La famille moderne est relationnelle
- La famille moderne s'est construite progressivement comme un espace
privé où les membres de la famille ont apprécié
davantage d'être ensemble et de partager une intimité, attentifs
à la qualité de leurs relations. Cette séparation
progressive de l'espace public et de l'espace privé va de pair avec
l'augmentation du poids de l'affectif dans la régulation des rapports
interfamiliaux. Le visible de la famille défini par la forme ou la
structure, élément le plus simple à décrire
statistiquement, risque de faire disparaître cette attention aux
relations, éléments le plus important théoriquement.
- A la famille moderne, nous associons le terme
« relationnelle » retenant ainsi la caractéristique
principale dont, dès 1892, Emile Durkheim a donné à
l'institution : « Nous ne sommes pas attachés à notre
famille que parce que nous sommes attachés à la personne de
notre père, de notre mère, de notre femme, de nos enfants. Il en
était tout autrement autrefois où les liens qui
dérivaient de choses primaient au contraire à ceux qui
venaient des personnes, où toute l'organisation familiale avait tout
pour objet de maintenir dans la famille les biens domestiques, et où
toutes les considérations personnelles paraissaient à
côté de celles- là ».50(*)
La famille moderne est individualiste
- Pour Emile Durkheim, la centration sur les personnes est associée
à une contraction de la famille. La zone centrale de la famille
conjugale est composée par le mari, de la femme et des jeunes enfants,
entourée des zones secondaires, les ascendants et les descendants. Avec
cette loi de contraction ou d'émergence progressive, Durkheim exprime
une deuxième idée : la forme de la famille dépend
des conditions les plus fondamentales du développement historique. Elle
doit nécessairement se contracter à mesure que le milieu
social avec lequel chaque individu est en relations immédiates
s'étend davantage. En effet, au fur et à mesure que le milieu
devient plus vaste, il laisse un plus libre jeu aux divergences privées,
et, par conséquent, celles qui sont communes à un plus petit
nombre d'individus cessent d'être contenues, peuvent se produire et
s'affirmer.
- Du fait des transformations historiques de la société, la
famille et les relations intrafamiliales se transforment car les individus
qui composent la famille changent en quelque sorte de nature sociale.
L'affaiblissement de ce qu'il nomme « communisme
familial »- ou encore la communauté - se traduit par une
montée de l'individualisme. La personnalité des membres de la
famille se dégage de plus en plus du cercle domestique. Les
divergences individuelles deviennent toujours plus nombreuses et plus
importantes.
- La famille moderne est un groupe avec des membres dont
l'individualité est plus grande qu'antérieurement. Ces
divergences individuelles s'accentuent, se consolident, et comme elles sont le
bien de la personnalité individuelle, celle-ci va
nécessairement en se développant. Chacun prend davantage sa
physionomie propre, sa manière personnelle de sentir et de penser.
Cette individualisation des membres de la famille limite le communisme
familial puisque ce dernier suppose au contraire l'identité, la fusion
de toutes les consciences au sein d'une même conscience commune qui
les embrasse. La famille est contrainte de se transformer pour permettre
à ses membres d'exprimer leur physionomie propre. L'indépendance
et l'autonomie de l'individu, libéré en partie des contraintes
propres à la logique d'une famille plus communautaire ont des effets
importants sur le fonctionnement interne du groupe domestique.
* 50 F. SINGLY, Sociologie de
la famille contemporaine, 3e édition refondue, Paris, Armand
colin, 2007, p. 13.
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