I.2. La mise en oeuvre des démarches
méthodologiques
Dans l'enseignement-apprentissage du français, les
différentes activités enseignées procèdent selon
une méthodologie, c'est-à-dire la manière dont l'action
pédagogique est mise en oeuvre selon les étapes, les moments de
ces étapes, les techniques et les outils utilisés dans ces
différentes étapes.
Les résultats de nos enquêtes auprès des
professeurs indiquent que tous les professeurs interrogés connaissent
les différentes méthodologies et savent élaborer une fiche
pédagogique. Mais aussi paradoxal que cela puisse paraitre, 60,86% des
enseignants formés élaborent rarement les fiches
pédagogiques, et 81,81% de ceux qui n'ont pas été
initialement formés le font aussi rarement. Cette situation insinue
d'une part la difficulté de la mise en oeuvre des démarches
méthodologiques et d'autre part, l'utilisation des méthodes
magistrales plutôt que des méthodes actives qui mettent
l'élève au centre des apprentissages. L'élève ne
participant pas à la construction du savoir, ne saurait assimiler les
contenus et les réinvestir. Un professeur certifié nous a tenu
les propos suivants en toute sincérité lors d'une visite de
classe : « Je n'élabore la fiche pédagogique
que lorsque j'ai l'information d'une visite des encadreurs
pédagogiques ». Mais ce taux assez élevé
des enseignants formés et non formés qui affirment pourtant
savoir élaborer une fiche pédagogique et qui ne le font pas,
montre une certaine paresse et une négligence des enseignants à
préparer les cours.
Les observations directes de cours que nous avons pu effectuer
montrent effectivement que la mise en oeuvre de la méthodologie
constitue un handicap aux apprentissages. Nous avons constaté que des
étapes sont escamotées aussi bien en grammaire qu'en lecture
expliquée. L'une des étapes de la méthodologie les plus
importantes dans l'exécution d'une leçon de grammaire, est sans
doute la phase de l'observation- manipulation-classement. Mais les deux
séances de grammaire (présentées par des professeurs non
formés) que nous avons observées, cette phase a été
mal abordée et ne permet pas donc aux élèves de se
familiariser avec les nouvelles notions qu'on veut leur faire assimiler. C'est
cette étape qui permet en réalité à l'apprenant de
manipuler les phrases du corpus, de dégager les règles et de les
classer. Nous-nous sommes donc rendu compte que si théoriquement la
méthodologie de façon générale est connue des
professeurs, sa mise en oeuvre constitue un véritable problème.
Ceci explique les difficultés des élèves à
comprendre les leçons. Nous avons suivi une la troisième
séance de grammaire présentée par un professeur
certifié. Nous avons été satisfait de la prestation de
l'enseignant de façon générale. Cependant, nous avons
relevé le fait que les exercices donnés aux élèves
à faire à la maison étaient en déphasage avec
l'esprit du décloisonnement.
L'observation d'une séance de lecture expliquée,
présentée par un professeur non formé, nous a
également permis de savoir que la méthodologie telle quelle est
mise en pratique ne permet pas une bonne compréhension du texte par les
élèves. Les difficultés résident dans la
motivation, l'étude de détail et les synthèses.
La motivation consiste à susciter la curiosité,
le désir d'apprendre, le plaisir d'atteindre un objectif. Cette
étape est donc déterminante lorsqu'on veut atteindre un but.
Lorsqu'elle est mal faite ou éludée, elle peut impactée
sur la disposition des élèves à adhérer à la
séance. L'étude de détails offre l'occasion à
l'enseignant de s'assurer de la compréhension du texte. Mais quand elle
est menée sous forme de paraphrase, le sens que l'on veut donner au
texte n'apparait pas de façon évidente pour les
élèves. Si les différentes synthèses ne sont pas
aussi élaborées avec la participation les élèves,
ils se sentent étrangers au contenu donné à
l'étude.
Lorsque les élèves pour la plupart issus des
classes tenues par des professeurs non formés, évoquent
l'explication des mots difficiles et une étude bien
détaillée dans leurs suggestions, cela dénote
effectivement d'un problème de méthodologie.
Tous les professeurs interrogés éprouvent certes
des difficultés dans leur pratique de classe, mais à des
degrés divers. Toutefois, les difficultés des professeurs
enquêtés n'ayant pas été initialement formés,
relatives à la maitrise des contenus et à la mise en pratique de
la méthodologie découlent de façon générale
de l'absence de formation initiale. Ils souhaitent d'ailleurs être
formés sur les méthodologies et l'élaboration des fiches
pédagogiques. La solution en amont à ces difficultés
serait de former d'abord les professeurs nouvellement recrutés avant de
les mettre à la disposition des établissements. Sur ce point, un
formateur de l'ENS-UNZ nous a confié les propos tenus
généralement par les professeurs non initialement formés
qui réussissent au concours professionnel et qui entrent à
l'école pour leur formation au CAPES : « Monsieur,
nous allons ressortir maintenant comme des professeurs pleins ».
En effet, si l'on se réfère aux modules dispensés à
l'ENS-UNZ aux élèves professeurs de français, la mise
à niveau et les cours de renforcement entre autres sur la grammaire,
l'orthographe, préparent ces futurs enseignants à une bonne
maitrise des contenus et des pratiques de classe. Cette formation initiale a
donc pour avantage aussi de dissiper les frustrations dont sont souvent
victimes ces enseignants lorsqu'ils n'ont aucune qualification
professionnelle.
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