2- Fondements théoriques des formes
d'accessibilité à l'eau
Le secteur de la gestion des ressources en eau connaît
actuellement une phase transitionnelle, entre omnipotence de l'État et
désengagement progressif de ses administrations, entre
domanialité de l'eau et protection des ressources, entre réforme
agraire et développement rural. L'enjeu est double : mettre en
cohérence les réseaux et les stratégies par la
co-construction d'un référent commun, d'une part, et assurer,
d'autre part, une place grandissante à des acteurs provenant de la
société : associations et entreprises. En effet, le processus de
décentralisation confère aux organes administratifs locaux des
prérogatives de plus en plus complètes, exigeant des moyens
techniques et humains de plus en plus importants auxquels on pallie par le
recours à des sous-traitants, souvent des microentreprises.
Si les interventions procèdent par un accroissement de
la part d'eau utilisable, tant en jouant sur la dimension anthropique du risque
de pénurie que sur sa dimension naturelle, l'approche fait de plus en
plus référence aux prérogatives énoncées par
les financeurs internationaux : consulter la population et la faire participer
aux aménagements pour qu'elle s'approprie leur entretien. C'est ce qui
explique quelque peu l'émergence de deux nouveaux modèles de
gestion de l'approvisionnement en eau en Afrique en général et en
Afrique au sud su Sahara en particulier.
2-1 Du modèle rural au " modèle " de
gestion communautaire
La gestion communautaire des ressources naturelles, et plus
précisément celle de l'eau doit faire partie intégrante
des vastes approches adoptées pour résoudre les problèmes
de pénurie. Gérer localement permet de démocratiser et de
décentraliser la prise de décisions et l'obligation de rendre
compte. Bien orchestrée, la gestion locale donne aux gens (surtout aux
pauvres et aux défavorisés) la possibilité de prendre part
à des décisions qui façonnent leur avenir. Elle encourage
l'intégration du savoir traditionnel aux avancées scientifiques
afin de favoriser une gestion efficace et équitable des ressources. Ces
moyens devraient permettre que la pénurie d'eau et la dégradation
de cette ressource puissent se transformer en approvisionnements durables.
(COING H. et al 2000)
Le modèle communautaire est surtout répandu en
milieu rural : un collectif d'habitants (généralement un "
village "), représenté par un comité ou une association,
est responsable
de la fourniture du service de production/distribution de
l'eau, à partir d'installations souvent financées dans le cadre
d'un projet et presque toujours propriétés de l'Etat. La vente de
l'eau est confiée à un fontainier, salarié ou
rémunéré à la marge, tandis que le comité
(ou l'association) est lié à un prestataire de service pour
l'entretien. Les relations entre les différents acteurs sont rarement
explicitées dans le cadre d'un document (contrat) écrit.
Les avantages théoriques de ce modèle sont
d'assurer la " participation " des populations, c'est-à-dire leur
responsabilisation et leur représentation, et la pérennité
du dispositif en prévoyant explicitement les modalités de
financement du fonctionnement et de la maintenance (tarif) ainsi que celles du
renouvellement partiel des installations (épargne placée).
Soulignons que la " délégation " demeure ici virtuelle. Ce n'est
d'ailleurs pas tant l' " informalité " (absence de document
écrit) du contrat qui est en cause que la faible
légitimité du système de redevabilités sous-jacent
: l'identification des responsabilités, leur répartition entre
opérateurs et la construction socio-technique de ces derniers
étant inachevées, les règles stabilisant les relations
entre acteurs demeurent imparfaitement admises et constamment soumises à
contestation.
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