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Geostrategie energetique en Afrique de l'ouest ( cas de la Chine et le golfe de Guinée)

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par DEMBA BA
ENSIATE  - Ingénieur éco-énergétique 2017
  

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SECTION II : Dispositifs diplomatiques et militaires

Les dispositifs diplomatiques et militaires sont de véritables indicateurs des ambitions géopolitiques des grandes puissances dans une région donnée, autour d'un enjeu déterminé. En effet, comme l'affirme François Thual (1996 : 26) " que ce soit en temps de paix ou de guerre, la structuration des moyens militaires est un des indices les plus parlants des ambitions géopolitiques d'un pays, (...) analyser les dispositifs militaires c'est s'attaquer à l'aspect le plus significatif des moyens dont dispose un Etat pour asseoir ses prétentions". Par ailleurs, afin de garantir le succès de ses objectifs géopolitiques, tout pays met en place un dispositif diplomatique, un dispositif de gestion de ses relations extérieures.

La Chine, puissance émergente de ce début de 21ieme siècle entend justement prendre appui sur ces instruments pour accéder au pétrole du golfe de Guinée. Aussi, est-il question pour nous d'étudier les différentes manoeuvres diplomatiques (paragraphe 1) et militaires (paragraphe 2) entreprises par la Chine autour du pétrole du Golfe de Guinée.

Paragraphe 1 : la diplomatie : le coeur de la stratégie pétrolière chinoise

La diplomatie chinoise, à pied d'oeuvre dans le golfe de guinée depuis un peu plus d'une décennie, est à coup sûr l'élément le plus visible de son redéploiement stratégique dans la sous région. La diplomatie énergétique de la Chine se présente le plus souvent sous la forme d'une offre multidimensionnelle pour les pays d'accueil. Ces derniers ont souvent en commun les caractéristiques suivantes : implantés dans des zones de crise désertées par les majors pétroliers occidentaux (cas de l'Angola et du Soudan), ils sont souvent engagés dans un bras de fer avec la communauté internationale pour des raisons de politique intérieure; ils disposent, par ailleurs, de réserves pétrolières peu convoitées ou n'offrant aucune rentabilité immédiate. La stratégie d'implantation des compagnies pétrolières chinoises s'adapte au cas de chaque pays (Mbaye Cisse ; 2007 : 9). C'est donc à une véritable diplomatie pétrolière, articulée en fonction des circonstances que se livre pékin en Afrique. De ce fait, il sera précisément question ici d'analyser les différentes recettes utilisées par la diplomatie chinoise pour s'octroyer le pétrole. A cet effet, les exemples Nigérian(A) et Angolais(B) sont illustratifs à plus d'un titre.

A-

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Le Nigeria : pétrole contre promesse diplomatique

Au Nigeria, la diplomatie chinoise fait preuve d'une parfaite adresse adaptée aux circonstances. Pour pénétrer ce marché, pékin fait preuve d'une habileté diplomatique déconcertante. Si les prédécesseurs du président Hu Jin tao avaient accordé leur soutien politique au dictateur nigérian Sani Abacha, l'actuelle diplomatie chinoise valse sur le soutien potentiel qu'elle pourrait apporter au Nigeria engagé dans la course à un siège permanent africain au Conseil de Sécurité de l'ONU (Mbaye Cisse ; 2007 : 10). En effet, la Chine soutient l'élargissement du conseil de sécurité et proclame la nécessité d'accorder des sièges aux pays africains, une volonté clairement affichée par l'ex-président Nigérian Olesegun Obasanjo. C'est dire que contre des garanties d'accès au pétrole, la Chine se propose de soutenir la candidature du Nigeria. Lors de la visite à Abuja du ministre chinois Tang Jiaxuan en 2000, le président Nigérian Olesegun Obasanjo a exprimé sans réserve sa forte insatisfaction en ce qui concerne la non-représentation des pays africains au sein du siège permanent du conseil de sécurité des nations-unies. Obasanjo a fait comprendre qu'il souhaitait une aide de la part de la Chine pour obtenir deux sièges permanents en faveur des pays africains, sous-entendu le Nigeria (Chung Lian Jiang ; 2004 : 5).

L'engagement chinois a été confirmé par un communiqué conjoint sino-nigérian, dans son article 9, signé lors de la visite de Jiang Zemin à Abuja du 14 au 16 avril 2002. L'article 2 de ce communiqué se termine par une valorisation de la coopération dans le secteur énergétique, la Chine étant encouragée et soutenue dans sa participation à l'exploitation des hydrocarbures au Nigeria (Chung Lian Jiang ; 2004 : 5). Grace à sa souplesse diplomatique, la Chine a réussi à s'insérer sur le marché pétrolier du Nigeria.

B- L'Angola : pétrole contre soutien économique

La pratique de la diplomatie énergétique chinoise se révèle également efficace en Angola, pays meurtri par plusieurs décennies de guerre et devenu aujourd'hui le premier fournisseur de pétrole de la Chine en Afrique subsaharienne. Tirant profit de son long compagnonnage avec le gouvernement de Luanda, notamment la vente régulière d'armes pendant la guerre de libération angolaise des années 1970, et de l'affaiblissement des intérêts français consécutif à l'Affaire Falcone, la China Petroleum & Chemical Corporation (CPCC) réussit en novembre 2004, à arracher, devant la compagnie française Total, l'exploitation du bloc 3/80 au nord du pays (Mbaye Cisse ; 2007 : 9). Cette belle percée coïncide avec les tentatives du Fonds Monétaire International et de la Banque mondiale d'amener Luanda, à plus de transparence sur les fonds pétroliers : "l'Angola, alors 3éme sur 102 pays les plus corrompus selon Transparency International, avait vu, en 2001, un tiers des revenus de l'Etat s'évaporer, alors qu'un quart de la population souffrait de famine et attendait une aide alimentaire extérieure. Pékin mit alors à la disposition de Luanda un prêt de 2 milliards de dollars à 1,5% d'intérêts sur 17 ans, en échange de 10.000 barils de pétrole par jour" (Mbaye Cisse ; 2007 : 9). Les autorités angolaises pouvaient désormais s'opposer au FMI et à la BM. Le pragmatisme chinois portait une fois de plus ses fruits, car en 2005, le géant asiatique supplante les Etats-Unis et devient le premier importateur du pétrole Angolais. Davantage, en 2006, l'Angola devenait le premier fournisseur africain de la Chine.

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Paragraphe 2 : La coopération militaire sino-africaine : un instrument au service des
intérêts pétroliers chinois

Même si la diplomatie pétrolière demeure au coeur des préoccupations chinoises, il n'en reste pas moins que Pékin use d'autres instruments pour asseoir sa position en Afrique et accéder au pétrole. La gamme d'initiatives bilatérales et multilatérales s'étend à la coopération militaire. Aujourd'hui, la coopération militaire a revêtu les mêmes allures que la coopération économique, sous couvert du sacro saint principe de la non-ingérence. Pékin n'apporte plus son soutien aux mouvements de libération africains, comme il le fit dans les années 1970 à l'union nationale pour l'indépendance totale de l'Angola (UNITA) ou au front de libération du Mozambique (FRELIMO) (Niquet Valérie ; 2006). Il est beaucoup plus question aujourd'hui d'un partenariat stratégique visant à un rapprochement dans le domaine énergétique. Ce partenariat stratégique concerne la fourniture d'armes (A) et la formation du personnel militaire (B).

A- Pétrole contre matériel militaire

Les contrats de vente d'armes passés par la Chine avec ses partenaires africains prennent souvent la forme d'un échange d'articles d'armement contre des matières premières. En effet, pour assurer des livraisons régulières de pétrole en provenance de l'Afrique, consolider ses liens bilatéraux et payer ses factures de pétrole, la Chine adopte des démarches diverses, parmi lesquelles la livraison d'armes et de matériel militaire. C'est ce que semblent confirmer (De Lestrange Cédric ; Paillard Christophe Alexandre ; Zélenko Pierre ; 2005 : 175) lorsqu'ils affirment : "Les livraisons d'armes permettent aux chinois de négocier l'obtention des concessions auprès des pays producteurs. (...) l'Angola et le Nigeria acceptèrent cet échange".

Cette stratégie chinoise d'accès au pétrole africain est observable sur l'ensemble du

continent. En effet, Le marché africain, comme dans le domaine des BTP, est l'occasion de tester un matériel souvent rustique et peu prisé sur les marchés occidentaux. C'est en Afrique que la Chine trouve un débouché pour ses avions d'entraînement K8, fournis à la Namibie, au Soudan et au Zimbabwe. La Chine pourvoit des hélicoptères au Mali, à l'Angola et au Ghana, de l'artillerie légère et des véhicules blindés à la quasi-totalité des pays de la région australe, ainsi que des camions militaires, des uniformes, du matériel de communication(Niquet Valérie ; 2006). La coopération est particulièrement étroite avec le Zimbabwe depuis le début des années 1980 et s'est renforcée en 2004. Pékin lui fournit des chars, de l'artillerie, des blindés ainsi que des camions, des vedettes rapides et des batteries de défense antiaérienne (Mbaye Cisse ; 2007 : 12).

Par ailleurs, l'empire du Milieu va même jusqu'à recourir à la vente de technologies de pointe et d'équipements nucléaires en échange d'importations pétrolières. La Chine maintient souvent des relations militaires avec ses fournisseurs de pétrole. De ce point de vue, les cas de l'Angola, du Soudan et du Nigeria sont révélateurs. La Chine n'a pas hésité à vendre au Soudan des avions de surveillance F-7 et des avions de transport Y-8 en pleine guerre civile, pendant la période où ses compagnies pétrolières étaient engagées dans l'exploitation des gisements pétroliers de Muglad (Mbaye Cisse ; 2007 : 13). Ces ventes sont réalisées le plus souvent par la North Industry Corporation (NORINCO) et Polytech Industries, la plus importante firme de vente d'armes de l'armée chinoise.

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En 1995, lorsque le Nigeria a été isolé et sanctionné par la Communauté internationale pour l'exécution de neuf dissidents politiques ogonis, Pékin a continué à vendre des armes à ce pays, en dépit de la forte pression occidentale (Chung Lian Jiang ; 2004 : 4). En Angola, pékin a soutenu militairement toutes les parties ennemies : le mouvement populaire pour la libération de l'Angola (MPLA) ; le Front National de Libération de l'Angola(FNLA) et l'union nationale pour la libération totale de l'Angola(UNITA) (Fogue Tedom ; 2008 : 162).

Les pays africains sont devenus les premiers acheteurs d'armes et d'équipements militaires chinois. Dans un continent aussi instable, regorgeant déjà de matériel de guerre, l'arrivée d'armes supplémentaires n'est pas vraiment souhaitable. Mais, comme l'a dit le ministre des Affaires étrangères chinois, Zhou Wenzhong, " les affaires sont les affaires et la Chine ne mélange pas les affaires et la politique" (Mbaye Sanou ; 2006).

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon