CONCLUSION
Nous nous sommes intéressés aux juridictions
militaires, au sort du condamné militaire après le
prononcé de son jugement le condamnant à une peine tel que le
prévoit le code pénal militaire et de la vie qui l'attend une
fois dans son milieu de privation de liberté.
Cependant après une analyse minutieuse du traitement
pénitentiaire, nous sommes arrivés à constater que toutes
les règles tant internationales que nationales qui ont tendance à
cadrer ou à encadrer le système carcéral en
République Démocratique du Congo ne sont qu'échantillon,
puisque certains détenus de la Primil de N'dolo sont allés
jusqu'à dire que la prison en RDC est un Enfer sur terre. Les conditions
de détention sont vraiment en dessous même de la moyenne. Les
déficiences se remarquent donc dans l'alimentation, en vêtements
et literie, en exercices physiques, en service médical, en information
et droit de plainte des détenus, en bibliothèque, en
séparation des détenus par catégories, en instruction et
loisir et pire encore en personnel. Bref, le traitement pénitentiaire
congolais dévie énormément non seulement aux règles
minima qui s'avèrent être internationales mais aussi et surtout
à celles de l'ordonnance n°344 du 17 Septembre 1965 portant
régime pénitentiaire, qui en soit s'inspire aux mêmes
réglés minima de détention.
C'est pour cela même, dans un atelier national
organisé en juillet 2007 sur la réforme du système
pénitentiaire en RDC, le ministre de la justice, George Minsay Booka,
avait insisté sur le respect des règles minima pour tous les
détenus et par tous les établissements pénitentiaires,
notamment les déviations citées ci-haut.
72
pénitentiaire tant sur le plan textuel que sur le plan
pratique aux conditions conjoncturelles de notre pays, la République
démocratique du Congo.
Nonobstant toutes les déviations tragiques, le
gouvernement Congolais par le biais de son ministère de la justice et de
la défense reste sourd et muet. Nous pensons qu'il serait
agréable que celui-ci pense à réduire le nombre des
détenus en particulier ceux qui ont déjà purgé le
1/4 de leur peine par une liberté conditionnelle, soit par grâce
présidentielle. D'où nous saluons l'idée de l'opposition
congolaise mise en oeuvre par le chef de l'Etat, de pouvoir gracier et
amnistier certains détenus. Car cela permettra de réduire le
nombre de détenus dans les prisons de la République en
général et en particulier celle de N'dolo qui normalement a
été construite pour recevoir 500 détenus mais qui en est
là à plus de 1472 détenus.
Il ne suffit pas seulement de diminuer le nombre des
détenus dans les prisons mais aussi d'en assurer la
réintégration ou la réinsertion dans la
société en leur apprenant au mieux un métier.
La surpopulation de la Primil de N'dolo n'est donc pas
uniquement due au grand nombre des militaires incarcérés à
cause des circonstances des guerres, mais surtout à la durée
anormale d'incarcération de chaque détenu, aggravée par le
mauvais fonctionnement de la justice militaire.
Cette surpopulation des prisons contribue à :
y' Accentuer les mauvaises conditions matérielles de
détention et le non-respect de la plupart des règles
édictées dans l'Ensemble des règles minima pour le
traitement des détenus et dans la législation congolaise en la
matière ;
y' Détériorer la condition physique des
détenus et à faciliter la transmission des
maladies infectieuses (comme la tuberculose) chez les
détenus ; y' Aggraver anormalement les conditions détention de
ceux, très nombreux, qui
sont en préventive alors que ces personnes doivent
bénéficier de la
73
présomption d'innocence et, à ce titre, jouir de
conditions de détention différentes des condamnés qui ont
été reconnus coupables d'infractions pénales.
La République démocratique du Congo fonctionne
sur une base répressive mais non préventive.
La dignité humaine est si importante, d'où
l'importance de la protéger à son extrême
vulnérabilité, car il vient d'être démontré
et approuvé à suffisance dans ce travail qu'en RDC, les droits de
l'homme en général et ceux du détenu en particulier
restent encore une hypothèse d'école. Le pauvre est donc soumis
à plus d'obligations qu'il lui est reconnu des droits.
Ce travail formule des recommandations, surtout à
l'intention des responsables du système judiciaire et
pénitentiaire congolais, dont certaines sont des actions et des mesures
à coût faible ou nul et dont la mise en application
immédiate ou à court terme est possible.
Visant à combattre la détention
illégale
? Renforcer le contrôle sur le respect des
procédures en matière d'arrestation et de détention
(notification, comparution devant une autorité judiciaire, etc.) ;
? Instruire les Officiers du Ministère Public qu'ils
assument les responsabilités de contrôle qui sont les leurs au
niveau des divers centres de détention conformément à
l'article 80 du Code congolais de procédure pénale, afin de
relever rapidement les cas d'arrestations arbitraires et de détentions
illégales et de les régulariser au fur et à mesure ;
? Assurer au détenu le concours d'un avocat (dès
son arrestation et sa mise en détention) pour permettre au détenu
d'exercer son droit d'avoir l'assistance d'un avocat ;
74
w' Informer les détenus des droits qui sont les leurs
tant au stade de l'instruction pré juridictionnelle et juridictionnelle
que pendant l'exécution de la peine privative de liberté.
Visant à améliorer l'administration de
la justice pénale
w' Fournir un appui léger aux parquets et à
l'administration pénitentiaire (en fourniture de bureaux, papiers,
etc)
w' Renforcer à travers des sessions de formation et
séminaires la formation du personnel pénitentiaire, des
magistrats, APJ et OPJ (dont la majorité n'a pas reçu la
formation adéquate) particulièrement dans le domaine des normes
internationales sur les garanties judiciaires et sur la protection des
personnes en détention, pour également éviter des
arrestations arbitraires et des détentions irrégulières
;
w' Réviser la législation pénitentiaire
et plus particulièrement l'ordonnance 344 du 17 septembre 1965 sur le
régime pénitentiaire. Il y a lieu d'initier une nouvelle
législation ou de proposer des modifications au texte qui existe
actuellement en rapport avec les règles minima pour le traitement des
détenus.
w' Améliorer des conditions de travail et de
rémunération des personnels intervenant dans l'administration de
la justice et dans le système pénitentiaire ;
w' Appuyer les Bureaux de consultation et d'assistance
gratuite des barreaux ;
w' Pousser la justice en générale et militaire
en particulier à accélérer sa manière de traiter
les dossiers pour éviter que les prévenus qui croupissent encore
en prison en attendant même que leurs dossiers puissent enfin être
mis à table ;
w' Enjoindre les magistrats à accorder la mise en
liberté provisoire et la mise en liberté conditionnelle, surtout
les établissements doivent en informer les
75
détenus de cette faculté et les encourager
à recourir à des peines substitutives à
l'emprisonnement.
Visant à améliorer les conditions de
détention et à respecter les Règles minima sur le
traitement des détenus
Dans le domaine alimentaire :
w' Distribuer régulièrement et de façon
contrôlée les aliments ;
w' En favorisant la communication des détenus avec
l'extérieur et leur famille (notamment en supprimant toute forme de
monnayage des visites) afin de suppléer par les apports de nourriture
;
w' En favorisant l'incarcération des détenus
dans les établissements pénitentiaires proches de leur lieu
d'origine ou de leur famille ;
w' Développer le travail des détenus y compris
les travaux d'intérêt collectif particulièrement ceux
pouvant augmenter l'autosuffisance alimentaire ;
w' Coordonner l'intervention des divers organismes caritatifs
ou humanitaires qui interviennent pour apporter une aide alimentaire ;
Dans le domaine médical :
w' Respecter la législation en matière de
transfert pour hospitalisation (art 60 de l'Ordonnance 344) ;
w' Séparer les personnes détenues atteintes de
maladies infectieuses de la population pénitentiaire
générale pour éviter la propagation de ces maladies et
leur administrer un traitement médical adapté à leur
état ;
w' S'assurer que les médecins ainsi que les infirmiers
de l'Etat s'acquittent effectivement de leurs tâches dans les prisons
;
w' Reconnaître, officiellement, aux médecins
engagés bénévolement dans les soins des détenus, le
droit de consulter et de soigner les prisonniers malades
;
w' Envisager des visites médicales dans les cachots ;
76
w' Traiter les détenus malades sur un même pied
d'égalité, sans aucune discrimination liée à leur
rang social, les motifs de leur arrestation, leurs tendances politiques,
etc.
w' Ouvrir dans les hôpitaux publics proches des prisons,
un pavillon pour détenus malades en transfert
Dans le domaine de l'adoucissement des conditions de
détention :
w' Favoriser l'exercice physique, le sport
w' Faciliter l'usage de radios, TV, lectures, etc.
Visant à réhabiliter le système
pénitentiaire :
w' Augmenter les effectifs du personnel pénitentiaire
notamment le personnel féminin ;
w' Assurer une formation de base et un recyclage du personnel
pénitentiaire en remettant en route le Centre de formation du personnel
judiciaire qui fonctionnait à Kinshasa-Gombe et dont le but était
la formation du personnel judiciaire (greffier, huissier, gardien de prison,
surveillant, etc.
w' Réhabiliter les prisons militaires permettant ainsi
de diminuer la surpopulation de nombreuses prisons et de séparer
détenus civils et militaires ;
w' Remettre en état des établissements de garde
et d'éducation pour les enfants afin d'éviter la présence
de mineurs dans les prisons et y assurer un encadrement des mineurs en vue de
leur réinsertion par des modules spécialisés en
matière d'éducation civique et morale et d'apprentissage des
métiers ;
w' Remettre en état la fourniture de la restauration et
des soins médicaux.
w' Remettre en route dans les prisons les activités de
production agricole et artisanale et plus particulièrement celles visant
à augmenter l'autosuffisance alimentaire notamment par la mise en place
de projets à caractère durable.
77
|