4.5- Comparaison des régimes alimentaires des deux
échassiers
La comparaison de l'abondance en nombre des principaux ordres de
proies consommés par les deux échassiers est faite en fonction de
leurs périodes phénologiques
(reproduction et hors reproduction). Pendant la période
de reproduction, les coléoptères viennent en tête du
régime alimentaire de la Cigogne blanche avec 51,35 %, suivis par les
orthoptères (38,02 %) et les dermaptères (8,54 %). Quant au
garde-boeufs, ce sont les orthoptères qui dominent son régime
alimentaire en période de reproduction avec un taux de 46,1 %, mais leur
taux n'est pas trop loin de celui des coléoptères qui sont
noté avec 37,5 %, suivis par les dermaptères (11,0 %) et les
hyménoptères (2,1 %) (Fig. 32).
Durant la période hors reproductrice, le régime
alimentaire de la Cigogne blanche est basé principalement sur les
orthoptères (67,14 %), suivis par les coléoptères (27,29
%) et les dermaptères (4,89 %). Lors de cette même période,
le Héron garde-boeufs consomme principalement des
coléoptères (40,01 %), des orthoptères (23,38 %), des
hyménoptères (22,84 %) et des dermaptères (11,2 %) (Fig.
32).
Il est à signaler que pendant la période de
reproduction, les taux de consommation des coléoptères, des
orthoptères et des dermaptères sont assez proches pour les deux
échassiers étudiés, ce qui dénote d'un risque de
compétition vis-à-vis de ce type de proies en cette
période.
Par ailleurs, le bol alimentaire de B. ibis parait
plus diversifié avec 134 espèces que celui de C. ciconia
composé seulement de 79 espèces.
Aussi, l'indice de SHANNON, révèle que le
régime alimentaire du Héron garde-boeufs est plus
diversifié avec 5,2 bits que celui de la Cigogne blanche avec 3,7 bits.
De même, l'indice d'équitabilité indique que le
régime alimentaire du garde-boeufs est relativement plus
équilibré (E = 0,7) que celui de la cigogne (E
= 0,6).
En deuxième lieu, l'indice de similitude de SORENSON
qui s'élève à 62,2 % montre qu'il existe une assez grande
similitude entre les régimes alimentaires des deux échassiers.
L'application de l'indice d'électivité d'IVLEV,
indique une sélection positive pour les deux modèles biologiques
étudiés aux orthoptères, aux coléoptères et
aux dermaptères dans les trois types de milieux
échantillonnés (le milieu humide, la culture basse et la pelouse
naturelle).
Les orthoptères notés avec une valeur de
sélection positive dépassant 0,8 sembleraient être les
proies les plus recherchées par les deux échassiers.
Les dermaptères qui ont une valeur de sélection
positive allant de 0,5 à 0,7 pour la Cigogne blanche, et de 0,7 à
0,8 pour le Héron garde-boeufs, sont également des proies
nécessitant plus d'effort de capture par leur manque dans les
gagnages.
Reproduction
En %
|
70 60 50 40 30 20 10 0
|
|
Rodentia
Squamata
Dermaptera
Orthoptera
Coleoptera
Hymenoptera
Hors reproduction
En %
|
70 60 50 40 30 20 10 0
|
|
Dermaptera
|
Orthoptera
|
Coleoptera
|
Hymenoptera
|
Squamata
|
Rodentia
|
Ciconia ciconia Bubulcus ibis
Figure 32- Fréquences d'abondance relative des
principaux ordres de proies consommées par C. ciconia et B.
ibis pendant les périodes de reproduction et hors reproduction dans
la région de Batna.
Les coléoptères montrent une valeur de
sélection positive moins importante, variant entre 0,1 et 0,3 chez les
deux échassiers, ce qui signifie qu'ils seraient plus abondants dans les
gagnages par rapport aux orthoptères et aux dermaptères, mais
moins prisés par les deux oiseaux étudiés.
La sélection négative des aranéides et
des hyménoptères s'explique par leur abondance dans les gagnages
et leur moindre consommation par les deux échassiers. C'est le cas pour
l'indice de sélection des hyménoptères consommés
par le Héron garde-boeufs, qui est de -0,5 dans les trois milieux de
gagnage.
Toutefois, l'analyse statistique n'est significative que pour
la similitude de la composition des régimes alimentaires des deux
espèces que lors de période de reproduction et seulement dans
zone d'El Madher.
A cet effet, les indices de similitude et
d'électivité calculés, ainsi que l'analyse statistique
dénotent d'un risque d'une compétition interspécifique
entre les deux modèles biologiques étudiés qui ont
tendance à élire en priorité les mêmes groupes de
proies (coléoptères, orthoptères et dermaptères) en
particulier lors de la période de reproduction.
Selon BENTAMER (1998), malgré la ressemblance apparente
dans les régimes alimentaires de la Cigogne blanche et du Héron
garde-boeufs, il existe certaines différences entre les proies
entomologiques consommées. La Cigogne blanche consomme des proies
entomologiques de tailles plus grandes que celles consommées par le
Héron garde-boeufs. Bien que les mensurations des proies n'ont pas
été réalisées, nous avons également
remarqué ces mêmes observations lors de notre travail.
BOUKHEMZA (2000), en comparant les régimes alimentaires
de ces deux échassiers dans la vallée du Sébaou, a
confirmé l'existence d'un certain isolement trophique entre ces deux
espèces grâce à une analyse de leur partage suivant un
gradient de taille des proies. Selon ce dernier auteur, la taille des proies
est une dimension de la niche par laquelle ces deux espèces sont
susceptibles de réaliser un isolement trophique.
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