C- Le vendeur :
Toute personne peut proposer à une autre une vente
assortie d'un financement à tempérament ; la
réglementation des ventes à crédit, ne s'intéresse
en général qu'aux rapports entre un professionnel
commerçant et un acheteur.
Ce vendeur ne se trouve pas soumis à des règles
particulières par rapport aux autres commerçants ; en revanche,
sur le plan contractuel, la situation sera fort différente selon que le
financement est assuré par le vendeur lui-même, ou au contraire
par l'intermédiaire d'un établissement
spécialisé.88
a- le vendeur prêteur :
La vente a crédit est apparue au 20ème
siècle comme substitut du prêt sur gage, le cas du vendeur faisant
lui même crédit constitue le premier stade de cette
évolution. Cependant il ne faudrait pas en conclure trop
hâtivement que ce type de situation a totalement disparu. En effet, il
arrive souvent encore à l'heure actuelle que des commerçants
consentent eux-mêmes des crédits à leurs clients.
Juridiquement la formation d'une opération de vente
à crédit ne pose guère de problème
spécifique, dès lors que le vendeur prêteur respecte les
règles générales imposées à tout
prêteur par les lois et les règlements. Cependant la seule
difficulté spécifique à cette situation qu'a eu à
connaitre la jurisprudence récente était relative à la
liberté pour le vendeur de refuser à certains clients les
facilités de crédit qu'il avait l'habitude de consentir à
d'autres.
Un conflit peut en effet surgir entre le principe de la libre
concurrence énoncé par l'article 289 de la loi n°
06-9990 et la nécessité évidente pour tout
commerçant d'entourer chacune de ses opérations de crédit
d'un maximum de garanties. Un tel conflit ne peut être tranché de
manière
88 Falleti Francois, La vente a crédit des
biens de consommation, LITEC, P.64
89 Article 2 de la loi 06-99 : «
Les prix des biens, des produits et des services sont déterminés
par le jeu de la libre concurrence sous réserve des dispositions des
articles 3, 4, 5 et 83 ci-après. »
90 Dahir n° 1-00-225 du 5 juin 2000 portant
promulgation de la loi n° 06-99 sur la liberté des prix et de la
concurrence.
satisfaisante qu'en faisant preuve de réalisme, c'est
pourquoi la jurisprudence retient qu'un refus de facilités de
crédit habituellement consenties peut être source de
responsabilité pour le vendeur, mais elle s'empresse d'ajouter qu'un tel
refus peut se trouver justifié, eu égard à des
circonstances d'espèce.
b- La situation du vendeur, intermédiaire
d'un établissement de crédit :
Cette situation, de loin la plus fréquente, voit naitre
des rapports triangulaires entre le commerçant vendeur, le prêteur
et le consommateur. Le plus souvent, le vendeur est en relation avec un
établissement de prêt auquel il présente le dossier de son
client. Lorsque le prêteur a accepté le dossier de l'emprunteur,
il se substitue à celui-ci pour le paiement de la fraction de prix
payée à crédit.
On voit immédiatement quel avantage considérable
le vendeur retire d'une opération de vente à crédit avec
intervention d'un tiers prêteur: d'une part, il dispose d'un argument
publicitaire d'importance en pouvant proposer à ses clients des
facilités de paiement de nature à inciter ceux-ci à
l'achat, et d'autre part, cet avantage se trouve dépourvu de toute
contrepartie puisque, une fois l'opération conclue, le vendeur se trouve
déchargé de tout risque de défaillance de la part de son
client dans le paiement du prix.
Or, dans la pratique, la concurrence entre les
établissements financiers fait que le vendeur perçoit en outre
une commission versée par l'établissement financier avec lequel
il correspond pour tout contrat de crédit passé.
2- La formation de la vente a crédit :
Le contrat de financement constitue une convention autonome
passée entre un consommateur et un organisme spécialisé
dans opérations de prêt. Alors que le contrat de vente est
régi par le droit commun et est formé entre l'acheteur et le
vendeur. Nous nous trouvons donc dans l'obligation de les traiter
séparément.
a- La formation du contrat de
financement
L'acceptation de l'offre préalable de financement
analysée plus haut par l'emprunteur est une étape essentielle de
la formation du contrat de prêt, toutefois le consentement ainsi
exprimé ne produit pas d'emblée l'ensemble de ses effets, et la
vie du contrat de financement demeure précaire.91
En effet, le principe du consensualisme contenu dans le code
civil implique que le contrat se forme immédiatement par le seul
échange des consentements92. On remarque donc qu'en principe
aucune difficulté n'est relative à cet aspect de la formation du
contrat, ce qui n'est pas le cas dans l'hypothèse de sa non
formation.
En effet, et sauf dans le cas où le vendeur fait lui
même crédit, le contrat de vente à crédit voit
naitre des rapports triangulaires entre les parties. Le fait que deux d'entre
elles, l'emprunteur et éventuellement le prêteur, disposent du
pouvoir d'empêcher la formation du contrat, a
91 G. Raymond, la protection du consommateur dans les
opérations de crédit.
92 Article 19 du DOC : La convention
n'est parfaite que par l'accord des parties sur les éléments
essentiels de l'obligation, ainsi que sur toutes les autres clauses licites que
les parties considèrent comme essentielles...
rendu nécessaire la mise en place d'un système
d'information assez précis pour permettre aux cocontractants
d'être renseignés aussitôt que possible sur le devenir de
l'opération.
Par ailleurs, la non formation du contrat est
accompagnée de deux conséquences qui sont l'effacement de
l'opération dans tous ses aspects et l'absence de responsabilité
du consommateur qui a usé de sa faculté de rétraction.
b- la formation du contrat de vente :
Le contrat de vente assorti d'un financement à
tempérament se forme dans les conditions du droit commun, par
l'échange des contentements comme édicté dans l'article 19
du dahir des obligations et des contrats, il précède
chronologiquement la formation du contrat de crédit.
Par ailleurs, le principe général est
l'interdépendance entre le contrat de vente et le contrat de
financement. En effet, le contrat de vente est résolu de plein droit si
dans les délais fixés dans l'offre préalable, le
prêteur n'a pas fait connaitre au vendeur son accord pour financer
l'opération, ou si, dans ce même délai, l'emprunteur a
usé de sa faculté de rétraction.
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