Partie II
Contribution à la réduction
de la stigmatisation et la discrimination des PVVIH
au Sénégal
I - VIH, DISCRIMINATIONS ET CADRES SPECIFIQUES
Il existe différents recours pour les
personnes victimes de discriminations en fonction du contexte dans lequel les
faits se sont déroulés. Ainsi, en cas de discriminations
liées au contrat de travail deux juridictions sont compétentes :
le conseil de prud'hommes et le tribunal de grande instance. En cas de refus de
soins pour cause de VIH annoncé le conseil départemental de
l'Ordre concerné, c'est-à-dire celui du département
d'exercice du professionnel, doit être saisi.
Le domaine des assurances jouit d'un cadre particulier car le
refus d'assurance n'est pas juridiquement une discrimination. En effet,
l'assureur n'a pas obligation de prendre en charge tous les risques.
Le VIH est une maladie, pas un crime. Vous ne perdez aucun
droit lorsque vous devenez atteints de VIH, même que dans certaines
situations vous en gagnez. Il faut cesser de se voir d'avance perdant.
Regardons les choses telles qu'elles sont. Le VIH est un virus
qui peut dormir dans l'organisme pendant des années et qui depuis 1997
peut être contrôlé par la trithérapie. Donc, une
PVVIH, qui n'est pas affaiblie par une maladie, est tout à fait apte aux
soins et au travail. Ainsi dans :
1- Le Cadre médical
Le dossier médical est un des éléments de
la vie privée, protégez- le. Le médecin qui vous expertise
pour votre employeur n'a pas à divulguer le nom des maladies dont vous
souffrez, il n'a qu'à évaluer votre aptitude à effectuer
le travail et ne vous gênez pas pour le rappeler à ce
médecin. De plus, lorsque vous remettez des documents au service des
ressources humaines de votre employeur, remettez-les sous enveloppe bien
cachetée, car votre employeur n'a pas à connaître les
informations que vous transmettez à votre assureur, ne vous gênez
pas, non plus, pour rappeler également à l'assureur qu'il doit
respecter la confidentialité de votre dossier; l'employeur n'est
sensé recevoir que les résultats financiers de son régime
sans aucune identification des personnes consommant tel ou tel
médicament. La prise en charge des personnes infectées par le VIH
a évoluée mais le cadre médical reste quand même le
premier domaine de discrimination dans la vie sociale comme le montrent les
différentes enquêtes. Ainsi, près d'une personne sur deux
déclare avoir été discriminée en raison de son
statut sérologique, une sur quatre avoir renoncé à une
consultation, un examen médical ou un soin et environ une sur trois
avoir tu son statut sérologique.
Les personnes vivant avec le VIH/ sida sont encore
confrontées, dans le contexte médical, à des situations et
des expériences offensantes, d'exclusion et d'humiliation.
Plusieurs types de discriminations sont observés :
refus de soins (" mon dentiste a refusé de me traiter "), propos ou
attitudes désobligeants voire non-respect du secret médical (" le
médecin l'a dit à une de mes amies ").
Les résultats des enquêtes montrent que les
femmes sont davantage l'objet de discriminations dans le milieu médical
que les hommes. Cette situation semble être liée aux consultations
gynécologiques et aux représentations encore souvent hostiles du
personnel médical du désir de maternité des personnes
séropositives.
Si différents groupes de soignant sont
évoqués, les personnes séropositives indiquent faire
particulièrement l'objet d'un refus de soins de la part des dentistes.
L'existence de pratiques discriminantes peut avoir des
conséquences dramatiques puisque certaines personnes témoignent
avoir parfois renoncé à faire appel au milieu médical
plutôt que de voir signaler leur statut sérologique ou avoir
préféré taire leur séropositivité. Face
à cette crainte du rejet, certaines personnes séropositives
cessent de prendre soin d'elles-mêmes et mettent leur santé en
danger.
De plus, si les indiscrétions concernant le statut
sérologique relèvent davantage de la violation du droit des
malades que d'un acte discriminant à proprement parler, elles peuvent
être lourdes conséquences et entraîner des discriminations
dans d'autres domaines tels que la vie sociale ou le cadre professionnel comme
l'exclusion ou le licenciement.
2 - Le Cadre professionnel
Lors d'une entrevue d'embauche, l'employeur a le droit de
vérifier la capacité de la personne à effectuer le
travail, mais un dossier médical est un élément de la vie
privée qu'on n'est pas obligé de dévoiler à moins
qu'on doive le faire pour assurer la sécurité d'autrui. De plus,
l'employeur peut vous demander de passer un examen médical que s'il vous
a offert un emploi et par la suite il ne peut pas refuser de vous embaucher au
seul motif que vous êtes une personne vivant avec le VIH, il devra
prouver que votre situation vous rend inapte au travail. Nous ne le
répéterons jamais assez, le VIH ne rend pas inapte au
travail.
L'apparition des trithérapies et leur
généralisation ont permis à bon nombre de personnes
touchées par le VIH, qui n'envisageaient plus leur vie à long
terme, de faire le deuil du deuil. Ces personnes ont dû
réapprendre à vivre et trouver, ou retrouver, un emploi est
devenu la préoccupation de certains.
En effet, l'activité professionnelle est un
élément important pour la construction ou la reconstruction des
projets de vie et la réintégration sociale.
Les résultats de l'enquête " AIDES et toi 2005 ",
réalisée dans les accueils de ''AIDES `'et lors d'actions
menées par l'association, montrent que 33% des répondants ont
été confrontés à des discriminations dans la
sphère du travail. Des données similaires ressortent de
l'ensemble des analyses menées au niveau national.
Le panel des situations à caractère discriminant
évoquées est vaste allant de la mise à l'écart aux
injures voire le harcèlement moral. L'analyse des témoignages
permet d'identifier des causes récurrentes à ces comportements
dont la peur de la contamination et les préjugés.
Les questions posées sur le dispositif de Sida Info
Droit montrent que tous les temps de la vie professionnelle sont
concernés. Des comportements discriminants pouvant en effet se
manifester au niveau de l'embauche ou être cause de licenciement en
passant par le maintien dans l'emploi ou la réinsertion professionnelle
: " j'avais postulé..., j'avais dit mon état de santé - il
a mis un post - it sur mon dossier SEROPOSITIF ".
Face à cet état de fait, certaines personnes
choisissent de ne pas révéler leur séropositivité.
Cependant il est parfois difficile de garder le secret sur son état de
santé : prise du traitement, présence d'effets secondaires ou
arrêts de travail à répétition.
3 - Le cadre financier et
économique
· Les banques et assurances
Les personnes séropositives rencontrent
également des difficultés dans le domaine des assurances et des
banques. L'assureur n'a pas obligation de prendre en charge tous les risques et
le refus d'assurance n'est pas juridiquement une discrimination. Dans le but de
prendre en compte ces difficultés, une première convention, a
été mise en place en 2001. Elle a été signée
le 19 septembre 2001 entre les pouvoirs publics, les représentants de la
banque et de l'assurance et les associations de malades et de consommateurs.
Sans caractère contraignant sur le plan juridique, elle visait à
améliorer l'accès à l'emprunt et à l'assurance des
personnes présentant un risque de santé aggravé.
Dans la réalité quotidienne, les surprimes
liées à l'infection à VIH sont restées d'un montant
rédhibitoire. Cependant ces accords n'ont jamais été
suivis d'effets, malgré l'implication des pouvoirs publics. Ce texte qui
remplace la convention assouplie les conditions d'âges, de montant et de
durée des prêts. De même, un mécanisme de
mutualisation des risques est prévu à destination des personnes
à revenus modestes pour essayer de juguler les surprimes.
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