3.3 La multiplication des puits, et ses conséquences
sociales et environnementales
En parallèle à la Révolution
verte, le gouvernement a initié une politique volontariste en faveur du
développement de l'irrigation par les réserves souterraines. Elle
a particulièrement été efficace au Tamil Nadu, où
elle s'est traduite par des prêts à faible taux
d'intérêts ainsi que par l'électrification gratuite des
campagnes accompagnée d'une multiplication des pompes électriques
(Balasubramanian et al., 2003). C'est une des facettes de
l'évolution d'une économie de subsistance vers une
économie de marché. Le cas étudié ici
révèle une situation où une certaine
complémentarité existe entre les différentes sources
d'irrigation.
3.3.1 Evolutions entre 1973 et 2001
L'image acquise le 09/02/1973 laisse apparaître
nettement les contours des tanks, ainsi que les sols humides qui correspondent
aux parties de leurs lits récemment exondées (cf. figure 32). Ces
tanks sont alimentés par le Thirumangalam Main Canal (TMC) qui est
connecté à la Vaigai, depuis la fin des années 1950, par
le régulateur Peranai situé en amont de Madurai. Ce sont ceux qui
présentent le meilleur rapport capacité de stockage/surface
irriguée dans l'ensemble du bassin versant (Vaidyanathan, 2001). La
perte de surface agricole est donc
75
Des facteurs locaux explicatifs des
disparités territoriales
compensée par leur efficacité. La saison
culturale correspond à la saison samba bien que la date de la
moisson soit proche. Le stock d'eau encore disponible dans les tanks laisse
à penser qu'une seconde culture sera possible. Il est toutefois peu
probable qu'il ne soit suffisant pour des cultures irriguées très
demandeuses en eau, comme le paddy, mais servira plutôt à des
cultures de ragi ou d'arachides. La seconde image, du 23/04/1990,
acquise durant un cycle pluviométrique déficitaire correspond
à la saison navarai. Dans ce contexte de péjoration
climatique, le stock d'eau résiduel peut être
considéré comme relativement élevé, ce qui
amène à relever le fait que les system tanks sont moins
dépendants des conditions climatiques locales que ne peuvent
l'être les non-system tanks. La majorité des parcelles
irriguées correspondent aux ayacuts des tanks, non seulement en
raison de la disponibilité de l'eau stockée dans ces derniers,
mais aussi en raison des niveaux piézométriques plus
élevés qu'en punjai et donc favorables à
l'implantation de puits. En 1995, les densités de puits dans les
ayacuts sont les plus élevées de tous les system
tanks du bassin versant ; de 30 à 75 puits par centaine d'hectares
(Vaidyanathan, 2001). Le morcellement, observé, des terres
irriguées en 2001 est significatif d'une irrigation par puits. De plus,
certains agrégats de terres irriguées en 1990, que l'on peut
considérer comme terres nanjai, sont absents en 2001, ce qui
laisse penser à une utilisation moindre du tank. Dans le même
esprit, une proportion importante de terres humides en 1973 est totalement
colonisée par de la végétation en 2001. Ceci peut
correspondre tout autant à des cultures qu'à des pelouses
à fort taux de recouvrement. Il reste toutefois des stocks d'eau dans
les tanks, ce qui est le signe d'une bonne alimentation par les canaux compte
tenu de la date avancée en saison sèche. Ces stocks permettent
aussi la recharge des nappes par percolation. Il n'est donc pas improbable que
ces dynamiques soient le fruit d'une bonne gestion des ressources de la part
des acteurs locaux.
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