Formation professionnelle continue des enseignants et rapport à leurs besoins: cas des professeurs de français de l'enseignement secondaire technique et professionnel de Ouagadougou( Télécharger le fichier original )par Barthélemy TENKODOGO Université de Rouen/France - Master 2 pro Ingénierie et Conseil en Formation 2011 |
PARTIE 5 : L'ANALYSE DES RESULTATS1. Analyse des résultats et solutions proposées1.1. Analyse des résultats1.1.1. Synthèse des entretiens sur le contexte de travailA ce niveau nous avons demandé aux enseignants de nous parler de leurs expériences de l'enseignement-apprentissage du français quand dans l'enseignement secondaire général (ESG) quand ils y étaient et maintenant dans l'enseignement secondaire technique et professionnel (ESTP). Nous avons utilisé cette entrée a priori pour recueillir la ou les perceptions des enseignants à travers une comparaison entre les deux environnements. Nous constatons que la moyenne d'ancienneté de nos interviewés dans l'enseignement secondaire technique et professionnel est environ de sept (7) ans. 1.1.1.1 Les perceptions des enseignantsSur la perception de leurs tâches dans l'enseignement technique et professionnel, nous les classons en deux catégories : ceux qui pensent qu'il y a une différence ou spécificité entre l'enseignement-apprentissage du français dans l'enseignement général et dans l'enseignement technique et professionnel et les autres. 1.1.1.1.1 La perception d'une différence ou d'une spécificité pour la première catégorieAu niveau du volume horaire Le volume horaire pour certains enseignants est un facteur de différenciation entre l'enseignement général et l'enseignement technique et professionnel et cela à un impact sur le contenu. Les propos suivants en témoignent : E4 : « Différence au niveau du volume horaire 3h » E2 : « La pratique est différente au niveau de l'enseignement technique et professionnel et de l'enseignement général parce que le contenu change et le volume horaire change (3h). » La confirmation des écrits fonctionnels dans la professionnalisation des sortants Dans l'enseignement technique et professionnel les écrits fonctionnels participent à la professionnalisation des sortants de ce système. Les écrits fonctionnels sont la lettre de motivation, la demande de stage, le rapport de stage, le compte rendu, le procès-verbal. Ils permettent à l'élève une fois sur le marché de travail de pouvoir chercher un emploi, répondre à un entretien, rechercher un stage, produire son rapport de stage. Ces écrits sont alors importants même si ils ne sont pas évalués à l'examen. Certains les apprennent aux élèves d'autres non. E1 : « Il y a les écrits professionnels en plus dans le programme de l'enseignement technique qui met l'accent sur l'aspect professionnel du français en lien avec le profil du sortant. En bep1 et bep2 je fais les écrits professionnels. ». E8 parle de nuance entre son expérience dans l'ESG et celle dans l'ESTP : « Au niveau du programme entre l'enseignement général et l'enseignement technique et professionnel, il y a une nuance .En termes de nuance, il y a les écrits fonctionnels.». E9 parle aussi des écrits fonctionnels même s'il reconnait qu'il ne le fait pas en classe pour des questions de temps au regard du volume horaire par semaine (3h). Le choix des textes d'étude à donner aux élèves Tous les enseignants reconnaissent qu'ils choisissent leur texte en tenant compte du profil professionnel du sortant. C'est ce que recommandent les instructions officielles de l'enseignement du français. Ce profil est lié à la matière technique principale comme la comptabilité, l'économie, l'industrie...Le choix des textes se portent alors sur le contenu. E4: «Je choisis des contenus tels que les textes en rapport avec les filières techniques des élèves » ; « Pour la différence, je le fais dans le choix des textes d'étude orienté le plus vers leur spécialité ». E5 va dans le même sens dans le but de faciliter la compréhension des élèves lors de l'exploitation du texte : « Dans le resumé le choix des textes se faits me concernant en lien avec la filière des élèves pour les facilité la compréhension du texte. » Cependant il reconnaît que s'il le fait en classe, à l'examen, le sujet peut porter sur tout type de texte ou de situation. E6 et E5 partagent la même réflexion sur le choix et la différenciation des textes à enseigner l'enseignement en lien avec les options de formation des élèves différent de l'enseignement général : « Enseignement du français à plus trait à leur domaine spécifique c'est-à-dire les options de formation. Je ne peux enseigner comme si j'étais dans un lycée d'enseignement général. ; « Au début j'ai pensé que je pouvais faire comme dans l'enseignement général, mais, il fallait sans cesse que j'adapte ma pédagogie à la réalité de l'enseignement technique. » La motivation des élèves comme différence La dernière spécificité selon les enseignants qu'il faut prendre en compte dans l'ESTP ce sont les élèves. En effet, il revient dans leurs propos la question de la démotivation ou du niveau des élèves de l'enseignement technique et professionnel. Le français comme matière est relégué au second rang en dehors du cours sur les écrits fonctionnels ou leur intérêt est vif parce qu'ils seront amenés à chercher des stages ou des emplois. E6 et E3 diront respectivement à ce sujet: « Pas de différence à première vue sauf au niveau de la motivation » ; « malheureusement, au niveau de l'enseignement technique et professionnel, les élèves le relègue au second par rapport à leur matière de base qui est la comptabilité, le secrétariat, et les mathématiques financières ». Le constat de cette démotivation par les enseignants constitue une entrave à l'enseignement-apprentissage du français dans ce milieu. E7 et E9 l'expriment en ces termes : « Il y a comme une démotivation, un manque d'intérêt que je constate chez les élèves en enseignement technique. Ma tâche se résume souvent à chercher à les motiver. La relation pédagogique se trouve en ce moment mise en rude épreuve pour l'enseignant qui cherche sans cesse la meilleure façon de faire passer son message quitte à alléger le contenu de son cours. E10 : « Ici on ne peut pas maximiser...Il faut beaucoup diluer le français et il faut être un peu plus souple avec eux car c'est des gens qui ne s'intéressent pas trop au français. Diluer c'est-à-dire quand tu essaies de faire un cours de français vraiment comme il faut c'est-à-dire comme si tu faisais à des élèves de l'enseignement général. Si tu fais le cours avec cette intensité, ils ne vont pas comprendre. Par exemple à des élèves de l'option A (général) c'est différent. ». L'environnement de l'enseignement technique et professionnel à conduit E8 à faire fi de l'enseignement de la littérature : « Il y a un changement total d'enseigner en général et en enseignement technique et je l'ai appris à mes dépens. Tout ce qui est par exemple purement littéraire, ils ne s'y intéressent pas. » Cet environnement a une influence sur les actions de l'enseignement-apprentissage du français des professeurs qui se sont trouvés dans ce milieu après un passage de l'enseignement secondaire général à celui technique et professionnel. Tout semble devenir nouveau, différent par rapport au milieu antérieur. Ils se trouvent devant un cas de hiatus entre la situation nouvelle et la situation ancienne c'est-à-dire entre le prescrit et la réalité du terrain d'où se dégagera certainement l'attente individuelle en formation. Ainsi à ce sujet E8 dira : « Au général on a tendance à être plus rigoureux dans la démarche, dans les attentes vis-à-vis des élèves et plus rigoureux dans les devoirs contrairement au technique. » Il y a un relâchement dans l'enseignement-apprentissage du français, ce qui montre l'enseignant fait avec la nouvelle situation à laquelle il est confronté. Cela traduit le travail réel sur le terrain. C'est la perception d'une spécificité liée au milieu qui impose une adaptation du comportement pédagogique de l'enseignant ou le conduit tout simplement à ignorer un élément inscrit au programme : « Cette réalité m'a amené à ne pas faire la littérature française. Il y a un problème de motivation. » . L'enseignant se trouve devant une situation où il n'arrive pas faire son travail comme il le souhaite. En resumé, les élèves étant au centre de l'apprentissage, leur désintérêt impacte sur le prescrit pédagogique et didactique de l'enseignant. L'enseignant se trouve confronté aux représentations des élèves du cours de français et peut être de son importance dans leur cursus professionnalisant. Aussi, il a besoin de compétences professionnelles qui lui permettent de travailler à partir des représentations des élèves d'une part et de développer l'implication des élèves dans leur apprentissage d'autre part.48(*) Aussi cette perception des enseignants de la spécificité des élèves liée à l'environnent technique et professionnel montre dans leur propos que leur enseignement-apprentissage du français ne s'effectue pas comme ils le veulent au plan professionnel : cours de littérature ignorée ou non faite, écrits fonctionnels enseignés de façon frontale, contenu du cours allégé, assouplissement de la rigueur. Cet ensemble de situation-problème constitue pensons-nous un écart entre le travail prescrit par le programme de français et le travail réellement fait dans la pratique de l'enseignement-apprentissage du français. Il résulte pour les enseignants de façon implicite un sentiment d'impuissance à faire correctement leur travail comme ils le voudront49(*). Or, c'est ce manque, cette impuissance ou insatisfaction implicite lié au contexte de l'enseignement secondaire technique et professionnel qui constitue le motif de l'expression d'un besoin en formation50(*). * 48 Philippe Perrenoud, Formation continue et développement de compétences professionnelles, In Éducateur 1996, n° 9, pp. 28-33, Université de Genève, 1996 http://www.unige.ch/fapse/SSE/teachers/perrenoud/php_main/php_1996/1996_27.html, consulté le 4 juillet 2012 * 49 Thierry Ardouin, op.cit * 50 Alain Meignant, op.cit |
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