C. La place des femmes, un enjeu au coeur des
politiques culturelles
1. Etat des lieux mondial de la condition
féminine
En abordant la question de la condition féminine, il
s'agit de s'intéresser aux relations entretenues entre les femmes dans
la société - les valeurs et les exigences spécifiques que
cette dernière leur impose ou propose - et les conséquences qui
en résultent.
Plusieurs indicateurs existent afin d'analyser la place des
femmes dans l'organisation sociale, ceux-ci permettant de mettre en avant le
fait qu'elles sont mondialement plus touchées que les hommes par les
problèmes de développement. Le Programme des Nations unies pour
le développement (PNUD), programme de fonds de l'ONU qui a pour
rôle d'aider les pays en développement en leur fournissant des
conseils, a mis en place deux Indices de Développement Humain (IDH).
L'Indicateur Sexo-Spécifique de Développement Humain (ISDH) et le
l'Indicateur de la Participation des Femmes (IPF). Le premier, l'ISDH, mesure
le niveau moyen atteint par chaque pays, l'ISDH corrige le résultat du
niveau moyen de l'IDH en le recalculant pour les deux sexes
séparément, de façon à refléter les
inégalités sociologiques entre femmes et hommes. Quant à
l'IPF, il mesure la représentation relative des femmes au niveau du
pouvoir économique et politique. Ces indicateurs permettent
d'établir un état des lieux de la condition féminine
ancré dans le présent, mais également d'analyser les
évolutions ou régressions ayant eu lieu.
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Il semble que la condition féminine se soit grandement
améliorée sur bien des points depuis 1986 (date de la
première édition de l'Atlas)13. En tête de ces
progrès, l'alphabétisation des femmes et des filles et leur
scolarisation, l'acquisition du droit de vote, du droit de travailler et la
signature par de nombreux gouvernements de traités internationaux visant
à l'amélioration des droits de la femme. Cependant, les
résultats nous emmènent à constater que le monde reste
divisé. En effet, le fossé entre pays riches et pays pauvres
amplifié par la mondialisation s'est encore creusé et plus de
femmes et d'hommes vivent aujourd'hui dans la misère qu'il y a dix ans,
les femmes restant les plus pauvres d'entre les pauvres. Les politiques
d'ajustements structurels imposées par les pays riches ont plongé
les pays les plus démunis dans des crises sociales et économiques
au sein desquelles les femmes sont en première ligne. Afghanistan,
Bosnie ou Rwanda, pour ne citer qu'eux, ont été laminés
par des guerres qui lèguent aux populations des conditions de vie
difficiles. Les femmes souffrent dans ces conflits des viols en nombre, de la
permanente remise en cause de leurs droits, des problèmes de vie
quotidienne, du poids d'un intégrisme religieux, le tout reposant sur
l'hypothèse patriarcale selon laquelle il appartiendrait à
l'homme de contrôler la femme. Cependant, la plupart des gouvernements du
monde se sont engagés, au moins en principe, à respecter
l'égalité entre hommes et femmes. La Convention pour
l'élimination de toutes formes de discrimination à l'égard
des femmes (CEDEF) adoptée par les Nations unies en 1979 est
entrée en vigueur en 1981. Elle est le résultat d'années
de luttes menées par les femmes (mais aussi par des hommes). C'est la
Conférence internationale des Femmes des Nations unies tenue à
Mexico en 1975 qui a donné l'impulsion nécessaire à
l'établissement de cette convention. Elle constitue un jeu de normes et
de principes universels destinés à servir de
références aux politiques nationales : à long terme, il
s'agit d'éliminer toute discrimination sexuelle. La question de
l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes fait
également partie des objectifs de l'OMD de l'ONU (objectif numéro
trois).
Si le monde semble rester un espace de danger et
d'inégalités pour les femmes, une nouvelle dynamique globale
tente d'y remédier afin de lutter contre des disparités ne
répondant pas à l'idée générale
d'uniformisation nécessaire au bon fonctionnement du monde. La
dichotomie pays du Nord et pays du Sud semble une fois de plus être mise
en lumière à travers cet enjeu de sociétés. En
effet, les lois et décrets ayant un impact mondial
13 Joni Seager, Atlas des femmes dans le
monde, Editions Autrement, 2013
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sont édités par les pays du Nord en
général à destination des pays plus pauvres. Cette
situation trouve-t-elle sa légitimation dans le fait que les pays riches
ont un impact planétaire que les autres n'ont pas, leur permettant de
faire évoluer l'histoire mondiale ? L'égalité entre les
hommes et les femmes doit-elle légitimement être réduite
autour d'un point de vue (celui des pays du Nord) afin de faire marcher le
monde dans la même direction ? Quelle marge de manoeuvre reste-t-il aux
pays plus pauvres afin de trouver par eux-mêmes des solutions qu'ils
auraient choisies et mises en place ?
Ces interrogations semblent attendre une réponse qu'il
est possible de trouver en se centrant sur deux pays au sein desquels la place
des femmes est centrale dans les enjeux politiques, le Maroc et la France. Il
ne s'agira pas d'effectuer une comparaison, mais d'observer des fonctionnements
et les différences qui en résultent.
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