Introduction
Les questions d'échec scolaire et de la baisse du
niveau de l'apprenant sont largement débattues aujourd'hui dans les
milieux éducatifs du primaire et du secondaire au Cameroun. Face
à ces problèmes, le coupable est souvent rapidement
identifié par l'imaginaire populaire. C'est l'élève
d'aujourd'hui qui n'apprend pas ses leçons et qui n'est plus
appliqué ou assidu comme l'élève d'hier. Dans le cas de
l'apprentissage des langues et plus particulièrement de l'anglais qui
est la discipline qui nous concerne, des récriminations fusent chez les
enseignants qui estiment pour la plupart que les élèves refusent
d'apprendre l'anglais, tandis que la majeure partie des élèves
pensent que l'anglais est une langue difficile et disent n'y rien comprendre ou
pas grand chose. Cette tendance négative est régulièrement
confirmée par les statistiques de résultats scolaires qui sont
globalement mauvais. Face à ces remarques convergentes sur les
performances médiocres et même faibles de nos apprenants, nous
nous sommes intéressés à la notion de
représentation en lien avec l'apprentissage d'une langue. Selon
Castellotti (2002), les représentations sont « des images que
se forgent les apprenants des langues qu'ils pratiquent, des locuteurs de ces
langues et des pays où elles sont pratiquées. » Ces
images qui sont des entités capables d'être modifiées,
peuvent être « soit valorisantes soit inhibantes
vis-à-vis de l'apprentissage lui-même ». Pour soutenir
cet argument, elle invoque les travaux menés par certains chercheurs
à l'instar de Perrefort cité par Castellotti (2002 :11) qui
montre qu'il existe une « corrélation forte entre l'image qu'un
apprenant s'est forgé d'un pays et les représentations qu'il
construit à propos de son propre apprentissage de la langue de ce pays
». Une image négative du pays ou se parle la langue
correspondrait à la vision d'un apprentissage difficile et
insatisfaisant de cette langue ; Berger toujours cité par Castellotti
(2002 :11) mentionne l'attitude des lycéens qui changent de
représentations envers la Grande-Bretagne une fois qu'ils ont
effectué le voyage qui les met en contact avec les anglophones. A cela
s'ajoutent Muller et Pietro (2007), qui analysent une recherche entreprise par
l'Institut de recherche et de documentation pédagogiques en relation
avec l'Unesco pour confirmer cette hypothèse du lien entre
représentations et apprentissage. C'est ce postulat qui nous a
amené à jeter un regard épistémologique sur le lien
qui unit les représentations de nos élèves et leur
apprentissage de l'anglais dans le contexte plurilingue du lycée
d'Ebolowa pour tenter de comprendre comment ils se représentent cette
langue et comment ces représentations influent sur leur apprentissage.
De ce point de vue notre recherche sera un travail engagé dans la mesure
où elle décrit une préoccupation de
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notre vécu quotidien. Cependant, l'intérêt
de cette étude dépasse le simple cadre d'observation de discours
ou de pratiques langagières en classe de langue ou dans l'enceinte d'un
établissement pour s'inscrire dans le cadre plus général
d'une recherche en didactique des langues et des cultures. A ce propos,
Blanchet affirme que ce qui intéresse du point de vue didactique dans
l'enseignement des langues c'est le travail de préparation des
enseignements qui consiste pour l'enseignant et/ ou le concepteur de la
formation à s'informer sur l'état de la connaissance scientifique
de référence, à sélectionner ce qui est pertinent,
enseignable à un public donné et à le transposer dans une
pratique pédagogique. Ce travail d'information scientifique, de
sélection des contenus utiles et nécessaires et de transposition
pédagogique ne peut se faire efficacement que si l'on dispose d'une
certaine connaissance de l'apprenant. Connaissance de ses besoins, de ses
appréhensions voire de ses relations avec l'environnement social dans
lequel il évolue. D'où l'intérêt de cette
étude qui s'attellera de répondre aux questions suivantes :
- Quels sont les représentations que nos
élèves se font de la langue anglaise en rapport avec les autres
langues en présence?
- Quels liens existent-ils entre les représentations
que se forgent nos élèves de l'anglais
et leur apprentissage de cette langue dans le contexte
plurilingue du lycée d'Ebolowa? - l'environnement socio-éducatif
plurilingue dans lequel ils évoluent peut-il constituer
un levier incitatif pour l'apprentissage de l'anglais?
A titre de réponses à ces préoccupations
pour le moins scientifiques nous pouvons supposer que les
représentations des élèves au lycée sont diverses
et tendent à se polariser en fonction de la motivation. Cette
polarisation engendre des liens qui sont soit en association soit en
antagonisme avec le processus d'apprentissage. La prise en compte de la langue
maternelle, de la première langue voire des langues qui entrent dans la
distribution de l'interlangue des apprenants peut contribuer à
réduire les rapports défavorables
représentations/apprentissage et stimuler le processus d'apprentissage.
L'expérience d'une éducation plurilingue peut améliorer de
manière significative l'enseignement et l'apprentissage de l'anglais et
même des langues dans leur ensemble dans le système
éducatif camerounais.
Pour rendre compte des phénomènes
explorés au cours de cette recherche, nous allons organiser notre
travail en cinq chapitres. Le chapitre premier décrit l'environnement
historique, politique et social dans lequel se déroule notre
étude en même temps qu'il présente le cadre spatio-temporel
dans lequel s'exercent les activités enseignements/apprentissage et les
pratiques didactiques et pédagogiques qui les sous-tendent. Le chapitre
deux sera le lieu pour nous d'examiner les domaines des sciences du langage
auxquels s'applique cette
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recherche, en l'occurrence la sociolinguistique, la didactique
et la sociodidactique d'une part, et de présenter les différents
concepts qui guideront notre recherche d'autre part. Au menu de ceux-ci on
retrouvera les concepts de représentation, attitudes, apprentissage,
plurilinguisme etc. Le chapitre trois expose les principes fondamentaux
qui ont été mis en oeuvre pour recueillir les informations qui
seront analysées au chapitre suivant. Le chapitre quatre annalyse et
présente les résultats obtenus. Ce travail s'achève par le
chapitre cinq autour d'une discussion sur les résultats engrangés
et des propositions didactiques et pédagogiques.
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