CONCLUSION BILAN ET PERSPECTIVES
La transition vers un nouveau mode d'organisation de
l'activité économique s'est imposée aux PM dès lors
que l'ancien système n'a plus été en mesure de
générer suffisamment de croissance et d'emploi. L'objectif
secondaire a été de réduire leur niveau de
dépendance envers l'aide extérieure et les revenus provenant des
ressources naturelles. La faiblesse des politiques de développement a
incité les PM à rechercher de nouveaux sentiers de croissance. Il
s'agit tout d'abord de compléter les revenus issus des rentes
pétrolières par des revenus hors hydrocarbures. Il s'agit ensuite
de remplacer les activités dominées par l'Etat par des
activités tournées vers le marché. Il s'agit enfin de
substituer les secteurs protégés contre les importations par des
secteurs compétitifs à vocation exportatrice. L'intensification
du commerce extérieur et de l'investissement se situe au coeur de ces
trois changements.
L'attente a été longue et coûteuse
durant les premières années de la transition avant que le pas ne
soit définitivement emboîté. A présent, les PM
doivent envisager une baisse inévitable des ressources naturelles et
faire face à une concurrence croissante sur les marchés mondiaux.
Le resserrement des opportunités de migration de la main-d'oeuvre et la
pression exercée sur les marchés intérieurs du travail
sont au centre de leurs préoccupations. Rappelons que l'accroissement
annuel moyen de la population active des PM a été estimé
à 3,4% par an pour la période 2000-2010, soit le double du
chiffre évalué dans les autres PVD. La réduction de
l'offre sur le marché du travail face à un tel potentiel
démographique ne fait qu'accentuer le risque d'une crise sociale plus
profonde.
Par ailleurs, les PM doivent disposer d'un cadre
attractif pour les capitaux étrangers et encourager l'investissement
intérieur privé, tous deux essentiels au développement
économique. Il est à noter que si les exportations hors
hydrocarbures étaient diversifiées, l'investissement privé
national serait plus important et les flux d'IDE atteindraient cinq à
six fois leur volume actuel, soit près de 3% du PIB. De même, si
la moitié du potentiel du commerce extérieur et de
l'investissement privé était réalisée au cours des
dix prochaines années, la croissance du PIB par tête passerait de
1% à 4% par an. Ceci permettrait à la région de
créer le nombre d'emplois requis pour la décennie à venir,
non seulement en répondant à l'accroissement futur de la
population active mais aussi en absorbant le niveau actuel de chômeurs.
Cependant, les exportations hors hydrocarbures ne représentent qu'un
tiers de leur niveau de prédiction statistique. Par conséquent,
le commerce extérieur n'a réussi à atteindre que 30% de
son potentiel. Ce chiffre est relativement faible compte tenu des
caractéristiques favorables des PM en termes de taille, de revenu et de
situation géographique.
En effet, même si la région est de petite
taille avec 5% de la population mondiale, elle détient 2% du PIB
mondial. En contrepartie, les revenus sont peu importants et se situent dans la
moitié inférieure de la distribution mondiale de revenus. Les
salaires sont également relativement bas et se positionnent dans la
moitié inférieure des barèmes salariaux
mondiaux.
Sur le plan du développement des
activités, on remarque que les secteurs manufacturiers de la plupart des
PM sont restreints par rapport aux normes internationales. Ils
représentent environ 50% de ceux des autres pays à revenu
intermédiaire de la tranche inférieure dans la distribution des
revenus mondiaux. De même, les services se développent lentement
et l'agriculture connaît des niveaux de productivité insuffisants.
En contrepartie, des efforts ont été réalisés au
niveau de la valorisation des ressources humaines, de l'équité
hommes / femmes et des modes de gouvernance, afin de favoriser une
réorientation en faveur d'activités reposant sur une
main-d'oeuvre de qualité.
En définitive, le processus de réforme
impulsé par la Déclaration de Barcelone reste vraisemblablement
la principale source motivant la croissance en Méditerranée. Il
doit être intense en qualifications afin de s'adapter aux
caractéristiques changeantes des nouveaux entrants sur le marché
du travail. De plus, il peut être un instrument puissant pour
améliorer la participation des femmes dans l'activité
économique. Ces effets se produisent à travers un meilleur climat
de l'investissement propice à la création de nouvelles
entreprises. A ce sujet, l'expérience des pays émergeants d'Asie
est parlante (Chine, Inde, Vietnam).
Concrètement, les résultats sur le
terrain ont été peu concluants, notamment en matière de
coordination des politiques économiques. Les années 90 ont
été marquées par des échanges peu
diversifiés et un secteur privé mal adapté,
exerçant une pression sur les différents domaines
d'activité des PM. Une pression toutefois nécessaire pour pallier
le déséquilibre entre les niveaux d'organisation respectifs des
gagnants et des perdants potentiels de la transition. Les réformes du
commerce et de l'investissement ont été prudentes, voire
hésitantes et timides. Les facteurs politico-économiques
extérieurs tels que la recrudescence des conflits, la faible
participation à l'OMC et l'intérêt limité pour
l'agriculture et les services dans les accords commerciaux sont les principales
variables explicatives de la lenteur des réformes.
Pour finir, soulignons que les freins à la
construction d'un espace régional euroméditerranéen sont
à chercher dans deux directions. La première concerne l'ensemble
de la zone et relève du choc des civilisations, d'une construction
européenne focalisée sur la question de l'élargissement et
d'une représentation de la globalisation omettant les règles de
proximité. La seconde est propre à la rive Sud et relève
de la difficulté du monde arabe à assumer son éclatement
politique et à assurer son unification économique. Ces raisons
ont fait de la politique européenne de voisinage une première
expression d'un dessein politique régional. Elle permet en l'occurrence
de lever la confusion entre l'espace institutionnel précisément
circonscrit et l'espace fonctionnel à géométrie variable
relevant d'une gouvernance complexe.
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