Paragraphe 2 : un péril pïur la paix ?
Loin d'assurer le développement de l'Afrique, le
partenariat stratégique sino-africain soulève également
des interrogations légitimes sur l'avenir de la paix et de la
sécurité. Le soutien militaire inconditionnel de Pékin
à des régimes politiques décriés, la vente
incontrôlée d'armes par les firmes chinoises et les tentatives
d'une implication militaire directe de Pékin dans la sécurisation
de ses investissements pétroliers sont autant de sujets
préoccupants (Mbaye Cisse ; 2007 : 25). La détermination de la
Chine à accéder par tous les moyens aux ressources
pétrolières africaines la conduit souvent à opter pour des
choix en contradiction totale avec les idéaux de paix pourtant
prônés par sa politique africaine. En effet, sur un plan purement
formel, la Chine prétend vouloir "appuyer les efforts actifs de l'UA et
des autres organisations régionales africaines ainsi que des pays
concernés pour régler les conflits locaux et leur fournir une
assistance dans la mesure du possible. Pousser énergétiquement le
conseil de sécurité des Nations-Unies à suivre de
près les conflits régionaux africains et apporter son assistance
au règlement de ces conflits. Continuer à soutenir l'action de
l'ONU pour le maintien de la paix en Afrique et à y prendre part"
(Chomtang Fonkou ; 2007 : 132133). Seulement, au-delà de ces initiatives
louables, dans la quête de ses intérêts pétroliers en
Afrique, la Chine ne se soucie guère de son influence sur la paix et la
stabilité. L'importance des investissements consentis par la Chine
à travers plusieurs pays africains, notamment dans le secteur
pétrolier, pourrait se traduire concrètement sur le plan de la
sécurité par un engagement plus marqué de Pékin
(Mbaye Cisse ; 2007 : 20). L'attitude de Pékin au Tchad (A), en
Angola(B), et au Soudan(C) est assez illustrative de cette
réalité.
A- Pékin et l'instrumentalisatiïn de la
rébelliïn tchadienne
Au Tchad, nouveau pays pétrolier convoité par
Pékin malgré ses relations diplomatiques avec Taiwan, la crise
institutionnelle progressive a connu son paroxysme en 2006 avec la crise au
Darfour et les offensives répétées des mouvements
rebelles. La montée des mouvements d'opposition armée s'est
traduite par de nombreuses attaques visant à renverser le pouvoir du
Président Idriss Deby. En janvier 2006, l'un des chefs de file de
l'opposition a été reçu à Pékin, alimentant
les soupçons d'une aide chinoise à son combat (Mbaye Cisse ; 2007
: 21). Ndjamena n'hésite plus à dénoncer l'aide militaire
chinoise accordée au Rassemblement pour la Démocratie et la
Liberté de Mahamat Nour, depuis les dernières attaques de
novembre et décembre 2006. La Chine est accusée d'être de
connivence avec le Soudan pour accélérer la chute du
Président Idriss Deby et procéder à une nouvelle
redistribution des cartes pétrolières (Mbaye Cisse ; 2007 :
21).
Très intéressée par les
potentialités pétrolières Tchadiennes, la Chine est
prête à déstabiliser le régime du président
Deby ou du moins à le faire chanter, espérant elle aussi
participer à
50
l'exploitation du pétrole du pays. En effet, un
tronçon d'oléoduc Tchad-Soudan permettrait de rediriger les flux
tchadiens vers la Mer rouge (à destination de la Chine via Port-Soudan)
et non plus vers l'Atlantique (via Kribi au Cameroun). Aussi, en jouant la
carte du soutien à la rébellion, la Chine espère-t-elle
suffisamment inquiéter le gouvernement tchadien et l'amener à lui
concéder une part dans l'exploitation de son pétrole. La crainte
qu'inspire la Chine au gouvernement tchadien s'est d'ailleurs confirmée
par le renouement des relations diplomatiques entre les deux pays, le 6 aout
2006, ceci après 9 années de rupture (Bergevin : 2006). Pour se
faire une place sur le marché pétrolier tchadien, Pékin
utilise le spectre de l'instabilité politique.
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