B - La promotion du maraîchage et des ateliers de
formation
La production en milieu carcéral s'imposera et
tous les obstacles doivent être levés, car dans aucune
société, surtout Africaine, il n'est concevable
qu'une communauté d'individus puisse se
soustraire à cette obligation de travailler qui est le propre au genre
humain et vivre au dépend des autres à travers l'Etat
dans le cas des détenus. Quand bien même les
difficultés inhérentes au travail en milieu carcéral sont
légions, ils ne sont pas insurmontables.
Ainsi, dans les prisons situées en ville et ne
disposant pas suffisamment d'espace pour l'exploitation agricole, on
pourrait développer le maraîchage et la mise en place
d'ateliers de formation. Le maraîchage occupera les
détenus qui seront presqu'en fin de peine et la production
contribuera à améliorer la ration alimentaire journalière.
Le surplus pourrait être vendu et les ressources obtenues serviront au
pécule des détenus qui y travaillent. Les jeunes détenus
qui purgent une assez longue peine pourront être formés dans les
ateliers de leur choix comme la menuiserie, la soudure, la couture et autres
spécialités de la région.
Le travail en milieu carcéral nécessite des
réformes et ne sera pas du tout aisé. Cela passe
nécessairement par l'adoption d'une politique
pénitentiaire claire qui fera une large place au travail en
milieu carcéral car aussi bien sur le plan juridique et institutionnel
qu'au niveau de l'opinion publique, le travail des
détenus suscite toujours des hostilités. Si le travail en
milieu carcéral s'avère être un moyen principal
de traitement criminologique et de lutte contre la misère,
l'effort doit être fait pour que ce traitement, touche le plus
grand nombre de détenus, en aplanissant les différents
obstacles.
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droit international et europeen des droits fondamentaux Présenté
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Des efforts particuliers doivent être
menés par l'Administration Pénitentiaire pour
sensibiliser la population par une meilleure communication. Cette question de
l'emploi des détenus peut faire l'objet d'un débat de
société, l'importance du sujet recommande son
appropriation par les décideurs politiques et administratifs. La
contribution de certains ONG et institutions de réflexions comme des
commissions spécialisées de l'Assemblée
nationale ou du Conseil économique et social pourrait être
bénéfique. Au nom même de la nécessaire protection
de la société, il faut se donner les moyens d'assurer une
meilleure réinsertion socioprofessionnelle des détenus. Au
demeurant, il s'agit de mettre en place des investissements de production pour
que le produit de ces investissements permette à l'Etat de faire des
économies chaque année. Dans le même temps les
retombés sociaux et humains seront profitables à
l'ensemble de la société. Ainsi, le travail en milieu
carcéral de façon générale participera à la
formation du détenu quant à son aptitude à jouer un
rôle actif au sein de la collectivité.
Ces activités, qui seront exercées par les
détenus, sont un retour aux sources dans la mesure où ils
trouveront là un moyen de se replonger dans l'univers habituel du
travail.
L'Etat, ne serait-ce que pour des
raisons économiques, devrait s'employer à financer
conséquemment la production pénitentiaire. Il lui reviendra alors
dans sa politique pénitentiaire de « s'efforcer d'indiquer la
stratégie de production au sein des EP, les priorités de cette
production [...] les moyens à mettre en oeuvre, les instruments de
gestion adéquats, les principes d'utilisation de la production...
»50. L'Administration
Pénitentiaire se constituera ainsi une chaîne de
production pénitentiaire diversifiée dans ses activités,
transformant ainsi le détenu en un agent de développement et le
Directeur de la prison en un véritable chef
d'entreprise.
Au plan individuel c'est-à-dire pour
les détenus eux-mêmes ça sera l'occasion de
développer chacun sa capacité à prendre en main
les rênes de sa propre vie et de gagner un peu d'argent
pour subvenir à leurs petits besoins et de se constituer un
pécule. C'est aussi un moyen pour eux d'échapper aux
effets néfastes de
50 Rapport Préliminaire d'Audit de l'Association
Pénitentiaire Africaine, APA sept 2001
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l'enfermement absolu, de communiquer aussi souvent
avec l'extérieur et de se soustraire de l'extrême
dénuement.
Les conditions de détention à savoir la
surpopulation, l'insalubrité, le manque de soins sanitaires
et l'insuffisance de l'alimentation, font régner une
misère ambiante en détention et sont une entorse aux
droits fondamentaux de l'homme. L'emploi des détenus dans les
centres pénitentiaire agricoles, les jardins maraichers, les ateliers de
formations permettront aux détenus de participer à leur propre
entretien en détention.
A terme le programme visera la création de
véritables fermes pénitentiaires capables de produire en
quantité suffisante les denrées essentielles qui entrent dans la
composition de l'alimentation des détenus de la RDC.
Dans cette perspective, l'affectation de terre à usage
de culture par l'état au profit de l'Administration
Pénitentiaire serait un préalable.
Ainsi, l'activité de production sera
axée sur les produits les plus appropriés d'une région
à l'autre et pour diversifier le marché, résoudre les
difficultés d'écoulement ou de mévente de la production
des initiatives pourront être prises pour éviter un
quelconque blocage. Et pour réhabiliter le travail en milieu
pénitentiaire, il faudra poser le principe de contrat de travail.
Les fermes pénitentiaires sont en général
victimes de leurs succès quand les sommes engrangées deviennent
importantes. Il faut anticiper et poser les bases d'une
stratégie de gestion transparente et rationnelle.
La situation juridique du détenu « travailleur
» fait obstacle à une possibilité de relation contractuelle
conformément au droit du travail ; mais un protocole entre
l'Administration Pénitentiaire, représenté par le
Directeur de la prison et le détenu pourrait être signé. Ce
protocole intégrera l'emploi occupé, la
rémunération, les horaires de travail et les
modalités de suspension et /ou de rupture d'activité
qui se traduirait par le transfert dans une autre prison. Un protocole
bien élaboré évitera une exploitation de la force de
travail du détenu, et un pécule minimal peut être
fixé par l'administration centrale. Afin d'assurer une bonne
application des textes en matière de travail
pénitentiaire et d'éviter toute dérive, il est
nécessaire d'accentuer un contrôle aussi bien interne qu'externe
de l'activité pénitentiaire. Pour veiller au respect de
la déontologie et de la discipline du personnel exerçant des
activités de
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sécurité, il peut être envisagé la
création d'une commission de déontologie de l'Administration
Pénitentiaire.
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