Formation de contrat électronique en droit congolais et en droit françaispar Serge ATIBASAY MOTINDO Université de Bunia - Licence en droit privé et judiciaire 2020 |
I.3. L'AUTONOMIE DE LA VOLONTE COMME FONDEMENT PHILOSOPHIQUE DU DROIT DE CONTRAT.3.1. ROLE DE LA VOLONTE EN MATIERE DE CONTRATa) Théorie de l'autonomie de la volonté La théorie de l'autonomie de la volonté exprime une doctrine de philosophie juridique suivant laquelle toute obligation doit reposer sur la volonté pour être légitime. Plus simplement il peut être énoncé et compris de la manière suivante : l'homme étant libre, il ne peut être soumis à des obligations autres que celles qu'il a voulues ; libre de s'engager sans contrainte, il ne l'est que dans la mesure où il l'a voulu. À côté de ce fondement moral, le contrat né également d'une conception libérale de l'économie : la liberté permet aux intérêts particuliers de s'équilibrer réciproquement et elle est le meilleur moyen de satisfaire l'intérêt général, fait lui-même de la somme des intérêts particuliers. Parallèlement, à partir du XVIIIe siècle, se développe la philosophie humaniste : l'homme est réputé être libre par nature, la société s'est formée par sa volonté, par contrat social. La Déclaration des droits de 1789 proclame ainsi que la loi elle-même « est l'expression de la volonté générale ». Pour Kant, il y a autonomie de la volonté si la volonté est déterminée par la seule loi morale, et hétéronomie si elle est déterminée par le principe du bonheur (le désir matériel).20(*) Ainsi, le contrat n'est pas contraignant parce que reconnue par une loi externe, mais parce que résultant directement de volontés créatrices de droits et d'obligations. En résumé, la théorie de l'autonomie de la volonté tire sa force obligatoire exclusivement de la liberté des parties. Ces dernières sont ainsi libres de contracter ou non des engagements. Mais dès l'instant où elles ont conclu un contrat, elles sont soumises à sa loi et ne peuvent alors y déroger que sous certaines conditions b) Remise en cause de la théorie de l'autonomie de la volonté Pour Durkheim, la règle émanant du groupe précède au droit de la volonté : ce phénomène de solidarité étant objectivé par le droit.21(*) On reproche à la théorie classique de l'autonomie de la volonté d'être, d'une part, inexacte et utopique, d'autre part ; inexacte en ce que tout le droit ne peut être régi par la volonté, car il y a des domaines où la loi doit intervenir (famille, succession, etc.) ; et utopique en ce qu'elle suppose des contractants égaux, or, ce qui est contractuel n'est pas forcement juste, et le contractant le plus faible économiquement, socialement ou intellectuellement, risque de se voir brimer par l'autre (par exemple dans les contrats d'adhésion). Des inégalités peuvent, ainsi, exister entre les consommateurs et les professionnels, mais aussi entre les professionnels eux-mêmes. Ces inégalités ne sont guère compatibles avec une justice contractuelle déduite de la suprématie de la volonté. Par ailleurs, la poursuite du profit personnel n'est pas nécessairement en harmonie avec ce qu'il convient d'appeler l'utilité sociale.22(*) Au cours du XIXe siècle, avec l' industrialisation et le développement du droit du travail, se fait entendre une critique de la conception libérale : face aux situations d'inégalité, cette liberté devient source d'injustice entre une partie faible et une partie dominante. Lacordaire énonce ainsi la célèbre formule : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, c'est la liberté qui opprime, c'est la loi qui affranchit. » Toutefois, en dépit de ces critiques, la théorie de l'autonomie de la volonté n'en demeure pas moins valable et ses incidences se manifestent encore de nos jours. c) Incidences de la théorie de l'autonomie de la volonté Les incidences de la théorie de l'autonomie de la volonté se manifestent tant au stade de la formation du contrat qu'à celui de son exécution. * 20 Emmanuel Kant,1985 : 173, 33. * 22KYABOBA KASOBWA, Op.cit., p.15 |
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