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De la protection diplomatique en droit international public. Cas des ressortissants congolais.


par Manoah TSHILUMBA
Université de Lubumbashi - Graduat en droit 2019
  

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§3. L'épuisement des voies de recours internes

Comme énoncé ci-haut, il ne suffit pas à un individu d'avoir la nationalité ou encore moins d'avoir les mains propres pour attendre l'intervention de son Etat d'origine, mais aussi d'avoir épuisé les voies de recours internes devant les juridictions de l'Etat responsable.

La condition de l'épuisement des voies de recours internes est l'une des trois conditions de recevabilité de l'action en protection diplomatique. Cette condition procédurale qui, plus explicitement, fera participer l'individu à l'instance, est ainsi essentielle à l'exercice de la protection diplomatique.

Elle signifie que l'individu doit avoir préalablement épuisé les local remedies177avant que l'Etat de nationalité endosse la protection diplomatique. Elle fait de la protection diplomatique un mécanisme subsidiaire de la protection des droits car celle-ci n'est mise en oeuvre que si les voies de recours internes n'ont permis à l'individu d'obtenir satisfaction.

Il faudrait d'abord que l'individu ait tenté d'obtenir justice par les juridictions internes de l'Etat qui l'aurait causé préjudice, et ce n'est qu'après n'avoir pas obtenu gain de cause qu'il pourra ensuite demander l'implication de son Etat de nationalité. Cette règle est retenue tant dans la doctrine que dans la jurisprudence. Il a été avancé l'idée que la responsabilité internationale était intrinsèquement liée à la mise en oeuvre de cette règle.

Nombreuses sont les affaires pouvant être annexées pour appuyer cet argumentaire. Comme c'est le cas dans la célèbre affaire Mavrommatis, la Cour permanente retient que : « C'est un principe élémentaire du droit international que celui qui autorise l'Etat à protéger ses nationaux lésés par des actes contraires au droit international commis par un autre Etat

176 Proclamation de Georges Washington du 22 Avril 1973 portant déclaration de neutralité des Etats-Unis dans la guerre de coalition contre la France cité par J. Salmon, op.cit., p.223.

177 D. RUZIE cité par KASSABO Léon Dié, op.cit., p.60.

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dont ils n'ont pu obtenir satisfaction par les voies ordinaires178 ». Il assez est clair que l'épuisement des voies de recours internes revêt le caractère d'une règle coutumière du droit international.

De plus, dans son arrêt du 14 avril 1939 relatif à l'affaire de La Compagnie d'électricité de Sofia et de Bulgarie, la Cour Permanente a estimé qu'un arrêt en Cassation n'était pas une voie de droit extraordinaire. Cette décision doit être considérée comme définitive, puisque la Cour de cassation bulgare est l'ordre juridique suprême. Ainsi, selon la Cour : « La règle de l'épuisement des recours internes (...) implique l'épuisement de tous recours y compris ceux devant la Cour de cassation, laquelle seule peut, soit-en cassant la sentence de la Cour d'Appel renvoyer l'affaire pour un nouvel examen, soit en rejetant le pourvoi-rendre la sentence définitive179 ».

Il sied de noter que cette position est explicite en ce sens qu'elle précise que quel que soit le degré de la juridiction nationale devant laquelle est exercé le recours, tant qu'elle est du pays territorial alors elle reste interne.

A. Analyse du fondement de l'épuisement de voies de recours internes

L'épuisement des voies de recours est une règle tendant au respect de la souveraineté de l'Etat causant préjudice. Si cette règle existe, c'est pour permettre à l'Etat du préjudice de réparer le dommage causé par lui, selon ses propres règles juridictionnelles internes. D'origine coutumière, cette règle bien connue trouverait son origine dans le devoir de respect dû à la souveraineté de l'Etat dont la souveraineté est engagée180.

Si un Etat cause préjudice à un individu résidant sur son territoire, il est donc assez logique que, du moins au stade préliminaire de la procédure, ses règles de droit interne interviennent pour le réparer.

Sans l'exercice des voies de recours internes, l'implication directe de l'Etat pour le compte de son national sera mal observée, et ce pour deux raisons. En premier lieu, ce serait une violation grave d'un principe sacro-saint du droit international et qualifié par la Cours en ce sens « d'un grand principe du droit international coutumier181 ». Ce genre d'interventions aurait donc des conséquences graves et serait considéré comme une ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat. Comment imaginer que l'individu puisse faire appel à son Etat

178 C.P.I.J, Affaire Mavrommatis, op.cit., p.12.

179 C.P.I.J., Affaire de la Compagnie d'électricité de Sofia et de Bulgarie (Belgique c. Bulgarie), 14 avril 1939, série A/B, n°77

180 Paul De VISSCHER cité par BORSUS Hélène, op.cit., p.11.

181 Bertrand BAUCHOT, op.cit., p.119.

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de nationalité pour régler le différend, alors que les moyens de droit interne sont ainsi à sa disposition ? Dans ce cas, il y aurait bel et bien ingérence dans les affaires internes de l'Etat territorial.

L'épuisement des voies internes a véritablement pour bien fondé le respect de la souveraineté de l'Etat territorial sur les individus se trouvant sur son territoire. Dans ce sens, l'on se rapprocherait de l'idée évoquée par le juge Cordova dans l'Affaire de l'Interhandel qui pense que la raison de l'existence de cette règle (...) est la nécessité absolue d'harmoniser les juridictions internationales et nationales assurant le respect dû à la juridiction souveraine des Etats (...) L'on parvient à cette harmonie, à ce respect de la souveraineté des Etats, en accordant priorité à la juridiction des tribunaux internes de l'Etat dans les affaires où des étrangers introduisent un recours contre un acte des autorités exécutives ou législatives182.

Pour pallier ces problèmes d'ingérence et de violation de la souveraineté étatique, les Etats ont adopté, dans leurs relations conventionnelles, de légiférer le recours de cette règle. En application de cette règle, l'Accord de coopération franco-américaine du 28 juin 1948, ayant trait à l'application en France du plan Marshall prévoit son article 10 alinéas 3 : « Il est également entendu qu'aucun des deux gouvernements ne présentera aux termes du présent article, de réclamations d'un de ses ressortissants avant que celui-ci n'ait épuisé les voies de recours qui lui sont ouvertes devant les tribunaux administratifs et judiciaires du pays où la réclamation prend naissance »183.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry