Paragraphe II : En matière de protection de la
santé humaine
La protection de l'environnement apparaît aujourd'hui comme
un impératif de santé publique dans tous les pays du monde. La
dégradation de l'environnement constitue une menace grave pour la
santé publique car elle emporte d'énormes conséquences sur
la santé humaine. Aussi, le maintien d'un environnement sain et propre
est une condition nécessaire pour la préservation de la
santé publique. Il faut donc, en application du principe 1 de la
Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement, du 14
juin 1992 « les êtres humains sont au centre des
préoccupations relatives au développement durable. Il ont droit
à une vie saine et productive en harmonie avec la nature »,
mettre en place des politiques environnementales prenant en compte les
questions de santé publique. Le principe de précaution se
présente en la matière comme une solution avant-gardiste,
malheureusement sa place reste encore limitée au Burkina Faso en
matière de santé publique.
A) Une plus grande place à la prévention en
matière de santé publique
La politique sanitaire du Burkina Faso est basée sur les
mesures préventives. Compte tenu du niveau de développement du
pays, de l'insuffisance des moyens financiers et technologiques, la
prévention apparaît comme une exigence essentielle des politiques
de santé publique afin de limiter les dangers. Les dispositifs de veille
et d'alerte sont quasi inexistants pour permettre une prise de mesures de
précaution. Pour pallier ces défaillances, la prévention
est pratiquée à profusion. Rien que
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
l'étude du circuit de décision en matière de
santé publique démontre la place occupée par la
prévention. Le circuit de décision en matière de
santé publique est globalement le suivant :
- apparition d'un problème de santé publique
à un niveau,
-
-
saisine des responsables locaux de centre de santé,
description du phénomène et notification au
district sanitaire (DS)
avec prélèvement éventuel des pièces
à conviction,
- vérification par les responsables techniques de
l'évidence et de
son acuité, de son ampleur,
-
Saisine des autorités administratives locales et de la
Direction
Régionale,
- Prise de mesures pour circonscrire le risque, informer la
population, la protéger contre les risques (vaccination,
désinfection, etc.)
- Saisine du niveau central avec comme porte d'entrée la
Direction
Générale de la santé, qui rend compte au
Secrétaire Général, lequel s'en réfère au
Ministre. Concomitamment, le haut commissaire saisit le gouverneur, lequel
saisit son ministre de tutelle qui entre en contact avec son collègue de
la santé après en avoir avisé le premier Ministre.
On remarque aussi des mesures de prévention en
matière de protection de la santé des consommateurs à
travers diverses mesures de contrôle des produits destinés
à la consommation humaine. Il en va ainsi, par exemple, des normes
environnementales de qualité ou de rejet, des mesures restrictives
à l'importation de certains produits susceptibles de mettre en danger la
vie ou la santé des consommateurs nationaux.
Cependant, la préférence des décideurs
burkinabè vis-à-vis du principe de prévention n'emporte
pas une méconnaissance du principe de précaution.
B) Vers une meilleure prise en compte du principe de
précaution
Le principe de précaution n'est pas un principe
ignoré par le droit burkinabè en matière de santé
publique. C'est un principe assez récent en la matière, qui exige
pour sa mise en cuvre efficace, l'existence d'un paquet technologique
important
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Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
voire trop important pour un pays pauvre. Néanmoins, ce
principe trouve de plus en plus un écho favorable auprès des
autorités. En effet, depuis les années 2000, le gouvernement
burkinabè met un effort particulier dans la recherche scientifique. Des
mesures concrètes sont prises dans ce sens, telles que, l'augmentation
du budget consacré à la recherche, l'apport de subventions
diverses aux institutions de recherche telles que le Centre National de
Recherche Scientifique et Technique (CNRST), l'Institut National de
l'Environnement et la Recherche Agricole (INERA) , la divulgation, la
vulgarisation et l'aide à la promotion des résultats des
institutions de recherche citées plus haut, mais aussi, la
création du Laboratoire National de Santé Publique
(LNSP)43. Certes, le laboratoire national de santé publique a
pour fonction première de contrôler la qualité des produits
destinés à la consommation humaine, donc une mission de
prévention par excellence, mais, il constitue aussi un canal de mise en
~uvre du principe de précaution. Le laboratoire national de santé
publique est un cadre privilégié pour le débat autour du
principe de précaution. Par les résultats des examens auxquels il
procède, le laboratoire peut susciter le débat au sein de
l'opinion publique et ainsi contrai ndre l'Etat à la prise de mesure de
précaution. Malheureusement, et pour l'heure les résultats des
analyses du laboratoire national de santé publique ne font pas l'objet
de divulgation au près du publique.
Sur le plan politique, le renforcement de place du principe de
précaution se lie à travers l'obligation de soumettre au
contrôle du laboratoire national de santé publique, les produits
destinés à la consommation humaine avant leur mise sur le
marché. Nous avons aussi l'intégration des questions de
santé publique dans certaines politiques nationales, telles que,
l'exploitation minière44, l'assainissement45 et de
radioactivité46.
Au-delà, de toutes ces dispositions et politiques il n'est
pas utopique de dire que le principe de précaution n'est pas
suffisamment entré dans le droit burkinabè de santé
publique. Pourtant, une bonne application de ce principe peut permettre au
Burkina Faso d'éviter les crises sanitaires survenues en occident telles
que le
43 Décret n° 99-377/PRES/PM/MS du 28
octobre 1999 portant création du laboratoire national de santé
publique ; Décret n°2003-478/PRES/PM/MS du 22 septembre 2003
modifiant le décret n° 99- 377/PRES/PM/MS du 28 octobre 1999
portant création du laboratoire national de santé publique.
44 Voir code minier précité
45 Code de l'environnement de 1994, art 58.
46 Loi 2005-010 sur la sécurité
nucléaire et la protection contre les rayonnements ionisants,
précité.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
scandale du sang contaminé ou l'affaire de la vache folle.
Il convient donc pour les décideurs du Burkina Faso, de tirer des
leçons des expériences des pays occidentaux, pour mettre des
politiques de santé publique prenant en compte le principe de
précaution qui constitue un avatar contemporain du principe de
prévention.
Le principe de précaution tel que conçu par le
droit international, est un principe fonctionnel, un principe directeur dont
l'importance n'est plus à démontrer. Ce principe a fait une
entrée mitigée dans le droit national burkinabè, il est
consacré implicitement et parfois explicitement par la constitution et
certaines dispositions règlementaires dans plusieurs domaines tels que
la protection et la conservation de la diversité biologique, la
protection de la santé humaine. Cependant, au-delà de cette
consécration, se pose le problème de la mise en cuvre du
principe, son rôle dans le développement du Burkina Faso en
général et particulièrement dans les biotechnologies
(titre II).
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