II-1-2-Mariage interethnique et intercommunautaire
Plusieurs alliances matrimoniales sont contractées
entre les locaux et les étrangers. Pour une fille, accepter devenir
l'épouse d'un pêcheur béninois et/ou nigérian est un
signe d'engagement dans l'activité de pêche au regard du
degré d'implication de ces communautés dans la filière,
mais aussi de la place qu'occupent leurs épouses dans le circuit de
commercialisation. Il ouvre la voie à des horizons divers dont les
relations entre les membres des familles unis par cette alliance, fait
naître des rapports préférentiels entre les deux blocs dans
les échanges des biens, des offres d'emploi ainsi que des savoirs. En
donnant une perspective nouvelle aux relations entre les familles unies par le
lien du mariage, il donne confiance à l'entourage des personnes
concernées, l'opportunité de mieux se connaître et
d'apprendre la manière et les techniques des autres. Tous ces
différents paramètres engendrent l'élargissement du
réseau social de formateurs dans les différents secteurs de
l'activité de pêche et font disséminer les savoirs. Nous
comprenons dont pourquoi selon SABINOT C. (2008:327) reprenant GERARD L.
(2003), «l'apprentissage culturel est entièrement pris dans
l'écheveau des relations quotidiennes» tant entre les Hommes
par le biais de leurs différents liens dont le mariage en constitue un,
qu'entre ces derniers et leur environnement immédiat d'où
provient l'essentiel de leurs ressources alimentaires et économiques.
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Ainsi au niveau du transfert des savoirs en matière de
pêche et de fumage, les Nigérianes et Béninoises venues en
mariages dans les ménages autochtones amènent avec elles, leur
savoir-faire en matière de disposition du poisson ainsi que les
connaissances sur l'emploi des sources énergétiques à
forte vertu coloratrice et gustative. La spécificité de leur
connaissance dans ce domaine est reconnue de tous. C'est en ce sens qu'une
informatrice a exprimé toute sa fierté d'avoir à ses
côtés une talentueuse fumeuse nigériane comme belle soeur:
«Nous avons notre Nigériane dans la famille, la femme de mon
frère, elle nous apprend beaucoup de choses sur le fumage du
mbounga» (NGAH JULIE, Fumeuse, Batanga, Londji I, le18/12/2010).
En même temps, les autochtones parties en mariage dans
les communautés (béninoise et nigériane),
acquièrent les premières le fumage intensif en vigueur au sein de
ces groupes, sont les premières à adopter les fumoirs banda de
grandes dimensions, et à se spécialiser dans le fumage de
certaines espèces de poisson à titre illustratif, le mbounga
(Ethmalosa fimbriata) dont les nigérianes sont
désignées comme étant les leaders. En même temps,
elles restent porteuses des techniques en vigueur dans leur groupe d'origine.
C'est ainsi que, le fumage du «maban» (ou poisson
fumé pimenté) dans un premier temps n'était assuré
au niveau des campements nigérians que par les ressortissantes
camerounaises en mariage. Mais, avec le temps, il a progressivement
intégré les habitudes alimentaires de ces derniers. D'une
manière générale, ces différentes relations
viennent agrandir le cadre de concertation entre les acteurs de pêche et
par ricochet, ouvrent un boulevard au changement des techniques de travail.
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