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La désignation du premier ministre en positif congolais.


par Pascal MUGASA YALALA
Université Catholique du Congo - Master 2 2018
  

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A. LA GARANTIE DE LA STABILITE

La stabilité des institutions en droit constitutionnel est une notion très vaste, qui fait souvent allusion aux problèmes de changements anticonstitutionnels des gouvernements.

Pour ce qui est de notre étude, nous employons ce terme « stabilité du gouvernement » pour indiquer les mécanismes consistant à éviter des crises entre le gouvernement et le parlement, crises qui ont pour conséquence l'instabilité du gouvernement. En effet, la désignation du premier ministre dans la majorité parlementaire est en elle-même une garantie de la stabilité du gouvernement qui devra être institué.

Cela est évident dans la mesure où le premier ministre nouvellement désigné et nommé et bénéficiera en effet, de la confiance de la majorité parlementaire dans laquelle il a été désigné et pourra par la suite asseoir son pouvoir sans beaucoup d'embuches provenant du parlement. Car comme on l'a évoqué précédemment, le parlement, en vertu du principe de la responsabilité politique du gouvernement devant le parlement en régime parlementaire, peut obliger le gouvernement à démissionner ; ce qui n'est pas autre chose qu'une sorte de révocation des membres de l'exécutif.53

A cela, il est évident qu'un problème peut aussi surgir, à savoir, après la désignation, la nomination et l'investiture du premier ministre, la majorité parlementaire peut changer. En d'autre termes, il y a une possibilité que le premier ministre n'ait plus une majorité au parlement, parce qu'elle s'est dissoute.

52 En effet, la majorité parlementaire, souvent formée par plusieurs coalitions des partis politiques, peut s'effondrer, notamment par la dissolution des coalitions

53 DUVERGER M., Institutions politiques et droit constitutionnel, op.cit., p.161.

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B. LA PROBLEMATIQUE DE LA VARIATION DE LA MAJORITE PARLEMENTAIRE

Cette considération fait allusion à une situation où lors de la nomination du premier ministre, le président de la République disposait d'une majorité présidentielle au parlement. Cependant, étant une donnée variable, il existe toujours une possibilité qu'elle change lors d'une mandature. A cet effet, une question se pose ; à savoir, quel est le sort d'un premier ministre qui a obtenu le soutien et la confiance d'une majorité parlementaire lors de sa désignation et son investiture et qui par la suite s'est dissoute.

Comme nous l'avons déjà évoqué, en principe c'est le président de la République qui nomme le premier ministre, nonobstant le mode de sa désignation. Mais pour que ce dernier gouverne, il a besoin du soutien de l'assemblée nationale, si non il y a risque qu'une majorité des députés adoptent une motion de censure qui le contraint et son gouvernement de démissionner.

Car en effet, ce n'est pas le programme du président de la République, mais du premier ministre54 qui est mis en oeuvre ; essentiellement, tout ce qui relève du domaine de la loi et ne peut être adopté sans le soutien d'une majorité des parlementaires.

En d'autres termes, ce vote de confiance, permet au gouvernement de prouver qu'il détient la confiance des parlementaires, et lui permet aussi d'exercer ses pouvoirs. Il s'en suit que s'il perd cette confiance, il doit s'en aller, il doit démissionner. Il ne gouverne que parce qu'il a la confiance du parlement. C'est d'ailleurs ici que se situe une sorte d'ambigüité du régime parlementaire, car on peut en conclure logiquement que le gouvernement est une sorte d'agent d'expression du parlement ; et les parlementaires en tirent trop facilement la conclusion que le

54 C'est le programme du premier ministre qui réussit à réunir une majorité

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gouvernement est leur chose, leur subordonné, leur créature55, même si en réalité en régime parlementaire, le gouvernement et le parlement sont égaux56

Cependant, outre cette modalité de la désignation du premier ministre en régime parlementaire, la pratique politique, nous fait état d'une autre modalité57, souvent non prévue par la constitution mais à laquelle on recourt, dans le cas de la République démocratique du Congo, pour résoudre certains problèmes qui se posent dans la pratique politique.

§2. Désignation du premier ministre dans la classe politique

La constitution n'est pas un texte mort et inerte. Elle vit et développe toute une dynamique. Dans le fonctionnement des pouvoirs publics apparaissent des pratiques constitutionnelles, des règles de comportement non formalisés que les acteurs politiques produisent.58 Ces règles informelles, dénommées « conventions de constitution », sont différentes de la coutume en ce qu'elles ne créent pas du droit et elles n'exigent pas un certain nombre des précédents pour leur formation.59

D'entrée de jeu, cette possibilité exceptionnelle de désignation du premier ministre en dehors de la majorité parlementaire dans un régime parlementaire, peut relever plusieurs questions de droit, à savoir le rôle du pouvoir législatif dans cette désignation ; mais aussi la possibilité pour le pouvoir législatif d'annuler une ordonnance ou un décret du président de la République désignant le premier ministre.60

A ces interrogations, la doctrine semble être divisée par rapport au point de vue.

55 JACQUES CADART, Institutions politiques et droit constitutionnel, op.cit., p.565.

56 Raison pour laquelle ils disposent chacun des moyens de pression contre l'autre dans le but de maintenir l'équilibre.

57 Cette modalité consiste à designer le premier ministre, non pas dans la majorité parlementaire comme prévue constitutionnellement, mais en recourant aux consultations de toute la classe politique (majorité et opposition) pour résoudre certains problèmes.

58 Le cas le plus probant pour la RDC, c'est la pratique des pouvoirs publics tendant à recourir aux consultations de la classe politique et de la société civile ; autrement appelée le « dialogue » pour résoudre certains problèmes.

59 NTUMBA-LUABA LUMU A., Droit constitutionnel général, op.cit., p. 127.

60 Dans la même veine, le journal Le Potentiel, dans son numéro 6859 du 18 octobre 2016, s'est posé la question de savoir « de qui répondra le gouvernement issu du dialogue de l'UA », un gouvernement issu de la classe politique, partis politiques confondus et de la société civile.

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Une portion pense que l'intervention aussi bien du président de la République dans la nomination du premier ministre, que celle du pouvoir législatif dépendent des prévisions constitutionnelles en vigueur dans un Etat; c'est-à-dire, de la manière dont le constituant a organisé les rapports et les compétences de chacun de ces pouvoirs. Ce point de vue doctrinal semble être d'application en République démocratique du Congo, qui depuis son indépendance, chacune de ses Constitutions connues prévoyaient la procédure de la désignation et l'autorité de nomination du premier ministre.61

L'autre partie de la doctrine estime quant à elle que la déformation autoritaire du régime présidentiel, qualifiée par Jean-Louis ESAMBO KANGASHE de « présidentialisme consulaire », contribue au renforcement exagéré des pouvoirs de l'exécutif aux dépens des autres organes de l'Etat, notamment, du parlement62 ; ce point de vue rend impossible toute tentative d'annulation par le pouvoir législatif d'un acte présidentiel désignant le premier ministre dans la classe politique lorsque les circonstances l'exigent.

Il existe du moins une autre possibilité pour le pouvoir législatif d'entraver l'ordonnance ou le décret présidentiel après son entrée en vigueur, en désapprouvant le projet du gouvernement présenté par le premier ministre qui demande aux parlementaires un vote de confiance ; et dans ce cas, le premier ministre récemment désigné par le président de la République doit remettre sa démission à ce dernier qui peut cependant décider aussitôt de le renommer à ce poste.63

Du moins, on ne recourt à cette modalité qu'après une longue consultation de toute la classe politique (A) pour éviter des contestations une fois que le premier

61 Pour l'Acte portant dispositions constitutionnelles relatives à la période de transition, le Premier ministre est élu par la Conférence Nationale Souveraine ; Pour la Loi n°93-001 du 02 avril 1993 portant Acte Constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition, c'est au Président de la république de nommer le Premier ministre après consultation des forces politiques de la nation ; Pour la Constitution de la RDC du 24 juin 1967 et le Décret-loi constitutionnel n°003 du 27 mai 1997 relatif à l'organisation du pouvoir en RDC, le Président est lui-même le Chef du Gouvernement ; Pour la Constitution du 18 février 2006, le Premier ministre est issu de la majorité parlementaire ; pour ne citer que celles-ci.

62 ESAMBO KANGASHE J-L., Le droit constitutionnel, op.cit., p. 230.

63 Cette possibilité est une forme de motion de censure contre tout le gouvernement récemment formé. Elle n'est possible que si le premier ministre n'est pas issu de la majorité parlementaire. (Sans ignorer le fait que la majorité parlementaire reste une donnée variable et évolutive).

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ministre sera désigné ; ou un dialogue entre la classe politique et la société civile (B), pour éviter ou résoudre une crise politique non résolue par la constitution et les lois en vigueur.

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