SECTION I : EN REGIME PRESIDENTIEL
Cette section, consacrée à l'analyse des
modalités pratiques de toutes les désignations des premiers
ministres connus par la République démocratique du Congo depuis
son indépendance jusqu'à ces jours en régime
présidentiel, sera analysée en se basant sur les
Républiques connues par la République
démocratique du Congo depuis son indépendance jusqu'à nos
jours.
Etudier les différents régimes qui se sont
succédés en les qualifiant de
République77 ne fait pas l'unanimité de la
doctrine, car la partie qui s'en oppose estime que définir la
République comme le régime politique où le
pouvoir est chose publique, implique bien entendu que ses détenteurs
l'exercent non en vertu d'un droit propre (droit divin ou
hérédité), mais en vertu d'un mandat
conféré par le corps social.78 Ce qui rend incorrect,
selon cette partie de la doctrine, cette appellation liée au changement
de régime, étant donné que la République
démocratique du Congo a connu, depuis son indépendance à
ces jours, plus des régimes dictatoriaux que ceux
démocratiques.79
De ce qui précède, une question demeure
pendante, celle de savoir si la numérotation des Républiques
doit suivre soit le changement des dirigeants à la tête de
77 PICOTTE J., Juridictionnaire, Centre de
traduction et de terminologie juridiques, 2005, p. 1433.
78 GUINCHARD S., Lexique des termes
juridique, Paris, 19ème édition, 2012, p. 753.
79 Ici nous faisons référence aux
représentants du peuple, élus par ce dernier pour un temps et
responsables devant toute la nation, en d'autres termes, un Etat qui met au
centre du pouvoir le peuple, souverain primaire.
34
l'Etat (même après un coup d'Etat), les
révisions constitutionnelles, l'établissement de nouvelle
constitutions ou le changement des fondements philosophiques des régimes
?
Dans le cadre de notre étude, nous avons opté
pour le cumul de tous ces éléments80 pour parler du
changement de République. Pour ce faire, nous allons analyser
successivement les particularismes liés à la désignation
de tous les premiers ministres congolais dans la première
République (§1), la deuxième République (§2) et
la troisième République (§3).
§1. Désignation du premier ministre dans
la première République
L'accession de la République démocratique du
Congo à la souveraineté internationale ou son indépendance
marque le début de la première République ;
caractérisée par la naissance d'un Etat, qui jadis n'était
qu'une colonie sous tutelle de la métropole. La première
République a été aussi caractérisée par la
présence des animateurs illégitimes ou non élus à
la tête des institutions de la République, outre les rares
élections locales vécues à partir du 08 décembre
1957, date qui coïncide avec l'organisation, dans certaines villes et
communes, des premières élections municipales.81
Ce faisant, nous analyserons la procédure de la
désignation du premier ministre dans la première
République sous le régime de la constitution du 1er
Août 1964, qui est la seule constitution à avoir consacré
un régime présidentiel dans la première République
; tout en faisant la mise au point sur le respect ou non des prévisions
constitutionnelles en rapport avec la désignation et la nomination du
premier ministre.
80 C'est-à-dire le changement des dirigeants
à la tête de l'Etat (même après un coup
d'Etat), les révisions constitutionnelles, l'établissement
de nouvelle constitutions ou le changement des fondements philosophiques des
régimes.
81 ESAMBO KANGASHE J-L., Le droit
électoral congolais, Academia-L'Harmattan, Louvain-la-Neuve, 2015,
Avant propos.
35
DESIGNATION DU PREMIER MINISTRE SOUS LE REGIME DE
LA CONSTITUTION DU 1er AOUT 1964
La constitution du 1er août 1964, dite la
constitution de Luluabourg a été élaborée par
l'application des articles 382 et 483 de la Loi
fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo.
En effet, les articles 3 et 4 de la Loi fondamentale
décrivent cette dernière comme étant une constitution
provisoire ; par conséquent, il appartenait alors au pouvoir constituant
(le chef de l'Etat et les deux chambres parlementaires)
d'élaborer une constitution définitive, qui a été
la constitution de Luluabourg du 1août 1964.84
Cette constitution définitive soumise au referendum du
25 juin au 10 juillet 1964, et promulguée le 1er août
1964 avait pour ambition de vider toutes les ambigüités de la Loi
fondamentale en mettant en place un régime
présidentiel85 avec même un glissement
présidentialiste.86Le président Joseph KASA VUBU
étant resté seul maitre de bord, il n'était pas
étonnant qu'il puisse aménager, à travers la commission
constitutionnelle qu'il avait mise sur pied en lieu et place du pouvoir
constituant prévu par la Loi fondamentale, une commission lui
conférant des larges pouvoirs en tant que chef de
l'exécutif.87 Ce faisant, c'est lui qui nomme le premier
ministre et les autres membres du gouvernement88sans aucune autre
procédure préalable de sa désignation par une autre
institution que le président de la République.
82 Cet article dispose que « les
dispositions qui suivent resteront en vigueur jusqu'à la mise en place
des institutions publiques qui auront été organisées par
la constitution ».
83 L'article 4 dispose que « le chef de
l'Etat et les deux chambres composent le pouvoir constituant »
84 La Section IV de la Loi fondamentale traite de
l'élaboration de la constitution, c'est-à-dire, de la
procédure à suivre pour l'élaboration de la constitution
définitive. Cependant, la Loi fondamentale n'a pas été
appliquée à la lettre dans l'élaboration de cette
constitution définitive. L'Ordonnance n°278 du 27 novembre 1963
avait créé une commission nationale chargée
d'élaborer la nouvelle constitution. Le chef de l'Etat s'était
passé des deux chambres, qui ont refusé d'appliquer le programme
du chef de l'Etat dans l'élaboration de cette constitution.
85 PROMONTORIO V., les institutions dans la
constitution congolaise, Kinshasa, Concordia, 1964, p. 117.
86 ALBERTINI, Le droit de dissolution et le
système constitutionnel français, Cité par DJOLI
ESENG'EKELI J., Droit constitutionnel Tome II : l'expérience
congolaise, op.cit., p. 96.
87 DJOLI ESENG'EKELI J., Idem.
88 Article 65 de la constitution de Luluabourg du
1er août 1964, Moniteur congolais, numéro
spécial du 1et août 1964.
36
Il faut aussi noter que cette constitution a
présidé la nomination d'un premier ministre qui a
été contesté par le parlement89 ; ce qui a
été à l'origine même du blocage des institutions
politiques par des graves conflits mis fin par le coup d'Etat du
Haut-Commandement de l'armée ; alors que cette constitution, outre les
mécanismes de contrôle parlementaire, entre autres la question
orale ou écrite, l'interpellation, l'audition par les commissions, la
commission d'enquête, l'avertissement ou la remontrance, n'avait pas
consacré la responsabilité politique90 du gouvernement
devant le parlement.91
Telle est l'économie de la première étape
de l'application des dispositions constitutionnelles de la première
République, à savoir lors du règne du président
Joseph KASAVUBU.
Cependant, le coup d'Etat du président
Joseph-Désiré MOBUTU, ayant marqué le début de la
deuxième République92, a consacré la
continuité des anciennes institutions politiques de la République
et la constitution de Luluabourg. Ce faisant, on peut alors parler de la
deuxième étape de l'application ou de l'emprise de cette
constitution.93
89 L'application de cette constitution a
été qualifiée par la doctrine d'impossible : le 13 octobre
1965, lors de son discours d'ouverture parlementaire, le président de la
République destitue le premier ministre sur base de l'article 54 de la
constitution et annonce la désignation d'un formateur du gouvernement en
la personne d'Evariste KIMBA, qui sera rejeté par le parlement le 18
octobre 1965 et sera désigné de nouveau par le président
de la République comme premier ministre et provoqua une crise qui
conduisit le Haut-Commandement à prendre le commandement de la
nation.
90 Cependant l'article 66 de cette constitution
donne le pouvoir d'approbation du gouvernement au parlement avant son
installation. Ce qui fait que si le parlement ne donne pas sa confiance au
gouvernement nouvellement nommé par le président de la
République, ledit gouvernement est réputé
démissionnaire. Ce faisant, nous estimons que le régime politique
institué par cette constitution n'est pas totalement
présidentiel, puisque ayant certains éléments du
régime parlementaire (la confiance du parlement au gouvernement
institué) mais un régime mixte, principalement un
régime semi-présidentiel, avec d'un côté le pouvoir
absolu du président de la République (Cfr les articles 54
à 63 de la Constitution) et de l'autre côté le pouvoir
du parlement de limité dans une certaine mesure ce pouvoir absolu du
président de la République par son approbation du premier
ministre nommé par le président ainsi que tout son
gouvernement.
91 Article 69 de la Constitution de Luluabourg,
Idem.
92 Ce coup d'Etat était justifié par
le Haut-Commandement de l'armée comme étant une solution au
blocage des institutions politiques du pays par les dirigeants politiques,
qualifié par l'armée « d'une lutte stérile pour
accéder au pouvoir sans aucune considération pour le bien
être des citoyens ».
93 Dans cette deuxième étape de
l'application de la constitution de Luluabourg, nous avons deux nominations des
premiers ministres conforment aux prévisions constitutionnelles : du 25
novembre 1965 au 26 octobre 1966 c'est Monsieur Leonard MULAMBA qui
était chef du gouvernement ; entre 1966 et 1977 le président de
la République avait installé un conseil exécutif.
37
§2. Désignation du premier ministre dans
la deuxième République
La deuxième République a été
inaugurée par le coup d'Etat du président
Joseph-Désiré MOBUTU, qui a, au début de son règne,
semblé maintenir la constitution de Luluabourg en vigueur,
(malgré son acte de coup d'Etat, qui est une remise en cause totale
de l'ordre constitutionnel) ainsi que les anciennes institutions de la
première République94jusqu'en juin 1967.
En effet, parler de la deuxième République
revient à parler du régime Mobutu, qui a inauguré et
clôturé cette deuxième République La deuxième
République a été en grande partie sous l'emprise de la
constitution du 24 juin 1967, qui a abrogé la constitution de Luluabourg
et qui semble avoir été l'élément
déterminant ce qui concerne la légalité du régime
Mobutu, qui était jusqu'en 1966 encore illégal et
illégitime.95
Cette constitution a subi des multiples
révisions96, qui ont eu des grandes incidences sur la forme
de l'Etat et la nature du régime politique97 en place.
94 MOBUTU SESESEKO WAZABANGA J-D., Discours,
allocutions et messages, Tome I, Proclamation du Haut-Commandement
militaire des Forces Armées du 24 novembre 1965, p. 14.
95 C'est une des raisons d'être de cette
constitution, car selon une portion de la doctrine, principalement les
constitutionalistes congolais ; ce nouveau régime ne s'accommodait pas
avec l'ancienne constitution. Il fallait donc mettre en place une nouvelle
constitution qui devra poser des nouvelles conceptions du pouvoir et
l'organisation politique et administrative de l'Etat.
96 Cette constitution a connu au moins 17
révisions selon Jacques DJOLI ESENG'EKELI dont les principales sont les
suivantes : La loi du 23 décembre 1970 consacrant
l'institutionnalisation du MPR ; la loi du 15 août 1974 instituant le
Mobutisme comme doctrine du MPR et consacrant la plénitude de l'exercice
du pouvoir par la président de la République et la loi du 15
février 1978 libéralisant l'exercice du pouvoir au sein du
MPR.
97 Notamment avec la révision de 1974 qui a
institué le mobutisme et a consacré un régime politique
adopté est authentiquement Zaïrois (Cfr le Titre 1er
de cette constitution révisée), un régime politique
sui generis qui ne comprend qu'une seule institution, le MPR, qui
détient la plénitude du pouvoir dont le président est
l'incarnation. Il y a aussi la Loi n°002/90 du 05 juillet 1990 portant
révision de certaines dispositions de la Constitution du 24 juin 1967,
qui a révisé et complété la constitution, notamment
en instituant une sorte de multipartisme limité à trois partis
politique ; et la Loi n°90-008 du 25 novembre 1990 portant révision
d'une disposition de la constitution, qui a consacré le multipartisme
intégral que la Loi du 05 juillet 1990 avait limité à
trois partis.
38
DESIGNATIONS DU PREMIER MINISTRE SOUS LA CONSTITUTION
DU 24 JUIN 1967
La lecture de cette constitution98 nous
amène à estimer que cette constitution a consacré un
régime présidentiel99 ou mieux un régime de
type présidentialiste'°° ; c'est pourquoi le
pouvoir du président de la République était fortement
renforcé'°', notamment par toutes les révisions
qu'a subi cette constitution et même la procédure des pleins
pouvoirs lorsque graves événements menacent d'une manière
immédiate la nation.'°2 Si certains ont vu dans une
telle attitude le souci réel d'assurer la survie ainsi que la
stabilité des institutions, il sied que cette logique ne pouvait
qu'être une consécration d'un pouvoir de fait qui devrait
inéluctablement conduire à des abus et à
l'arbitraire.'°3
De ce fait, on peut déjà imaginer ce que
pourraient être les modalités de la désignation du premier
ministre et les autres membres du gouvernement dans un tel régime.
Effectivement le premier ministre et les autres membres du gouvernement sont
directement nommés et révoqués par le président de
la République'°4dont il est lui-même
chef.'°5
A cela, l'histoire politique de la République
démocratique du Congo fait état de sept nominations de premiers
ministres sous l'emprise de cette constitution'°6et que l'on
peut qualifier de nominations constitutionnelles.
98 Principalement les articles qui régissent
les relations entre les pouvoirs à savoir, de l'article 20 à
l'article 55 de ladite constitution.
99 C'est aussi le point de vue de Jacques DJOLI
ESENG'EKELI, lorsqu'il estime que le régime présidentiel est
celui qui, en assurant au maximum l'indépendance des pouvoirs,
réalise leur séparation la plus complète.
100 ESAMBO KANGASHE J-L., Traité de droit
constitutionnel congolais, Paris, L'Harmattan, 2017, p. 203.
101 Cfr le Mémoire explicatif du projet de Constitution
établi sur la base des textes de l'avant projet présenté
au président de la République et sur base des discutions de la
Commission politique du gouvernement, Journal officiel de la République
du Zaïre, Moniteur congolais n°14 du 17 juillet 1967.
102 Article 54 de la constitution du 24 juin 1967.
103 DJOLI ESENG'EKELI J., Droit constitutionnel Tome II :
l'expérience congolaise, op.cit., pp. 113-114.
104 Article 29 de la constitution du 24 juin 1967
105 Article 30 Idem.
106 Ces nominations sont les suivantes : du 06 juillet 1977 au
06 mars 1979 le premier ministre était Monsieur MPINGA KASENDA ; la
période allant du 06 mars 1979 au 27 août 1980 était sous
l'autorité de Monsieur BO-BOLIKO LOKONGA comme premier ministre ; entre
le 27 août 1980 et le 23 avril 1981 le gouvernement avait à sa
tête Monsieur Jean-NGUZA KARL-BLOND ; du 23 avril 1981 au 05 novembre
1982 c'était Monsieur Joseph UNTUBE N'SINGA UDJUU, qui était le
chef du gouvernement ; entre le 05 novembre 1982 et le 31 octobre
39
La fin de la deuxième République a
été marquée par une longue période de transition
régie par plusieurs textes à valeur constitutionnelle
qualifiés de « constitutions de la transition ».
§3. Désignation du premier ministre
pendant la transition (avec un penchant vers le
présidentialisme)
La transition peut être définie comme le
processus de transformation qui fait passer un système autocratique vers
une gouvernance démocratique. Autrement dit, une constitution de la
transition est un chef-d'oeuvre dans le domaine de la démocratisation de
la vie politique en République démocratique du
Congo.107
Ces constitutions ont été
élaborées à la suite de la crise politique et/ou militaire
par les accords politiques qui en constituent, par ailleurs, le fondement ;
elles apparaissent provisoires, circonstancielles et tournées vers la
gestion épisodique du pouvoir politique.108
La République démocratique du Congo a connu sa
transition entre 199O et 2006 (qui prend fin par la promulgation de la
constitution du 18 février 2006), qui, selon une partie de la
doctrine, est partagée en trois grandes périodes, à
savoir, la transition disputée, la transition imposée ou
autoritaire et la transition partagée.109 Cependant, il faut
noter que les modalités de la désignation du premier ministre
telles que prévues dans ces textes majeurs à valeur
constitutionnelle pris pendant toute la transition peuvent être
analysées selon le régime politique consacré par chacun de
ces textes constitutionnels.
1986, la primature était gérée par
Monsieur KENGO WA DONDO ; du 27 janvier 1987 au 07 mars 1988 Monsieur MABI
MULUMBA était le premier ministre ; entre le 07 mars 1988 et le 26
novembre 1988 le gouvernement avait pour premier ministre Monsieur SAMBWA PIDA
NBANGUI et enfin entre le 26 novembre 1988 et le 04 mars 1990, c'est Monsieur
KENGO WA DONDO était revenu à la primature.
107 MUKUBI KABALI KAMANGO P., Constitution de la
transition : ses questions essentielles, Kinshasa, Ed. ITONGOA, 2003, p.
9.
108 ESAMBO KANGASHE J-L., Traité de droit
constitutionnel congolais, op.cit., p. 40.
109 DJOLI ESENG'EKELI J., Droit constitutionnel Tome II :
l'expérience congolaise, Idem.
40
A. LA LOI N°002/90 DU 05 JUILLET 1990 PORTANT
REVISION DE CERTAINES DISPOSITIONS DE LA CONSTITUTION DU 24
JUIN 1967
Cette loi a été promulguée dans le souci
d'appliquer les décisions prises par le président
Joseph-Désiré MOBUTU lors de son discours du 24 avril 1990,
axé sur l'introduction du multipartisme à trois et le pluralisme
syndical, l'abolition de l'institutionnalisation du MPR comme parti-Etat,
l'instauration d'une période de transition allant jusqu'au 30 avril 1991
et l'élaboration par une Commission Constituante d'une constitution
définitive devant être soumise à un referendum et
appelée à régir la troisième
République.110
Cette loi a maintenu la même nature du régime
politique consacrée par la version initiale de la constitution du 24
juin 1967 outre les éléments du régime parlementaire
contenus dans cette loi constitutionnelle111, qui ne sont que de
façade, sans commune mesure avec la réalité du pouvoir qui
est restée concentrée entre les mains du président de la
République en dépit de la restauration du multipartisme à
trois.112
Pour ce qui est de la désignation du premier ministre,
un seul premier ministre, nommé par le président de la
République, a régné pendant cette première
période de transition connue par la République
démocratique du Congo, à savoir Monsieur Vincent de Paul LUNDA
BULULU ; et sa nomination a été conforme aux prescrits de la
constitution du 24 juin 1967.
Cependant, la période suivant cette première
transition (c'est-à-dire entre avril 1991 et août 1992) a
été marquée par la nomination de quatre premiers
ministres.113
110 Contenu global de l'exposé des motifs de la Loi
n°002/90 du 05 juillet 1990 portant révision de certains articles
de la constitution du 24 juin 1967.
111 Notamment la responsabilité du gouvernement devant
l'assemblée nationale, l'unique chambre du Parlement (article
52), le contrôle parlementaire sur le gouvernement et cela sans
possibilité de motion (de défiance ou de censure)
112 IMBAMBO LA NGANYA J-R., cité par DJOLI ESENG'EKELI
J., Droit constitutionnel Tome II : l'expérience congolaise,
op.cit., p. 137.
113 Entre le 1er avril 1991 et le 29 septembre
1991, le chef du gouvernement était Monsieur MULUMBA LUKOJI ; du 29
septembre 1991 au 1er novembre 1991, Monsieur Etienne TSHISEKEDI
était à la tête du gouvernement ;
41
B. L'ACTE PORTANT DISPOSITIONS CONSTITUTIONNELLES
RELATIVES A LA PERIODE DE TRANSITION DU 04 AOUT 1992
Cette constitution a été élaborée
sur base des grandes lignes du discours du président de la
République du 24 avril 1990 et sur base de la configuration
institutionnelle consacrée par la Loi n°002/90 du 05 juillet
1990114, à la seule différence que, le gouvernement
est désormais dirigé par un premier ministre, responsable devant
le Haut conseil de la République, assumant également les
fonctions législatives et de contrôleur de l'exécutif, des
entreprises publiques et des services publics.115
Cependant, il s'est avéré que pour des raisons
politiques116, l'Acte en question n'a pas été
signé conjointement par le président de la CNS et le
président de la République, et surtout n'ayant pas
été promulgué par le président de la
République, et par conséquent non publié au journal
officiel. Il est donc considéré comme un texte
inexistant.117
Cela étant, nous pouvons affirmer que c'est la
constitution du 24 juin 1967 telle que modifiée et
complétée qui demeurait toujours en vigueur pendant cette
période. Et c'est sur base de cette constitution que le 19 août
1992, le président de la République a pris une ordonnance nommant
Monsieur Etienne TSHISEKEDI premier ministre, après avoir
été élu118 par la Conférence nationale
souveraine le 14 août de cette même année.
la période allant du 1er novembre 1991 au 25
novembre 1991 était sous la gouvernance de Monsieur Bernardin MUNGUL
DIAKA comme premier ministre et en fin entre le 25 novembre 1991 et le 15
août 1992, c'est Monsieur Jean NGUZA KARL-BLOND, qui était
à la tête de la primature.
114 A savoir les institutions de la République sont :
le Président de la République, l'Assemblée nationale, le
Gouvernement et les Cours et tribunaux.
115 ESAMBO KANGASHE J-L., Traité de droit
constitutionnel congolais, op.cit., p. 45.
116 Ces raisons peuvent être résumées par
le simple fait que le président Joseph-Désiré MOBUTU n'a
pas voulu consacrer le début du dépouillement de ses
prérogatives constitutionnelles et de son pouvoir.
117 DJOLI ESENG'EKELI J., Droit constitutionnel Tome II :
l'expérience congolaise, op.cit., p. 140.
118 Cette élection préalable d'un candidat
premier ministre avant sa nomination par le président de la
République était une innovation dans l'histoire politique
congolaise et en droit positif congolais et cela était du au fait que
seul la CNS convoquée par la président de la République
était le regroupement qui pouvait parler au nom du peuple et de ce fait,
elle a élu Monsieur Etienne TSHISEKEDI à 70,8% des voix contre
Messieurs Thomas KANZA et Clément KANKU, ses adversaires.
42
Il sied de noter que nous allons ignorer dans le cadre de
cette étude, l'analyse du Décret-loi n°003 du 27 mai 1997
relatif à l'organisation et à l'exercice des pouvoirs publics en
République démocratique du Congo, en raison de son organisation
de l'exercice du pouvoir où le chef de l'Etat lui-même joue le
rôle du chef du gouvernement119 ; et par conséquent
cette constitution n'a pas prévu les fonctions du premier ministre.
Il en est de même concernant l'analyse de la
désignation du premier ministre dans la constitution de la transition du
04 avril 2003 approuvée et adoptée par la Plénière
du Dialogue inter congolais le 1er avril 2003 à Sun City en
RSA, et promulguée par le président Joseph KABILA.120
Cette constitution a vu le jour dans un contexte post-conflit que
prétend gérer l'Accord global et inclusif sur la transition
politique en République démocratique du Congo121, la
constitution du 04 avril 2003 aménage, de manière
singulière, les pouvoirs publics avec en toile de fond le partage des
responsabilités entre composantes et entités au dialogue inter
congolais.122
Ce qui fait que malgré la formule 1+4 qui apparait
à la présidence et ferait penser à un exercice
collégial du pouvoir et la présence d'un gouvernement
pluripartite, l'exécutif de la République démocratique du
Congo est monocéphal123 sous cette constitution.
Cette constitution semble être floue quant au
régime politique consacré, du fait qu'elle n'avait pas repris
avec fidélité les prescrit de l'Accord global et inclusif, en
sigle AGI en matière des rapports entre les pouvoirs, principalement,
qui consacre que
119 Cfr les articles 6, 7, 9 et 10 du Décret-loi
n°003 du 27 mai 1997.
120 NZUZI PHUKUTA D., Grandes lignes de la nouvelle
constitution de la transition en RDC, Kinshasa, Publication de la
Fondation Konrad Adenauer, 2003, p. 7.
121 Cet Accord politique est l'oeuvre des composantes et
entités du Dialogue Inter congolais à savoir, le Gouvernement de
la RDC, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), le
Mouvement de Libération du Congo (MLC), l'Opposition politique, les
Forces vives, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie/Mouvement de
Libération (RCD/ML), le Rassemblement Congolais pour la
Démocratie/National (RCD/N) et les Maï-Maï. Et cet accord
avait pour soubassement juridique : l'Accord pour un cessez-le-feu en RDC
signé à LUSAKA les l0, 30 et 31 juillet 1999; les
Résolutions pertinentes du Conseil de sécurité des Nations
Unies relatives au conflit en RDC ainsi que les Résolutions du Dialogue
inter congolais tenu à Sun-City (Afrique du Sud) du 25 février
2002 au 19 avril 2002.
122 ESAMBO KANGASHE J-L., Traité de droit
constitutionnel congolais, op.cit., p. 50.
123 KAMUKUNY MUKINAY A., « la constitution de la
transition congolaise à l'épreuve du constitutionalisme
» in Pour l'épanouissement de la pensée juridique
congolaise-Liber Amicorum Marcel Antoine Lihau, Kinshasa-Bruxelles, Presses
Universitaires de Kinshasa-Bruylant 2006, p. 176.
124 Point III.4 de l'Accord global et inclusif sur la transition
en RDC, p. 3. Journal Officiel, n°spécial du 5avril 2003.
43
les institutions de la transition reposeront sur le principe
de la séparation des pouvoirs entre l'exécutif, le
législatif et le judiciaire.124
De ce fait, il va falloir analyser les modalités
pratiques de désignation du premier ministre dans tous les
régimes parlementaires consacrés par les constitutions connues
par la République démocratique du Congo.
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