SECTION II : Les importations d'hydrocarbures : une
absolue nécessité
La très forte croissance de l'économie chinoise
génère une demande en hydrocarbures que la production nationale
n'est pas à même de fournir, et les importations nettes qui
étaient de 61,91 millions de tonnes en 2002 devraient atteindre au
minimum 200 millions de tonnes en 2020 (Miginiac Jean Philippe ; 2006 : 12). En
2010, la moitié des besoins pétroliers de la Chine
dépendra ainsi de ses importations, lesquelles importations
constitueront en 2020, jusqu'à 80% de ses besoins pétroliers
(Miginiac Jean Philippe ; 2006 : 12).
Aussi, pour faire face à ce nouveau défi, la
Chine a-t-elle lancé un véritable « quadrillage »
diplomatique des principales zones pétrolières mondiales. Cette
offensive politique pétrolière chinoise, dénote le
caractère structurant du pétrole dans la formulation de la
politique
18
étrangère chinoise (paragraphe1). Elle nous
permet également de comprendre l'important redéploiement de
Pékin dans les zones pétrolifères mondiales (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : le pétrole : un enjeu majeur de la
politique étrangère chinoise
Le pétrole est considéré ici comme un
enjeu majeur de la politique étrangère de la Chine eu
égard à la subtile diplomatie menée par pékin pour
le conquérir (A), mais aussi compte tenu de l'instrumentalisation ou de
l'utilisation de ses compagnies pétrolières comme de
véritables outils de politique étrangère (B).
A- La diplomatie pétrolière
chinoise
La diplomatie pétrolière chinoise est un
concept qui, en réalité n'est qu'un néologisme nous
permettant de traduire l'idée d'une diplomatie au service des
intérêts pétroliers. Pour la Chine en effet, la diplomatie
constitue le cheval de Troie de son offensive pétrolière. Les
autorités chinoises ont compris que pareillement aux Etats-Unis, le
pétrole est d'un intérêt vital pour leur économie.
Il semble donc évident à l'analyse que les offensives
diplomatiques chinoises sur la scène internationale sont le juste reflet
de cette ambition. Pékin entend en effet par le dynamisme de sa
diplomatie tisser des liens de coopération étroits avec les pays
producteurs de pétrole. C'est ce qui explique le quadrillage des
principales zones pétrolifères mondiales par l'ensemble de son
corps diplomatique.
L'attention médiatique de ces dernières
années portée sur l'ouverture de la Chine et sa conquête du
monde, démontre la crainte que l'Occident éprouve pour ce pays,
jusqu'alors isolé et à l'histoire émaillée par la
dictature et l'autoritarisme. La Chine utilise toutes les astuces pour se faire
les amis parmi les pays producteurs de pétrole. Pour pékin en
effet, la diversification et la garantie de ses approvisionnements
extérieures contribueraient à limiter sa dépendance
vis-à-vis du marché international et le mettrait à l'abri
des chantages des pays ou groupes de pays tels que l'OPEP.
B- Les compagnies pétrolières
chinoises : de véritables instruments de politiques
étrangères.
Les compagnies pétrolières chinoises,
instruments de la quête chinoise d'hydrocarbures, sont les suivantes :
China National Petroleum Corp. (CNPC), Petro china, China National Off Shore
Oil Corp. (CNOOC), China National Oil Development Corp. (CNODC), China National
Star Petroleum (STAR), China National Petrochemical Corporation (SINOPEC),
China National Chemicals Import and Export Corporation (SINOCHEM), China United
Petroleum Corporation (CHINA OIL) et China United Petrochemical Corporation
(UNIPEC) (De Lestrange Cédric; Paillard Christophe Alexandre ; ZELENKO
Pierre; 2005: 175).
Pour mener à bien cette nouvelle stratégie de
présence dans les zones productrices, la Chine privilégie le
déploiement de son réseau d'entreprises pétrolières
avec une multiplication des projets d'exploration et de production dans des
pays peu occupés par les compagnies internationales et où la
concurrence provient le plus souvent des compagnies Russes. La CNPC a ainsi
acquis des concessions au Kazakhstan, au Venezuela, au Soudan, en Iraq (avant
2003), en Iran et au Pérou, sans autres véritables justifications
que d'occuper les secteurs pétroliers encore vacants :
19
" Dans ce cadre, la stratégie chinoise d'alliance tout
azimut dans le monde pétrolier a de nombreuses cibles, comme l'Egypte,
l'Algérie ou le Gabon. Ceci s'est traduit dans ces derniers cas en 2004
par des accords de prospections et d'exploitations, puis des contrats de
commercialisation entre les compagnies opérant dans les pays producteurs
et le groupe chinois SINOPEC" (De Lestrange Cédric; Paillard Christophe
Alexandre; Zélenko Pierre; 2005: 175).
Accédant aux ressources des pays producteurs par le
biais de ces compagnies pétrolières dont il est l'actionnaire
principal, l'Etat chinois peut ainsi " sécuriser " une partie de son
approvisionnement. Les nombreux accords de partage de la production
signés par les compagnies pétrolières chinoises dans les
pays producteurs témoignent de la réussite de ces
stratégies.
Tableau n° 2 :
Principaux fournisseurs en pétrole de la Chine en 2003 (En % des
importations chinoises)
Arabie saoudite
|
15.6
|
%
|
Iran
|
15 %
|
Oman
|
11.3
|
%
|
Angola
|
9 %
|
|
Soudan
|
7.7
|
%
|
Yémen
|
5.2
|
%
|
Russie
|
4.5
|
%
|
Indonésie
|
4 %
|
|
Malaisie
|
2.3
|
%
|
Guinée équatoriale
|
2.2
|
%
|
Congo
|
1.5
|
%
|
Gabon
|
1.2
|
%
|
Cameroun
|
1.1
|
%
|
Algérie
|
0.75 %
|
Nigeria
|
0.6
|
%
|
Egypte
|
0.3
|
%
|
Autres
|
17.75 %
|
Source : François LAFARGUE, op.cit page
50.
Tel que nous pouvons le constater dans ce tableau,
après les pays du Golfe arabo-persique, les pays du Golfe de
Guinée occupent une place importante parmi les principaux fournisseurs
en pétrole de la Chine. Les pays tels que l'Angola, le Nigeria, la
Guinée Equatoriale, le
20
Congo, le Gabon et le Cameroun fournissait en 2003
jusqu'à 15,6% des importations chinoises de pétrole.
La Chine a intérêt aujourd'hui à
diversifier ses sources d'approvisionnement, et nous pouvons dès lors
nous interroger sur les nouvelles régions où elle souhaite
désormais étendre son influence.
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