Impact des difficultés de l'usine gonfreville de bouaké sur ses employés( Télécharger le fichier original )par Kouassi Kan Nestor N'DRI Alassane Ouattara - Licence 2015 |
I-2-2 Cadre théorique· Théorie de l'identité Selon cette théorie, l'entreprise est un lieu de socialisation et donc de construction identitaire. Ainsi, le travail confère au travailleur une identité, car il ne suffit pas d'avoir passé le bac, d'être marié et d'avoir un logement, encore faut-il pouvoir trouver une identité par et dans le travail sous peine de ne plus savoir ce que l'on vaut et qui l'on est. Ainsi, Renaud Sainsaulieu (1935-2002), à travers son oeuvre l'identité au travail (1977) apporte de nombreux éclairages sur les phénomènes identitaires et sur le développement des cultures professionnelles ou organisationnelles. A travers ses enquêtes menées auprès d'ouvriers, d'employés, de techniciens et de cadres, Sainsaulieu montre comment les structures d'organisation du travail construisent les modes de relations établies non seulement avec les collègues et les supérieurs mais aussi avec les amis. Nous avons mobilisé cette théorie en vue d'expliquer, le fait que les employés travaillent toujours à l'usine malgré les difficultés qu'ils rencontrent dans leurs conditions d'existences. · La théorie de la motivation Abraham Maslow publieen 1943 sa théorie selon laquelle tout individu au travail ressent des besoins qui sont sources de motivation. Il propose l'existence de besoins répartis en cinq catégories, qu'il est possible de hiérarchiser et de classer selon une pyramide : - Les besoins physiologiques : le premier niveau, le plus basique. Ces besoins peuvent être satisfaits par l'intermédiaire de la rémunération. - Les besoins de sécurité (économique, psychologique, physique) qui peuvent être satisfaits notamment en développant l'employabilité des individus. - Les besoins de sociabilité (appartenance, communication). Ils peuvent être satisfaits par un développement du sentiment d'appartenance, notamment par la culture d'entreprise, la communication interne, les groupes de projet, les activités sociales... - Les besoins de reconnaissance (estime, considération). Ils peuvent trouver écho à travers les systèmes de rémunération, l'implication des individus, le management participatif, l'empowerment6(*)des individus... - Les besoins d'accomplissement. Ils peuvent être satisfaits par le développement personnel (formation, carrière...) et l'empowerment qui permettent à l'individu de se sentir utile et compétent. Cette théorie nous permettra également de justifier que les employés s'y accrochent toujours à ce travail afin de satisfaire leurs besoins. I-3Revue critique de littératureAu regard des enjeux autour du sujet, nous avons décidé de faire le tour de la littérature sur l'impact des crises sur les groupes et ensuite sur les entreprises, notamment les conditions de vie des employés. v Impact des crises sur les groupes D'abord, sur le plan socio-économique, Patricia Justino, (2010)7(*) examine le rapport entre guerre civile et pauvreté d'un niveau micro-économique et sociale. En effet, selon elle, au niveau micro-économique, la guerre détruit les infrastructures, les institutions, les productions et les biens. Et cette destruction va diminuer la capacité de production des hommes et détruire leur positionnement économique et favorisée la croissance de la pauvreté. Au plan social, il y a un changement au niveau de la cohésion et des normes de coopération. Car,au cours des conflits, les populations étant dans les zones affectées par le conflit se déplacent vers les zones stables. Cette mutation engendre une rupture avec les alliances et les réseaux sociaux de solidarité et d'entraides établies avec les populations avec qui l'on vivait auparavant. Les déplacés sont ainsi confrontés, en plus de la perte des biens matériels à un besoin d'entraide et de solidarité ce qui va accroitre leur situation de pauvreté. Dans le même ordres d'idées,le rapport d'Oxfam, le Raial et Saferworld, (2007), évalue le coût économique des conflits armés en Afrique et estiment que 300 milliards de dollars ont été perdus depuis 1990 dans plusieurs pays Africains dont, l'Algérie, l'Angola, la Côte d'Ivoire, la République Démocratique du Congo (RDC), la République du Congo, l'Érythrée, l'Éthiopie, le Ghana, la Guinée, le Libéria, le Rwanda, la Sierra Leone, l'Afrique du Sud etc. cet argent aurait pu servir à résoudre le problème du VIH/SIDA en Afrique et faire face aux besoins de l'Afrique en matière d'éducation, d'eau potable, d'hygiène et prévenir la tuberculose et la malaria. En outre, l'Afrique perd environ 18 milliards de dollars par an dans les guerres et réduisent en moyenne l'économie Africaine de 15%8(*). Ensuite,au plan social(Yabile, 2013)9(*) examine à travers une enquête sur les conditions de vie des ménages l'impact du conflit armé Ivoirien (2002-2007) sur l'accentuation de la pauvreté. Il estime que parmi les causes sous-jacentes au décollage économique difficile des pays africains figurent les conflits armés. Ces conflits retiennent les pays les plus pauvres du monde dans un état de pauvreté et les enferment dans des économies stagnantes et /ou en régression. Il estime l'impact de la crise militaro-politique Ivoirienne sur l'augmentation de la pauvreté à 4,75% et déclare qu'elle est l'une des causes essentielles de l'accentuation de la pauvreté dans le pays. Par ailleurs, la crise a eu des conséquences dans plusieurs domaines dont le plan humanitaire (un millier de morts) et aussi économique. Ensuite, elle a engendré une mutation sociale interne au sein des populations (entre750 000 et un million de personnes déplacées à l'intérieur du pays), avec une interruption du fonctionnement des services sociaux de base et de l'administration publique dans les zones affectées et une détérioration des conditions d'éducation des enfants ainsi qu'un dysfonctionnement du système sanitaire. Selon la Banque Mondiale (2011), à l'échelle de la planète, une personne sur quatre, soit plus de 1,5 milliard d'êtreshumains, vit dans un État fragile ou touché parun conflit ou dans un pays affichant un niveau deviolence criminelle très élevé. Les pays fragiles à faible revenu ou touchés par un conflit n'ont encore atteint aucun des OMD. Les habitants de ces pays sont deux fois plus susceptibles de souffrir de malnutrition que ceux d'autres pays en développement, le risque qu'ils ne puissent envoyer leurs enfants à l'école y est plus de trois fois plus élevé, celui de voir leurs enfants mourir avant l'âge de cinq ans deux fois supérieur, et la probabilité qu'ils aient accès à de l'eau propre est plus de deux fois plus faible. Les pays qui ont été le théâtre de violences majeures durant la période allant de 1981 à 2005 ont un taux de pauvreté supérieur de 21 %10(*). Toujours au plan social, le DSRP (2009), à travers une étude identifie comme pauvre en 2008, toute personne qui a une dépense de consommation inférieure à 661 FCFA par jour, soit 241 145 FCFA par an. Aujourd'hui, une personne sur deux est pauvre contre une personne sur dix en 1985 et le nombre de pauvres a été multipliée par 10 en l'espace d'une génération. Aussi, il déplore que la pauvreté a connu une hausse tendancielle passant de 10,0% en 1985 à 36,8% en 1995 et à 33,6% en 1998 avant de remonter à 38,4% en 2002 puis à 48,9% en 2008, en raison des crises sociopolitiques et militaires successives. Il estime que le Nord est le plus touché par le phénomène de pauvreté avec près de 4 pauvres sur 5 personnes en 2008. Ce pôle est suivi par ceux de l'Ouest (63,2%); du Centre-Ouest (62,9%) ; du Nord-Ouest (57,9%); du Centre-Nord (57,0%) et du Nord-est (54,7%). La crise militaro-politique de septembre 2002 a eu également un impact négatif sur les conditions de vie des ménages. Ainsi, près de la moitié de la population totale dit avoir été directement affectée par la crise. 70,1% d'entre eux ont déclaré connaître des difficultés d'alimentation, 68,1% des difficultés à payer les soins sanitaires, 28,4% ont dit avoir perdu leur activité économique pendant que 26,3% éprouvent des difficultés à se loger. Au niveau des revenus, 67,6% de la population affirment avoir subi une diminution de leurs revenus contre 6,5% qui disent avoir observé une hausse. Le reste de la population (25,9%) n'a constaté aucune évolution du revenu. Dans le milieu éducatif, une étude menée par le ROCARE(2011), analyse les difficultés rencontrées par l'université de Bouaké pendant la crise politico-militaire de 2002 et les stratégies de maintien de cette institution. Il ressort de cette étude que la crise a occasionnéla dispersion des acteurs de l'université, la destruction des locaux, la perte de documents administratifs et du matériel de bureau et la détérioration des conditions sociales des étudiants. En outre pour assurer la continuité de cette institution, les acteurs ont dû délocaliser l'université à Abidjan. v Difficultés des usines et conditions de vie des employés des usines. Antoine, Chloé, Adeline et Pierre dans Les conditions de vie des ouvriers au 19ème siècle décrivent les conditions de vie des ouvriers de cette époque. En effet, ils affirment que les ouvriers de cette époque étaient malheureux, ils venaient pour la plupart du village et vivaient péniblement en ville. Ils percevaient des salaires très faibles et ne mangeaient que du pain et des pommes de terre, la viande étant trop chère. Comme leur salaire étaitinsuffisant, leurs enfants devaient travailler dès l'âge de huit ans dans les ateliers des usines. Ils n'ont pas beaucoup d'économie. Les quartiers ouvriers sont très peuplés. Les ouvriers sont souvent touchés par l'alcoolisme, la tuberculose. Ils travaillent beaucoup, donc rendent leurs familles malheureuses, surtout leurs enfants car ils ne voyaient presque pas leurs père étant donné qu'ils étaient tous les temps au travail. Malgré leurs heures de travail ils ont de bas salaires, des logements humides et mal- chauffés. Dans le même ordre d'idées, DONALD ROY (1952), dans une étude menée sur l'usine de métallurgie où il travaillait,analyse les sources de motivation de travail des ouvriers. Selon lui, les employés limitent volontairement leur production quand ils trouvent le barème de rémunération trop peu avantageux. Il montre que les ouvriers savent s'arrêter avant que leur rendement n'entraîne une réduction de la rémunération à la pièce ; et que le freinage global cache des phases de grande intensité, montrant que les ouvriers ont besoin de s'inventer des jeux, des défis, et aussi de s'organiser des plages de détente. Il affirme que ce freinage des ouvriers est rationnel car rien ne sert de se donner à fond et qu'à la fin l'on n'obtient aucune récompense car comme le dit l'adage « petit salaire, petit travail »11(*). Ensuite, Émilie HENNEQUIN (2009), analyse les attentes des salariés en termes de carrière. En effet, selon lui le sentiment de réussite professionnelle des ouvriers repose sur trois composantes : matérielle, psychologique et sociale.La réalisation matérielle se réfère à l'acquisition de récompenses dont les récompenses monétaires (salaires primes), les avantages accessoires (cadeaux, remises etc.), le niveau hiérarchique (position ou titre du poste) et le nombre de promotions. Le succès de carrière psychologique réside dans l'accomplissement (sentiment de s'être réaliser dans sa carrière), le succès dans l'emploi, Le succès interpersonnel(le fait d'interagir avec les autres membres de l'entreprise, L'équilibre vie privée / vie professionnelle (la carrière doit permettre de gérer conjointement les deux).Le succès de carrière social est dans le statut social (appréciation de l'ouvrier par les personnes extérieures à l'entreprise), La reconnaissance (l'appréciation des autres de la carrière d'une personne de l'intérieur ou de l'extérieur de l'entreprise), Le prestige d'appartenir à l'entreprise12(*). En outre la Fédération française du Bâtiment (FFB) (2012), dans une étude en France intituléeprévenir et guérir les difficultés des entreprises Des outils pour maintenir l'activité, propose des pistes à suivre pour sortir les entreprises des difficultés. En effet, selon l'étude, une entreprise peut à tout moment de sa vie rencontrer des difficultés. Les raisons sont multiples, mais cela peut être dû à des causes endogènes (problème structurel de rentabilité, mauvaise gestion des créances clients...) ou exogènes (défaillance d'un gros client, perte de chantiers, crise économique...). Dans ces situations, deux mots d'ordre doivent primer : anticiper et ne pas rester seul13(*). L'étude porte sur l'impact des difficultés de l'usine Gonfreville de Bouaké sur ses employés. La première partie de la revue nous a enseigné sur l'impact des conflits sur les groupes. Les conflits entraînent des mutations au sein des populations, développe la pauvreté, l'insécurité, la déscolarisation. La deuxième partie quant à elle nous instruit sur les conditions de vies des employés et des difficultés des usines. En effet lorsque les employés vivent dans des conditions précaires cela ne constituent pas une source de motivation pour ces derniers. Et les difficultés au niveau des usines sont de deux ordres (internes ou externes). Au niveau interne elles peuvent être des problèmes de trésorerie, de management etc. et au plan externe elle découle des crises ou conflits dans les Etats où elles sont implantées. Mais, ces études ne soulèvent pas la question de l'effet ou l'impact des difficultés des usines sur les conditions de vie et de travail des employés. Ainsi, en abordant ce thème, l'étude apportera donc une contribution aux études existantes liées à ce thème. * 6 Le Empowerment est un terme anglais qui signifie l'octroi de plus de pouvoir aux individus ou aux groupes dans le travail pour agir sur les conditions sociales, économiques, politiques ou écologiques qu'ils subissent. * 7Patricia JUSTINO. 2010. War and poverty,Oxford University Press. PP 1- 50 * 8 LE RAIAL ET SAFERWORLD (2007). Les milliards manquants de l'Afrique-les flux d'armes internationaux et le coût des conflits. Oxfam, P4 * 9René YABILE KIMINO (2013). « Impact du conflit armé sur l'accentuation de la pauvreté en Côte d'Ivoire » in European Scientific Journal, March 2013 Edition vol.9, No.8.PP 1-23 * 10 Banque Mondiale (2011). Rapport sur le développement dans le monde: Conflit, sécurité et développement.Washington D.C. p5 * 11 Donald ROY. 1952. Quota Restriction and Goldbricking in a Machine Shop. The american journal of sociology, Vol. 57, No 5, 427-442. PP 1-29 * 12 Emile HENNEQUIN (2009).La gestion des carrières ouvrières: un sentiment de réussite possible pour les salariés?, Université Paris 1 Panthéon Sorbonne, France, REMEST, vol. 4, N° 2. PP 1-23 * 13 FFB (2012). Prévenir et guérir les difficultés des entreprises, PP 1-60. |
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