VI-HYPÏTHESES
Les hypothèses sont des tentatives de réponse
à une ou plusieurs questions théoriques ou observations
empiriques. Ce sont en fait des explications provisoires d'une
réalité. Elles doivent alors être confirmées ou
infirmées à la fin par les résultats de l'étude. Ce
sont aussi des outils de sélection pour le chercheur, car elles aident
ce dernier à choisir les faits, à les interpréter et
à suggérer les procédures de recherche (Bokalli E. S.2006
:10).
La " macro-hypothèse " (Sindjoun L.2002 :20) autour de
laquelle s'ordonne notre recherche est la suivante : Du fait de la place
qu'elle occupe désormais dans l'économie mondiale, la Chine
nourrit des ambitions de grande puissance. Sa dépendance
énergétique l'amène à reconsidérer sa
politique vis-à-vis de l'Afrique. Le Golfe de Guinée, espace qui
jouit d'un potentiel énergétique important et d'une position
géostratégique indéniable, ne pouvait que susciter ses
appétits. Par une offensive politique, économique, diplomatique
et militaire, pékin entend investir le Golfe de Guinée afin de
s'assurer entre autre, le contrôle et l'exploitation des matières
premières en présence, pétrole en l'occurrence. Seulement,
engagé dans cette entreprise stratégique, pékin se souci
peu du respect des valeurs démocratiques et des droits de l'Homme. En
effet, le soutien politique qu'il apporte aux régimes africains
s'avère être une sorte de caution à leur gestion, les
conforte dans leur immobilisme politique, constituant ainsi un péril
pour la démocratie et la paix.
De cette hypothèse originelle, dérive les
« micro-hypothèses » (Sindjoun L.2002 :20) suivantes :
-
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l'offensive pétrolière chinoise en Afrique,
notamment dans la sous-région du Golfe de Guinée s'explique en
partie par son déficit énergétique. Lui-même
lié à la croissance de la demande énergétique
nationale par les différents secteurs d'activité et à
l'épuisement progressif des réserves nationales.
- l'important potentiel énergétique, les
nombreux atouts du pétrole et de la région du golfe de
guinée, mais aussi et surtout l'incapacité politique et
technologique des dirigeants à contrôler et à exploiter les
ressources expliquent également la ruée de la Chine dans la
sous-région.
- L'âpreté de la compétition entre
puissances pour un accès privilégié et à un moindre
coût aux ressources africaines, et notamment au pétrole du golfe
de guinée a conduit la Chine à ne négliger aucune
démarche pouvant concourir à la réalisation de son projet
géostratégique. De ce fait, elle va s'approprier les recettes qui
depuis les indépendances africaines permettent aux pays occidentaux de
transformer l'espace africain au mieux de leurs intérêts.
Celles-ci sont diplomatiques, politiques, économiques et militaires.
L'extraversion dont souffrent les Etats de la sous-région et le subtil
stratagème utilisé par pékin constituent un
véritable catalyseur à la mise en oeuvre de cette
offensive.
- La détermination de la Chine à
accéder par tous les moyens au pétrole africain en
général et à celui du Golfe de guinée en
particulier, l'a conduit à soutenir politiquement les régimes
africains en indélicatesse avec la communauté internationale pour
des raisons de non-respect de la démocratie et des droits de l'Homme. Ce
soutien pourrait s'avérer être un obstacle majeur à
l'évolution politique des pays africains vers la démocratie et
constituer une véritable menace pour la paix en Afrique.
PREMIERE PARTIE :
? LES ENJEUX DE L'OFFENSIVE PETROLIERE CHINOISE DANS
LE GOLFE DE GUINEE
Depuis le milieu de la décennie 1990, la
coopération sino-africaine semble avoir pris une nouvelle tournure. Pour
Pékin, le pragmatisme a pris le pas sur la rhétorique. Du fait de
la forte industrialisation que connaît le pays depuis quelques
décennies, la Chine se livre à une quête
effrénée de matières premières, en l'occurrence le
pétrole à tous les points stratégiques de la
planète. Animé par un esprit réaliste, Pékin s'est
rendu compte de l'impérieuse nécessité d'une
réorientation de sa politique vis-à-vis de l'Afrique. En effet,
comme l'écrit Eric Patrick MOUPAYA (2008 :1) " la croissance et
même la survie économique de la chine dépendent, et pour
une part croissante, de l'Afrique ". La Chine absorbe désormais 25% de
tout le cuivre consommé à travers le monde, 40% du charbon, 35%
de l'acier, 10% du pétrole et sa demande ne cesse de croître, et
90% de tout l'aluminium (Moupaya E. ; 2008 : 1). Une économie
dévoreuse d'énergie, boulimique en matières
premières, qui s'est tout naturellement tournée vers la
région du monde la mieux pourvue.
Aussi, selon toute vraisemblance, l'offensive
pétrolière de la chine dans cette sous région aujourd'hui,
pourrait-elle s'expliquer à la fois par une demande
énergétique interne en perpétuelle croissance (chapitre1),
et par le potentiel énergétique important de la sous
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région, couplé aux nombreux avantages de son
pétrole. Mais aussi et surtout par l'incapacité politique et
technologique des dirigeants à contrôler et à exploiter les
ressources (chapitre2).
La dépendance énergétique de la
Chine
Jusqu'à présent, le débat autour de la
dépendance pétrolière de la Chine reste ouvert. Si pour
certains, la dépendance chinoise en termes d'énergie
pétrolière est une illusion, obéit tout comme les autres
puissances industrielles, à une volonté politique de ce pays de
préserver ses réserves pétrolières pour l'avenir.
Pour les autorités chinoises par contre, la dépendance
pétrolière du pays est une réalité, un défi
à surmonter pour rester compétitif sur le marché
international. S'il est vrai que la plupart de pays industrialisés
aujourd'hui évoquent cette dépendance énergétique
pour justifier l'expansion de leurs firmes pétrolières à
travers le monde, il n'en demeure pas moins vrai que ces mêmes pays
optent pour la préservation de leurs réserves, visant ainsi
à constituer des réserves stratégiques,
représentant de dizaines d'années de consommation. Donc,
dépendance supposée ou réelle, notre objectif n'est pas de
prendre position. Il est simplement question d'analyser les données
recueillies tout au long de nos recherches.
Par dépendance, nous entendons un assujettissement,
une absence d'autonomie. La dépendance énergétique quant
à elle peut être perçue comme le fait que le pays ne puisse
plus subvenir à ses besoins par la production nationale et doit par
conséquent importer la différence. La Chine a en effet longtemps
cru qu'elle pourrait rester autonome énergétiquement, mais face
à la croissance de sa consommation, elle va devoir se résigner
à importer de plus en plus de pétrole. Se retrouver tributaire du
marché mondial n'est certes pas une sensation très rassurante
pour Pékin, mais c'est le lot de la plupart de pays
industrialisés, pays dont la Chine aspire à faire partie au cours
de ce siècle.
Dans le cadre de ce travail, la dépendance
pétrolière de la chine sera analysée à travers son
déficit énergétique interne (section1), mais aussi
à travers l'absolue nécessité de ses importations
(section2).
SECTIÏN I : Le déficit
énergétique de la Chine
De nos jours, la Chine se dessine comme la seule puissance
capable de contenir ou de contester l'hégémonie des Etats-Unis
d'Amérique, elle est même devenue l' « adversaire reflet
»de ces derniers. En effet, seul l'Empire du milieu peut réellement
constituer une véritable menace pour les intérêts
américains. Pourtant, la Chine se heurte à un véritable
obstacle, celui de sa dépendance énergétique.
Deuxième consommateur d'énergie dans le monde, la chine doit
désormais nourrir une machine industrielle dont l'appétit semble
insatiable. Or, ses ressources énergétiques tarissent à un
rythme inquiétant et le pays est redevenu depuis 1993, un importateur de
pétrole.
La mise en valeur de nouveaux gisements, notamment dans le
bassin de Tarim dans le Xinjiang, reste très lente et ne permet pas de
répondre à la hausse régulière de la consommation
de pétrole, multipliée par deux depuis 1995. Cette situation
s'explique essentiellement par la hausse de la production industrielle,
l'augmentation régulière du parc
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automobile et la constitution depuis 2003 d'une
réserve stratégique (représentant un trimestre de
consommation), comme dans les grands pays industrialisés.
C'est à travers l'insuffisance des réserves et
de la production (paragraphe1), mais également par la croissance de la
demande intérieure par les différents secteurs de
l'économie nationale chinoise (paragraphe2), que nous étudierons
le déficit énergétique de la Chine.
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