CHAPITRE I : GENERALITES SUR LA FERTILISATION ET
SUR AZOLLA.
1.1. FERTILISATION
La fertilité est la capacité d'un milieu
à produire. Il s'agit d'une notion dépendant d'une part des
fonctions productives assignées à ce milieu, et d'autre part des
techniques mobilisables pour transformer le milieu et le coût de leur
mise en oeuvre (MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES, 2002).
Cette capacité repose sur un ensemble des
propriétés formant les caractéristiques physiques,
biologiques et chimiques du sol lui-même, telles sa structure ; sa
profondeur ; sa teneur en éléments nutritifs, en
humus ; son pouvoir d'absorption et sa teneur en éventuels
éléments toxiques.
La fertilisation est l'enrichissement du sol par des engrais
et elle a pour buts :
- d'améliorer ou de maintenir les
caractéristiques du sol citées ci-dessus, aptes à
optimiser l'absorption par les plantes, des éléments
nécessaires à leur croissance et au rendement ;
- d'assurer la complémentarité des fournitures
nécessaires en provenance du sol (FALISSE et LAMBERT, 1994).
Les engrais sont des produits riches en éléments
minéraux nécessaires aux plantes. Ils peuvent être
naturels, transformés, synthétisés par l'industrie
chimique ou sous-produits industriels (MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES,
2002). Ils sont de deux types : organique et minéral.
1.1.1. ENGRAIS ORGANIQUES
a) Fumier de ferme
Le fumier de ferme est constitué par un mélange
de litière et de déjections animales ayant subi des fermentations
plus ou moins poussées en étables et en tas. Sa composition varie
dans très larges limites suivant la nature et la proportion des
matières en présence (litière, excréments). La
composition des excréments varie, à son tour, suivant
l'espèce animale, l'âge et la production des animaux et le
régime alimentaire de ceux-ci (AL HASSANI et PERSOON, 1994).
DOUCET (2001) affirme que le fumier le plus riche est celui de
volaille, suivi de celui de cheval, de mouton, et de porc. Le fumier peut
être épandu sur tous les sols et presque toutes les cultures.
b) Purin
C'est un engrais organique constitué d'une fraction de
liquide qui s'écoule du fumier mis en tas, principalement composé
des urines des animaux. La qualité des purins dépend du mode de
gestion du bétail et de la dilution par les eaux de pluies ou de lavage
(MAZOYER, 2002).
c) Lisier
C'est le mélange de déjections liquides et
solides des animaux d'élevage et d'eau, et un excellent engrais
organique, particulièrement riche en azote. En République
Démocratique du Congo, on le trouve dans les élevages des
porcs.
d) Compost
Le compostage est le traitement de nombreuses matières
végétales ou animales en vue de faire démarrer, en milieu
normalement anaérobie, une fermentation aérobie en
atmosphère confinée dont l'effet sera la prolifération de
micro-organisme avec réorganisation de matières minérales
dont l'azote nitrique et ammoniacal (AL HASSANI et PERSOON, 1994).
Les différents éléments qui entrent dans
la composition du compost sont :
- déchets organiques de domicile ;
- résidus d'origine animale ;
- déchets agricoles (pailles, broussailles,
résidus de récoltes) ;
- boues des rivières et des étangs ;
- déchets agro-industriels (résidus de scieries,
pulpes...) ;
- 1 à 2% de terre argileuse.
Dans les tropiques, le temps de compostage est de huit
semaines minimum, mais réellement achevé au bout de 16 semaines.
La durée de la phase de maturité dépend de l'usage qu'on
veut faire du compost.
e) Engrais verts
C'est une façon d'apporter de la matière
organique au sol. La technique consiste à enfouir une plante feuillue,
des feuilles d'arbres ou de buissons pour améliorer les
propriétés physico-chimiques du sol et l'enrichir en humus.
La culture d'une légumineuse comme engrais vert permet
aussi la fixation de l'azote atmosphérique. La quantité
fixée par hectare varie d'une culture à l'autre, et peut
être en moyenne de 30 à 40 kg. La technique d'engrais verts
nécessite une bonne quantité d'eau pour sa décomposition
dans le sol (FAO, 1987).
f) Déchets de
végétaux
Beaucoup de résidus végétaux peuvent
être utilisés comme fumures organiques :
- feuilles mortes ;
- déchets agroalimentaires tels que les bagasses de
canne à sucre, les pulpes de café, les écorces des noix de
coco, d'arachides, les résidus des scieries, les balles de riz ;
- les pailles de céréales.
g) Déchets d'origine animale
D'après DOUCET (2001), les principaux engrais
organiques d'origine animale sont :
- sang desséché ;
- déchets d'abattoir desséchés ;
- farines de poisson ;
- poudre d'os.
1.1.2. LES ENGRAIS MINERAUX
a) ENGRAIS AZOTES
Engrais nitriques
Ils contiennent de l'azote sous la seule forme nitrique
NO3 :
- le Nitrate de Sodium (NaNO3) : 16% N et
30,5% de Na2O ;
- le Nitrate de Calcium Ca(NO3)2 :
15,5% de N et 34% de CaO ;
- le Nitrate de Calcium et magnésium [Ca,
Mg(NO3)2] :
15% de N, 46% de la CaO et 80% de MgO ;
- le Nitrate de Potassium (KNO3) : 18% de N et
46% de K2O
Les engrais nitriques sont vendus sous forme granulée
et utilisés en culture spéciale. On les emplois
généralement en cours de végétation au moment
où la culture est en pleine croissance.
Engrais ammoniacaux
Ils fournissent de l'azote sous forme ammoniacale,
NH4+ :
- Le sulfate d'ammoniaque [(NH4)2
SO4]: 21% de N
et 61% de SO3 ;
- L'ammoniac anhydre [NH3]: 82% de N, il est
injecté dans le sol.
Engrais ammoniaco-nitrique
Ils contiennent l'azote sous les deux formes :
ammoniacales et nitriques :
· Les ammonitrates : (SCHVARTZ et
COL, 2005) affirment que ce sont des engrais simples les plus utilisés
en raison de leur teneur élevée en azote, de leur bonne
conservation, de leur facilité d'emploi et de leur efficacité
agronomique due à leur composition (mi-nitrique, mi-ammoniacale).
Ils sont habituellement sous forme granulée et sont
disponibles sous deux dosages : ammonitrates à 27% ou 33,5% de
N.
· Les ammonitrates enrichis en SO3
et/ou MgO : leur dosage est de 25 à 28% de N, 20 à
35% de SO3 et 8% de MgO.
Autres formes
· L'urée
[CO(NH2)2] : 46% N : c'est un engrais
azoté solide et plus concentré. Il est souvent sous forme
perlée ou granulée.
· Les solutions azotées :
sont généralement employées en couverture sur les cultures
en cours de végétation.
· La cyanamide calcique
(CN2Ca) : 18 à 21% de N. c'est un produit peu
utilisé (SCHVARTZ et COL, 2005).
b) ENGRAIS PHOSPHATES
Les engrais phosphatés sont caractérisés
par leur teneur en phosphate, exprimée en anhydre phosphorique
P2O5, et par leur solubilité dans
différents réactifs (MAZOYER, 2002).
MINISTERE DES AFFAIRES ETRANGERES (2002), distinguent les
engrais phosphatés suivants leur solubilité en :
v Engrais phosphatés insolubles :
les phosphates naturels moulus, utilisés dans les sols acides où
ils se solubilisent lentement. Ils sont parfois vendus sous le nom d'hyper
phosphate. La teneur minimale en P2O5 totale est de 28
à 38% ;
v Engrais phosphatés
hyposolubles : insolubles dans l'eau mais solubles dans les
acides organiques. Le phosphal est du phosphate alumino-calcique de
Thiès calciné et broyé.
La teneur en P2O5 est de 34,5% ;
v Engrais phosphatés solubles, les
plus employés sont :
· Le Super phosphate simple (SSP) :
[CaH4(PO4)2], 16 à 24% de teneur en
P2O5, 9 à 12% en S, 28% en CaO. Il est donc
particulièrement bien adapté aux cultures qui ont besoin de Ca, P
et S, comme l'arachide ;
· Le Super triple (TSP) :
[CaH4(PO4)2]. La teneur minimale en
P2O5, 45%, en CaO, 20% ;
· Les phosphates d'ammoniaque sont des
engrais très concentrés :
- Phosphate monoammonique (MAP) :
[(NH4)H2PO4].
La teneur minimale en P2O5, 54% ;
en N, 11% ;
- Phosphate diammonique (DAP) :
[(NH4)2H2PO4].
La teneur minimale en P2O5, 46 à
48%; en N, 16 à 18%.
· Le Nitro-phosphate : la teneur
minimale en P2O5 est de 60 à 80%.
· Les phosphates partiellement
acidulés (25 ou 50% de quantité d'acide
ajouté).
· Les phosphates condensés ou
polyphosphates d'ammoniaque très concentrés,
mais peu utilisés (engrais liquides).
c) ENGRAIS POTASSIQUES
v Chlorure de Potassium (KCl) : il est
pur et se présente sous forme granulée. Il titre 60% de
K2O.
v Sulfate de Potassium
(K2SO4) : il titre 50% de K2O et
43% de SO3, en raison de sa faible salinité, il est beaucoup
utilisé en culture maraîchère de plein champ.
v Patient Kali
(K2SO4, MgSO4) : c'est un sulfate double
de Potassium et de Magnésium. Il titre 30% de K2O, 54% de
SO3 et 10% de MgO.
1.2. AZOLLA
Azolla est une petite fougère aquatique
réalisant une symbiose héréditaire avec Anabaena
azollae, cyanobactérie diazotrophe, capable d'utiliser le diazote
(N2).
Cette association se caractérise par une
productivité élevée des substances azotées et une
forte teneur en protéines.
Les protéines confèrent à Azolla des
qualités fertilisantes et alimentaires, reconnues et exploitées
empiriquement depuis de nombreux siècles en Chine et au Vietnam (FAO,
1978).
Généralement appelée
« fronde », une plante d'Azolla est constituée d'une
tige principale, croissant à la surface de l'eau avec des feuilles
alternes ainsi que des racines adventives se formant à intervalle
réguliers. A l'aisselle de certaines feuilles se développent des
tiges secondaires ayant les mêmes caractéristiques que la tige
principale. Elles portent à leur tour les tiges de troisième
ordre. Chaque feuille est bilobée : un supérieur, flottant
et chlorophyllien et ; l'autre inférieur, immergé
chlorotique (VAN HOVE et AL, 1983) [photo1].
Photo 1 : Frondes, plantes d'Azolla.
1.2.1. REPRODUCTION
Chez Azolla, il existe 2 modes de reproduction : la
reproduction sexuée ou générative et la reproduction
assexuée ou multiplication végétative.
La reproduction se fait par voie végétative dans
les conditions climatiques favorables et par voie générative en
saison défavorable caractérisée par la chaleur ou le froid
intense (BECKING, 1979). Azolla est hétérosporé.
La symbiose est maintenue durant le cycle sexuel. Les cellules
d'Anabaena, notamment les akinètes (akinétospores) sont
enfermées à l'intérieur des macrosporocarpes. Elles sont
enfoncées dans une cavité sous le chapeau de l'indusie du
macrosporange.
Après fécondation de l'oosphère, un
zygote se forme et se développe en sporophyte avec son algue
associée (Figure 1).
Figure 1. : Schéma de la reproduction
sexuée et végétative d'Azolla
1.2.2. CONDITIONS ECOLOGIQUES
Azolla est une plante fragile qui exige un certain nombre de
facteurs pour vivre, pour se développer et pour croître. Parmi ces
facteurs on peut citer : l'eau, la température, la lumière
(RAHAGARISON, 2005).
Besoins en eau
Azolla est une plante aquatique qui ne résiste pas
à un taux d'humidité inférieure à 60%, elle est
très sensible à la sécheresse et meurt en quelques heures
si le sol s'assèche (BECKING, 1979).
La nutrition minérale d'Azolla est favorisée par
une couche d'eau n'excédant pas 5 à 10 cm, puisque les racines
sont proches du sol.
Plante d'eau douce, Azolla ne supporte qu'un certain
degré de salinité, allant de 0,05 à 0,1%. Sa croissance
s'arrête dans une solution contenant 1,3% de sels (HALLER et AL,
1974).
Température, lumière
Azolla s'adapte à des conditions climatiques
extrêmement variées. Elle peut survivre entre 15°C et
40°C (RAHAGARISON, 2005). Pour l'intensité lumineuse, en conditions
thermiques optimales, la saturation est atteinte à environ 50% de
l'intensité maximale. La croissance reste cependant bonne même aux
intensités lumineuses maximales (BECKING, 1979).
pH
Azolla est particulièrement tolérant en ce qui
concerne le pH du milieu. Il survit dans une gamme allant de pH 3,5 à 10
et sa croissance est pratiquement identique de pH 4,5 à 7 (ASHTON,
1974).
1.2.3. BESOINS NUTRITIONNELS
Le besoin en minéraux d'Azolla comprend les
macroéléments (P, K, Ca, Mg et Mn) et les
microéléments (Fe, Mo, Co). Les carences en ces
éléments entraînent les diminutions des croissances
(BECKING, 1979). Mais la caractéristique la plus remarquable dans ce
domaine nutritionnel est l'indépendance totale à l'égard
de la source d'Azote. Azolla croit parfaitement en absence d'azote
combiné (VAN HOVE et AL, 1983).
1.2.4. USAGE
Azolla est utilisé comme :
- Engrais azoté pour le riz ;
- Aliment pour animaux d'élevage tels que :
canards, poules, porcs et même poissons (FAO, 1978).
Un certain nombre d'avantages secondaires a été
attribué à Azolla :
- diminution des pertes d'eau par évaporation ;
- effet herbicide dû au tapis d'Azolla qui empêche
les plantules de mauvaises herbes de croître ;
- réduction de la prolifération des
moustiques ;
- amélioration de la texture du sol (RAHAGARISON,
2005).
Ces applications ne sont pas seules possibles. En effet, des
recherches sont entreprises en vue d'évaluer le potentiel d'utilisation
d'Azolla comme :
- engrais verts pour des cultures sur terre ferme après
compostage ;
- aliment pour des animaux autres que ceux mentionnés
ci-dessus et pour l'homme ;
- matière première pour digesteur
biométhane.
1.2.5. SYSTEMATIQUE
Azolla appartient à :
- l'embranchement des Ptéridophytes ;
- la classe des Filicophytes ;
- l'ordre des Salviniales ;
- genre Azolla. Selon KONAR et KAPOOR (1974), Azolla constitue
le seul genre de la famille, alors que HILLS et GOPAL (1967) classent ce
végétal dans la famille des Salviniacées, qui comprend
deux genres : Azolla et Salvinia.
Azolla est un genre réparti en deux sections ou
sous-genres qui se différencient par le nombre des flotteurs des
mégaspores (MOORE, 1969), et qui sont :
- Azolla ou Euazolla,
- Rhizosperma .
v Section Azolla ou Euazolla
EVRARD et VAN HOVE (2004), distingue deux
espèces dans cette section :
- Azolla cristata ;
- A. filiculoides.
v Section Rhizosperma
Cette section comprend également deux
espèces :
- A. nilotica, présent uniquement dans l'Est
de l'Afrique, du Soudan au Mozambique. En RDC, elle est présente dans la
Province Orientale ;
- A. pinnata, dont il existe deux
variétés :
· A. pinnata var. pinnata : présente
dans toute l'Afrique subsahélienne ainsi qu'à Madagascar et en
Australie. Elle est largement répandue en RDC.
· A. pinnata var. imbricata :
présente en Asie (Inde, Vietnam, Chine, Malaisie, Indonésie,
etc.)
1.3. ANABAENA AZOLLAE
Cyanobactérie qui se présente sous forme de
filaments non ramifiés, constitués de deux types de
cellules : le premier formé des cellules végétatives
plus nombreuses et plus petites, le deuxième constitué des
hétérocystes. Ces dernières sont les sièges de la
fixation de l'Azote atmosphérique (BLONDEAU, 1980).
Le développement d'Anabaena azollae est
synchrone avec celui d'Azolla lors de la formation de la cavité de la
feuille (HILLS et GOPAL, 1967). Au départ, les filaments d'Anabaena
générateurs de la colonie dans le méristème apical
de la fougère, sont formés uniquement de cellules
végétatives. Lorsque le développement de la cavité
foliaire commence, les hétérocystes commencent aussi à se
différencier des cellules végétatives (PETERS et AL,
1982). Les deux types de cellules d'Anabaena communiquent entre eux par
l'intermédiaire d'un pore (BLONDEAU, 1980).
La symbiose hôte-bactérie permet des
échanges mutuels entre les deux partenaires s'effectuant comme
suit : Azolla fournit à l'algue des composés
carbonés, par contre l'Anabaena approvisionne son hôte en
composé azotés (ASHTON, 1974). Ces échanges entre
hôte et endophyte se font grâce aux poils pluricellulaires
provenant des cellules épidermiques qui bordent la cavité
foliaire d'Azolla où loge Anabaena (VAN HOVE et AL, 1983).
Anabaena azollae appartient à :
- l'embranchement des Cyanophycophytes ;
- la classe des cyanophyceae ;
- l'ordre des Nostocales ;
- la famille des Nostocaceae ;
- le genre des Anabaena ;
- l'espèce : Anabaena azollae
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