PARTIE I. LA MUSIQUE ELECTRONIQUE
A. Les festivals de musiques électroniques en
France
1. L'origine de la musique électronique
Nous n'allons pas ici revenir sur les premiers instruments
électroniques, comme le Theremin ou les Ondes Martenot, et il ne sera
pas non plus fait mention des sons expérimentaux d'avant-guerre
créés en laboratoire. En effet, les premiers faits marquants de
la musique électronique ont été réalisés au
tournant des années 1950 lorsque la musique électro-acoustique,
ayant encore plutôt des tendances expérimentales, a fait appel
à des compositeurs érudits et à une nouvelle forme
d'écriture ayant la capacité de transcrire le langage de ces sons
nouveaux.
Iannis Xenakis, Bernard Parmegiani, Pierre Henry ou encore
Pierre Schaeffer vont être à l'origine et vont concevoir ce
nouveau domaine des possibles dans la musique. Ils sont notamment à
l'origine de nombreuses oeuvres de référence comme "Symphonie
pour un homme seul" de Pierre Schaeffer et Pierre Henry en 1949, ou encore
"Orphée 51" et "Toute la lyre" en 1951. Pour exister, cette musique
pioche dans toutes les ressources technologiques d'alors, comme les bandes
magnétiques et les ordinateurs, mais sans pour autant occulter
l'utilisation des instruments acoustiques.
En France, l'une des références la plus
significative se trouve dans la musique de Pierre Henry dans une collaboration
avec le compositeur Michel Colombier. Intitulée "la Messe pour le temps
présent", cette musique de ballet est utilisée comme illustration
sonore lors d'une chorégraphie de Maurice Béjart en 1967.
Ces nouveaux sons électroniques attirent les
compositeurs ayant soif de découverte et de nouveauté. Autant en
France qu'aux États-Unis, l'expérimentation sonore est un premier
pas vers un futur inconnu. Bien évidemment, ces nouvelles visions
sonores et attitudes dans le domaine de la création musicale vont faire
face à de nombreux rejets de la part de compositeurs "conservateurs" ou
non progressistes. Dans les années 50, et d'un avis
général, la musique électro-acoustique n'est ni plus ni
moins qu'une suite d'expérimentation n'ayant ni queue ni tête, qui
se cherche, et évolue dans de multiples directions avec des idées
parfois irrationnelles sans
4
lendemain. À ce moment-là, il serait plus
adapté de parler d'expériences sonores plutôt que de
musique.
La musique minimaliste a été inspirée par
John Cage. Il a été suivi par Steve Reich, Philip Glass et Terry
Riley qui ont emprunté le même chemin en produisant une musique
aux motifs répétitifs, autant mélodique que rythmique, qui
de fil en aiguille fait évoluer l'image sonore première.
Désormais, l'exploration des sonorités
électroniques relève autant de l'expérimentation
scientifique que de la création artistique. Les avancées
technologiques, au fur et à mesure de leurs apparitions, se couplent
à ces ornementations sonores avant-gardistes. Et notamment, le
synthétiseur, qui n'en est encore qu'à ses débuts attire
pourtant de plus en plus de musiciens grâce à ses capacités
sonores qui jouent un rôle de plus en plus important dans les processus
créatifs.
Vers la moitié des années 60, les techniques
comme les sons fixés sur vinyle, la bande magnétique qui doit
être coupée et collée, ou encore l'arrivée des
magnétophones multipistes ne sont plus uniquement à la
portée des spécialistes du genre. En effet, des groupes comme
Pink Floyd ou les Beatles montre déjà vivement leur
intérêt, et sont prêts à créer et innover
à partir de ces nouveaux moyens.
Saut dans le temps, direction les années 1970 et 1980.
Jusqu'alors, la musique électronique a commencé à faire
son apparition dans des styles déjà existants, le premier
étant le rock, suivi de près par le jazz. Cependant, la musique
électronique n'occupait qu'une partie mineure et souvent mal
maitrisée d'un morceau de rock ou de jazz, cela étant
principalement dû à la faible gamme d'appareils produisant ces
fameux sons électroniques et à leurs prix exorbitants.
Ces années ont été source de nombreuses
innovations et de développement des instruments de musique
électroniques. Les synthétiseur jusqu'alors analogiques sont
devenus numériques et couplés aux samplers. Les premiers
échantillonneurs ainsi que les premiers synthétiseurs
étaient des machines qui coutaient chers et étaient encombrantes.
Fairlight et New England Digital étaient des sociétés
privées qui vendaient ces instruments à plus de 100 000 dollars.
Fort heureusement, l'arrivée de samplers numériques à bas
prix vers le milieu des années 80 a rendu cette technologie accessible
à de nombreux musiciens. Ces nouveaux sons électroniques
provenant des synthétiseurs ont aidé à la création
du genre de la musique industrielle, avec notamment des pionniers comme
Throbbing Gristle ou encore Wavestar. Certains artistes et musiciens ont pris
pour modèle les innovations de la musique concrète et de l'art
acousmatique
5
pour les inclure à la musique dance et rock. S'en est
donc suivi l'apparition et le développement de nombreux styles comme le
dub, l'electronic body music (EBM) étant une combinaison de la pop et de
la dance, ou encore la downtempo ou la trip-hop.
Le commencement des années 90 a vraiment marqué
le développement ainsi que la diffusion de la musique
électronique. Cela est dû au développement et à la
popularisation de la musique house, techno et électro à Chicago
et Détroit dans les années 80, et plus tard le mouvement acid
house de Chicago et de la scène anglaise à la fin des
années 1980.
L'un des genres ayant le plus marqué le début de
cette nouvelle décennie est la techno hardcore. Né à
partir de la techno, du breakbeat, de l'EBM et du new beat, ce genre est apparu
aux Pays-Bas et en Allemagne. Il comprend divers autres genres et sous genres
comme le gabber (qui occupera par la suite une place importante dans la culture
des free party), la makina, le happy hardcore et le speedcore, entre autres.
Pendant les années 2000 il devient très courant,
pour ne pas dire habituel, de distinguer un fond sonore électronique
joué de manière répétitive pendant un morceau,
auquel se superposent toutes sortes d'instruments et samples
électroniques. Cette avancée et cette nouvelle façon de
faire et d'écouter de la musique a été permise par les
progrès techniques mais surtout par le coût abordable des
échantillonneurs, ainsi que l'apparition du numérique et la
popularisation des home-studios.
La musique électronique, notamment durant les
années 90, a donné naissance à un si grand nombre de
genres, styles et sous-styles qu'il serait impossible de tous les citer ici.
Cependant, n'existant pas de frontières rigides et clairement
définies, il est possible d'identifier de manière non-extensive
certains genres :
- Genres et styles contemporains : acousmatique ou
électro-acoustique, musique pour bande,
concrète et improvisée
- Genres et styles expérimentaux : krautrock, nu jazz,
rock progressif, new wave, industriel,
electro, witch house, etc...
- Genres et styles consacrés à la danse : house,
techno, progressive, drum'n'bass, hardcore,
hardstyle, tribe, trance, garage, dance, etc...
- Genres et styles dit de « chill out » : ambient,
downtempo, dub, trip-hop, etc...
6
Aujourd'hui, que ce soit dans les festivals de musique
électronique ou bien encore au sein des free parties, le genre le plus
représenté est celui consacré à la danse. Nous
allons donc nous focaliser sur ce genre.
|