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Sociologie des carrières professionnelles dans les entreprises privées au Burkina Faso. Cas de Telecel Faso à  Ouagadougou.

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par Antoine SANGUE
Université de Ouagadougou - Maà®trise 2014
  

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II.2. Modalités de rémunération des travailleurs

Le salaire, selon la théorie marxiste (Marx 1891),est la somme d'argent que le capitaliste paie, pour un temps de travail déterminé ou pour la fourniture d'un travail déterminé.  Cette rétribution de la valeur du travail est l'un des facteurs motivant dans la relation de travail entre employeurs et employés. Au Burkina Faso, le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti) est passé de 5027 franc CFA en 1963 à 30684 francs CFA mensuel en 2006. Cette valeur monétaire est donc la somme minimum, qu'un employeur est sensé rétribué en contrepartie de la force de travail à son employé. Toutefois, il y a des règles et normes qui codifient le mode de rémunération des agents, particulièrement dans le secteur privé. Selon l'Inspecteur de travail,

« [...]. Il y a des conventions collectives qui régissent les secteurs d'activité. Les fonctions, les différents emplois, les différentes catégories, sont reparties par différentes conventions. [...]Maintenant il faut dire que tous les secteurs ne sont pas régis par des conventions collectives. Ya beaucoup de secteurs qui ne sont pas régies par les conventions collectives comme les télécommunications. Si bien qu'il ya un arrêté, un décret qu'on appelle décret des non régis. C'est un fourre-tout. C'est en fonction de ce décret làqu'on essaie de logeren fonction du diplôme du travailleur et aussi de l'emploi occupé, c'est plus de l'emploi occupé même. On essaie de voir quelle sont les avantages auxquels il a droit. Mais il faut dire y a un problème à ce niveau-là. Bon y a eu d'abord un décret de 1960, qui a été modifié ; la dernière modification doit être de 2000. Maintenant, y a un décret, qui est sorti même en 2010, qui abroge l'ancien décret. Malheureusement ce décret-là, on ne peut pas l'appliquer ; parce que ce décret n'a pas défini les différentes catégories si bien que bon, on est quand même obligé de se rabattre malheureusement sur le décret de 1960» (Entretien effectué avec M.Z, Inspecteur de travail, le 05/12/2014, Ouagadougou).

L'avènement de l'externalisation a permis à tous les agents de Télécel de posséder un compte bancaire dans lequel les salaires sont virés mensuellement. Les entretiens effectués auprès des personnes ressources ont révélé que le salaire chez Télécel est reparti selon les tâches à accomplir et non selon le capital culturel de l'agent. Ainsi, dans chaque service, les travailleurs ont la même grille salariale selon la catégorie et selon le type de contrat. Selon le DRH, « concernant la rémunération, elle est faite en fonction des catégories. Les directeurs ont le même salaire de base. Et des indemnités en plus». Cela suppose aussi que les chefs de divisions, les chefs de services, les commerciaux, les téléacteurs, les promoteurs, les conseillers clientèle, ont une grille salaire commune, soutenue par des indemnités. Il faut ajouter, que le salaire est imposé, donc non négociable, comme le témoigne cet agent permanent : « Le premier salaire que j'ai eu m'a été imposé, et après quand j'ai changé de poste, il a été revue à la hausse, et j'ai jamais négocié mon salaire, il m'a toujours été imposé » (Entretien effectué avec Y.D, Agent permanent au Call center, le 10/01/2015, Ouagadougou).

Cependant, il existe une dichotomie des relations salariales au sein de cette entreprise. Il y a les agents qui sont liés par un CDI et d'autres par un CDD d'une durée de 1 an renouvelable, qui relèvent tous juridiquement de Télécel. L'ensemble de ces agents sont au nombre de 196 dont 100 à Ouagadougou, appelés agents permanents, ou « le personnel ». Les employés permanents enquêtés se plaignent de leurs conditions salariales, car selon eux, le salaire n'a pas été fixé en fonction des réalités sociales du Burkina comme le dit cet agent:

« [...]Je pense que toutes les conditions ne sont pas réunies au niveau financier, vu la cherté de la vie, je pourrais dire que les salaires ne sont pas à la hauteur. Pourtant les prix ne font que grimper. Mais à ce niveau, y a pas de changement. Ce qui fait que c'est un peu difficile aujourd'hui de joindre les deux bouts, même quand on est dans une entreprise pareille. Voilà, c'est un peu difficile, on fait avec ! Sinon, ce n'est pas à la hauteur de nos attentes. » (Entretien effectué avec Y.D, Agent permanent du Call center, le 10/01/2015, Ouagadougou).

Mais que diront alors les « prestataires » au nombre de 400 repartis entre les différents services pour servir de force de production ? Ceux liés juridiquement à Planium RH, avec un contrat qui va de 3 mois minimum à 6 mois maximum. Selon l'agent de Planium-RH que nous avons enquêté,

« le salaire n'est pas fixé selon le niveau de diplôme. Il y a une base qui est le BAC+2. Lorsque vous venez, nous on vous dit bon voilà. On a tel travail que nous voulons que vous effectuez. Et pour ce travail nous disposons de tel montant pour la rémunération. La suite, cela dépend de votre choix. C'est comme les concours de la fonction publique. Il y a des concours de niveau BEPC, CEP, BAC etc. Si tu postules pour un niveau BEPC alors que tu as un BAC +3, tu ne peux pas réclamer un salaire de BAC+3. Tu prends d'abord le salaire de BEPC et la suite dépendra d'autres critères. » (Entretien effectué avec M.K, Agent Planium-RH, le 18/03/2015, Ouagadougou).

Du call center, en passant par le phoning, le service flash, aux agents des différents fronts office, tous ont révélé lors de l'enquête avoir un salaire de moins de 100 mille francs CFA, sauf un promoteur qui dit en avoir plus. Pourtant, avec les agents permanents, « on fait le même travail et on demande même plus aux prestataires»(entretien effectué avec O.E, Agent permanent Front office, le 29/11/2014, Ouagadougou).Pour des agents effectuant les mêmes tâches, et ayant les mêmes modalités horaires, il est difficile de comprendre qu'une franche de cette population ait un traitement salariale nettement supérieur à d'autres, sur la raison du statut. Un téléconseiller donne son avis :

« Pour un service, je pense que c'est dangereux et puis ça incite à beaucoup de choses. Vu que c'est à peu près le même travail. Même si ce n'est pas les mêmes conditions salariales il ne doit pas avoir un grand écart. Parce qu'à l'allure où ça va là ça devient une sorte de discrimination et puis ça crée des frustrations. Je trouve que c'est dangereux» (Entretien effectué avec M.I, Agent call center, le 25/11/2014, Ouagadougou).

Cela pourrait aussi s'expliquer par des stratégies du patronat afin de rentabiliser. Selon le DRH, « nous savons bien que nous vous exploitons, mais vu que l'on vous paye en dessus du SMIG, je pense que y a pas de problème ». Ces propos ne peuvent être encouragés que par le fait qu'il n'y ait pas de conventions collectives régissant le domaine de la télécommunication. Selon la théorie marxiste (Marx : 1891),la scission d'une unité de production en une petite classe immensément riche et en une grande classe de salariés non possédants fait que cette société étouffe sous son propre superflu, alors que la grande majorité de ses membres sont dans la précarité.

Une autre catégorie de travailleurs que nous avons jugés nécessaire d'interviewer est celle des « vigiles ». Ces agents de sécurité étant aussi sous la houlette d'une entreprise de sous-traitance livre des vigiles à l'entreprise afin d'assurer la sécurité des locaux. Ces agents de sécurité ont un traitement salarial juste en dessus du SMIG. Un agent à propos de sa rémunération :

« Vu la rareté de l'emploi et vu mon niveau scolaire qui ne me permet pas d'avoir un travail à la hauteur de mes attentes,ça me convient. Je sais que mon salaire devait dépasser cela, mais j'ai un faible niveau. Donc je me débrouille avec, tout en poursuivant mes études. Je sais que ce boulot n'est pas à ma hauteur » (Entretien effectué avec M.G, Vigile, niveau BEPC, le 07/01/2015, Ouagadougou, traduit du mooré).

Un autre vigile apprécie:

« Si c'est à apprécier c'est négativement. On ne peut pas comprendre qu'on travaille avec une grande société de télécommunication et puis ses agents sont pas bien payés. Le salaire est mauvais, les paiements sont tardifs. Le travail est une obligation. Sinon, si c'était choisir de travailler ou ne pas travailler, on préfère ne pas travailler dans Télécel» (entretien effectué avec M. S, Vigile, niveau BAC+2, le 28/11/2014, Ouagadougou).

Que dire alors à propos des dates de paiement du salaire ?

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