Définition de l'espace public
Un espace physique, juridique et localisé
Lorsque l'on pense espace public, on pense d'abord à un
espace physique, matériel. C'est ainsi que Merlin et Choay, dans leur
Dictionnaire de l'Urbanisme et de l'Aménagement (1988),
introduisent leur chapitre sur l'espace public par une définition qui
lui dessine des limites physiques et juridiques : « On peut
considérer l'espace public comme la partie du domaine public non
bâti, affectée à des usages publics. L'espace public est
donc formé par une propriété et par une affectation
d'usage (...). En tant que composé d'espaces ouverts ou
extérieurs, l'espace public s'oppose, au sein du domaine public, aux
édifices publics. Mais il comporte aussi bien des espaces
minéraux (rues, boulevards, places, passages couverts) que des espaces
verts (parcs, squares, cimetières) ou des espaces plantés (mails,
cours). » Isabelle Billiard, dans ce qui est considéré comme
la première véritable étude sur les espaces publics en
France (1988), ajoutera une dimension géographique à cette
définition, en considérant que « l'espace public se polarise
autour de lieux publics, mais clos, destinés à des
citoyens-usagers, dont les architectures spécifiques (écoles,
mairies, postes) constituent une emblématique nationale ».
Un espace immatériel, vecteur de communication
De cette définition qui procède d'une
démarche descriptive et qui encadre l'espace public dans des
repères physiques, juridiques et géographiques, on peut envisager
d'expliciter cet espace en partant des usages qu'il induit et non de ses
caractéristiques. Ainsi Thierry Paquot, dans son ouvrage « L'espace
Public » (2009), présentera une approche non plus descriptive, mais
fonctionnelle, énonçant que l'espace public consiste en un
ensemble d'espaces « mettant en relation, du moins ponctuellement, des
gens, qui s'y croisent, s'évitent, se frottent, se saluent,
conversent, font connaissance, se quittent, s'ignorent, se heurtent, etc. Ces
gens remplissent une fonction essentielle de la vie collective : la
communication. Ils facilitent l'urbanité élémentaire et
reçoivent, comme un don anonyme et sans réciprocité
attendue, l'altérité. C'est dans ces espaces publics que
le soi éprouve l'autre. C'est dans ces espaces dits publics
que chacun perçoit dans l'étrangeté de l'autre la
garantie de sa propre différence ». De la même
manière, Richard Sennett (1972) précisera que la ville est le
lieu privilégié de cet en-commun créé par l'espace
public, car elle se présente comme « un milieu humain dans lequel
des inconnus se rencontrent ».
La ville et son espace public sont donc avant tout des lieux
de communication entre
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habitants, travailleurs, promeneurs, enfants, parents. C'est
une définition que nous apprécions, car elle insiste, non sur les
espaces qui font public, mais sur l'aspect relationnel qui fait de certains
espaces des espaces publics. Et cela nous paraît pertinent, puisque de
nombreux lieux nous semblent devenir publics par leur usage, et non par leur
destination initialement imaginée. C'est une conception qui semble
convenir à une réflexion de renouvellement urbain :
l'aménageur et son urbaniste ne devraient pas chercher à
créer des lieux qui doivent être amenés à être
publics, mais plutôt à trouver les lieux qui font du lien et
seront amenés, par leur usage, à devenir espaces publics de fait.
Une telle approche pousse l'urbaniste à réfléchir à
la valeur d'usage des espaces qu'il crée, et donc à adopter une
posture sensible dans sa vision de la transformation du territoire.
C'est une approche que l'on retrouve dans certaines notes
d'intentions issues des candidatures pour l'accord-cadre de maîtrise
d'oeuvre urbaine. Ainsi Reichen et Robert diront que « le sens de l'espace
public est celui de la rencontre, du vivre ensemble et de l'appropriation, base
de la désirabilité. » Ils imaginent déjà que
« des lieux communs, hors normes et aménagés avec
les gens du coin, pourront créer des lieux actifs et vivants,
pixels inattendus dans la ville, associant le loisir à la
pédagogie. »
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