Quels outils marketing et quelles stratégies de communication employer pour transformer l'image négative des festivals de musique électronique en France ?par Antonin Vanderriest ECE INSEEC - BBA 2021 |
d. ...menant à leurs radicalisationsBien qu'elle touche d'abord les évènements légaux, il a bien été démontré ici que cette répression de l'Etat est à l'origine de la clandestinité. Il est indéniable que techno et marginalité soient liées dû au fait qu'à l'origine, c'est effectivement une population marginale qui s'est appropriée cette musique. Cependant, bien que l'illégalité se soit développée comme une sorte de sous culture de la techno, sa signification conventionnelle étant constamment mise en avant elle appelle en réalité une population préalablement en rupture avec la société : « A partir du moment où une opposition institutionnelle s'est créée et où la fête techno a cherché à se 45 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge 2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 94 34 maintenir contre les pressions, elle a bénéficié de l'aura de la transgression et de la dimension libertaire46». C'est en fait une situation assez classique, démontrant un cercle vicieux où plus la répression des rave sera grande, plus elles consolideront leur allure contestataire et politique, s'enfonçant dans la clandestinité, plus elles appelleront des populations idéologiquement en marge (tel les travellers, alors plutôt qualifiés de « punk à chiens »). A cause de cela, ceux pouvant avoir un attrait pour ce mouvement et faisant partie de groupes sociaux plus « intégrés » et donc ayant plus à perdre, vont petit à petit délaisser ces regroupements. Une free party Cela va déboucher sur une politisation partielle du mouvement. On assistera alors à des actions coups de poings, à l'instar de l'Heretik sound system, qui choisiront les lieux de leurs évènements de manière idéologique et s'attaqueront à des symboles au lieu de trouver des lieux en fonction de critères pratiques et esthétiques. Ils seront notamment à l'origine d'une rave clandestine dans les sous-sols de Bercy, mais leur action la plus importante est indéniablement l'investissement de la piscine Molitor située au plein centre du tranquille et fortunée 16e arrondissement de Paris. Cette fête rassemblera presque 5000 teufeurs et se déroulera sous le nez de la police qui n'a rien pu faire pour l'endiguer, craignant une émeute47. 46 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge 2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 85 47 Raclot-Dauliac D. (2013), «Heretik - We had a dream», https://www.youtube.com/watch?v=HB4R-yN1nBk 35 Pour en revenir aux saisies, elles ont également une portée symbolique dans le sens où elles touchent la raison même du mouvement. C'est en réalité assez ironique car bien que comme le fait remarquer Renaud Epstein, ce mouvement s'est développé aisément suite à l'apport de la technologie48, ce dernier constitua en même temps son principal point faible car les saisies et confiscations sont faciles à entreprendre. Une scène de liesse en free party Si cette répression est aussi efficace, c'est principalement que cette culture de la free avait pour principale représentant sociologique une population assez jeune, qui était par ailleurs suffisamment intégrée pour avoir trop à perdre en cas d'opposition violente mais ne l'était cependant pas assez pour réussir à s'organiser dans le but de défendre son espace culturel, sans compter le fait qu'elle n'avait par-dessus le marché aucun pouvoir économique pour faire la différence49. Une grande partie de cette culture a par conséquent été annihilée par cette répression. A cet égard, Loic Lafargue de Grangeneuve pose une différence nette entre la pré-LSQ marquant une faible répression des free parties et autre regroupements illégaux, et la post-LSQ où les consignes de répression font monnaie courante. En termes de chiffres, 582 free parties sont répertoriées en 2000 contre 712 en 2001, 372 en 2002 étant la première année ou la LSQ s'est vue appliquée, et enfin seulement 275 en 200350. 48 Epstein R. (03/2004), « Villes défaites », Vacarme (n° 28), pp. 15-19 49 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge 2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 136 50 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge 2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 90 36 Les Heretik envahissent la piscine Molitor En temps normal, dans la gestion des problèmes publics l'Etat doit habituellement faire face à des revendications au sujet du réagencement du cadre légal. Seulement, dans le cas de celui-ci qui revendique simplement le droit d'exister du fait de sa culture intrinsèquement libertaire, l'Etat ne peut agréer à cette volonté tant elle s'écarte du cadre légal. En effet, il s'agit là d'une réclamation du droit à la fête, mais aussi en bonne partie du droit d'existence hors de la légalité. « Ils n'ont pas d'attente messianique du type : « un jour viendra où nous serons reconnus ». Ils ne veulent pas plus détruire l'ordre existant. Pas d'attentat, pas de violence contre l'ordre ou l'Etat. En fait, ils font ou souhaiteraient pouvoir faire comme si ce dernier n'existait pas51 ». |
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