Le statut juridique de l'enfant adultérin dans le Code civil haà¯tien( Télécharger le fichier original )par Jennifer SYLAIRE Université Jean Price (Haiti ) - Licence en droit 2002 |
II.2.3 La problématique des unions de fait.L'Institution matrimoniale connaît une crise moins marquée, là où les traditions familiales restent fortes. La diminution progressive du nombre des mariages et des familles reconnues comme telles par les lois des divers Etats et l'augmentation dans certains pays du nombre de couples non mariés ne sont pas le fruit d'un mouvement culturel isolé et spontané. Il semble déraisonnable de soutenir que les fonctions vitales remplies par les communautés familiales centrées sur l'institution matrimoniale stable et monogamique peuvent être remplies de manière massive et permanente par les unions de fait basées uniquement sur des relations affectives.162(*) Face à cet ordre de choses, les lois relatives à la famille et à sa constitution se trouvent confrontée continuellement à la problématique des unions de fait. Dans toutes leurs dimensions sociales, économiques et juridiques les unions de fait quant à la filiation à établir, sont en choc avec la réalité juridique de l'union basée sur le mariage dans lequel la filiation est d'emblée établie. Le contrat de mariage comporte des clauses qui balisent les conjoints face aux responsabilités qui leur incombent tant vis-à-vis d'eux-mêmes, et de la famille qu'ils auront à fonder. Ils sont régis par des principes tant civils que moraux, tandis que pour les unions de fait, l'inexistence d'un véritable acte ayant force juridique et produisant des effets juridiques dévalue l'institution du mariage, qui depuis sa sécularisation suit encore aujourd'hui l'influence de nouvelles tendances jugées osées. Toujours dans l'ordre des principes, il faut garder à l'esprit, la distinction entre intérêt public et intérêt privé. Dans le premier cas, la société et les pouvoirs publics ont le devoir de le protéger et le promouvoir. Dans le second cas, l'Etat doit se limiter à garantir la liberté. Aussi, les unions de fait, sont - elles la conséquence de comportements privés et doivent demeurer sur le plan privé. Leur reconnaissance publique ou leur assimilation au mariage, avec l'élévation d'intérêts privés au rang d'intérêts publics qui s'ensuivraient, serait dommageable pour la famille fondée sur le mariage.163(*) Comme mentionné auparavant, l'enfant qui naît au sein d'un couple marié est d'emblée légitime. C'est surtout dans cette optique que les législateurs ont élaboré tant de conditions relatives au mariage. L'enfant en grandissant et en demeurant en constant rapport avec ses géniteurs, intériorise son statut d'enfant légitime, et ne saurait subir les pressions sociales, pouvant influencer son identité. La Convention aux droits de l'enfant est pourtant claire en énonçant que l'enfant dès sa naissance a droit d'être reconnu par ses parents et d'être élevé par eux. Dans le cas d'un enfant adultérin, après la naissance ou au moment de la grossesse, le père où la mère quel que soit son statut, doit au moins le reconnaître. Des scénarios multiples peignent des situations où l'enfant adultérin vient à s'identifier par rapport au père, sous témoignage de la mère. La plupart des veuves ont la surprise de ne découvrir les autres enfants du mari qu'à l'enterrement. Soulignons que ce genre de situation est très difficile à pardonner. Le seul moyen d'enrayer ce phénomène, est d'encourager la stabilité des couples par le mariage. A priori Il faut bien comprendre la différence existant entre le mariage et les unions factuelles.164(*) C'est là en effet, que prend racine la différence entre la famille d'origine matrimoniale et la communauté issue d'une union de fait. Cette communauté familiale naît du pacte d'alliance des époux qui fonde le mariage.165(*) Quant aux unions de fait, on met en commun l'affection réciproque, mais il manque ce lien conjugal. Le mariage en tant qu'institution n'est pas une création des pouvoirs publics, mais une institution naturelle et originelle qui leur est antérieure. Ainsi dans ce même ordre de principes, il convient de mettre l'accent sur l'importance du mariage au regard de l'éthique sociale.166(*) La reconnaissance publique et l'existence d'un lien conjugal entre un homme et une femme ne sont point contraires aux bonnes moeurs, bien que dans les sociétés ouvertes et démocratiques d'aujourd'hui, l'Etat et les pouvoirs publics tentent d `institutionnaliser les unions de fait en leur accordant un statut similaire à celui du mariage. Dans l'intérêt des époux, et pour la stabilité de la famille et de tous ses membres, en particulier les enfants et l'ordre public il incombe aux responsables étatiques, à l'Eglise de prêcher en faveur du mariage et de bannir les procréations en dehors de la couche nuptiale Le mariage constitue dans la grande majorité des cultures, une affaire publique. Il s'agit d'un contrat entre deux familles qui règle les propriétés et l'héritage, détermine les droits et les liens sociaux des enfants. La relation personnelle des partenaires n'est alors qu'une partie de la fonction du mariage. C'est seulement dans les temps modernes que la notion du mariage d'amour est apparue dans nos sociétés. En réalité le mariage a encore la même fonction qu'autrefois : propriété, famille et enfants. Alors on peut bien comprendre les autres cultures où le choix du partenaire est fait par la famille en vue d'échanger les propriétés et d'assurer la continuité des valeurs familiales et culturelles. Tenant compte du rôle important du mariage en tant qu'institution, et les nombreuses obligations qui en découlent nous soulignons que de nos jours les jeunes de moins en moins sont enclins à s'unir par les liens du mariage. Sous l'influence de visions pessimistes beaucoup d'entre eux doutent qu'il puisse exister, dans le mariage un don réel qui crée un lien fidèle, fécond et indissoluble. Ces visions peuvent dans des cas extrêmes les mener à refuser l'institution matrimoniale, considérée par certains, comme une réalité illusoire à laquelle ne pourraient accéder que des personnes ayant une préparation très spéciale. Certains s'engagent à l'essai et suivant les compatibilités qu'ils établissent entre eux, ils décideront peut- être de se marier ou pas. Dans la majorité des cas ils choisissent l'option la moins contraignante. L'expérience de différentes cultures au long de l'histoire a démontré pour la société la nécessité de reconnaître et défendre l'institution de la famille. Il est donc impératif aujourd'hui, face à cette détérioration sociale et morale qui sévit, que la famille et la société toute entière accordent la plus grande attention aux problèmes auxquels le mariage et la famille doivent faire face actuellement, dans le respect absolu de la liberté. Dans le catéchisme de l'Eglise Catholique, on lit : La famille est la cellule originelle de la vie sociale. Elle est la société naturelle où l'homme et la femme sont appelés au don de soi dans l'amour et dans le don de la vie. L'autorité, la stabilité et la vie de relations au sein de la famille constituent les fondements de la liberté, de la sécurité, de la fraternité au sein de la société.167(*) En ce sens le Pape Jean Paul II, dans sa lettre aux familles, a écrit que l'amour dit libre est un facteur désagrégeant et destructif pour le mariage. Il lui manque en effet l'élément constitutif de l'amour conjugal fondé sur le consentement personnel et irrévocable par lequel les époux se donnent et se reçoivent mutuellement. Ils instaurent ainsi un lien juridique et créent une unité scellée par une dimension publique de justice.168(*) Cette stabilité conjugale dont a fait mention le Pape Jean Paul II, n'est pas fondée uniquement sur la bonne volonté des personnes concernées, mais revêt un caractère institutionnel en raison de la reconnaissance publique, de la part de l'Etat, du choix de vie conjugale. La reconnaissance, la défense et la promotion de cette stabilité répond à l'intérêt général, et en particulier à celui des plus faibles, c'est-à-dire les enfants. C'est la nature du mariage comme réalité naturelle et humaine qui est ici en jeu, et le bien de la société tout entière qui est en cause, ainsi que la valeur et l'utilité même de l'institution. Le rôle de la famille est déterminant et irremplaçable pour bâtir la culture de la vie.169(*) Quelle que soit la nature du mariage (religieux, coutumier, civil) son importance est partout la même. Il suffit que ceux qui le contractent, soient en mesure de répondre aux prescrits fournis par la loi et surtout de respecter leurs engagements mutuels et envers la société et surtout envers leur progéniture. Envisagée comme tel, il incombe à l'Etat haïtien de réorganiser les structures existantes s'il le faut créer de nouvelles en fonction des attentes immédiates pour un fonctionnement efficient de ses Institutions. * 162 _ Ibid. * 163 _ Ibid. * 164 _ Ibid. * 165 _ Ibid. * 166 _ Ibid. * 167 _ Ibid. * 168 _ Ibid. * 169 _ Ibid. |
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