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La prise en compte de mesures de précaution dans la
protection de l'environnement et de la santé a toujours depuis longtemps
existé dans le monde. Ces mesures étaient l'émanation de
politiques internes des Etats77 ou la résultante de
politiques sectorielles78. Ces mesures de précaution se sont
transformées par la nécessité des choses, en principe qui
a connu sa consécration international dès 1992 avec les
conventions du cycle de RIO. Cette consécration internationale qui s'est
faite par l'entremise de sources conventionnelles et des sources de droit
souple, s'est poursuivie après RIO, par d'autres dispositions
conventionnelles internationales, régionales et sous-régionales
mais aussi par des dispositions internes des Etats.
Le Burkina Faso n'est pas resté en marge de ce dynamisme
international. D'ailleurs sa constitution, qui est antérieure à
la consécration internationale généralisée du
principe de précaution, intégrait ne serait ce qu'implicitement
le principe. En consacrant dans son préambule la nécessité
de protéger l'environnement et en établissant un lien entre la
protection de l'environnement et le développement, la constitution a
suscité la prise de nombreux textes intégrant des mesures de
précaution. C'est ainsi qu'on peut constater un foisonnement normatif en
matière de protection de l'environnement. Mais, force est de reconnaitre
que ces textes regorgent de beaucoup de lacunes. Il y a une faible prise en
compte du principe de précaution par ces textes qui se
réfèrent le plus souvent au principe de prévention.
Néanmoins, il faut observer que la faiblesse des textes
légaux n'emporte pas vide juridique en matière de
précaution. Les quelques règles internes sont
complétées par une panoplie d'instruments internationaux
consacrant explicitement et implicitement le principe de précaution.
Aussi, il parait important de souligner la faible prise en
compte du principe de précaution dans les plans et programmes aussi bien
en matière de conservation et de préservation de la
diversité biologie que de la protection de la santé humaine.
Ces
77 Cf. droit allemand de l'environnement
78 Cf. convention de Vienne du 22 mars 1985 et son
protocole additionnel de septembre 1987.
Application du droit international au plan interne : examen de la
mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
différentes politiques bien que nombreuses,
n'intègrent pas suffisamment le principe de précaution compte
tenu de la technicité qui entoure ce principe. Le pays manque de moyens
logistiques pour accompagner scientifiquement la mise en ~uvre du principe,
évaluer méthodiquement les risques, faire des études
comparatives des coûts et avantages liés aux risques.
La mise en ~uvre peu satisfaisante du principe de
précaution dans les textes et politiques a lancé le débat
sur la place de principe dans le développement d u Burkina Faso. Bien
que considéré comme un principe anti-progrès, le principe
de précaution a trouvé un écho favorable au Burkina Faso
du moins quant à sa nécessité dans le développement
du pays. Il est considéré unanimement comme un moyen d'assurer un
développement participatif et éclairé intégrant
tous les acteurs de la vie sociale. Il permet une prise de risque
mesurée et surtout permet aux Etats faibles de se protéger
vis-à-vis des Etats développés. Tout compte fait, il reste
réelle la difficulté de l'application du principe de
précaution au Burkina Faso. La technicité de ce principe fait
qu'il est difficile à appréhender par une population à
majorité analphabète. Aussi, la pauvreté et ses nombreuses
conséquences sont des facteurs qui poussent la population à
ignorer les règles de protection de l'environnement.
C'est dans ce contexte peu enviable que l'avènement des
OGM au Burkina Faso a soulevé d'énormes controverses. Cette
entrée dans les OGM s'est produite dès 2003 alors qu'aucun cadre
juridique n'existait, aucune institution de gestion des risques n'était
mise en place. Ce n'est qu'en 2004 puis en 2006 que ce cadre a
été réellement mis en place à traves un
décret puis une loi. Il faut remarquer que l'entrée du Burkina
Faso dans les biotechnologies modernes s'est fait dans la clandestinité,
ni le peuple dans son ensemble, ni les organisations de la
société civile, n'ont été associés dans le
circuit de la décision d'autorisation des
expérimentations. Ce défaut de participation
semble aujourd'hui quelque remédié car des associations de la
société civile comme la Ligue des Consommateurs du Burkina (LCB)
sont membres de l'Agence National de Biosécurité (ANB). Aussi, de
nombreux ateliers de formations sont organisés à travers le pays
à l'attention des élus locaux
pour permettre à ces derniers de s'imprégner des
réalités des OGM et d'être à leur tour des maillons
de sensibilisation de la population. Toutes ces activités se justifient
par le désir du gouvernement de booster l'économie nationale
à travers les OGM
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SOMDA Sâabèsèlè Jean Augustin Master
DICE Limoges 2010
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mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
dans la mesure où cette technologie présente des
avantages quant au rendement des productions agricoles.
Par contre, pour les acteurs de la société civile,
le slogan est très souvent le même « les OGM d'accord,
mais précaution d'abord ». Pour eux, les OGM constituent un
potentiel danger aussi bien pour les hommes et les animaux, que pour
l'environnement dans la mesure ou la preuve de leur innocuité n'est pas
apportée. Il faut donc aller progressivement dans les OGM, voire
instaurer un moratoire pour permettre à la science de faire son travail,
mais aussi à la population de faire un choix libre en toute connaissance
de cause.
Au-delà de toutes ces controverses, se pose le
problème des moyens d'application du principe de précaution et
surtout de l'impact du principe dans l'économie nationale. Il ne faut
pas oublier le fait que l'usage très médiatique du principe de
précaution dénature son sens. Le principe de précaution
est invoqué tout azimut par des personnes qui ignorent très
souvent le sens et la portée du principe. Il est très souvent
confondu avec le principe de prévention qui convient lorsque les risques
sont avérés79.
Somme toute, que ça soit au Burkina Faso ou dans le
reste du monde, le principe de précaution divise l'opinion. En effet,
pendant que des pétitions sur la nécessité du principe de
précaution sont mises en ligne et que des personnalités comme le
ministre français de l'Ecologie Jean Louis Borloo, clament la
bonté de celui-ci, d'autres personnes s'attaquent à ce principe.
Pour eux, le principe de précaution empêche le progrès
comme le dit si bien un ancien ministre français (Claude
Allègre), «le principe de précaution est une arme contre
le progrès ».
Au vu des développements ci-dessus, on peut affirmer comme
l'a fait Léopold Cedar Senghor pour la colonisation de l'Afrique, que le
principe de précaution est mal nécessaire pour le monde de nos
jours en proie aux catastrophes de tout genre, conséquences des choix
que nous faisons tous les jours.
79 Cf. Affaire du volcan Islandais en matière
de sécurité du transport aérien.
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mise en ~uvre du principe de précaution au BURKINA FASO.
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