Partie 2 : questionnaire spécifique
métiers professionnels de santé
Êtes-vous accompagné aujourd'hui dans
les changements de votre métier liés aux nouvelles technologies
et notamment celles dotées d'intelligence artificielle ? Si oui, comment
?
Non, je ne suis même pas accompagnée sur le
logiciel que j'utilise. Ça n'a jamais été le cas, ni
à l'hôpital, ni ailleurs. L'accompagnement c'est : « il y a
un outil, tu te débrouilles, tu l'utilises. » A l'hôpital il
y a les logiciels de patient informatisé et d'événement
indésirable quand il arrive un problème et que l'information va
directement à la direction. C'est une tannée : tu n'es pas
formé, c'est un outil machine à gaz qui te demande un code que tu
n'as jamais. En revanche on voit tout de suite que cela monte à la
direction parce qu'en général on a une
136
réponse dans les vingt-quatre heures. C'est bien mais
encore une fois on n'est pas formé. A l'hôpital les autres ne
voulaient pas le faire. J'étais une des rares à le faire. Je pars
du principe que si on ne dit pas que ça ne va pas on n'aura jamais de
personnes en plus ou de meilleurs outils.
Comment souhaiteriez-vous être
accompagné d'une manière générale ? Pour les
changements liés directement ou indirectement à la mise en place
de nouvelles technologies ?
Je suis très formation. Aujourd'hui pour moi RH
ça ne sert qu'à une chose c'est d'être un interlocuteur de
formation parce qu'on a besoin de formations tout le temps. La RH nous a
récemment avoué qu'elle attribuait les formations avec un tableau
Excel avec des prix. Ça a pour conséquence que quand une
infirmière est dans l'unité depuis 4 ans et qu'elle demande
à faire une formation en médiation cognitive, la responsable des
ressources humaines refuse à cause du coût que cela
représente alors que l'unité veut faire de la médiation
cognitive. Elle a conscience que l'outil qu'elle utilise n'est pas
adapté.
La formation c'est de la communication car c'est du temps
dégagé pour prendre du recul, pour se parler entre
professionnels, interroger les professionnels qui souhaitent te faire utiliser
un nouvel outil. Et il faut aller en formation à plusieurs et ne pas
être un seul référent d'une unité à aller en
formation. Ça crée des liens et des débats pour permettre
d'être porte-paroles dans son institution. Sur l'intelligence
artificielle par exemple, ce serait se poser une demi-journée ou une
journée avec un professionnel qui explique ce qu'est l'intelligence
artificielle, comment l'appliquer, comment la mettre en perspective dans les
établissements avec des exemples concrets et des témoignages. La
communication doit être orale. L'écrit, on n'a pas le temps.
On fonctionne déjà avec des
référents. Il y a une référente pour le logiciel
Cariatides mais qui n'est pas suffisamment impliquée. Je vais
moi-même être référente comme évoqué
sur le questionnaire tentative de suicide. Un protocole autour de ce
questionnaire a été créé par le service
qualité après un suicide mais personne ne nous a expliqué
ce que c'était, comment l'utiliser et l'outil n'est, encore une fois,
pas adapté. Comme j'ai une formation suicide en octobre j'ai
proposé à ma cadre d'être référente dessus et
de communiquer dessus quand l'outil sera adéquat.
137
Je fais des demandes de formation tout le temps parce que
c'est le seul moment où je peux m'arrêter, réfléchir
et rencontrer des gens. Ça permet de discuter sur ce qui fonctionne et
ce qui ne fonctionne pas d'une manière générale. En dehors
de ça on travaille sans s'arrêter.
Il n'y a pas longtemps on a eu une formation d'une et demi
par un cadre sup sur l'espoir. Ça, dans ma profession, c'est important.
Il y a un truc qui m'énerve chez les infirmiers c'est qu'ils
râlent et ne sont jamais contents, parce qu'effectivement on a de
mauvaises conditions de travail et qu'on n'est pas bien payé. Alors
cette formation m'a fait un bien fou. Les histoires des patients sont
horribles, on a de mauvaises conditions de travail, on est mal payé, on
a très peu de formation et ce type de formation peut être un vrai
levier au changement. Le changement c'est d'arrêter de râler et de
trainer des pieds et à aller toquer aux bonnes portes et bouger pour
faire de son métier quelque chose d'agréable à
défaut d'avoir un bon salaire.
On est quand même une profession super adaptable. Si on
ne s'adapte pas on meurt et pourtant la résistance au changement c'est
abominable dans les métiers paramédicaux. Il y a tellement de
gens qui disent : « il ne faut pas changer c'était mieux avant
», même des infirmières de 45 ans. Il y a un blocage sur les
technologies parce qu'on travaille dans l'humain et que ce n'est pas humain. On
souffre de la déshumanisation des institutions. C'est pour ça
qu'on va dans la rue. Parce que c'est déshumanisé et qu'on nous
méprise. Aujourd'hui, je ne peux pas contacter ma DRH. Je n'ai
pas le droit d'appeler ou d'envoyer un email à ma DRH. C'est interdit.
Si je le fais j'ai un avertissement. Avant on pouvait passer la porte
du DRH, dire bonjour et lui demander un CET par exemple. Maintenant il y a :
1/ Une cadre de proximité 2/ Un cadre sup
3/ Une directrice des soins 4/ La DRH
5/ La direction générale
J'ai une collègue qui au lieu de passer par la cadre
de proximité a envoyé sa lettre à la directrice des soins
et qui s'est pris un blâme pour ça. Elle a dû faire une
lettre d'excuse à la cadre pour lui dire qu'elle était
désolée de ne pas être passé par elle. Quand on en
est là, on est bien... ça me choque beaucoup de ne pas pouvoir
contacter la DRH, d'autant qu'on n'est pas chez Google, on est une fondation
locale, on est 50. Il y a trop de strates. Ça déshumanise. On
parlait tout à l'heure de communication, pour communiquer tu ne mets pas
15 personnes au-dessus de toi et le même nombre de strates pour des
demandes simples. Ça donne l'impression que le but est qu'il n'y ait
justement pas de communication.
138
Annexe 12 : QUESTIONNAIRE VIERGE COACHS ET PROFESSIONNELS
ACCOMPAGNEMENT / CONDUITE DU CHANGEMENT
Rappel des éléments contextuels :
· Mémoire RH Elisabeth Berthelot
· Sujet du mémoire :
Quels sont les rôles et missions de la fonction RH
pour mettre en oeuvre les formations liées à l'impact de la
diffusion de nouvelles technologies dotées d'intelligence artificielle
sur certains métiers dans le plan de développement des
compétences des établissements de santé en France
?
· Public concerné : Jury de DRH ne
connaissant pas spécifiquement les questions d'intelligence artificielle
ni le secteur santé
La transcription de l'entretien sera annexée au
mémoire. Elle peut être rendue anonyme.
23. Quel(s) accompagnement(s) spécifique(s) pourrait
être mis en oeuvre dans les établissements sanitaires sur le long
terme dans le cadre des changements à venir liés à
l'implantation croissante d'outils technologiques, notamment ceux dotés
d'intelligence artificielle ?
24. Quelles adaptations suggérez-vous suivant les
familles de métiers : médicaux, paramédicaux et personnel
administratif ?
25. Pourquoi tel type d'accompagnement plutôt qu'un autre
? En quoi ce type d'accompagnement se distingue-t-il des autres ?
26. Le type de structure et les enjeux que représente
l'hôpital nécessitent-ils des aménagements
spécifiques par rapport à ce type de formation / d'accompagnement
?
139
Annexe 13 : Interview professionnel accompagnement Marie-Pier
Levesque
QUESTIONNAIRE MEMOIRE Marie-Pier Levesque, Consultante
changement, conflits, leadership, performance grandes entreprises et services
publics au Québec, en France et en Suisse
Quel(s) accompagnement(s) spécifique(s)
pourrait être mis en oeuvre dans les établissements sanitaires sur
le long terme dans le cadre des changements à venir liés à
l'implantation croissante d'outils technologiques, notamment ceux dotés
d'intelligence artificielle ?
L'accompagnement d'un changement de type technologique, c'est
le même type d'accompagnement que d'autres changements. Je pense qu'il y
a des règles et des pistes à suivre qui sont les mêmes.
L'intérêt de celui-là c'est qu'on est sur un changement qui
doit être développé avant d'être implanté.
Parfois il y a des changements que tu dois implanter comme une nouvelle
réglementation ou un nouvel outil et il faut juste procéder
à la gestion du changement pour l'implanter. Ce qui est
intéressant ici c'est que la gestion du changement peut commencer au
moment du développement des outils. On peut faire participer beaucoup
plus de gens, avoir des démarches beaucoup plus innovatrices, qui
peuvent être beaucoup plus créatives et c'est beaucoup plus
emballant de développer ce type de changement-là que des
changements qui sont déjà prédéterminés.
Si on commençait au tout début, dans les
principes de conduite du changement, il faut penser à de l'information,
à de la formation, à de la rétro information, à des
groupes de travail, à déléguer des décisions, etc.
Il y a beaucoup de canaux qu'on peut utiliser pour accompagner le changement.
Dans un hôpital par exemple la première chose à faire
serait d'essayer de faire un tour des experts et de voir exactement ce qui
existe, ce qui est envisageable, quel créneau est le plus
intéressant pour l'hôpital parmi tout ce qui existe et de
déterminer des orientations : se dire par exemple que dans tout ce qui
existe on pourrait se spécialiser dans les patchs, les pilules
interactives, la physiothérapie, choisir une
orientation.
A partir de ça, commencer à mobiliser les gens
ou à les impliquer dans des projets pour ensuite faire des sites
pilotes, se connecter avec des acteurs externes, avec la recherche et impliquer
le plus de gens possibles. Ça ferait un projet qui serait innovateur
choisi par l'institution, porté par des participants volontaires. Alors
le projet serait sans résistance parce qu'il est pris dès
140
le départ, les gens peuvent choisir dans quoi aller et
comment le développer. Plus tu peux donner de marge de manoeuvre, plus
c'est intéressant et le moins tu as de résistance.
En contrepartie, s'il y a une crise qui arrive, le projet
risque d'être mis de côté. De même s'il y a un
changement informatique plus urgent. Ce sont des projets qui peuvent vite
tomber dans l'inertie car il y a moins de pression que quand on a un changement
urgent. La Covid en revanche demandait à ce qu'on développe
beaucoup de solutions à distance, de télémédecine
et il y avait peut-être aussi du temps qui était
dégagé pour de la recherche. C'est devenu une opportunité
pour développer ce genre de projet.
Le reste de ce que je suggérerais sont des choses assez
traditionnelles : faire des choix, faire un groupe de travail pour faire des
choix, chercher des gens pour aller dans un groupe de recherche, on fait
plusieurs groupes, on met en place des moments où ils peuvent
échanger ensemble, on fait des expériences. On peut aller vers
une stratégie de foyer contaminant qui commence et puis quand ça
marche d'autres groupes se joignent. Tout du long il doit y avoir beaucoup
d'information. Il faut que personne dans l'entreprise, même ceux qui ne
sont pas impliqués, ne puisse avoir l'impression d'être pris par
surprise. Comme il y a beaucoup d'informations, on peut inventer un journal sur
le projet ou s'il y en a déjà un une rubrique spécifique
qui parle de ce projet régulièrement et que tout le monde
progresse, même ceux qui n'y participent pas.
Ensuite il faut réfléchir à comment
ça va changer l'avenir et si tu veux une organisation agile, c'est bien
que régulièrement les équipes fassent des moments de
réflexion pour voir comment toutes ces nouvelles technologies vont
changer l'avenir, d'où on vient, vers quoi on pourrait aller, quels
seraient les différents scenarii. Il y a beaucoup de choses à
faire de ce côté-là.
Pour ceux qui sont déjà dans le changement et
des expériences, c'est important qu'il y ait des mécanismes qui
soient suivis, qu'il y ait du feed-back, qu'on voit comment évoluent les
choses. On doit leur donner des objectifs et vérifier s'ils les
atteignent, si les choses se passent bien, quels problèmes ça
crée, c'est quoi les interférences avec les autres
systèmes, ce qu'il faut corriger, est-ce que ces personnes ont du
plaisir, pas de plaisir, qu'est-ce qu'ils recommandent, le temps qu'ils ont
à disposition ou au contraire qu'ils n'ont plus pour faire le reste du
travail. Ce sont des mécanismes de feed-back. Les mécanismes de
feed-back ça peut être surveiller l'information de gestion,
ça peut être d'avoir des sondages, ça peut être
également d'aller voir au niveau des erreurs, la qualité, les
atteintes d'objectifs.
141
Il peut y avoir du benchmarking qu'on peut mettre en place
avec d'autres organisations qui font des projets semblables.
Quelles adaptations suggérez-vous suivant les
familles de métiers : médicaux, paramédicaux et personnel
administratif ?
Dans les résistances, la première résistance
est celle qui est liée au sens et à la pertinence.
Les médecins voient tout de suite l'impact pour les
patients et pour eux aussi. Ça c'est la deuxième
résistance : ce que je gagne ou je perds. Pour eux c'est assez
évident que ces changements sont intéressants.
Pour les professions paramédicales, dans la mesure
où si on leur explique que si c'est bon pour les patients ils vont finir
par l'accepter il faut quand même leur montrer les gains qu'il y a de
leur côté. Il y en a moins que pour les médecins. Ça
prend plus d'efforts pour les persuader mais on peut trouver d'autres gains
qu'on peut leur apporter en parallèle pour que ce soit plus attrayant
pour eux.
Pour le personnel administratif la pertinence est encore plus
difficile à comprendre parce qu'ils s'identifient moins au patient.
C'est plus difficile de trouver du sens et ils n'y gagnent probablement rien !
Il faut s'interroger sur ce qu'ils pourraient gagner, comment ils pourraient
être soulagés dans ce qu'on trouve dans les logiciels, qu'est-ce
qui facilite leur travail, est-ce que ça leur permet d'avoir un travail
un peu plus varié, être plus polyvalent, est-ce qu'ils peuvent se
remplacer plus facilement. A un moment il va peut-être falloir
décider de passer en force mais il faut aussi calculer ce que va
coûter ce passage en force : est-ce qu'ils vont faire de la
résistance, est-ce qu'ils vont travailler moins bien, quelle importance
accorde-t-il au fait d'adhérer à ce changement ? C'est un calcul
entre l'effort et les retombées.
Pour les impliquer je vois surtout la piste de beaucoup
d'explications, de leur parler avec intelligence de quelle est leur
contribution dans l'avenir de l'institution pour qu'ils sentent bien qu'ils
font partie de l'établissement et de ces nouveaux projets et non pas
qu'ils sont là juste pour soutenir ceux qui mènent ces projets.
Il faut aussi idéalement leur trouver des avantages à eux dans
tous ces projets et peut-être leur donner des compensations. Est-ce que
ce ne serait pas le bon moment pour leur donner ce qu'ils demandent depuis
longtemps, par exemple des bureaux un peu plus agréables, du meilleur
matériel, des bureaux communs, un
142
local de pause plus agréable ? Il faut s'interroger sur
ce qu'on pourrait leur donner pour que l'effort soit
récompensé.
Et est-ce qu'ils peuvent participer dans l'élaboration
du projet ? Peut-on les mettre dans des groupes de travail pour donner leur
avis ? C'est peut-être difficile sur l'élaboration mais sur
l'impact administratif, le choix du logiciel et comment les adapter, il y a
moyen de les impliquer d'une manière ou d'une autre. Quand on les fait
participer ils sont toujours plus partie prenante. S'ils ne sont pas d'accord
ils pourront le dire et on pourra chercher des solutions. Essayer de voir
comment les impliquer dans le développement du projet à leur
niveau et les informer en continue.
Pourquoi tel type d'accompagnement plutôt qu'un
autre ? En quoi ce type d'accompagnement se distingue-t-il des autres
?
Les techniques habituelles que je viens de mentionner sont
très bien. Encore une fois l'avantage ici c'est de pouvoir vraiment
commencer en amont, d'intéresser tout le monde ensemble, que tout le
monde sache où on en est, quelles sont les orientations possibles, ce
vers quoi on pourrait aller, choisir ensemble l'orientation à partir de
différents projets et de différents niveaux et que ce soit
décliné jusqu'au personnel administratif. Il s'agit de construire
quelque chose ensemble. Ça me parait l'idéal. Il y a quand
même beaucoup de projets potentiels dans tout cet univers des
technologies.
Une des choses qu'on peut mettre sur pied dans les petites
structures, c'est créer des relais d'information qui vont vraiment
jusque dans toutes les strates de l'organisation, chercher les états
d'esprit, les suggestions, faire remonter ça jusqu'à un groupe de
pilotage, prendre des idées à partir du groupe de pilotage, les
faire redescendre à la base, les valider. Il faut s'appuyer sur des
cadres ou des personnes qui ont du leadership pour aller chercher des
idées et les faire circuler, qu'elles fassent des allers-retours dans
les étages, faire remonter des idées et les valider. Ça
dans les hôpitaux, ça m'a toujours semblé assez porteur. On
travaille toujours en vase clos : c'est l'informatique qui va développer
quelque chose, qui va envoyer son projet et les cadres vont devoir le mettre en
place alors qu'ils n'ont pas été impliqués avant.
Ça arrive un peu comme un cheveu sur la soupe et ça devient
difficile dans l'implantation du changement. A l'hôpital on devrait
procéder un peu plus à l'utilisation de ces relais par la
hiérarchie ou par des employés qui ont du leadership dans des
groupes de travail.
143
Après, il y a la stratégie des foyers
contaminants. Quand un groupe se lance dans un projet, tu fais beaucoup de
publicité autour, ça intéresse tout le monde et
normalement ça attirera un autre groupe qui voudra aussi le mettre en
place. C'est une approche de conduite de changement qui se fait assez par
volontariat. Il faut avoir du temps pour le faire, il ne faut pas être
trop pressé. S'il y a plusieurs petits comme dans plusieurs
départements de médecine, chacun avec un projet différent,
on peut aussi créer une émulation entre les différents
services et ça peut générer beaucoup de motivation chez
les collaborateurs. S'ils sentent qu'ils sont impliqués dans un projet,
qu'il faut avancer et qu'ils savent qu'il y en a d'autres qui sont dans un
autre projet, qu'il y en a trois, quatre ou plus qui sont
intégrés dans l'hôpital ça donne vraiment une
impression que l'organisation apprend, qu'elle se développe, qu'elle a
une vision, qu'elle va vers quelque part.
Le type de structure et les enjeux que
représente l'hôpital nécessitent-ils des
aménagements spécifiques par rapport à ce type de
formation / d'accompagnement ?
Je travaille surtout dans de très gros hôpitaux
et ce que je voie beaucoup c'était des projets développés
en vase clos par une entité comme la direction des ressources humaines,
l'informatique, la pharmacie, le laboratoire, ... Ils développent des
choses en vase clos sans consulter, sans informer, et le jour où ils
sortent ça comme un projet les gens ne sont pas prêts et on a des
résistances alors que si on avait de la gestion du changement en
même temps qu'on développait le projet, il n'y aurait pas toute
cette résistance. Je vois beaucoup ça dans les hôpitaux.
Tout le monde est pris dans son truc et tout à coup il y en a un qui
arrive avec un projet tout ficelé prêt à être
implanté dans une unité mais l'unité n'a pas de place, le
cadre n'en peut plus de négocier. On donne un objectif, une date, un
budget et il faut que ça passe. C'est ce que je déplore dans le
monde hospitalier : beaucoup de travail en vase clos qui rendent les choses
difficiles.
EB : le fait que cela soit un patient en bout de ligne et
non un produit ou un client nécessite-t-il des ajustements
spécifiques ?
Le patient a de l'impact mais pas tant que ça. Le
patient n'est pas le même d'une unité à l'autre. La
pédiatrie, la gériatrie et la chirurgie n'ont pas la même
mission ou les mêmes patients. Il y a des nombreuses chapelles entre les
unités, les corps d'emploi, les spécialités. S'il pouvait
y avoir un projet unificateur, pas juste pour la chirurgie de la hanche, pas
juste pour la pharmacie mais qui réunisse plusieurs chapelles, plusieurs
services et plusieurs professions
144
ça pourrait être assez porteur d'une
collaboration intéressante. Chacun peut avoir son propre projet mais il
faudrait que chacun soit lié dans un projet plus global ou qu'ils aient
plus de visibilité. J'appellerais ça des projets levier qui
permettrait à l'hôpital de dire : « ça a
réussi, ça a été intéressant, tout le monde
s'est mobilisé. Vite on en veut un autre ! ». Le premier projet qui
va passer, il faut que ce soit un projet levier. Il faut qu'il soit
intéressant, il faut qu'il y ait des ressources, beaucoup de gens
impliqués pour être sûr que ce soit un succès. Il
faut qu'il donne une renommée à l'hôpital et à ceux
qui auront travaillé dessus. En bout de ligne ça va être un
moteur pour ceux qui suivraient. Je ne sais pas si c'est réaliste, je
parle de façon tout à fait abstraite quand je dis ça.
145
Annexe 14 : Interview professionnel accompagnement
Jérôme Carfantan ENTREVUE Jérôme Carfantan,
Auteur, conférencier et Coach Agile
Quel(s) accompagnement(s) spécifique(s)
pourrait être mis en oeuvre dans les établissements sanitaires sur
le long terme dans le cadre des changements à venir liés à
l'implantation croissante d'outils technologiques, notamment ceux dotés
d'intelligence artificielle ?
Quand je suis en accompagnement agilité, j'essaie de
d'abord de comprendre la culture de l'organisation et si cette culture est
propice à mettre en place des façons de travailler un peu
différentes. Si la culture n'est pas propice, il faut aller au plus haut
niveau de la hiérarchie pour essayer de comprendre pourquoi cette
culture traditionnelle à la hiérarchie très marquée
et au contrôle très fort est en place et essayer de coacher
à ce niveau-là, au niveau hiérarchique le plus haut pour
faire comprendre qu'il y a d'autres façons de faire et faire comprendre
que pour que ces autres façons de faire soient diffusées, il faut
avant tout être exemplaire sur ces sujets-là. Quand on ne montre
pas l'exemple : si tout le monde te vouvoie, si tout le monde se met au
garde-à-vous quand tu arrives dans un bureau, si tu montres cette
exemple-là, toute ta garde rapprochée va montrer cet
exemple-là et diffuser cette culture au sein de l'organisation.
L'agilité, ça ne fonctionne pas s'il n'y a pas
un terrain propice à cette culture de l'agilité. La culture de
l'agilité c'est l'entraide, le partage, l'exemplarité,
l'intelligence collective. Qui dit intelligence collective dit on se fait
confiance. On valide cette confiance par du feed-back régulier.
Ça c'est la culture, en quelques secondes, de l'agilité. Si le
terreau culturel de la structure n'est pas en ligne avec ça, on a un
problème. Traiter ce problème c'est faire du coaching de
dirigeant, je ne vois que ça. Tout le monde ne le fait pas.
Moi-même je ne le fais pas systématiquement. Si ce sont de petites
organisations, je peux le faire. Quand ce sont de grosses structures, je n'ai
peut-être pas le carnet d'adresse suffisant pour le faire. A terme,
j'arriverai peut-être y accéder. Le premier sujet, c'est donc
valider la culture et ce n'est pas le cas dans le milieu médical. C'est
peut-être par là qu'il faut commencer. Ensuite on peut commencer
à diffuser les pratiques.
En général on commence par un projet pilote. Il
ne faut pas qu'il soit trop simple ni trop confidentiel, suffisamment visible,
que le dirigeant le connaisse et sur lequel il ait envie de communiquer. Il ne
faut pas que cela soit trop compliqué non plus parce que si ça ne
fonctionne pas on pointera notre méthode comme étant la cause de
l'échec. Si c'est trop
146
simple on dira que de toute façon c'était
tellement simple que quelle que soit la méthode cela aura
fonctionné. Il faut donc trouver le bon projet pilote.
Ensuite, il faut trouver au sein de l'organisation les
personnes qui sont volontaires pour changer de façon de travailler. On
ne travaille pas avec celui qui n'a pas envie. Pour un projet pilote, on est
sûr de se planter. Une fois identifiées ces personnes et le projet
pilote, on communique avec eux sur la nouvelle façon de travailler. Une
fois que le projet a réussi. On communique de manière plus
globale sur la réussite du projet. Il faut faire attention à ce
qu'on entend par réussite d'un projet. En termes d'agilité ce
n'est pas : « ok je suis dans mon budget, dans mes délais dans le
périmètre que j'avais imaginé. » mais plutôt
est-ce que l'utilisateur final du produit qu'on a sorti est satisfait par
rapport à ce qu'on lui a délivré comme outil ou comme
service. S'il y a une vraie satisfaction en face, c'est une réussite. Si
c'est une réussite, tu communiques sur cette réussite en montrant
que l'utilisateur ou ton client est content.
Une fois que tu as fait ça tu vas essayer par
capillarité ou par effet virale essayer de le diffuser. Cela peut
prendre du temps. Cela va dépendre de la taille de la structure dans
laquelle tu arrives et de sa culture. Tu vas également suivre ce
changement de façon agile. Tous les deux mois par exemple tu vas faire
des rituels pour essayer d'identifier où tu en es, si tu dois pivoter,
si tu vas dans le bon sens, si on a choisi les bons projets. J'essaie de
synthétiser au maximum ce qu'on peut faire quand on est dans une
dynamique d'accompagnement au changement agile.
Le type de structure et les enjeux que
représente l'hôpital nécessitent-ils des
aménagements spécifiques par rapport à ce type de
formation / d'accompagnement ?
Concernant la dimension structurelle de création d'une
direction commune (il parle des groupements hospitaliers de
territoire), cela peut être contradictoire avec l'agilité.
L'agilité c'est aller vite dans les décisions et parfois, faire
appel à un centre d'achat qui ne va pas prendre ta demande en
priorité ou ne pas acheter le produit exact que tu avais demandé
parce qu'il a trouvé moins cher, ça ne correspond pas. Vouloir
regrouper, cela part toujours d'une bonne intention d'un point de vue
budgétaire mais souvent cela amène à une perte de
qualité, une perte de temps voire une perte de sens. L'aspect structurel
est aussi important. Il est parfois compliqué d'obtenir de simples
post-it ou un PC pour travailler avec un service achat centralisé avec
des process dans tous les sens pour tout. C'est plus facile à mettre en
place dans des petits établissements. Il faut peut-être commencer
par ça : montrer que ça peut fonctionner
147
dans un petit établissement et après essayer de
diffuser cela sur des établissements un peu plus conséquents.
L'agilité il ne faut pas vouloir commencer gros tout de suite.
L'idée c'est d'avoir du feed back et pour avoir du feed back il faut
commencer petit, apprendre de ce qu'on voit sur le terrain et en fonction on
ajuste. On ne vient pas avec des méthodes toutes faites. Il y a plein de
méthodes mais ce sont des méthodes qui s'adaptent, qui s'ajustent
au contexte.
Quelles adaptations suggérez-vous suivant les
familles de métiers : médicaux, paramédicaux et personnel
administratif ?
Ça ne va pas être le métier qui va
déterminer l'accompagnement. En revanche, derrière un
métier, il y a une culture avec des niveaux de hiérarchie plus ou
moins marqués. C'est la culture qui drive la façon
d'aborder l'accompagnement. Les médecins ayant une culture ouverte au
changement, c'est avec eux qu'il faut travailler. Il faut commencer par eux.
Eux ont l'habitude de se mettre à jour régulièrement, ils
sont curieux, c'est leur métier qui veut ça. Ils sont
obligés d'être à la pointe au niveau technologique, ils ont
besoin d'aller vite parce qu'ils ont des patients en face qui ont besoin de
réponses rapides parce qu'ils sont malades. C'est une population qui
à mon sens est une bonne candidate pour expérimenter des
façons de travailler différentes.
Le médecin a autre chose à faire que de penser
à une méthode de travail. Il a sa façon de travailler pour
soigner ses patients, pour le reste il sera ouvert. L'idée c'est de
faire une petite acculturation d'une demi-journée ou d'une heure ou deux
pour expliquer ce qu'il y a derrière l'agilité, ses
bénéfices. Il faut que ce soit raccord avec le reste de la chaine
de décision. Si ce n'est pas le médecin qui décide, tu as
beau l'avoir convaincu, il faut quand même aller voir la personne
décisionnaire sur le projet. Tu peux t'appuyer sur le médecin une
fois que tu l'as convaincu pour qu'il aille en parler à la bonne
personne.
Quoiqu'il arrive, il faut donner un rythme au projet. Il n'est
pas forcément nécessaire d'avoir une date de mise en place. Le
rythme fait que tu vas avoir plein de dates. L'agilité, c'est impulser
un rythme. Tous les deux mois on se voit et tous les deux mois on montre
quelque chose. On avance. Je dis deux mois mais cela peut être beaucoup
plus court. Si tu prends la méthode Scrum qui est la plus connue, ils
disent deux semaines. Toutes les deux semaines, on sait qu'on a un rendez-vous
durant lequel on va faire grandir le projet. C'est itératif et
incrémental. Ça permet d'avoir du feed back toutes les deux
semaines sur : « est-ce qu'on va dans la bonne direction ? ».
148
Ça me fait penser à un article que j'ai lu hier
sur SpaceX et Elon Musk. Ce type est fou. C'est un ingénieur hyper
intelligent. Il faut le connaître, c'est le nouveau Steve Jobs. S'il y a
un successeur, c'est lui. Il a entre autres 2 entreprises : Tesla,
désormais tout le monde connait, on commence à en voir de plus en
plus dans la rue et SpaceX. Son projet, c'est d'aller sur Mars. Il a une
vision. Sa vision, il n'a pas posé de date dessus. Il sait que, si
ça se trouve, lui n'ira pas mais il sait que l'humanité ira sur
Mars. Il n'a pas dit c'est dans 12 ans par exemple. Il a dit que
l'humanité irait sur Mars. Une fois qu'il a posé ça, tout
ce qu'il fait au quotidien, tout ce que font ses employés, c'est dans
cette direction-là. Donc en fait tu n'as pas besoin d'avoir une date
à 12 ans, tu as juste besoin de connaître la destination. C'est
quoi la destination d'un hôpital demain ? C'est ce qu'avait fait Kennedy
avec la Lune. Il a réussi à canaliser tout le monde pour aller
sur la Lune et ils l'ont fait. Certains vont dire qu'il ne l'a pas fait mais
c'est encore autre chose. Certains disent aussi que la terre est plate. Tout
ça pour dire que ce n'est pas tant la date qui importe et si elle est
lointaine, c'est la vision. Qu'est-ce qu'on veut faire ? Où on veut
aller ? Est-ce qu'on veut aller sur Mars ? J'aime bien cet exemple-là :
il est gros, il est grossier, peut-être qu'il ne le fera jamais mais en
tout cas il a une vision et a une histoire à raconter. Si on prend
Tesla, il y a peut-être un peu plus de 300.000 véhicules vendus
par an alors que Toyota en vend des millions et pourtant Tesla vaut plus sur
les marchés financiers en termes de capitalisation boursière. Il
a tellement une histoire à raconter que tous les financiers misent sur
lui pour ses voitures mais aussi pour aller sur Mars. En ayant ces
idées-là, il arrive à concurrencer Ariane Espace. Ariane
Espace ça existe depuis des dizaines d'années alors que SpaceX a
un peu plus de dix ans. Ils ont fait le premier vol habité il y a
quelques mois. Thomas Pesquet va bientôt repartir dans l'espace avec
SpaceX. C'est le principal partenaire de la Nasa aujourd'hui, concurrent et
partenaire. Si on prend Ariane 6, ils ont un projet, ils ont une date à
laquelle ils doivent sortir une fusée. Elon Musk, il n'a pas de date
mais il a un projet. Ce qu'il fait, c'est qu'il embauche les meilleurs en
faisant ça. Parce qu'il raconte une vraie histoire. Tous les
ingénieurs, aujourd'hui, si tu leur demandes s'ils
préfèrent travailler pour Ariane, pour la Nasa ou pour SpaceX, tu
peux être certaine que 99% des ingénieurs dans
l'aérospatial vont répondre que SpaceX, c'est quand même
plus sympa parce que chez SpaceX, on me raconte une vraie histoire. On a
éradiqué une chose chez SpaceX également, c'est la
bureaucratie. Elon Musk a une aversion à la bureaucratie et c'est
beaucoup ce qu'il y a derrière l'agilité. L'agilité c'est
un peu essayer d'enlever tout ce qui est bureaucratie. Tout à l'heure
quand je parlais des achats, je sentais que ça piquait un peu mais tout
ce qui est bureaucratie ça peut te gangrener une organisation, ça
empêche d'avancer. D'une manière générale, ce qu'il
faut retenir c'est que ce n'est pas la date qui importe, c'est la vision.
149
Elisabeth Berthelot : Il y a un présupposé
pour que cela fonctionne : c'est que le directeur doit avoir
énormément de charisme.
Oui ! Pour moi un directeur doit avoir
énormément de charisme. S'il n'en a pas c'est qu'il n'est pas
à sa place. Ce n'est peut-être pas le cas dans les hôpitaux,
je ne sais pas, je ne les connais pas. Le problème c'est qu'en France,
dans les directions, on a que des politiques et pour moi les politiques n'ont
pas forcément énormément de charisme. C'est un
problème. Ils sont souvent sur leur intérêt personnel par
rapport à leur plan de carrière et oublient
l'intérêt général. Elon Musk, encore une fois,
l'argent lui tombe dessus parce qu'il raconte une histoire. C'est ce qui manque
aujourd'hui : des gens qui racontent de vraies histoires. Pas des histoires
individuelles qui montrent qu'ils sont plus forts que le copain mais des
histoires pour embarquer tout le monde. Aujourd'hui, on n'a pas ça, quel
que soit le secteur.
Pourquoi tel type d'accompagnement plutôt qu'un
autre ? En quoi ce type d'accompagnement se distingue-t-il des autres
?
L'agilité, pour conduire le changement, n'a rien
inventé. On s'inspire de choses qui existent déjà. Les
façons de faire, tu les retrouves dans toutes les façons de
conduire le changement. Si tu as une culture du contrôle et de
non-exemplarité, que tu n'es pas agile, tu vas mettre en place une
conduite du changement traditionnelle qui ne sera pas efficace. La proposition
de valeurs de l'agilité c'est d'arrêter de croire que tout seul on
va y arriver. C'est dans la force du collectif qu'on va s'en sortir.
Croiser les compétences est une clef. Mettre les
experts ensemble pour qu'ils sortent un produit, il ne faut pas les cloisonner.
A la fin, ils portent un regard fier sur le produit collectivement.
Elisabeth Berthelot : Quelles différences y a-t-il
avec le co développement professionnel par exemple ?
L'agilité est un aspirateur à bonnes pratiques.
Le codéveloppement professionnel par exemple est une pratique agile. Il
y a un proverbe africain qui dit : « tout seul on va plus vite mais
ensemble on va plus loin. » et l'idée n'est pas d'aller plus vite
mais d'aller plus loin, d'aller sur Mars par exemple. L'idée est d'aller
plus loin vers une vision fédératrice qui embarque tout le monde.
Pour faire cela, on est obligé de le faire à plusieurs. Elon Musk
ne construit pas sa fusée tout seul dans son garage, il a
embauché les meilleurs pour le faire et pour embaucher les meilleurs, il
a raconté une histoire. J'en reviens toujours à lui parce que
c'est un bon
150
exemple. C'est en cela que l'agilité est
intéressante et passionnante, c'est qu'on ne prétend pas
détenir la vérité. Il y a déjà plein de
pratiques qui existent comme le codev. Quand on les découvre, si elles
vont dans le sens de ce qu'on souhaite mettre en place quand on veut être
agile demain on prend et on y va. S'il y a une habitude de faire ce genre de
choses dans l'organisation, on dit ok : on prend et on y va. Scrum est le
format de réunion agile le plus connu. On pourrait tout à fait
combiner le scrum et le codev. Il y a une réunion de résolution
de problème dans le Scrum et on pourrait se dire que pendant cette
réunion de résolution de problème on va faire un codev.
C'est totalement compatible. Dans Scrum, il y a plein
d'événements (ou réunions), on appelle ça des
itérations. A la fin d'un sprint ou itération, on a un meeting
qui va durer quelques heures en fonction de la taille du sprint, qui va
être dédié à résoudre les problèmes
qu'on a pu rencontrer pendant l'itération pour les résoudre et/ou
ne pas les rencontrer à nouveau sur les prochaines itérations. Il
y a cette dynamique d'amélioration continue dans l'agilité.
L'agilité, ce n'est surtout pas une méthode.
Certains disent que c'est un état d'esprit. C'est un état
d'esprit ET les pratiques qui vont avec. L'état d'esprit sans les
pratiques qui suivent ça n'a pas de sens et des pratiques sans
état d'esprit non plus. Il y a eu une définition dans les
années 90 qui disait : « C'est un moyen d'être performant
dans un environnement complexe. ». Aujourd'hui on est dans un
environnement complexe et incertain. Avec la digitalisation et l'intelligence
artificielle on a complexifié et rendu incertain plein de choses.
L'agilité est une réponse à ce climat d'incertitude et de
complexification. Ce sont des compétences à acquérir pour
une organisation, notamment la capacité d'apprendre mais aussi
d'oublier, de désapprendre. Apprendre c'est avant tout
désapprendre ce qu'on faisait bien hier mais qui n'est plus
adapté à notre monde aujourd'hui. C'est être en
capacité d'apprentissage permanent et de désapprendre ce qui nous
entrave. Et ce n'est pas parce qu'il faut le désapprendre aujourd'hui
que ce n'était pas bien de le faire hier.
L'agilité vient du monde de la stratégie
d'entreprise. En 2001, il a été repris par le monde de l'IT, par
des experts de l'informatique qui ont inventé des façons de
travailler différentes qui permettent de satisfaire le client. Ces 17
experts ont rédigé un manifeste agile. C'est là que le mot
agile a pris toute sa dimension et a pris corps, avec toutes les pratiques
qu'ils avaient mis en place. Ils avaient plusieurs méthodes,
différentes, qui fonctionnaient et se sont demandé quel
était le dénominateur commun. Ces dénominateurs communs,
ils les ont mis noir sur blanc dans un manifeste agile qu'ils ont
rédigé et signé et qui tient sur une feuille A4. Ce
manifeste agile, c'est ce dont je parlais sur la culture : c'est le partage,
c'est l'entraide. L'idée c'est l'intelligence collective plus que les
processus et les outils. On retrouve les concepteurs de Scrum, de eXtrême
Programming (XP), Rational Unified Process (RUP), Dynamic Systems
151
Development Method (DSDM) et d'autres. Tout ça c'est
hérité de la pensée Lean qui vient de Toyota pour
éviter les gaspillages, mettre en place un flux d'activité qu'on
peut visualiser, faire de l'amélioration continue, etc. Il y a
l'approche Kanban qui est très connue aujourd'hui qui hérite
totalement du Lean. Encore une fois, l'agilité est un état
d'esprit et une éponge à bonnes pratiques.
Mon métier est passionnant parce qu'on touche à
de l'organisationnel, à du structurel, à de l'intelligence
collective d'équipe, à de l'individuel aussi : on peut faire du
coaching individuel pour essayer de comprendre des blocages. Quand on est sur
de l'individuel, on apprend aussi de la psychologie. C'est juste passionnant.
La base de tout, ce sont les échanges.
152
Annexe 15 : QUESTIONNAIRE VIERGE CONCEPTEUR DE SOLUTIONS
IA
Rappel des éléments contextuels :
· Mémoire RH Elisabeth Berthelot
· Sujet du mémoire :
Quels sont les rôles et missions de la fonction RH
pour mettre en oeuvre les formations liées à l'impact de la
diffusion de nouvelles technologies dotées d'intelligence artificielle
sur certains métiers dans le plan de développement des
compétences des établissements de santé en France
?
· Public concerné : Jury de DRH ne
connaissant pas spécifiquement les questions d'intelligence artificielle
ni le secteur santé
La transcription de l'entretien sera annexée au
mémoire. Elle peut être rendue anonyme.
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