CHAPITRE II
CADRE CONTEXTUEL
Nous présenterons, dans ce cadre contextuel, un regard
critique sur la réalité mondiale, les caractéristiques
d'Haïti, la formation sociale haïtienne, le problème de
recherche, l'origine historique de ce problème et son
développement.
1- COUP D'OEIL SUR LE MONDE
Les disparités économiques et sociales sont l'un
des grands enjeux du monde actuel. Cette mondialisation capitaliste et
néolibérale, essentiellement régie par des
intérêts privés, entraîne un pillage
généralisé des ressources. Plus d'un milliard d'enfants
vivent dans la pauvreté5. Selon l'ONU ( 2008 ), 150 millions
d'enfants vivent dans la rue. Ces enfants s'approprient la rue en tant que lieu
de vie. Certains pays ont organisé des réactions violentes pour
faire face à la prolifération du nombre d'enfants des rues ( la
répression prend les formes les plus aigües , là où
le taux d'exploitation est le plus fort6 ).
Ces enfants exploités sont, en majorité, issus
du monde rural. La domination et l'exploitation dans le monde rural ne peuvent
pas être cernées, pensons-nous, en dehors de la question agraire
caractérisant la structure de la société globale.
Selon le rapport de l'UNICEF sur la situation des enfants dans
le monde en 2009, 51 millions d'enfants n'ont pas été
enregistrés à la naissance et n'ont pas d'existence officielle.
C'est le cas de nombreux enfants d'origine haïtienne, nés dans la
République voisine (particulièrement dans les Bateys). Ainsi, ils
sont destinés à rester marginaux toute leur vie
5 Cf. Rapport de l'UNICEF, 2005
6 Cf. Laënnec Hurbon,Comprendre HAITI, Ed.
KARTHALA, Paris, 1987, p.124
comme bon nombre d'autres enfants abusés,
emprisonnés, vendus, orphelins, violentés, victimes de
dénutrition, de VIH/SIDA, du mariage précoce.
Nous ne saurions oublier des milliers d'enfants qui sont
recrutés comme soldats ou enlevés en vue de la prostitution ou de
la servitude domestique. Il faut comprendre que ces problèmes mondiaux
ne sont pas naturels et qu'ils sont produits par une formation
économique et sociale déterminée ( par un monde de guerre,
de conquête, de pillage, d'impérialisme ... ). C'est, dirait le
leader Fidel Castro, le capitalisme globalisé avec tout ce que cela
implique : ... l'anarchie de la production, la destruction des ressources
naturelles, la faim au milieu de l'abondance, le chômage au sein des
crises de surproduction7...
Et, citons FROMM, « même si elle n'a qu'une chance
modérée de vaincre, une nation fera la guerre, non parce qu'elle
souffre économiquement, mais parce que le désir d'avoir davantage
et de conquérir est profondément enraciné dans le
caractère social »8.
Maintenant, laissons un peu Karl Marx nous livrer sa
pensée : « Poussé par le besoin de débouchés
toujours nouveaux, la bourgeoisie envahit le globe entier. Il lui faut
s'implanter partout, exploiter partout, établir partout des relations...
»9.
C'est le temps de comprendre bien ces chiffres relatant que
les décès causés par la misère extrême dans
les pays du Sud se sont élevés à plus de cinquante-neuf
millions (ONU,2007) ; alors qu'en 2008, pour la première fois dans
l'histoire, les dépenses d'armement des Etats membres de l'ONU ont
dépassé les 1 000 milliards de dollars par an.10
7 Cf. Jean Edern Hallier, Fidel Castro.
Conversation au clair de lune, Ed. Messidor, Paris, 1990, p.141
8 Cf. Fromm Erich, Avoir ou être ?,
Editions Robert Laffont, Paris ,1978, p136
9 Cf. Karl Marx, OEuvres choisies, Editions du
Progrès, Moscou, 1987, p.34
10 Cf. Jean Ziegler, La haine de l'occident,
ALBIN MICHEL, Paris, 2010, p13
Entre temps, 250 000 000 d'enfants de 5 à 14 ans
travaillent (dans des conditions surtout difficiles afin de survivre) et 60 000
000 d'enfants de 5 à 11 ans effectuent des tâches dangereuses
(Rapport 2000 de l'UNICEF ). Selon Ziegler ( l'Empire de la Honte, 2007 ), deux
armes de destruction massive sont à l'oeuvre : la dette et la faim. Par
l'endettement, les Etats abdiquent leur souveraineté ; par la faim qui
en découle, les peuples agonisent et renoncent à la
liberté. Un artiste eut à chanter : la Banque Mondiale et le FMI
sont nés pour distribuer des cadeaux empoisonnés. Ils financent
la pauvreté, la privatisation meurtrière...
Les enfants en servitude domestique font partie de ceux qui
accomplissent des travaux dangereux capables de mettre en péril leur
santé. À rappeler que nous nous intéressons à cette
catégorie d'enfants et que notre attention est mise, dans le cadre de ce
rapport de recherche, sur leur mode de perception de la maison de placement.
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