3- La jurisprudence marocaine vis-à-vis du
crédit-bail . ·
Dans les débuts du crédit-bail au Maroc, la
formule était pratiquement inconnue, au sein des tribunaux qui
assimilaient le crédit-bail tantôt à une location,
tantôt a une vente à tempérament et condamnaient les
locataires à honorer les effets impayés correspondant aux loyers
sans prononcer la restitution du matériel.
En effet, les tribunaux jugeaient souvent en se basant sur le
droit cambiaire70, le droit de propriété du bailleur
était alors controversé et son opposabilité aux tiers n'a
pas été reconnue ce qui avait des conséquences
néfastes sur le bailleur qui trouvait du mal à
récupérer son matériel en cas d'inexécution des
termes du contrat.
Néanmoins, on arrive à déceler et ce
depuis les années 90, une certaine évolution intéressante
dans les décisions des différentes juridictions du royaume.
Les tribunaux tendent à consacrer de plus en plus
nettement la spécificité du crédit-bail en confirmant le
droit de propriété du bailleur71.
C'est ainsi que la promulgation de la loi du 1er
Août 1996 régissant le crédit-bail a levé toute
équivoque : Le droit de propriété du bailleur a
été expressément reconnu et l'opposabilité de ce
droit de propriété aux tiers est depuis définitivement
acquise lorsque les formalités de publicité sont convenablement
accomplies.
La promulgation de cette loi accompagnée des
éclaircissements sur les différents aspects de l'opération
de crédit-bail donna alors naissance à une jurisprudence en la
matière. C'est dans cette optique que celle-ci vint combler quelques
lacunes législatives en posant les bases mêmes du sort du contrat
de crédit-bail en cas d'inexécution suite à une
déclaration de liquidation judiciaire du locataire. L'arrêt de la
cour de cassation est résumé comme suit : « La
liquidation judiciaire du locataire n'a aucun effet sur sa capacité
commerciale dans la mesure où le bailleur peut l'assigner en justice
pour restituer son bien loué en cas de non paiement des loyers
échus. L'article 435 du CC dispose qu'en cas de d'inexécution par
le preneur de ses obligations contractuelles relatives au paiement des
redevances de crédit-bail devenues exigibles, le président du
tribunal statuant en référé est compétent pour
prononcer la restitution de l'immeuble au vu du constat de non paiement. Le
recours à la procédure prévue à l'alinéa 1er
du présent article ne peut intervenir qu'après épuisement
des modalités de règlement à l'amiable des
différends prévues à l'article 433 du CC. Il est à
noter que ce qui est valable pour les immeubles est aussi valable pour les
meubles. Par conséquent, et dans la mesure où ledit contrat ne
prévoit pas un arrangement à l'amiable, le juge des
référés demeure compétent pour ordonner la
restitution du bien objet de location, après avoir constaté la
réalisation de la condition résolutoire stipulée dans le
contrat de crédit-bail »72.
Par ailleurs, dans un autre arrêt, la cour de cassation
confirme la résolution de plein droit du contrat en cas de non paiement
et affirme : « Les conditions générales des conventions
de crédit-bail immobilier énoncent expressément
qu'à défaut de paiement d'une échéance le contrat
est résolu de plein droit de sorte que les échéances
même non échues sont exigibles de plein droit
»73.
Dans le même ordre d'idées on retrouve un autre
arrêt de la même cour qui dispose que « Le
crédit-bail portant sur un véhicule permet au
propriétaire, en cas de non paiement par le locataire des
échéances dues, de saisir le juge des
référés à l'effet de constater la
résiliation de plein droit du contrat de crédit-bail et
d'ordonner la restitution du véhicule »74.
70 Le droit cambiaire est l'ensemble des règles
applicables aux effets de commerce.
71 Ordonnance en référé 92/994 du
04 Août 1993 du président du tribunal de première instance
de Casablanca (wafabail contre delta).
72 Arrêt n° 659 du 21 juin 2006, Dossier
numéro : 111/3/1/2005
73 Arrêt n°4659 du 05/10/2005
74 Arrêt n°821 du 13/03/2005
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