du requérant ».166 En vertu de l'article 6 du Décret n°100/156,

« Dès la réception de la requête en naturalisation, le Procureur de la République procède à son affichage par extrait afin de permettre à toute personne qui aurait d'éventuelles objections à formuler de les lui faire connaître. L'affichage dure au moins trois mois ».

Après l'affichage de la requête effectué par le Procureur de la République, cette dernière fait l'objet d'un second affichage, celui effectué par l'administrateur communal.

En effet, en vertu de l'article 7, alinéa 1er du Décret « Dès la réception du dossier, l'administrateur communal procède à l'affichage par extrait de la requête en naturalisation. L'affichage dure au moins trois mois ».

Il importe de préciser que la requête en naturalisation doit être accompagnée des pièces établissant que les conditions de sa recevabilité sont réunies.

165 Art. 3 du D. n°100/156 du 14 octobre 2003 portant modalités pratiques d'acquisition de la nationalité par naturalisation, in B.O.B. n°10/2003

166 Art.5 du D. n°100/156, in B.O.B. n°10/2003

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L'article 4 du Décret énumère les pièces suivantes :

· un curriculum vitae du requérant : celui-ci permet à l'autorité compétente d'avoir des renseignements suffisants sur les services déjà rendus au Burundi par l'intéressé.

· des extraits d'acte de naissance du requérant et de ses enfants mineurs ou, à défaut, tous documents en tenant lieu : ce document servira à la détermination de l'âge du requérant.

· un certificat de nationalité du requérant ou tout autre document prouvant sa nationalité ;

· une attestation délivrée par les services d'immigration établissant la durée de séjour au Burundi ; le cas échéant, ce document sera accompagné des pièces établissant que l'intéressé peut bénéficier de la réduction du délai prévue par l'article 2, litera d du présent décret ;

· une attestation de bonnes conduite, vie et maeurs ;

· un extrait du casier judiciaire, pour prouver l'absence de condamnation pour crime ou délit ;

· tous documents prouvant l'attachement du requérant au Burundi et son assimilation aux citoyens burundais.

2. Enquête de l'administrateur communal

L'administrateur communal du lieu de résidence du requérant, après avoir reçu et affiché la requête en naturalisation, procède aux investigations. Il « vérifie notamment si le requérant remplit les conditions exigées par l'article 2 du présent décret ».167

Aux termes de l'article 7, alinéa 3 du code burundais de la nationalité, « après clôture de l'enquête dont la durée ne peut excéder six mois à dater du jour de la réception du dossier, l'administrateur communal transmet au Procureur de la République sous pli confidentiel les résultats de l'enquête ».

167 Art. 7, al. 2 du décret n°100/156 du 14 octobre 2003, in B.O.B. n°10/2003

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3. Transmission du dossier au Ministre de la Justice

Le procureur de la République, après s'être assuré que tous les éléments requis par la loi et le présent décret ont été réunis, transmet le dossier complet accompagné de son rapport au Ministre de la Justice.168

4. Décision de l'autorité compétente

La naturalisation est octroyée par décret sur proposition du Ministre de la Justice. Il s'agit donc d'un acte émanant du Président de la République. C'est par là que nous admettons que la naturalisation est un mode d'acquisition de la nationalité par décision de l'autorité publique.

En droit belge, la naturalisation est accordée par acte du pouvoir législatif conformément à l'article 9 de la constitution.169

Il importe de rappeler que même si elle est recevable, la demande n'est pas toujours admise : l'opportunité de la décision relève du pouvoir d'appréciation de l'autorité compétente,170 ce qui signifie qu'elle peut prendre une décision d'octroi ou de refus de la nationalité.

Il convient, en outre, de préciser qu'une commission consultative pour la naturalisation, chargée de donner des avis en la matière, a été créée par Ordonnance du Ministre de la Justice.171

5. Signification de la décision

La décision d'octroi ou de rejet de la naturalisation est signifiée au requérant endéans deux ans à dater de son enregistrement à l'office du Procureur de la République compétent.172

168 Art. 8 du décret précité, in B.O.B. n°10/2003

169 R. ERGEC, op. cit., pp. 104-105

170 Voy. Supra, p. 21

171 Art. 1er, O.M. n°550/1158 du 28 novembre 2006 portant nomination des membres de la commission consultative pour la naturalisation, inédit.

172 Art. 15, al. 1er du D. n°100/156 du 14 octobre 2003, in B.O.B. n°10/2003

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Lorsque la requête en naturalisation a été rejetée, aucune autre requête ne peut être introduite avant l'expiration d'un délai de trois ans à dater de la signification de la décision de rejet par le Ministre de la Justice. C'est ce qui ressort de l'article15, alinéa 2 du présent décret.

6. Enregistrement et publication

En vertu de l'article 16 du Décret n°100/156 du 14 octobre 2003, le décret de la naturalisation est enregistré au registre-répertoire des actes modificatifs ou déclaratifs de nationalité et publié par extrait au Bulletin Officiel du Burundi selon le modèle défini par Ordonnance du Ministre de la Justice.

Aux termes de l'article 17 du Décret précité, « Les frais d'enquête et de publication sont déterminés par Ordonnance conjointe des Ministres des Finances et de la Justice ». Ils sont fixés à cinquante mille francs burundais, pour l'enquête et à dix mille francs burundais par tranche de une à douze lignes, pour la publication.173

La naturalisation permet à l'intéressé d'avoir la qualité de double national par elle-même, mais la double nationalité peut s'acquérir également par le biais d'un acte juridique, le mariage.

§3. L'acquisition de la nationalité du conjoint

D'une façon générale, l'un des époux a la possibilité d'acquérir la nationalité de son conjoint. Cependant, le droit burundais de la nationalité se caractérise par sa particularité par rapport à la règle générale.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci