La problématique de la candidature en droit électoral camerounais.par Valéry DJOBA KALVOKSOU Université de Maroua (Cameroun) - Master en droit public interne 2019 |
IERE PARTIE : LES CONTRAINTES DIRECTES ET IMMEDIATES A L'ACCES A LA CANDIDATURE ELECTORALECHAPITRE 1 : LES CONTRAINTES A L'EXERCICE DU DROIT A LA CANDIDATURE COMMUNES A TOUTES LES CONSULTATIONS ELECTORALESDans le Code électoral applicable au Cameroun, le législateur a bien voulu éviter des amalgames lorsqu'il fixe distinctement le cadre juridique des règles générales applicables à l'ensemble des consultations électorales de celui des règles applicables à chaque type d'élection dans sa spécificité. C'est en effet fort de ce constat, et surtout pour des raisons de commodité que nous avons envisagé fonder notre analyse dans cette logique différentielle. Les contraintes communes à toutes les consultations électorales sont celles d'ordre générales entamant le droit d'accès à la candidature à toutes les élections prévues par le Code électoral. A la lecture du Code électoral, il ressort qu'on note une diversité se manifestant par une variété d'obstacles d'ordre général (Section 1) renforcés par des entraves à l'égalité et à l'équité (Section 2). I. DE LA DIVERSITÉ ET DE LA VARIÉTÉ DES OBSTACLES DANS L'ORDRE GÉNÉRALCette diversité peut être mieux appréhendée en opérant un distinguo entre empêchements à l'initiative ou à la motivation (A) et les contraintes temporelles (B). A. LES EMPÊCHEMENTS À L'INITIATIVE OU À LA MOTIVATIONS'il est vrai que l'accès à la candidature est un droit fondamental consacré aussi bien par les instruments juridiques nationaux40(*) qu'internationaux41(*) auxquels le Cameroun est partie; il n'en demeure pas moins que la rigidité de l'encadrement juridique de l'exercice de ce droit participe véritablement à son verrouillage42(*). Il est logique que l'exercice d'un droit requière en contrepartie la satisfaction d'un certain nombre d'obligations, mais seulement ces dernières doivent être raisonnables à l'effet de permettre la participation du maximum possible de citoyens honnêtes et respectueux des lois de la république. C'est en réalité ce qui n'est pas le cas en droit camerounais lorsqu'on convoque le code électoral dans son titre III relatifs aux dispositions communes à l'élection du président de la république, des députés et des conseillers municipaux et au referendum ; notamment les articles 45 et 46. Nous aborderons dans le cadre de cette articulation la rigidité des conditions d'acquisition de la qualité d'électeur (1) et la rigidité de certaines conditions objectives d'acquisition de la qualité de candidat (2). 1. LA RIGIDITÉ DES CONDITIONS D'ACQUISITION DE LA QUALITÉ D'ÉLECTEURAu Cameroun, la candidature est conditionnée par la qualité d'électeur ; elle-même conditionnée au positif et au négatif43(*). Les conditions positives sont celles relatives à la capacité électorales et énoncées aux articles 4544(*) et 4645(*) du code électoral. En effet, selon POUT. C et ATEBA EYONG. R, « l'inscription sur les listes est soumise à un ensemble de conditions dont les unes pourraient être dites positives et les autres négatives. Les premières définissent le profil des personnes pouvant être inscrites sur les listes électorales [...], tandis que les secondes identifient les catégories de personnes insusceptibles d'être inscrites sur les listes électorales et, donc, d'exercer le droit de suffrage [...] »46(*). a. La rigidité dans les conditions positives C'est l'article 45 du code électoral qui dispose qu'est électeur, toute personne de nationalité camerounaise, sans distinction de sexe, âgée de vingt (20) ans révolus, inscrite sur une liste électorale et ne se trouvant dans aucun cas d'incapacité prévue par la loi ». De manière complémentaire, l'article 46 précise que « Peuvent être inscrits sur la liste électorale d'une commune, les citoyens camerounais jouissant du droit de vote et qui ont leur domicile d'origine ou résident effectivement dans ladite commune depuis au moins six (6) mois ». POUT. C et ATEBA EYONG. R dans leurs travaux ont analysé de manière très pointilleuse les articles 45 et 46 suscité. Ils sont parvenus au constat selon il résulte de la combinaison de ces deux dispositions que l'inscription sur les listes électorales est soumise à pour l'essentiel à 4 conditions cumulatives : la nationalité, la maturité et la résidence ou le domicile, la capacité. - La condition de nationalité : seuls
peuvent être inscrites sur les listes électorales que - La condition de maturité : la
condition d'âge minimum de 20 ans fixée par le - La condition de domicile ou de résidence :
l'inscription sur la liste électorale Si cette condition semble porteuse de difficultés ce
n'est pas en soi à cause de la distinction qu'elle opère entre
domicile et résidence. Du point de vue juridique, le domicile est le
lieu où une personne est censée demeurée, le lieu
où elle se trouve en droit. La résidence par contre, est
le lieu où la personne se trouve en fait. L'élection de
domicile pouvant donc être différente du lieu de résidence.
Ce qui pose réellement problème, c'est la notion de «
domicile d'origine » qui ne renvoie à aucun contenu
précis, et se prête subséquemment à toutes formes
d'interprétations. Ce d'autant plus qu'elle paraît prima facie
non dénuée de tout lien guère très sain
quoiqu'assez lointain avec les catégories glissantes d' «
autochtone » et d'« allogène » introduites
dans l'ordre juridique par le constituant de 1996. Toutefois, en l'absence d'un système d'adressage dans la quasi-totalité des agglomérations urbaines et rurales camerounaises, les possibilités de vérification de l'adresse inscrite au Certificat de domicile sont des plus limitées. Cette pièce étant établie sur une base déclarative avec pour seule garantie de sa véracité sa rédaction en forme de déclaration sur l'honneur susceptible de fonder la responsabilité pénale du titulaire en cas de fausse déclaration avérée. - La condition de jouissance du droit de vote et de capacité : en dernier lieu, ne peuvent être inscrites sur les listes électorales que les personnes jouissant de leur droit de vote. D'une certaine manière, cette condition est partiellement redondante avec les précédentes puisque pour jouir du droit de vote, précisément, il faut avoir la nationalité camerounaise, être âgé de 20 ans révolus à la date de l'élection et être inscrit sur les listes électorales, alors même que cette inscription est conditionnée la nationalité et l'âge. Quant à la condition de capacité, elle s'analyse davantage sous le prisme d'obligations négatives sous le prisme des situations juridiques à éviter sous peine d'être privé du droit d'être inscrit sur une liste électorale. b. La rigidité dans les conditions négatives Si les articles 45 et 46 du code électoral énoncent, positivement, les conditions qu'il faut remplir pour être inscrit sur les listes électorales, l'article 47 par contre détermine, négativement, les états dans lesquelles il ne faut pas se trouver sous peine de se voir privé du droit de vote. En résumant cette disposition l'on pourrait dire qu'elle soustrait du droit d'être inscrit sur les listes électorales et, par implication, du droit de vote, les personnes frappées d'indignité et les personnes frappées d'incapacité. Au titre de l'indignité, l'article 47 prévoit que « Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale : - les personnes condamnées pour crime, même par défaut ; - les personnes condamnées à une peine privative de liberté sans sursis supérieure à trois (03) mois ; - les personnes condamnées à une peine
privative de liberté assortie de sursis simple ou avec - les personnes qui font l'objet d'un mandat d'arrêt ; - les faillis non réhabilités dont la
faillite a été déclarée soit par les tribunaux
camerounais, Au titre de l'incapacité, l'article 47 consacre le retrait du droit d'inscription sur les listes et de vote en l'encontre des « aliénés mentaux ». Il s'agit de personnes dont l'insanité d'esprit ne les met pas à même de pouvoir effectuer un choix éclairé sur les personnes appelées à exercer des mandats politiques. Il s'agit d'une incapacité d'exercice déterminée par la loi dans l'intérêt de la société d'abord et celui de l'aliéné par implication incidente. Sur la base de cette détermination législative des personnes susceptibles d'être inscrites et de celles insusceptibles de l'être, les structures compétentes d'ELECAM en lien avec les Commissions électorales s'il y'a lieu, procèdent aux opérations d'établissement des listes électorales. * 40 Voir paragraphe 2 de la constitution - Consécration par renvoi à la déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH), la charte des nations-Unies (CNU), la charte africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP) et toutes les conventions internationales y relatives et dûment ratifiées -. * 41 Cf. art 21 de la DUDH : (1) : toute personne a le droit de prendre part à la gestion des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire des représentants librement choisis. (2) : toute personne a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de son pays. * 42 Il s'agit de l'existence de conditions aussi bien positives que négative aussi bien en ce qui concerne les modalités d'accès à la qualité d'électeur que de candidat. * 43 Cf. POUT. C., et ATEBA EYONG. R., Éléments de référence pour un dialogue participatif sur les élections au Cameroun, Septembre/Octobre 2017, P46 * 44 ARTICLE 45 du code électoral. - Est électeur, toute personne de nationalité camerounaise, sans distinction de sexe, âgée de vingt (20) ans révolus, inscrite sur une liste électorale et ne se trouvant dans aucun cas d'incapacité prévue par la loi. * 45 ARTICLE 46 du code électoral. - (1) Peuvent être inscrits sur la liste électorale d'une commune, les citoyens camerounais jouissant du droit de vote et qui ont leur domicile d'origine ou résident effectivement dans ladite commune depuis au moins six (6) mois. (2) Peuvent également être inscrits sur les listes électorales, les citoyens qui, ne remplissant pas les conditions d'âge ou de résidence requises lors de la révision des listes, les rempliront avant la clôture définitive des inscriptions ou le cas échéant, le jour du scrutin. (3) Les militaires et assimilés de toutes armes peuvent être inscrits sans condition de résidence sur les listes électorales du lieu où se trouve leur unité ou leur port d'attache. (4) Peuvent également être inscrits sur les listes électorales, les citoyens qui justifient de leur inscription au rôle des contributions directes dans la circonscription électorale concernée pour la cinquième année consécutive. (5) Dans le cas visé à l'alinéa 4 ci-dessus, la demande d'inscription doit obligatoirement être accompagnée d'un certificat de non-inscription sur les listes électorales ou de radiation, délivré par le démembrement communal d'Elections Cameroon du lieu du domicile ou de résidence habituelle de l'intéressé. * 46 Voir POUT. C., et ATEBA EYONG. R., op.cit. p 46. * 47 Cf. Loi N°1968-LF-3 du 11 juin 1968 portant code de la nationalité camerounaise. Voir CHAPITRE II : DE L'ATTRIBUTION DE LA NATIONALITE CAMEROUNAISE A TITRE DE NATIONALITE D'ORIGINE * 48 Est définie par le Lexique des termes juridiques, op.cit. P 973, comme le « lien juridique entre parents (au sens strict du terme des père et mère) et enfants. Tous les enfants dont la filiation est légalement établie, quelle que soit la nature de celle-ci, ont les mêmes droits et les mêmes devoirs dans leurs rapports avec leurs parents dans la famille de chacun d'eux ». * 49 Extraits du code de nationalité En raison de la filiation Art 6.- Est Camerounais * 50 Extraits du code de nationalité En raison de la naissance au Cameroun Art 9- Est Camerounais l'enfant né au Cameroun de parents inconnus. Toutefois, il sera réputé n'avoir jamais été Camerounais si, au cours de sa minorité, sa filiation est établie à l'égard d'un Etranger, et s'il a, conformément à la loi nationale de cet Etranger, la nationalité de celui-ci. Art 10.- L'enfant nouveau-né trouvé au Cameroun est présumé, jusqu'à preuve du contraire, né au Cameroun. Art 11.- Est Camerounais, sauf faculté de
répudier cette qualité dans les six mois précédent
sa majorité. b) l'enfant naturel, né au Cameroun, lorsque celui des parents étrangers à l'égard duquel la filiation a d'abord été établie y est lui-même né. Art 12- La nationalité camerounaise est en outre acquise de plein droit, par le seul fait de la naissance sur le territoire camerounais, à toute personne ne-pouvant se prévaloir d'aucune autre nationalité d'origine. * 51 Art 17.- Sous réserve des dispositions des articles suivants, la femme étrangère qui épouse un Camerounais, acquiert la nationalité camerounaise au moment de la célébration du mariage. Art 18- 2. Elle peut, même si elle est mineure, exercer cette faculté sans autorisation. Art 19- Au cours du délai de six mois qui suit leur célébration pour les mariages contractés sous l'empire de la présente loi, ou qui suit la promulgation de la présente loi, s'il s'agit de mariages contractés antérieurement, le Gouvernement peut s'opposer par décret à l'acquisition de la nationalité camerounaise * 52 Dans les conditions fixées par la loi n° 1968-LF-3 susvisée en ses articles 24 et suivants. * 53 Cf. CODE
ELECTORAL DU NIGER (Loi organique n° 2017-64) Art.40 : « Les
électeurs sont inscrits sur le Fichier Electoral Biométrique par
Commune et/ou Arrondissement Communal, Ambassade et/ou Consulat sur
présentation de l'une des pièces suivantes : |
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