Source:district de
santé de Guéré(année 2011)
Eu à cet égard, le gouvernement camerounais
à travers le Ministère de la Santé Publique, avec l'appui
des organismes partenaires (UNICEF, PAM, HCR, HKI), a depuis 2007 mis en place
le programme de prise en charge communautaire de la malnutrition aiguë.
Les événements politiques survenus au Tchad en
février 2008 ont entrainé un afflux des refugiés Tchadiens
au Cameroun, particulièrement dans le département du Logone et
Chari dans l'Extrême Nord, fragilisant davantage la situation. Pour
répondre à cette urgence, en vue de la prise en charge
nutritionnelle des enfants, l'approche «Community Management of Acute
Malnutrition » a été adoptée avec la mise en
place de 34 centres de nutrition supplémentaire et de 4 centres de
nutrition thérapeutique. Ces centres ont pris en charge près de
3000 enfants malnutris aiguë réfugiés et camerounais dont
35% ont guéri en 2008. Cette composante «curative» a
été renforcée par la suite, à partir de septembre
2008, par une composante préventive ayant pour socle les Actions
Essentielles en nutrition, par le Gouvernement du Cameroun, UNICEF et HKI.
Ce programme a pour objectifs généraux de
réduire le taux de la malnutrition aiguë dans deux régions
où la prévalence de la malnutrition est de 14,2%, dans
l'Extrême- Nord et 15,2% dans le Nord représente presque le double
de la prévalence nationale (7,2%). Hors, selon les normes humanitaires,
lorsque la prévalence est supérieure à 10%, la situation
nutritionnelle est sérieuse et à 14%, elle a atteint le seuil
d'urgence; la malnutrition étant la résultante d'un ensemble de
facteurs complexes en relation entre eux. Les pratiques d'allaitement maternel
inappropriés et non conformes (selon l'OMS/UNICEF/MINSANTE) ainsi que la
qualité et la quantité insuffisante des aliments de
complément ont été identifiés comme des facteurs
favorisant la malnutrition infantile dans ces deux régions (MICS, 2006;
MINSANTE, 2010).
Entre 6 et 8 mois, près de 80% d'enfants dans
l'Extrême Nord reçoivent un aliment de complément contre
72,8% dans le Nord. Par ailleurs, la proportion d'enfants de 6 à 23 mois
ayant reçu une alimentation diversifiée est de 43,9%
(Extrême Nord : 48,4% ; Nord : 35,9%). Seulement 35,3%
d'enfants âgés de 6 à 23 mois dans les deux régions
reçoivent une alimentation de complément acceptable.
1.2. JUSTIFICATION DE L'ETUDE
La conduite de cette étude est fondée sur un
certain nombre de motivations personnelles et scientifiques.
Ø Les raisons personnelles:
Notre expérience professionnelle dans le district de
santé de Guéré nous a permis d'être témoins
des souffrances et des décès dus à la malnutrition d'un
nombre important d'enfants. Nous avons donc décidé de mieux
comprendre ce problème en espérant que les aboutissements de
notre recherche pourront contribuer à mieux le contrôler.
Ø Les raisons scientifiques:
Malgré une production alimentaire assez importante
auCameroun, l'état nutritionnel des populations en général
et celui des groupes vulnérables en particulier, ces derniers
composés particulièrement des femmes enceintes et allaitantes et
des enfants d'âge préscolaire, s'est dégradé au
cours de la dernière décennie (MINSANTE/UNICEF, 2007). La
prévalence de la malnutrition sous toutes ces formes n'a cessé
relativement de croître depuis lors. Des dix régions du Cameroun
où se vit cette situation alarmante, le district de santé de
Guéré est la zone du Cameroun Septentrional la plus
touchée. Ses trois départements supportent à eux seuls
plus de 50% du poids de la malnutrition à l'Extrême Nord Cameroun.
Il en résulte dans ces localités les taux de mortalité
plus élevés au Cameroun (MINSANTE, 2010). Parmi les causes
pouvant expliquer cette situation, les indicateurs des pratiques alimentaires
et nutritionnelles sont les plus bas du pays.
Le choix du terme de notre étude a été
orienté par l'acuité du problème de la malnutrition
surtout infantile au Cameroun en général et dans ce
diocèse en particulier. Nous avons aussi été
motivés par la rareté d'étude traitant de la malnutrition
au Cameroun, en particulier dans la région de l'Extrême- Nord.
Nous nourrissions l'ambition de contribuer modestement d'une part à
enrichir les études existantes, d'autre part à améliorer
la mise en oeuvre et efficacité des Actions Essentielles en Nutrition
(AEN).
Ensuite, la malnutrition a fait l'objet de plusieurs
recherches.Nous citerons en ici quelques unes : d'abord en 2009, Patrice
Tanang a mené une les facteurs explicatifs de la malnutrition des
enfants de moins de cinq ans dans cette partie du pays tout comme Yvant
Nguetimo qui lui aussi en 2011 s'est attardé sur les pratiques
alimentaires et la malnutrition chez les enfants. Enfin Igor de Garine qui a,
en 1985 réalisé une étude sur l'alimentation et ses
aspects sociaux. Tous ont été unanimes que la malnutrition a un
lien avec le niveau de vie des ménages, le niveau d'éducation des
parents de l'enfant, le sexe de l'enfant, l'âge de l'enfant. Quant
à nous, nous avons jugé opportun d'explorer les pistes
thérapeutiques et les représentations sociales de la
malnutrition.
Enfin, deux des dix premières causes de consultation
dans les formations sanitaires du district de santé de
Guéré notamment le paludisme et le VIH/SIDA
bénéficient déjà de la couverture d'un programme
entier de lutte contre le paludisme et le VIH/SIDA. Notre étude, de par
son originalité pourrait peut être se constituer un lobbying pour
qu'un programme national de lutte contre la malnutrition puisse aussi naitre
pour le bonheur des enfants.
En conséquence, il faut une recherche participative en
vue d'approfondir les approches socio culturelles et les savoirs
thérapeutiques de la malnutrition d'une part et, d'autre part de
contribuer à une meilleure analyse et à une bonne
compréhension des mécanismes de chacune de ces causes. Elle
pourrait aussi nous permettre de concevoir et de formuler de manière
pertinente des messages éducatifs adéquats. C'est dans ce cadre
que la présente étude a été menée.
1.3. PROBLEME
Le Gouvernement Camerounais dans ses efforts pour
améliorer la santé et surtout le bien-être des populations
et particulièrement celui des groupes vulnérables que sont les
femmes et les enfants s'est engagé à travers le document de la
Stratégie Sectorielle de la Santé (SSS) à réduire
d'ici 2015 de deux tiers (2/3) la mortalité des enfants de moins de cinq
ans, de trois quarts (3/4) la maternité maternelle et de moitié
la proportion des personnes souffrant de la faim. Ces objectifs du Cameroun
rejoignent les OMD que sont les Etats dans le cadre des Nations Unies (ONU).
Selon Ann M. Veneman
«La réduction de l'extrême
pauvreté et de la faim, l'abaissement de la mortalité infantile
et la réalisation de tous les autres Objectifs du Millénaire pour
le Développement (OMD) concernant la santé et l'éducation
sont largement tributaires des progrès en matière de nutrition.
Si l'on ne vient pas à bout de la malnutrition, il sera difficile
d'atteindre les autres OMD.»
Les recommandations de l'OMS, de l'UNICEF et du MINSANTE en ce
qui concerne l'allaitement maternel et l'alimentation de complément
visent de manière globale à assurer la survie et le
développement normal de l'enfant. Si ces recommandations étaient
respectées, la nation en tirerait grand profit. Elles contribueraient
grandement à éviter la malnutrition et bien d'autres
problèmes de santé auxquels sont exposés les jeunes
enfants. Ce qui permettrait de réduire la mortalité infantile.
A quatre ans de l'atteinte des OMD, la situation des
indicateurs de mortalité infantile et maternel ; et de malnutrition
reste encore alarmante pour le Cameroun en général et pour les
régions septentrionales en particulier. Les indicateurs liés aux
pratiques alimentaires quant à eux demeurent assez bas.
Il nous semble opportun et pertinent de renforcer et
d'améliorer les solutions mises en oeuvre sur le terrain pour
éradiquer la malnutrition. La mise en exergue des représentations
sociales et les itinéraires thérapeutiques de la malnutrition
chez les enfants de moins de cinq ans dans le district de santé de
Guéré devient fondamentale si l'on veut agir sur les facteurs de
risque de la malnutrition et éviter que d'autres enfants n'en soient
affectés.
C'est dans cette perspective que s'inscrit cette étude.
Le lien étroit entre la survenue précoce de la malnutrition
infantile et les pratiques d'allaitement maternel et d'alimentation de
complément adéquates des nourrissons et des jeunes étant
avéré, cette étude cherche à appréhender les
idées qui motivent ces pratiques afin d'améliorer la promotion de
la nutrition de la mère et de l'enfant dans le cadre des Actions
Essentielles en Nutrition (AEN) mises sur pied depuis 2008. Ceci contribuera
à améliorer la santé de cette population vulnérable
et de faire reculer la malnutrition au Cameroun en général et
dans ces régions en particulier.
1.4. PROBLEMATIQUE
De nombreux facteurs et maladies se conjuguent pour accroitre
la mortalité des enfants au-delà des impacts individuels. La
malnutrition est responsable d'une part importante des décès
d'enfants, directement ou indirectement (comme cofacteur aggravant d'autres
pathologies), d'une forte morbidité et de séquelles touchant tous
les aspects de développement (Simondon et al. 1989 ; WHO Working
Group, 1986). Chaque année, la dénutrition contribue au
décès d'environ 5,6 millions d'enfants de moins de cinq ans. Un
enfant de moins de cinq ans sur quatre- soit 146 millions d'enfants dans le
monde en développement - présente une insuffisance
pondérale par rapport à son âge (UNICEF, 2006) : ce
qui augmente son risque de décès prématuré.
D'après la même source, la dénutrition est la cause
sous-jacente d'environ 53% des décès d'enfants de moins de cinq
ans. Elle affecte durablement le potentiel de vie des individus et des
communautés, le développement social et économique en
pâtit ainsi que le développement intellectuel des individus. Il
s'agit là, de la spirale infernale dans laquelle beaucoup de pays
africains se trouvent confrontés.
La malnutrition infantile provient rarement d'un seul niveau
d'explication à l'exclusion des autres, mais d'une imbrication de
facteurs en résonance les uns par rapport aux autres. Si on veut
réduire donc la mortalité infantile, il est nécessaire
d'en comprendre d'abord les facteurs qui la sous-tendent et les
mécanismes qui les régissent. L'allaitement exclusif au sein
pendant une période de six mois présente bien des avantages pour
le nourrisson et la mère, et notamment l'insigne avantage de
protéger contre les infections gastro-intestinales, tant dans les pays
en développement que dans les pays industrialisés. Une mise au
sein précoce, dans l'heure qui suit la naissance, protège le
nouveau-né des infections et réduit le taux de mortalité
en rapport.
Pour nous, il s'agit d'établir un partenariat avec la
communauté et les responsables des services de santé du
diocèse en vue d'avoir une même vision thérapeutique de la
malnutrition.
Le partenariat dont il est question se décline en
termes de son appropriation par les communautés. Les responsables de
santé peuvent aider à réaliser l'appropriation en
impliquant les communautés dans les différentes étapes de
planification et de mise en oeuvre du programme. Pour impliquer davantage les
communautés du diocèse dans la prise en charge de la
malnutrition, nous épouserons l'idée de l'AEN(2009) :
· Pour la planification de programme, parler de
l'importance des problèmes de nutrition avec les représentants de
la communauté plus précisément les Maires, les
Députés, les autorités traditionnelles et religieuses,
les autorités administratives locales de la nécessité de
résoudre ces problèmes.
· Pour l'évaluation des besoins, donner aux
représentants de la communauté la responsabilité
d'entreprendre la grande partie des activités d'évaluation des
besoins et de tous les choix de conception de programmes.
Pour l'organisation et la gestion, utiliser plutôt les
structures existantes dans la communauté -même si elles ne
constituent pas un « comité » classique-qu'une structure
conçue en dehors de la communauté. Consacrer du temps au
développement des capacités du groupe local pour conduire la
communauté dans le dialogue avec les agences externes, et
développer leurs capacités de gestion.
· Pour l'organisation des activités
quotidiennes, tenir des réunions avec des petits groupes, près
des domiciles des mères en leur permettant de venir avec leurs enfants.
Tenir les réunions les jours et les heures convenables pour les
mères de jeunes enfants.
· Pour la formation, utiliser une formation sur le
tas, basée sur la résolution de problèmes pour les
travailleurs basés dans la communauté et les organisations
communautaires au lieu de proposer des ateliers avec des cours magistraux et
des théories.
· Pour le suivi, l'évaluation, et
l'échange d'information, utiliser des indicateurs simples qui
reflètent les priorités de la communauté, et utiliser des
méthodes simples de collecte de données. Il est essentiel de
donner aux communautés le pouvoir de posséder les informations et
de s'en servir pour prendre des décisions.
1.5. QUESTIONS DE RECHERCHE
Après énonciation du problème et de la
problématique, nous posons à présent les questions de
recherche. Ce questionnement est constitué d'une question centrale et
des questions secondaires.
Ø QUESTION
PRINCIPALE
Notre question principale a deux volets et est formulée
ainsi qu'il suit: Quels sont les représentations sociales et les
recours thérapeutiques de la malnutrition chez les enfants de moins de
cinq ans dans le district de santé de Guéré ?
Ø QUESTIONS
SECONDAIRES
Quelles sont les perceptions socio culturelles de la
malnutrition dans les ménages du district de santé de
Guéré?
Quelle est l'influence des savoirs thérapeutiques
endogènes de la malnutrition sur la santé des enfants de moins de
cinq ans dans le district de santé de Guéré ?
1.6. HYPOTHESES DE RECHERCHE
Les hypothèses dans un travail scientifique sont des
réponses provisoires aux questions de recherche.Quelles soient
confirmées ou infirmées à posteriori, cela
n'oblitère pas la qualité des données. Nous avons ainsi
une hypothèse principale et d'autres dites secondaires.
Ø HYPOTHESE
GENERALE
L'hypothèse générale qui sous-tend cette
étude est la suivante : La malnutrition dans le district de
santé de Guéré serait influencée par les
perceptions socio culturelles et la pluralité des chemins
thérapeutiques empruntés par la population.
Ø HYPOTHESES
SECONDAIRES
Les hypothèses secondaires à tester dans cette
étude sont les suivantes :
H1: Les croyances socioculturelles
influenceraient l'état nutritionnel des enfants de moins de cinq ans. En
effet, plus le système de croyance est dominant, plus les enfants sont
vulnérables à la malnutrition.
Même remarque que SAN17
H2: La multiplicité des
savoirsthérapeutiques sur la malnutrition influencerait la restauration
de la santé de l'enfant.
Cette hypothèse est sans lien avec la question
posée. Je propose de reformuler une question secondaire 2 qui sied
à cette « bonne « hypothèse.
1.7. OBJECTIFS DE L'ETUDE
Les objectifs constituent le but à atteindre à
partir d'un canevas de recherche méthodique et scientifique. Etant
donné que ces objectifs sont en connexion directe avec les questions et
les hypothèses de recherche, nous en aurons un qui est principal et
trois dits secondaires.
Ø OBJECTIF
GENERAL
L'objectif principal de cette étude est d'analyser et
de décrire les perceptions socioculturelles des personnes qui s'occupent
de la nutrition des enfants de moins de cinq ans.
Ø OBJECTIFS
SPECIFIQUES
Spécifiquement, il est question de:
· Déterminer l'influence des
représentations sociales sur la malnutrition
· Explorer l'influence des savoirs
thérapeutiquesendogènes nutritionnels sur la santé de
l'enfant
1.8. INTERETS DE L'ETUDE
L'intérêt de l'étude revêt deux
aspects : l'intérêtthéorique et
l'intérêtpratique de l'étude.
Ø INTERET
THEORIQUE
L'intérêt théorique renvoie à la
contribution intellectuelle et ou scientifique à l'avancement des
connaissances dans le domaine de la malnutrition chez les enfants de moins de
cinq ans.
Dans le district de santé de Guéré, cette
étude est l'une des premières études
réalisées sur le thème que nous avons choisi.Les
résultats de notre étude contribueront certainement à la
mise en place des informations endogènes sur la santé
susceptibles d'alimenter les exploitations à des fins
intellectuelles.
Ø INTERET
PRATIQUE
L'intérêt pratique renvoie à
l'utilité effective des résultats de la recherche.En 2009, le
programme AEN a vu le jour à côté des autres programmes de
prise en charge de la malnutrition mise sur pied par le Ministère de la
Santé Publique avec l'aide des partenaires( UNICEF , HKI, PAM) depuis
2009 en réponse à la situation nutritionnelle alarmante dans les
régions du Nord et de l'Extrême Nord (Nguetimo, 2011).
Son but majeur est la promotion des bonnes pratiques
alimentaires et l'éducation nutritionnelle pour le changement des
comportements.Au niveau du district de santé,ses principales
activités sont :
· Contrôler les problèmes de nutrition,
identifier les sous groupes de population exposés à des
problèmes nutritionnels, et canaliser les ressources
supplémentaires vers les secteurs à haut risque ;
· Fournir des ressources et des outils pour la mise en
oeuvre d'activités de nutrition dans les structures de santé et
dans les communautés ;
· Mettre à jour les politiques et les protocoles
de nutrition ;
· Mener des actions spéciales en complément
aux services de routine, par exemple des campagnes de masse pour la
distribution de micronutriments ;
· Mettre en place des structures pour la prise en charge
des cas de malnutrition et d'anémie grave ;
· Travailler en partenariat avec les prestataires
privés exerçant dans le district (AEN, 2010)
Cette étude pourra être importante pour AEN dans
la mesure où les résultats qui en découleront permettront
de formuler des messages de communication pour le changement de comportement
adapté.
En outre, les résultats de cette étude pourront
améliorer l'impact des programmes de prévention et de lutte
contre la malnutrition. Ainsi, la réduction de la malnutrition
contribuera fortement à la baisse de la mortalité des enfants
permettant au Cameroun de cheminer vers l'atteinte des objectifs des OMD. Notre
souhait est qu'un programme national de lutte contre la malnutrition soit mis
en place.
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