2.4. Des acteurs numériquement dominés
par les femmes
De tous ceux qui ont pour principal lieu de travail les
trottoirs et les rues, les femmes sont globalement les plus nombreuses, mais
avec des différences sensibles suivant les secteurs d'activités,
le quartier ou la rue. Par exemple à Tokoin ramco et à
Déckon, on a rencontré très peu de femmes (36,4 %) qui
exercent le métier de commerçant (Tableau N° 1). Même
si selon l'échantillon les hommes font 62,5 %, la réalité
montre que les femmes sont plus nombreuses dans le secteur. On rencontre les
hommes beaucoup plus dans les métiers dits nobles et dans les
activités commerciales, ils interviennent particulièrement dans
la vente d'articles ménagers et électroménagers, de
bicyclettes et de motocyclettes soigneusement rangées sur le trottoir,
de pièces détachées pour voitures et motos, etc. Il faut
donc retenir que les emplois de rue sont donc numériquement
dominés par les femmes avec cependant des variantes très
importantes suivant les secteurs et les nationalités. Elles sont
particulièrement nombreuses dans et autour des marchés .Le nombre
de femmes impliquées dans la restauration de rue prend de plus en plus
d'ampleur à cause de la dynamique urbaine qui est à l'origine de
l'étalement urbain. Les femmes sont particulièrement
présentes dans cette restauration de rue où les jeunes filles et
fillettes constituent la main d'oeuvre. L'une des raisons qui expliquent
fondamentalement le nombre élevé de femmes dans les
activités du secteur informel est leur faible niveau scolaire et leur
taux élevé d'analphabétisme (61,7 % contre 31,2 % pour les
hommes au Togo) (Banque mondiale, 1996) qui ne leur permettent pas d'être
compétitives sur le marché de l'emploi et de participer aux
activités du secteur moderne au même titre que les hommes.
2.5. Des activités ni commerciales, ni
artisanales
C'est le lieu de rappeler un phénomène
très pertinent : la prière musulmane tous les vendredis
surtout aux abords des rues où on note une affluence des adeptes de
Mahomet, convergeant en grand nombre sur certains points du trottoir
pratiquement transformé en mosquée. Cette occupation
éphémère peut s'expliquer par le fait que ceux-ci se
regroupent pour pouvoir en même temps surveiller leurs
étalages.
C'est aussi l'organisation des funérailles avec
l'autorisation des autorités municipales la plupart du temps de vendredi
à dimanche. Non plus seulement les trottoirs, mais aussi des rues
entières (trottoirs et chaussées) sur lesquelles des
appâtâmes sont érigés dans tout le sens de la largeur
et sur une longueur de 50 à 100 mètres, sont bloqués
pendant 48 à 72 heures, particulièrement durant les week-ends. Il
revient donc à faire de longs détours par des rues secondaires
généralement peu entretenues pour pouvoir passer. L'organisation
de ce genre de manifestation sur les espaces publics entraîne par
ailleurs des nuisances sonores, car de nombreuses fanfares et chorales sont
là pour accompagner le défunt dans sa dernière demeure. La
plus grande affluence a lieu à « la veillée de
prières et de chants », à la veille de l'enterrement
entre 20 heures et minuit, au domicile du défunt.
D'autres types d'occupation ont trait à
l'érection sur les trottoirs des habitations en matériaux
définitifs ou dans l'emprise de la voie des bâches lors des
manifestations festives ; la fabrication et le stockage de matériaux de
construction dans le domaine public lors des travaux de construction ;
l'abandon d'épaves de véhicules et autres engins dans le domaine
public, la construction des ouvrages d'assainissement privés dans
l'emprise de la voie et la transformation des trottoirs en parkings
privés. Ces divers types d'occupations ont souvent pour
conséquences l'obstruction du passage, induisant un fort risque
d'accident et la dégradation du bien public de même que la forte
exposition aux pollutions de toutes sortes, le risque d'incendie et la
réduction de la visibilité dans la ville. Ce qui
précède pourrait laisser supposer une situation de vide juridique
loin de là !
Il y a dans les villes africaines ce qu'on appelle
« les librairies par terre ». Ce sont des livres d'occasion
exposés à même le sol ou sur des étalages. Tout cela
est complété par des fournitures scolaires et la papeterie. Le
secteur est très actif à la rentrée scolaire où
déjà dès le mois de juillet, juste après la
proclamation des derniers résultats scolaires et universitaires et ce
jusqu'en novembre, des dizaines de femmes et de jeunes filles qui deviennent
momentanément des « libraires » d'occasion, ne
laissent aucun répit aux parents sollicités de toutes parts.
Ainsi, de nombreuses activités socio-économiques
et culturelles comme le commerce, l'artisanat, la religion... qui
s'exerçaient naguère dans des lieux précis, commencent
aujourd'hui à déborder de leurs cadres pour se retrouver dans la
rue et sur les trottoirs, avec souvent la complicité des
autorités centrales et locales, malgré certaines interventions
ponctuelles très brutales mais sans effet. Par la diversité des
services offerts et des acteurs, on se rend compte que toutes les
catégories sociales sont impliquées et sollicitent les trottoirs
d'une manière ou d'une autre.
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