2.3.1.2.2 Les identifications : symboles sociaux
En conservant toujours en filigrane dans notre analyse la
"métaphore de la solitude", nous avons relevé, dans les
entretiens, un certains nombre d'éléments,
développés ci-après, qui semblent nous indiquer des
processus d'identification, c'est-à-dire par lesquels un autre membre ou
un objet, de par ce qu'il est ou ce qu'il représente, sert de
référence à un autre. Par exemple, si nous devions retenir
seulement notre troisième interlocuteur, il identifie d'abord les
adultes qui encadrent les jeunes comme des pères de famille :
« Bon, ben y en a jamais un qui a levé la
voix, euh, parce-que avant tout c'est des pères de famille, la plupart,
bon, euh, il se trouve qu'on a un public jeune, ben on fait avec, on essaye de
comprendre. » (l.118)
Pour ensuite se substituer, "jouer" avec l'image du "bon
père de famille", celui auprès de qui on peut se confier, qui
comprend, qui élève, etc. :
« Leur enlever un petit peu la... comment dire
? ...la, la timidité peut être qu'ils peuvent avoir. Et pi
c'est pareil pour les personnes adultes qui se confient pas trop au sein de
leur famille et qui sont plutôt solitaire. » (l.125)
« Je peux apporter du réconfort quand une personne est pas
bien et qu'elle cherche un refuge pour... pour être un peu tranquille
parce qu'elle a... elle a subit une mauvaise journée. »
(l.170)
Constatons, au passage, que le public visé dans ces
"jeux" est celui d'un public que notre interlocuteur se représente comme
solitaire : « les personnes adultes qui se confient pas trop
au sein de leur famille et qui sont plutôt solitaire. ».
Ce commentaire nous permet de nous demander s'il ne s'agit pas là d'une
"réaction de compensation", d'une "substitution", qui consisterait
à déplacer sur une autre situation sa propre identité
sociale ?
Si nous devions continuer à rendre compte de cette
identification au père de famille nous pourrions faire part,
succinctement, des éléments suivants : le Pilote de branche
semble se substituer, quelquefois, à cette identification de l'image du
"bon père de famille" : toujours présent, sauveur.
« On apprend avec un pilote qui a beaucoup plus
d'expérience que nous. » (l.249) « On peut dire que
c'est, que c'est la personne qui va faire preuve de, de... qui va prendre du
recul et qui va faire preuve de discernement et de pi de perspicacité
pour essayer de comprendre les gens. » (l.274)
Ainsi, ce processus inconscient d'identification semble
être une donnée importante dès lors que l'on veut
s'interroger sur l'engagement des individus :
« Moi, je suis très content de venir au
Club et s'est d'ailleurs pour çà que je m'investis et que je fais
partie des Administrateurs. Moi, ça me plaît parce-que je me rends
compte qu'il y a des gens qui repartent après que je les ai aidé,
content. Le réconfort des autres c'est aussi très plaisant. En
plus c'est pas payant. » (l.369)
Nous avons pu relever, ainsi, cette identification à
l'image du "bon père de famille" auprès de cinq personnes
interviewées. De plus, comme pour la "métaphore de la solitude", nous avons
retrouvé ces articulations de repères d'identité sociale
et d'identifications avec la "métaphore de l'amitié", la
"métaphore de l'ambiance" et d'autres métaphores encore.
Pour synthétiser, le repère
d'identité sociale "la métaphore de la solitude" semble
être une élaboration sociale de la réalité dans
laquelle se manifeste le rapport à autrui par des énoncés
oraux en relation avec la conscience d'appartenir à un groupe.
L'identification, processus inconscient paraissant structurant
de l'engagement du membre, semble être un processus d'incorporation
à sa propre conduite des propriétés d'un modèle
valorisant son identité sociale.
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