TITRE PREMIER : Dispositions générales
Le droit du crédit est essentiellement régi par
le droit commercial, le droit des obligations et contrats et la loi du contrat
signé entre la banque et son client. Certains textes spéciaux
relatifs aux taux d'intérêts4 et ceux édictant
les mesures de protection du consommateur5 peuvent si besoin
interférer et remettre en cause l'accord des parties au contrat.
Bien que les contrats bancaires soient en
général des contrats types d'adhésion, le contrat de
crédit reste néanmoins intuitu personae. En effet, la
banque peut aménager la structure du contrat en fonction des
qualités, potentialités et références d'un client
en particulier et ce dans le but de le garder ou l'avoir, on parlera alors d'un
contrat sui generis, négocié et adapté au cas
d'espèce.
Cependant, quelle que soit la partie au contrat, la
réglementation prudentielle, la loi bancaire ainsi que la loi
consumériste impose au banquier et ce en sa qualité de
professionnel, de satisfaire un bon nombre d'obligations. Toutefois, les effets
issus de l'échange du consentement des parties au contrat en vue de
créer un lien juridique à but onéreux ne s'arrêtent
pas à la seule responsabilité du banquier. C'est dans ce cadre
que nous verrons que le client aussi bien personne morale que physique est tenu
de satisfaire certaines obligations et responsabilités qu'il sera tenu
d'honorer jusqu'à échéance de la date expiratoire du
contrat.
C'est dans cette optique que nous allons dans un premier lieu
analyser le dit contrat de crédit quant à sa formation (Chapitre
premier) pour ensuite nous orienter vers les obligations et
responsabilités des parties au dit contrat (Chapitre
deuxième).
Chapitre premier : le contrat de crédit
La qualification juridique du contrat de crédit
soulève certaines incertitudes qui ont par la suite été
partiellement réglées par la jurisprudence. Ces
hésitations sont principalement liées à la dispersion des
sources applicables au contrat de crédit et plus exactement au contrat
de prêt d'argent. Les débats jurisprudentiels et doctrinaux ont
fini par se fixer sur le fait que la validité du contrat de prêt
doit en premier lieu satisfaire aux conditions de formation posées par
le dahirs des obligations et des contrats et dans un second se
référer à quelques coutumes issues de la pratique
bancaire.
Cependant c'est dans une optique selon laquelle le
consommateur se voit intimidé par le banquier professionnel et donne son
consentement sans complètement assimiler la portée de
4 Circulaire N° 4/G/10 de Bank Al-Maghreb ;
Circulaire n°18/G/13 du 19 Aout 2013 modifiant la circulaire n°
19/G/2006 relative au taux maximum des intérêts conventionnels des
établissements de crédit ; Arrêté du Ministre des
Finances et des Investissements Extérieurs N°143-96 du 31/01/1996
réglementant les intérêts applicables aux opérations
de crédit
5 Dahir n°1-11-03 du 14 Rabii I 1432 (18
février 2011) formant loi n°31-08 édictant les mesures de
protection du consommateur
6 Article 230 du DOC : « Les
obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi
à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être
révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas
prévus par la loi. »
ses actes que la loi consumériste vient imposer une
condition qui devint à nos jours indispensable à la
validité de tout contrat de prêt.
C'est dans ce cadre que nous allons traiter dans une
première section des conditions de formation du contrat de crédit
a la lumière du droit commun et de la pratique bancaire pour ensuite et
dans une seconde section nous focaliser sur cette condition consumériste
qui est l'offre préalable.
Section première : Les conditions de formation du
contrat de crédit
D'une manière générale tout contrat
relève de la « théorie générale des
obligations ». Cependant du fait de la spécialité du
crédit, des dispositions expresses viennent limiter ce principe. Ce qui
se traduit par l'obligation de se soumettre aux règles posées par
le dahir des obligations et des contrats ainsi qu'aux conditions posées
par des textes spéciaux.
Sous-section première : Les
conditions de fond
Traditionnellement, la formation d'un contrat de crédit
bancaire est assujetti à la fois à l'application des
règles du droit commun (I) et à celle des règles du droit
bancaire (II).
I- Les règles du droit commun
L'accord des parties suppose la réunion de certains
éléments ou conditions de formation/validité tel qu'elles
ont été prévues par l'article 2 du dahir des obligations
et des contrats, ainsi libellé :
« Les éléments nécessaires pour
la validité des obligations qui dérivent d'une déclaration
de
volonté sont . ·
1° La capacité de s'obliger ,
2° Une déclaration valable de volonté
portant sur les éléments essentiels de l'obligation ,
3° Un objet certain pouvant former objet d'obligation
,
4° Une cause licite de s'obliger. »
1- le consentement
. ·
Le consentement comme la liberté de contracter, est une
conséquence du principe de l'autonomie de la volonté ; c'est
l'intention de faire naitre une obligation de donner, de faire ou de ne pas
faire tel que régi par l'article 230 du DOC.6 On en conclu
donc que le contrat n'est conclu que lorsque les deux parties, banquier et
client, y ont consenti.
En principe, le consentement du banquier résulte de la
seule publicité concernant tel ou tel « produit » bancaire.
Cependant encore faut-il que ce dernier accepte de traiter avec le client qui
le lui demande. En effet, il n'existe pas de droit au crédit.
En ce qui concerne le client, il constate son consentement par
sa signature apposée sur les formulaires de l'établissement de
crédit.
Par ailleurs, et conformément aux articles 39 et
suivant du D.O.C, le consentement des deux contractants doit être exempt
de vices : dol, erreur et violence.
En outre et dans le but de préserver la justice
contractuelle et l'ordre social certaines restrictions ont été
apportées au principe de la liberté contractuelle. Ces
restrictions, qui intéressent aussi bien le fond que la forme de cette
liberté peuvent être conventionnelles ou légales.
2- La capacité de s'obliger
En règle générale, toute personne
physique ou morale peut passer un acte juridique valable et, donc exercer ses
droits, à condition qu'elle ne soit pas frappée d'une
incapacité d'exercice ou d'une incapacité spéciale.
On peut alors définir la capacité comme la
reconnaissance par la loi, de l'aptitude qu'une personne peut avoir à
défendre ses intérêts, c'est pourquoi, il est indispensable
de recourir aux règles du statut personnel pour cerner à la fois
cette aptitude -capacité de jouissance et capacité d'exercice-
ainsi que les limitations qu'elle comporte -cas d'incapacité-.
Le client de la banque doit donc être
impérativement capable de s'engager. L'application de ce principe est
différente pour les personnes physiques et morales.
En ce qui concerne les personnes physiques, l'article 209 du
code de la famille7 fixe pour le marocain de confession musulmane
l'âge de majorité à 18 ans révolus sauf autorisation
d'exercer le commerce et de la déclaration anticipée de
majorité8. Cependant dans la pratique, même
représenté par son tuteur ou administrateur légal, les
banques ne peuvent consentir au mineur un crédit. Ce principe s'applique
aussi bien aux mineurs qu'aux majeurs protégés.
Par ailleurs, et en ce qui concerne les personnes morales,
les sociétés et associations ne peuvent bénéficier
des services bancaires que lorsqu'elles ont la personnalité morale.
Sinon, la banque devra contracter avec une ou plusieurs personnes physiques qui
s'engageront pour le groupement.
3- L'objet . ·
L'objet du contrat constitue l'essence même de l'acte
juridique. En matière bancaire l'objet doit être possible, licite,
déterminé et déterminable. On peut citer par exemple le
prix des services rendus par le banquier qui doit être fixé
dès la conclusion du contrat.
4- la cause . ·
Le DOC n'a pas donné de définition à la
cause, il a, en revanche, exigé non seulement son existence
réelle et effective, mais également son caractère licite
et conforme à l'ordre public et aux bonnes moeurs. La doctrine a par la
suite défini la cause comme étant la raison d'être de la
création d'une obligation contractuelle.
Dans ce cadre, et en matière de crédit, la cause
est différente selon qu'il s'agisse d'un contrat de crédit
affecté ou non affecté. En effet, dans la première
hypothèse, la remise des fonds doit être destinée à
l'accomplissement d'une prestation déterminée, les parties
doivent alors le spécifier dès la signature du contrat, la non
affectation des fonds à cette destination rend la cause illicite et
entraine nullité du contrat. Dans la seconde hypothèse,
l'emprunteur n'a pas spécifié la destination des fonds, il peut
alors en jouir librement. Cependant, les règles du
7 Article 209 de la loi n°70-03
formant code de la famille : « L'âge de la majorité
légale est fixé à dix-huit années
grégoriennes révolues. »
8 Article 218 de la loi n°
70-03
DOC viennent toutefois encadrer cette liberté en
imposant la licéité et la conformité à l'ordre
public et aux bonnes moeurs de la dite utilisation.
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