1.6.3. L'informel et l'Etat
La stagnation du secteur moderne et des services
entraîne le développement du secteur informel qui lui, offre un
coût à la création d'emplois beaucoup plus faible.
Selon plusieurs auteurs, l'État est fortement mis en
cause dans l'analyse du problème de l'informalité. Il semble en
effet absent lorsqu'il s'agit de réguler la société. A ce
sujet, Muheme parle d'une faillite de l'État dans ses mécanismes
de régulation de la crise et de la marginalisation. Diehdiou exprime
sensiblement la même idée lorsqu'il écrit qu' « il
y a donc, quant au fond, une indéniable faillite de l'Afrique officielle
» (Diehdiou, 2003 : 6). Dans ce contexte, le commerce de la rue
concrétiserait les tentatives d'inspiration sociale pour corriger les
manques de l'État. En somme, l'État dans les pays africains
serait incapable de répondre aux besoins de base de sa population et
serait même responsable d'une tendance régressive dans la
répartition du revenu. Sommes-nous devant un État
démissionnaire ? Pour Carlos Maldonado, les pouvoirs publics
étant incapables d'offrir une alternative de développement, les
citadins africains trouvent les moyens de survivre et de s'affirmer, par leur
propre initiative et leur propre ingéniosité (Maldonado, 2001 :
4).
Si l'État des pays africains est inexistant dans le
devoir de régulation et de redistribution, il est parfois
qualifié de « monstre » agonisant (Gaspar B. Muheme, 1995 :
102).
Le B.I.T fait état, dans les pays du tiers monde,
d'obstacles juridiques et institutionnels rendant difficile la
possibilité pour les travailleurs et les entreprises d'évoluer
vers le secteur formel ou de s'y maintenir. Toujours selon le B.I.T, d'autres
causes fondamentales permettent le développement de l'économie
informelle : les politiques publiques nationales empêchant la
création d'emplois dans l'économie formelle, l'accès
limité à des institutions fortes et efficaces ainsi qu'une
discrimination envers les femmes et autres groupes défavorisés.
Les tendances démographiques, l'absence de représentation et de
moyens d'expression pour les travailleurs du secteur informel sont, de la
même façon, des causes de « l'informalisation ». (B.I.T,
2002 :6)
« Face à un État incapable de
redresser la situation, l'économie informelle répond, pour la
population, à une stratégie de survie »
(Coquery-Vidrovitch, 1991 :32). L'économie informelle est en mesure de
créer des emplois, et même de contribuer au produit
intérieur brut, donc au revenu national (Muheme, 1995 : 101). Pour
Maldonado, les activités informelles deviennent la seule alternative
pour les chômeurs et pour les nouveaux arrivants sur le marché du
travail. En dépit du fait que l'économie informelle ne peut,
selon le même auteur, sortir les pays en développement de la
crise, elle pourvoit à l'essentiel des emplois urbains et assure
elle-même la formation. (Maldonado, 2001).
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