Conclusion du Chapitre
Il était question pour nous de présenter nos
modèles économétriques, et les techniques d'estimations
utilisées pour répondre à nos questions
spécifiques. A cet effet, pour notre première hypothèse
d'étude, nous avons construit un modèle de panel à effets
aléatoires avec variable instrumentale. De plus, nous avons
présenté les différents tests effectués sur ce
modèle. Il s'agit des tests de stationnarité de IPS ;
d'homogénéité ; de spécification de Hausman ; de
causalité bidirectionnelle de Granger mais aussi l'estimation des
paramètres du modèle par les variables instrumentales. Notre
seconde hypothèse s'est également construite autour d'un
modèle de panel à erreurs composées ; dont la
régression a nécessité que nous présentions la
méthode d'estimation par variables instrumentales.
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CHAPITRE IV : RESULTATS ET RECOMMANDATIONS
Au chapitre précédent, nous avons
présenté les modèles et les étapes d'estimations
économétriques, en relation avec nos différentes
hypothèses. Dans ce chapitre, nous nous attèlerons à
présenter les résultats de nos estimations et les recommandations
de politiques économiques tant pour la relation fiscalité et
croissance économique (Section 1) que celle de l'instabilité des
recouvrements fiscaux et la variabilité de la croissance
économique (Section 2). Le but de cette démarche est de confirmer
ou d'infirmer nos hypothèses d'étude. Rappelons le, ces
hypothèses stipulent d'une part que : les taux de pressions fiscales
appliquées en CEMAC sont si élevés qu'ils dépriment
la croissance économique des pays concernés (Hypothèse 1),
et d'autre part que : l'instabilité des recouvrements fiscaux au sein de
la zone CEMAC a un impact positif sur la variabilité de la croissance de
la sous-région (Hypothèse 2).
SECTION 1 : FISCALITE ET CROISSANCE ECONOMIQUE:
RESULTATS ET RECOMMANDATIONS
Cette section ambitionne de présenter et
d'interpréter les résultats de nos estimations effectuées
pour le modèle [III.1] et d'en donner des recommandations concernant la
fiscalité et la croissance économique.
I.1- Présentation et interprétation des
résultats.
A la lumière des différents tests
économétriques effectués au chapitre
précédent, nous avons obtenu les résultats suivants que
nous interprétons :
> Analyse de la stationnarité des
variables
Tout comme nous l'avons mentionné au chapitre 3, nous
effectuons le test de stationnarité en panel de « Im, Pesaran et
Shin (IPS) ». Les résultats sont consignés dans les tableaux
IV.1 et IV.2 se trouvant à l'annexe.
Il ressort du test IPS au seuil de 1% (un pourcent) que la
variable endogène est stationnaire dans les formulations avec constante
d'une part et avec constante et trend d'autre part. De ce fait le taux de
croissance est intégrée d'ordre zéro c'est-à-dire
I(0).
Au rang des variables explicatives, le logarithme du PIB
réel par habitant et capital humain mesuré par le taux de
scolarisation sont non stationnaires au seuil de 1% (voir 10% dix pourcent)
selon le test IPS (spécification avec trend). Nous les
considérerons comme ayant une racine unitaire. Ces deux variables de
contrôle seront différenciées une fois dans l'optique de
les rendre stationnaire avant l'estimation du modèle. Par contre toutes
les autres variables explicatives : logarithme de la formation brute de capital
fixe, l'ouverture économique (taux d'ouverture), recettes fiscales et
taux de pression fiscale sont stationnaires dans la spécification du
test IPS avec trend. Elles sont intégrée d'ordre zéro
[I(0)]. Nos variables étant de différents ordres
d'intégration, nous ne pouvons pas effectuer un test de
cointégration.
> Test de spécification ou
d'homogénéité (Hsiao)
L'algorithme du test d'analyse de
l'homogénéité du premier modèle donne les
résultats
présentés dans le tableau ci-dessous.
Tableau IV.3 : Résultats du test
d'homogénéité de HSIAO
Etapes du test
|
... ~
|
~
...
|
3
...
|
p-value associée
|
0, 00001172
|
0, 124152
|
0, 00409323
|
Décision
|
On rejette H01
|
On accepte H02
|
On rejette H03
|
|
Sources : Nos calculs sous STATA
Le p-value associée au test de Fischer de
l'hypothèse ...~ est égale à 0, 00001172. Elle est
inférieure au seuil de 10%, donc pour ce seuil, on rejette
l'hypothèse nulle ...~d'égalité
des
constantes D; et des coefficients E; et k; avec E; =
(EJ; EK et E`)' etk; = ( ; e i= h)'. Il
convient alors de tester l'hypothèse ...~ d'égalité des
coefficients E; et k; (coefficients associés aux variables explicatives)
entre les pays. Le p-value associée à ce test indique que
jusqu'au seuil de 0, 124152 (12,4152%), l'hypothèse nulle ne peut pas
être rejetée. A 10%, on confirme donc ici la structure de panel.
Il reste enfin à tester l'hypothèse ...~ des constantes
individuelles D;. Le p-value est inférieur au seuil de 5%. Pour ce
seuil, on rejette l'hypothèse nulle d'égalité des
constantes D; : il est nécessaire d'introduire dans le premier
modèle des effets individuels. Pour savoir si l'effet individuel est
fixe ou aléatoire, nous avons eu recours au test de spécification
de Hausman.
> Test de spécification de Hausman
Par la suite, l'on fait appel au test de Hausman pour savoir
si l'effet individuel est fixe ou aléatoire. Les résultats de ce
test regroupés dans le tableau IV.4 de l'annexe ne réfutent pas
l'hypothèse d'absence de corrélation entre le terme
aléatoire et les variables explicatives du modèle (P-value= 92,4%
supérieur à 5%), et le test de Chi2(7)= 2,57. Dans ce contexte,
le
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modèle à effet aléatoire est
préférable au modèle à effet fixe. Pour le premier
modèle, l'on estimera donc un panel de type erreurs composées
dont la structure est la suivante :
TC i,t= ai + 9Dévali,t
+ p ln(Yi,t) + 13sln(Ki,t) + 132educi,t + 133T
0i,t + gpTPFi,t_s +
Ei,t
Avec ai = a + ui
; a désigne la composante fixe
et uila composante stochastique individuelle, non
observable.
> Test de causalité bidirectionnelle : test de
causalité en panel de Granger par paire de
variables.
Le test de causalité de Granger en panel par paires de
variables nous a fourni des résultats consignés dans le tableau
IV.5 de l'annexe. Il en ressort d'une part qu'au seuil de 10%, le taux de
croissance économique cause au sens de Granger le capital physique, le
taux d'ouverture et le taux de pression fiscale. On relève d'autre part
que le PIB réel par habitant (que l'on a retardé d'une
année), le taux d'ouverture commerciale, les recettes fiscales
(retardées d'une année) et le taux de pression fiscale
(retardé d'une année) causent au sens de Granger le taux de
croissance économique. On en déduit l'existence d'une
causalité bidirectionnelle entre les paires de variables : « taux
de croissance économique- taux d'ouverture commerciale », et «
taux de croissance économique - taux de pression fiscale ».
Une fois que nous connaissons les sens des causalités
bidirectionnelles, nous pouvons passer à l'estimation proprement dite
des paramètres de notre modèle.
> Estimation des paramètres du
modèle
Le tableau IV.6 de l'annexe, implique que la
corrélation entre le taux de croissance du PIB et le taux de pression
fiscale est de -0,164, et celle entre ce taux de pression fiscale et les
recettes fiscales est de 0,775. Par conséquent, notre variable
explicative d'intérêt est donc endogène, et la covariance
entre cette variable et celle des recettes fiscales est non nulle. Dans ces
conditions, il nous est possible d'effectuer une régression en panel
à erreurs composées, avec les recettes fiscales comme variable
instrumentale.
L'estimation des paramètres du modèle nous donne
le tableau ci-après.
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Tableau IV.7: Estimation du modèle 1. (Variable
dépendante : taux de croissance du PIB)
Code
|
Variables explicative
|
fi
|
P>t
|
Influence
|
Constante
|
Constante
|
-4,153**
|
0,039
|
Négative
|
Deval
|
Dévaluation (variable indicatrice)
|
-0,585*
|
0,000
|
Négative
|
ln_pibr_hbt
|
Logarithme du PIB réel par habitant
|
102,19*
|
0,000
|
Positive
|
ln_fbcf
|
Logarithme de la formation brute de capital fixe (capital
phy.)
|
0,320*
|
0,000
|
Positive
|
dk_h
|
capital humain mesuré par le taux de scolarisation
|
0,021
|
0,418
|
Positive
|
t_o
|
L'ouverture commerciale / Le taux d'ouverture
|
5,398**
|
0,049
|
Positive
|
L.tpf
|
Taux de pression fiscale retardé
|
-6,750*
|
0,000
|
Négative
|
|
L'influence d'une variable est en gras-italique
lorsque son coefficient estimé est *= Significatif à 1%, **=
Significatif à 5%.
Sources : Estimations de
l'auteur sous le logiciel Stata 12
Les résultats présentés ci-dessus font
état de ce que la seule variable non significative est le capital
humain. Toutes les autres sont significatives soit à 1% (un pour cent),
soit à 5% (cinq pour cent). Les variables peuvent donc être
classées en deux groupes. D'un côté le groupe de variables
qui ont des élasticités positives à savoir les variables :
niveau de PI3 par tête, capital physique, le capital humain et taux
d'ouverture commerciale. De l'autre côté, le groupe des variables
à élasticités négatives. Il s'agit des variables
taux de pression fiscale et dévaluation le signe est négatif.
Pour le premier groupe de variables :
Le niveau de PI3 par habitant a un impact positif sur la
croissance économique, du fait du signe de son coefficient. Toute hausse
de 1% du niveau de cette variable, entraine une augmentation de la croissance
économique de 102,19%. Ceci n'a rien d'étonnant, car cette
variable est considérée comme un indicateur de
développement économique. De plus, le tableau IV.8 réfute
la théorie de la convergence conditionnelle. En effet, le modèle
de Solow (1956) prédit que les économies ayant un niveau initial
du revenu peu élevé croissent plus rapidement que celles dont le
niveau du revenu est plus important et proche de l'état stationnaire. Or
on constate qu'en zone CEMAC, les pays qui en 1980, avaient les niveaux de PI3
réel les plus faibles (Congo,
ae 44 Page 52
République Centrafricaine et Tchad) occupent toujours
les dernières places. On conclut alors qu'il n'y a pas convergence des
niveaux de vie des populations de la sous-région.
L'investissement a un impact positif sur la croissance du
PIB. Cela se traduit par le signe de son coefficient. En effet une augmentation
du niveau de l'investissement de 1 % entraîne une augmentation de la
croissance du PIB de 0,320%. Cette sensibilité de la croissance
économique à l'investissement traduit l'importance de cette
variable dans le processus du développement. Toutefois, il est important
de constater que cette sensibilité est pratiquement non signifiante du
fait de l'envergure que la littérature reconnaît à
l'investissement. Ce niveau d'investissement est d'autant plus faible que
malgré la croissance du PIB, la pauvreté n'a pas reculée.
Il urge alors donc que les politiques macroéconomiques, mettent un
accent particulier sur l'investissement privé et public. Cela exige un
tissu économique sain et peu contraignant avec les mesures fiscales
visant à stimuler l'investissement.
Le capital humain, tout comme les autres variables
présentées a une influence positive sur la croissance du PIB,
mais malheureusement, cette influence est non significative.
Le taux d'ouverture commerciale a également un impact
positif sur la croissance économique des pays de la zone CEMAC. Une
augmentation de 1 % du taux d'ouverture commerciale entraîne une
augmentation du taux de croissance économique de du PIB de 5,398%. Cette
situation ne surprend guère car si l'on en croit Avom (2011), les taux
de croissance excellents de la zone CEMAC sont largement tributaires de
l'exportation de quelques produits de base, et notamment le pétrole.
Cette situation rend la sous-région, vulnérable aux chocs des
pays dont elle dépend. Nous en avons pour preuve la récente crise
financière de 200825.
Pour le deuxième groupe de variables
Les taux de pression fiscale utilisés pour la
régression de notre modèle ne jouent pas en faveur de la
croissance du PIB. Comme l'atteste son coefficient, avec 1% de chances de se
tromper, une augmentation du taux de pression fiscale de 1 % entraîne une
baisse de la croissance économique de 6,750%. Force est de constater que
le seuil d'imposition en zone CEMAC est franchi26. Ce
résultat n'est pas surprenant car la majeure partie des études
empiriques rendent compte du lien négatif existant entre la politique
fiscale et la croissance économiques des pays à travers le
monde.
25 Banque de France, 2008
26 Confère Laffer (1978)
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Quant à la dévaluation, elle a eu un impact
négatif sur le niveau de croissance de la sous-région. Cette
vision est partagée par de nombreuses études notamment celles de
la BAD27 qui stipulent que la dévaluation de 50% du FCFA en
1994 qui a corrigé la surévaluation de la monnaie a eu des effets
mitigés sur la croissance économique jusqu'au début des
années 2000.
Aussi, les variables indépendantes du modèle
contribuent à 99,06% en l'explication de la variabilité
interindividuelle du taux de croissance ; tandis que les effets
aléatoires des différents pays contribuent à 94,93% au
modèle28. Après l'analyse de ces résultats,
nous proposons des stratégies à adopter par les gouvernements de
la sous-région pour réduire l'instabilité de leurs
croissances économiques.
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