2. La place des femmes au Maroc
Au Maroc, les avancées concernant
l'égalité hommes-femmes sont réelles, et sont notamment
dues au mouvement réformiste (Nahda) porté par les mouvements
féministes depuis la fin des années cinquante et surtout
quatre-vingt-dix. La stratégie mise en place semble être celle des
« petits pas », dans la conscience de ce qui est socialement et
politiquement envisageable de demander, et qui pourrait se résumer ainsi
: « oui à l'école et au travail, oui mais à
l'évolution de la famille, non au bouleversement des rôles sexuels
entre hommes et femmes ».
Les avancées concernant l'émancipation
féminine au Maroc sont indéniables, depuis les ouvrages
écrits dans les années soixante-dix par Germaine Tillon et Pierre
Bourdieu : la scolarisation est obligatoire pour les filles comme pour les
garçons depuis 1963 au Maroc et les filles sont désormais plus
nombreuses que les garçons à obtenir le baccalauréat. Au
Maroc, l'âge du mariage moyen a reculé, et le nombre d'enfants par
femme est estimé à 2,20 en 2012. La scolarisation, l'urbanisme,
l'extension du salariat, mais également la dégradation de la
situation économique, qui rend de plus en plus nécessaire
l'apport d'un deuxième salaire, influent également sur
l'évolution de la condition féminine, notamment en leur donnant
accès au monde du travail.
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Néanmoins, l'évolution générale
masque les disparités entre ville et campagne, tant en matière de
scolarisation que de taux d'activité féminine. Au Maroc, selon le
Haut-Commissariat au Plan, le taux d'activité féminin est de
26,6% et de 75,9%14 pour les hommes. Si on peut se poser la question
de la déclaration du travail effectué, qui irait dans le sens
d'une sous-estimation par les chiffres officiels de l'activité
féminine, néanmoins, ces chiffres sont là pour nous garder
de la généralisation à partir du seul cas des femmes
diplômées, urbaines, et de milieu favorisé.
L'examen des textes de loi qui régissent le statut des
femmes au Maroc n'est guère encourageant au sujet des marges de
manoeuvres des femmes. La modernisation en 2004 de la Moudawana (code de la
famille) passe pour la réforme phare du règne de Mohammed VI, et
témoigne de la difficulté à composer avec la charia : sans
être interdite, la polygamie est rendue impossible. La
responsabilité parentale est partagée. Les droits et devoirs des
époux deviennent réciproques, l'âge du mariage porté
pour les deux sexes à 18 ans. La répudiation ne disparait pas,
mais est soumise au contrôle judiciaire. Le divorce judiciaire peut
être demandé par les deux époux. La répartition des
biens après le mariage n'est plus soumise à la possession des
titres de propriété par l'épouse, etc. Mais
l'héritage reste inéquitable (la fille ayant droit à une
demi-part par rapport au garçon). Il y a par ailleurs loin de la loi
à la règle : si l'âge du mariage au Maroc est fixé
à 18 ans, en 2007, les juges de la famille ont accepté plus de
85% des demandes précoces.
Le 10 février dernier, le gouvernement marocain a
permis la levée des réserves exprimées à la
Convention sur l'élimination de toutes les formes de discriminations
à l'égard des femmes (CEDAW). En résumé, cela veut
dire que ce gouvernement va modifier sa législation nationale et va
ainsi faire un pas de plus vers l'égalité juridique des femmes au
Maroc.
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