En fonction des impacts (positifs/négatifs)
des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur
métier, comment les médecins sont-ils / seront-ils
accompagnés ?
Oui, ils sont accompagnés. Cela fait partie
intégrante de leur mission et de leur quotidien donc il faut absolument
qu'ils maitrisent l'outil dans le cadre de leur fonction.
On a travaillé sur des parcours
d'intégration pour les médecins qu'on a mis en place en
2017. On accompagne les médecins dans l'utilisation du dossier patient.
Le médecin est à la base du dossier patient. Si la prescription
n'est pas faite du traitement médicamenteux, si on ne prescrit pas les
actes ou les consultations et s'il ne saisit pas ses observations
médicales dans le dossier patient, on est quand même très
embêté. C'est essentiel dans leur métier. Au cours de ce
parcours d'intégration, il y a une partie binôme avec le
médecin titulaire qui va présenter l'organisation du quotidien du
médecin et il va y avoir après un temps de formation à
l'outil informatique. En fonction de la spécialité de nos
services, ce parcours est plus ou moins long. Il est adapté. Certains
services sont plus techniques, avec des prescriptions et demandent plus de
formation.
En fonction des impacts (positifs/négatifs)
des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur
métier, comment les professions paramédicales, infirmiers plus
spécifiquement sont-ils / seront-ils accompagnés ?
C'est la même chose pour les paramédicaux. On a
des parcours d'intégration pour les Infirmiers et les aides-soignants,
en binôme avec une infirmière titulaire et en formation avec la
cadre de santé ou une infirmière « tuteur » qui
s'occupe de l'intégration aux outils
108
informatiques. Il faut que l'infirmière sache remplir
ses transmissions dans un dossier patient, sache compléter un plan de
soin puisqu'à chaque fois qu'une infirmière donne un
médicament à un patient, il faut que ce soit saisi dans le
dossier patient. Il faut que tout ça soit fait, il faut qu'elle sache le
faire et il faut qu'on lui donne les moyens de savoir le
faire. Ça fait partie de ce qui est effectué en
journées d'intégration.
Les parcours d'intégration, c'est ce qu'on fait au
quotidien. Quand on a déployé l'outil, on a pris des
référents, des personnes qui se sont portés volontaires
pour être formés par le prestataire concepteur du
logiciel, accompagnés des cadres de santé. Tous nos cadres de
santé sont référents sur le dossier patient
informatisé. Il y a également deux IDE117. Tous ont
été formés, moi aussi parce que je me suis dit que, dans
le cadre de ma fonction, il fallait impérativement que je sache comment
ça fonctionne. Une fois que nos référents ont
été formés par notre prestataire, on a
déployé des formations en interne en binôme cadre de
santé/IDE. On a formé toutes nos équipes de titulaires et
nos vacataires long terme dans des mini formations. On a créé des
parcours parce que c'était assez conséquent en termes de
compétences à acquérir. On l'a fait sous forme de mini
formations pour que ce soit interactif et ludique avec des mises en situation.
On a mis des ordinateurs à disposition, ils ont pu essayer avec un
dossier test sur lequel on pouvait faire n'importe quoi et ça permettait
de pratiquer comme ça.
On a fait un premier parcours qui était
l'environnement du dossier : montrer globalement comment ça se
présentait : la page d'accueil, les différents liens, le portail
médical, tout l'environnement global. Après, on est rentré
dans le détail. Pour les IDE ce qui était important
c'était de savoir où aller trouver les transmissions, comment
saisir une transmission, voir ce qu'il y a dans un plan de soin : le traitement
médicamenteux, les prescriptions du médecin en termes d'actes. Le
troisième niveau était optionnel pour apprendre à utiliser
l'agenda et ainsi savoir où est le patient. Ce n'est pas essentiel mais
c'est intéressant de savoir le faire.
Les cadres ont fait partie intégrante du
projet, même dans la phase de recherche et de sélection
du prestataire. Quand on a choisi le prestataire et qu'on s'est retrouvé
à la réunion de lancement en 2016, avant le déploiement,
il fallait mettre à plat tout notre fonctionnement papier. Un jour on
est arrivé, notre prestataire nous a dit qu'il leur fallait tous nos
papiers. On a tout mis sur la table. On s'est retrouvé avec une
quantité de papier incroyable. On s'est rendu compte du nombre de
papiers qu'il y avait. Elles - je dis elles car il s'agit de femmes - ont fait
partie du process au même titre que le médecin
référent qui venait en représentation de tous
117 Infirmier Diplômé d'Etat
109
les autres médecins. Ça s'est fait avec
eux. J'étais toujours présente également avec le
responsable informatique. On a pris les décisions ensemble.
Comme il y a quatre services et qu'il y a eu vraiment beaucoup de
réunions, tous ne pouvaient pas être systématiquement
présents donc on a créé des groupes de travail par
service. Je n'ai pas pris de consultant externe, on a vraiment
géré ça en interne avec notre prestataire. Ce
moment-là nous a permis de nous réorganiser puisque ça
nous a demandé de revoir complètement l'organisation de nos
services. On l'a fait ensemble. La casquette que j'avais de consultante m'a
bien servie puisque c'est moi qui ai piloté tout le projet. On l'a
vraiment fait ensemble.
Là où on a eu des difficultés,
c'était avec nos professionnels libéraux (médecins
spécialistes et kinésithérapeutes). Là
c'était compliqué parce que c'était des personnes qui se
sentaient moins impliquées, elles viennent de façon ponctuelle.
Il a fallu les impliquer dans le process. Ils ont eu beaucoup de mal à
passer du papier à l'informatique. Il a fallu bien accompagner. C'est
moi qui m'en suis occupé et ça a pris du temps. C'était la
plus grosse difficulté et le changement a été complexe
pour les professionnels terrain, surtout les médecins, qui comptaient le
nombre de clics. Ils m'ont dit que ça avait vraiment fait évoluer
leur métier.
En fonction des impacts (positifs/négatifs)
des nouvelles technologies et de l'intelligence artificielle sur leur
métier, comment le personnel administratif, dont les secrétaires
médicales/agents d'accueil, sont-ils / seront-ils accompagnés
?
Leur parcours d'intégration a été
vraiment revu car ce n'est pas simple d'utilisation sur la partie gestion. Il y
a des journées d'intégration qui sont vraiment
nécessaires. On a essayé de former un maximum de personnes pour
mutualiser les compétences et ne pas avoir une seule et unique personne
qui sache faire chaque tache : par exemple un agent d'accueil qui sache faire
l'accueil, une secrétaire qui sache faire l'admission. On a
essayé de les former à plusieurs profils, pas tous non plus car
ce serait trop compliqué, mais au moins à deux
compétences. On arrive ainsi à les remplacer plus facilement.
On n'a pas eu de réfractaires mais des personnes qui
ont eu des difficultés à utiliser l'outil. Les personnes savent
que de toute façon on n'a pas le choix donc elles l'ont fait. Il y a
effectivement des personnes qui sont là depuis longtemps, qui ont leurs
habitudes et qui voient leur métier et leur fonction évoluer. Ce
n'était pas simple mais il y a eu pas mal d'accompagnement des managers
sur les profils administratifs et pas que des formations. Pendant plusieurs
jours, un référent est resté à côté
d'une personne à l'accueil ou à la facturation pendant des jours
entiers pour bien l'aider à manipuler l'outil.
110
EB : vous avez tout misé sur la formation aux
outils pour qu'ils soient à l'aise et avec du temps et de
l'écoute.
Oui. Ça a été lourd et difficile. Ces
formations prennent du temps. On a 150 personnes sur la clinique. Ça
fait vraiment beaucoup de temps. On accompagnait un maximum de fonctions
différentes le même jour parfois parce qu'on ne voulait pas que
certains aient le sentiment d'être privilégié ou pas par
rapport à d'autres. Il fallait que tout le monde se sente
accompagné. C'est une période qui a été très
fatigante et très éprouvante.
Aujourd'hui l'outil est bien en place. On est dans
l'optimisation maintenant et c'est intéressant. On est dans
l'optimisation en termes de gestions et de pilotage mais aussi optimisation de
l'outil. On essaie de voir comment on peut le manipuler autrement parce qu'on
le connait mieux : pour essayer de gagner du temps, pour privilégier
notre relation soignant/ soigné et de le perfectionner en interne. Ce
qui est compliqué avec l'outil, c'est que ce n'est pas lui qui va
s'adapter à l'établissement, on n'a pas le choix, c'est
l'établissement qui s'adapte à l'outil et on ne nous l'avait pas
vendu comme ça. On pensait leur donner tous nos dossiers papier pour
qu'ils les paramètrent et que ça ne changerait pas. En fait, ce
n'est pas du tout ça ! Il y a eu cette période de flottement
où on ne se retrouvait plus dans ce fonctionnement et il a fallu qu'on
apprenne à fonctionner avec cet outil. C'est nous qui nous sommes
adaptés à l'outil et pas le contraire. Ça a
été une refonte complète de notre organisation.
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Annexe 7 : Interview DRH Perrine Cainne
ENTREVUE PERRINE CAINNE, Directrice des Ressources Humaines
du Centre Hospitalier d'Arcachon