4.2 Les perspectives d'une gestion intégrée
de l'eau et d'une agriculture durable
4.2.1 Le maintien des actions collectives
Assurer le renouvellement des stocks d'eau et enrayer
le creusement des inégalités dans l'accès à l'eau
doivent devenir des priorités. Plusieurs éléments
amènent à penser que seuls un haut niveau de coopération
et d'actions collectives pourront permettre de répondre à ces
objectifs. L'individualisation des stratégies est un acte de
désolidarisation qui promeut les comportements économiquement
rationnels au dépend de la collectivité et des biens communs.
Certains exemples précis montrent que les propriétaires de puits
profitent des avantages du tank sans en supporter les contreparties
financières. On peut qualifier ces individus de passagers clandestins.
Conformément à la métaphore de la tragédie des
communs, ceux-ci peuvent être définis comme des agents
économiques usant d'un bien collectif et ne payant pas leurs
quotes-parts qui est alors supportée par les autres passagers (Ostrom,
2000). C'est pourtant l'ensemble de la collectivité qui pâtirait
d'un épuisement généralisé de la ressource. Comme
c'est le cas pour certains cycles naturels, il existe la plupart du temps des
seuils qui, une fois atteints, peuvent engendrer un emballement du
système. Des mesures devraient donc limiter les abus et rétablir
un certain équilibre entre les cycles naturels et l'utilisation des
ressources par les hommes.
On peut donc envisager les actions collectives comme
des actes solidaires, utiles à tous et écologiquement
nécessaires. Leur banalisation passe par un discours et par une
communication efficace et réaliste, mais aussi par une intervention de
l'état qui doit organiser
83
Discussion
les prélèvements et la gestion des
ressources, en créant des organismes de régulation et de
contrôle, et qui devraient aussi avoir un pouvoir coercitif.
4.2.2 Une gestion qui intègre les
différences territoriales et qui limite les conflits d'usage
Par la méthodologie employée, nous avons
pu relever que l'étude de certains phénomènes
s'avère optimale lorsque l'on considère plusieurs échelles
d'analyse. Ceci est d'autant plus vrai lorsqu'il s'agit de réseaux
hydrologiques qui sont spatialement délimités. Une gestion
adaptée aux problématiques traitées ici correspondrait
à intégrer à la réflexion, les analyses à
différentes échelles. Dans le cas du bassin versant de la
Vaigai-Periyar, cela inciterait à adopter une gestion des ressources en
eau à au moins deux niveaux : une coordination entre tous les acteurs
à travers le bassin versant, ainsi qu'une articulation des
décisions à un niveau plus localisé, en prenant en compte
les sous-unités homogènes (selon les systèmes culturaux,
la disponibilité de l'eau sous différentes formes, le support
physique et la structure sociale). Ceci pourrait permettre des
réflexions et des actions qui intègrent la multitude et la
diversité des problématiques. Les Agences de bassin, en France,
semblent correspondre à un exemple efficace d'une telle
intégration. Il est toutefois nécessaire de placer les acteurs
locaux au centre des décisions. En effet, lorsque la mise en vigueur de
règles émane de décisions consenties par les usagers
eux-mêmes, la gestion s'avère être plus durable et plus
efficace (Ostrom, 2000). Pour ce faire, les organisations locales, officielles
et informelles, doivent avoir les moyens financiers et coercitifs
nécessaires pour exercer leur contrôle. Ceci passe, en partie, par
une utilisation plus rationnelle des produits du tank. En définitive,
pour être socialement acceptable et écologiquement durable, la
gestion doit donc s'appuyer sur des objectifs s'organisant autour des notions
d'équité (répartition des ressources), de
solidarité, de neutralité écologique, de conservation et
de rationalité économique (cette dernière étant
dépendante des autres). Ceci peut contribuer, enfin, à
résorber les conflits d'usage et à participer, à ce qu'il
est convenu d'appeler, la bonne gouvernance. Un autre objectif pour ces espaces
ruraux consisterai aussi à développer plus largement des emploi
non agricoles, qui permettraient non seulement de fixer les populations pour
éviter qu'elles aillent grossir les banlieues des villes, mais aussi de
limiter l'utilisation agricole des ressources en eau.
|