VI. Une histoire politique féminine très
peu connue
On ne saurait appréhender une étude sur la
citoyenneté politique des femmes togolaises sans un bref retour au
passé. Pour bon nombre de personnes, elle est une notion amorphe avant
la conférence nationale, pour d'autres encore, elle ne vient que
commencer. Ces considérations traduisent une méconnaissance ou
une forme d'amnésie sur les apports incontestables des femmes togolaises
dans le processus d'émancipation du Togo comme l'illustrent les
résultats de notre enquête (tableau 5).
En effet, en se référant à ces
résultats, on constate qu'une frange importante de l'intelligentzia
togolaise ne maitrise pas réellement leur histoire politique et dans la
moindre mesure celle des femmes. Cela pose donc un sérieux
problème, car si ceux qui sont considérés comme les phares
de la société trainent toujours une vision déformée
de la citoyenneté de la femme, comment pourrait-on transformer les
considérations peu condescendantes et bourrées de
préjugés que l'opinion commune se fait sur le potentiel politique
des femmes ? Car à en croire Annie Petit, «La
régénération des savants signifie la
régénération des sociétés».
Certes, il est vrai que la participation de la femme
était plus ancrée dans les formes protestataires et dans les
associations qu'à travers les formes représentatives.
C'était un travail de fond comme le relève l'une de nos
interviewées : « la façon dont elles exprimaient leur
opinion n'était pas médiatisée ».
Néanmoins, on admet que c'est aussi une forme de participation politique
qui mérite d'être reconnue.
Cette situation est liée au fait qu'il n'existe pas
d'ouvrages abondants, accessibles au public togolais et relatif à la
citoyenneté politique de la femme togolaise. Les ouvrages existants sont
d'un caractère élitiste et relativement cher, donc difficile
à s'en procurer. Il faut aussi compter avec le dégoût de la
lecture qu'affiche maintenant le public togolais.
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Dans les programmes scolaires, à part quelques cours
synthétiques d'Education Civique et Morale
proposés dans le primaire qui traitent d'une manière
ramassée l'histoire politique du Togo, au niveau du secondaire
(collège et lycée), il n'existe pas un curriculum
spécifique sur ces évènements, à par quelques
bribes offertes dans le cours sur la décolonisation. Or, c'est à
ce niveau que l'élève commence à donner sens à ce
qu'il apprend, c'est également là que commence par se forger la
personnalité l'individu. Ces cours sont souvent déclinés
au masculin. On ne retient que les noms comme Martin Aku, Anani Santos,
Sylvanus Olympio... tronquant fondamentalement le travail de fond abattu par
les femmes dans ces mouvements politiques.
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