C- Le véto chinois et la perpétuation des
exactions du régime soudanais au Darfour
Le soudan constitue aujourd'hui un véritable sujet de
discorde entre pékin et la communauté internationale. En 2004,
face au conseil de sécurité qui menace Khartoum de sanctions sur
sa production pétrolière, la Chine brandit une menace de
véto et s'abstient, en septembre, de voter l'embargo sur les armes.
Malgré les accusations portées par le gouvernement
américain en l'encontre du régime soudanais sur le
déplacement de milliers de civils des zones pétrolières,
la Chine opte pour la protection d'un pays, fournisseur de 7% de ses
importations de brut (Pinel, Fabienne ; 2006 : 1). En avril 2005, elle s'est
abstenue au cours de la saisie de la Cour Pénale Internationale (CPI)
visant à traduire en justice les responsables soudanais supposés
impliqués dans des crimes de guerre au Darfour. Aujourd'hui, le Soudan
s'oppose toujours au déploiement de troupes onusiennes sur son sol, avec
le soutien discret de Pékin (Mbaye Cisse ; 2007 : 15). Cette attitude
pour le moins irresponsable de la Chine, au regard du rôle de grande
puissance qu'elle entend jouer au cours de ce 21e siècle,
conforte le gouvernement soudanais et constitue pour ce dernier une sorte de "
parapluie " face aux différentes critiques de la communauté
internationale en général et aux sanctions du conseil de
sécurité de l'ONU en particulier.
Depuis le début de la crise du Darfour, la junte
soudanaise est passée maîtresse dans l'art d'éviter les
sanctions, ce qui lui a permis de continuer de procéder aux exactions en
toute impunité, avec le soutien, d'un allié de poids, la Chine.
Le président Omar el-Béchir s'est opposé au
déploiement des troupes onusiennes (17 000 militaires et 3 000
policiers) en remplacement des soldats de l'Union africaine. La Chine, qui n'a
pas voté la résolution s'est aussi opposée à
l'adoption de toute sanction contre le régime soudanais. Au
détriment d'une action commune internationale dans le cadre du
règlement d'un conflit, Pékin a plutôt
privilégié ses intérêts avec Khartoum (Samson Didier
; 2006). Quand bien même le président chinois Hu Jin tao demande
à son homologue soudanais de trouver "une solution correcte au Darfour
et de continuer à améliorer la situation humanitaire", on
comprend que ce n'est qu'une clause de style, visant uniquement à
apaiser le courroux de la communauté internationale.
Pire encore, par une fourniture régulière
d'armes à l'armée soudanaise et à sa milice armée,
les jenjawids, pékin contribue à entretenir cette violence
infernale sur les populations civiles du Darfour. En effet, la Chine est le
principal fournisseur d'armes du soudan. "Selon certaines sources, parmi les
avions de chasse chinois vendus au Soudan depuis les années 90 figurent
plus de 40 Shenyang J-6 et J-7, et plus récemment des chasseurs
supersoniques F-7, version améliorée du MiG-21 Fishbed russe. La
Chine aurait fourni 50 hélicoptères Z-6 au Soudan en 1996. En
2001, la société chinoise Harbin Dongan Engine aurait
signé un contrat de réparation d'hélicoptères Mi-8
pour le Soudan .L'Iran aurait financé en partie l'achat par le Soudan de
21 avions de chasse J-6 et de deux avions-cargo Y-8 D, une version de l'Antonov
An-12 fabriquée sous licence en Chine,..." (Bergevin ; 2006 ;
7).
Seulement, ce soutien sans faille de la Chine au
régime soudanais contribue à perpétrer les massacres au
Darfour. Aujourd'hui, la Chine participe indirectement à la continuation
de ce que la communauté internationale qualifie désormais de
génocide. En fournissant du matériel militaire, une aide
économique considérable, surtout en empêchant à
l'ONU de déployer ses forces de maintien de la paix au Darfour,
pékin contribue à la perpétuation des massacres
constatés au Darfour. Tout en espérant que la Chine n'utilisera
pas cette fois encore son droit de véto pour empêcher
l'exécution du mandat d'arrêt international délivré
le 04 mars 2009
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par la cours pénale internationale contre le
président Béchir et deux de ses acolytes pour crime de guerre et
crime contre l'humanité.
S'il est vrai que cette attitude pour le moins irresponsable
de la Chine en Afrique lui vaut de nombreuses critiques de la part de
l'ensemble de la communauté internationale, nous ne devons aucunement
oublier le fait qu'en réalité la Chine n'innove pas. Les
puissances occidentales avant elle ont, et continuent d'ailleurs à faire
pareil chaque fois que leurs intérêts stratégiques
l'exigent.
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