I - Approche méthodologique
A - Problématique
1 - Définition du problème selon
l'UNGASS 8
La stigmatisation a été décrite comme un
processus dynamique de dévaluation qui `discrédite
significativement' un individu aux yeux des autres. Associée au VIH,
elle s'observe à plusieurs niveaux, et tend à s'appuyer sur des
pensées négatives déjà implantées et les
renforce, en associant le VIH et le sida à des comportements d'ores et
déjà marginalisés comme le commerce du sexe, la
consommation de drogues, l'homosexualité et la transsexualité. La
stigmatisation renforce également le sentiment de peur face aux exclus
et aux autres groupes vulnérables, par exemple les détenus et les
migrants.
Depuis le début de l'épidémie, les
métaphores puissantes associant le VIH à la mort, à la
culpabilité et à la punition, au crime, à l'horreur et
à `autrui' ont construit et légitimé la stigmatisation. La
stigmatisation se manifeste par le langage mais surtout de l'image que l'on se
fait d'autrui.
L'emploi de ce langage s'explique par un autre aspect
sous-tendant et renforçant le processus de stigmatisation : les gens ont
peur des maladies mortelles. La stigmatisation se fonde en partie sur la peur
des gens face aux conséquences de l'infection à VIH, en
particulier concernant les taux élevés de létalité
(surtout lorsque les traitements ne sont pas largement accessibles), la peur de
la transmission ou de voir une personne atteinte du SIDA décliner
à vue d'oeil.
La stigmatisation peut apparaître à un autre
niveau. Les personnes vivant avec le VIH peuvent intérioriser les
réactions négatives des autres et résulter en une
auto-stigmatisation ou une stigmatisation `intériorisée' comme
certains l'ont appelée. L'auto-stigmatisation est associée
à ce que certains auteurs ont parfois appeler la stigmatisation
`ressentie' par opposition à la stigmatisation `effective', en ce
qu'elle touche principalement aux sentiments de dignité et de valeur
d'un individu ou d'une communauté affectée. Chez les personnes
vivant avec le VIH, ce phénomène peut se manifester par un
sentiment de honte, de culpabilité et de dévalorisation qui,
associé au sentiment d'être en retrait de la
société, peut conduire à la dépression, au repli,
voire au désir de suicide.
___________________
8
UNGASS : C'est la
Déclaration d'engagement, adoptée en juin 2001 lors de
la Session extraordinaire de l'Assemblée générale des
Nations Unies sur le VIH/ sida. Elle stipule que le combat contre la
stigmatisation et la discrimination est une condition préalable à
l'efficacité de la prévention et de la prise en charge, et
réaffirme que la discrimination liée au statut sérologique
d'une personne constitue une violation des droits de l'homme.
La discrimination 9 selon l'UNGASS et ONUSIDA est
la conséquence de la stigmatisation 10. La discrimination
consiste à faire des choses ou à oublier de faire des choses
découlant de la stigmatisation dirigées à l'encontre des
personnes qui sont stigmatisées.
La discrimination, telle que définie par l'ONUSIDA
(2001) dans le Protocole pour l'identification de la discrimination
à l'égard des personnes vivant avec le VIH, renvoie à
toute forme de distinction, d'exclusion ou de restriction arbitraires à
l'égard d'une personne, généralement mais pas
exclusivement, en fonction d'une caractéristique inhérente
à cette personne ou perçue comme appartenant à un groupe
particulier, par exemple dans le cas du VIH et du sida, une personne dont le
statut VIH est confirmé ou supposé positif, que ces mesures aient
ou non une quelconque justification.
La discrimination associée au VIH peut apparaître
à plusieurs niveaux. La discrimination peut survenir dans le
contexte familial ou communautaire, ce qui est parfois décrit
comme la stigmatisation `effective'. Il s'agit d'actes qui poussent les
individus à faire des choses, ou à oublier de faire des choses,
qui mettent les autres en danger ou à leur refuser des services ou des
droits. A titre d'exemple de cette forme de discrimination envers les personnes
vivant avec le VIH, on peut citer : l'ostracisme conduisant par exemple
à obliger les femmes testées positives au VIH à retourner
dans leur famille lorsqu'elles présentent les premiers signes de la
maladie, ou lorsque leur partenaire est décédé du SIDA ;
le fait de fuir la personne ou d'éviter d'être à son
contact quotidiennement, le harcèlement verbal, la violence physique, la
déconsidération et les reproches verbaux, le commérage, le
déni des rites funéraires traditionnels sont également des
formes de discrimination.
La discrimination existe également dans le milieu
institutionnel, en particulier sur le lieu de travail, dans les services
de soins de santé, les prisons, les établissements d'enseignement
et les centres sociaux.
Cette discrimination concrétise la stigmatisation
effective en des politiques et des pratiques institutionnelles discriminant les
personnes vivant avec le VIH, ou au contraire en une absence de politiques
anti-discriminatoires ou de procédures de réparation. Les
exemples de cette forme de discrimination à l'égard des personnes
vivant avec le VIH sont entre autres :
· Services de soins de santé : soins de
qualité inférieure, déni d'accès aux soins et au
traitement, dépistage du VIH sans consentement, violations de la
confidentialité, notamment parler de la séropositivité
d'une personne à ses proches ou à des organismes
extérieurs, attitudes négatives et pratiques dégradantes
de la part des professionnels de la santé.
___________________
9 « La
discrimination est l'action d'isoler et de traiter différemment
certains individus ou un groupe entier par rapport aux autres» ;
« Discriminer consiste à établir une
différence, une distinction entre des individus ou des choses ».
10 « la
stigmatisation est une réaction négative réelle
ou perçue comme telle provenant d'un particulier d'une communauté
ou d'une société à l'encontre d'une personne ou d'un
groupe de personnes. Elle se caractérise par le rejet, la
dénégation, le discrédit, le mépris, la
dévalorisation et la mise à distance sur le plan social. Elle
conduit souvent à la discrimination et à la violation des droits
de l'homme »
· Lieu de travail : refus d'accorder un emploi en
raison du statut sérologique, dépistage du VIH obligatoire,
exclusion des personnes séropositives des régimes de
prévoyance ou des prestations médicales.
· Ecoles : refus d'inscrire des enfants
affectés par le VIH, ou renvoi des enseignants séropositifs.
· Prisons : ségrégation obligatoire des
personnes séropositives et exclusion de ces dernières des
activités collectives.
Au niveau national, la discrimination peut
refléter la stigmatisation ayant été officiellement
sanctionnée ou légitimée par des lois et des politiques
déjà mises en place, et promulguées sous forme de
pratiques et de procédures. Ceci peut renforcer d'autant la
stigmatisation des personnes vivant avec le VIH et légitimer par voie de
conséquence la discrimination.
Dans de nombreux pays, des lois ont été
promulguées en vue de restreindre les droits des personnes et des
groupes affectés par le VIH. Il s'agit entre autres des
éléments suivants :
· Dépistage et test obligatoires de groupes et
d'individus ;
· Interdiction de recruter des personnes vivant avec
le VIH pour certains postes et certains types d'emploi ;
· Isolement, détention et examen
médical, et traitement des personnes infectées
obligatoires ;
· Restrictions concernant les voyages à
l'étranger et les migrations, notamment le test VIH pour les personnes
demandant un permis de travail et expulsion des étrangers
séropositifs.
La discrimination peut survenir par omission, par exemple
lorsque les lois, les politiques et les procédures visant à
redresser et à sauvegarder les droits des personnes vivant avec le VIH
ne sont pas appliqués ou font défaut.
La stigmatisation et la discrimination sont étroitement
liées, se renforçant et se légitimant mutuellement. La
stigmatisation est à l'origine d'actes discriminatoires, et conduit les
individus à des actions, ou à des omissions, qui mettent les
autres en danger ou à leur refuser des services ou des droits. La
discrimination est définie comme l'application de la stigmatisation. A
son tour, la discrimination encourage et renforce la stigmatisation.
La discrimination liée au VIH est non seulement une
violation des droits de l'homme, mais il est également nécessaire
de contrer la discrimination et la stigmatisation pour atteindre les buts en
matière de santé publique et vaincre l'épidémie.
Les ripostes au VIH et au SIDA constituent un continuum, allant de la
prévention à la prise en charge et au traitement, et les effets
négatifs de la stigmatisation et de la discrimination peuvent être
perçus dans tous ces éléments de la riposte.
Dans l'idéal, chacun devrait pouvoir librement
solliciter et recevoir le conseil et le test volontaires et confidentiels pour
connaître son statut VIH sans en craindre les répercussions.
Les personnes dont le test VIH est négatif doivent
bénéficier de conseil sur la prévention afin de pouvoir
rester négatives.
Celles dont le test VIH est positif doivent être
traitées et prises en charge, et recevoir des conseils sur la
prévention afin de protéger les autres de l'infection et de se
protéger elles-mêmes d'une réinfection. Les personnes
vivant avec le VIH et le sida doivent pouvoir vivre ouvertement et recevoir
compassion et soutien au sein de leurs communautés.
Leur exemple d'ouverture donne à l'autre une perception
du risque et de leur expérience, contribuant ainsi aux efforts de
prévention, de prise en charge et de traitement.
Si l'environnement social est stigmatisant, des obstacles se
dresseront à tous les stades du cycle décrit ci-dessus
étant donné que, par définition, la stigmatisation n'est
pas un élément de soutien. La stigmatisation et la discrimination
associées au VIH sapent les efforts de prévention
car les individus ont peur de découvrir s'ils sont ou non
infectés, de chercher à s'informer sur les moyens de
réduire les risques d'exposition au VIH, et d'adopter un comportement
plus sûr de crainte de susciter des doutes sur leur statut VIH. Ainsi, la
stigmatisation et la discrimination nuisent à la capacité des
individus et des communautés à se protéger. La crainte de
la stigmatisation et de la discrimination décourage également les
personnes vivant avec le VIH de dévoiler leur infection, même aux
membres de leur famille et à leurs partenaires sexuels. Le secret qui
entoure l'infection à VIH et qui résulte de la peur de la
stigmatisation et de la discrimination fait que les gens imaginent qu'ils ne
sont pas exposés au risque d'infection à VIH.
La stigmatisation et la discrimination liées au VIH et
au sida signifient également que les personnes vivant avec le VIH et le
sida recevront vraisemblablement moins de soins et d'appui. Même les
personnes qui ne sont pas infectées mais sont associées à
des individus infectés, telles que les conjoints, les enfants et les
personnes qui dispensent des soins, souffrent de stigmatisation et de
discrimination. Cette stigmatisation et cette discrimination accroissent
inutilement les souffrances personnelles associées à la
maladie.
La stigmatisation et la discrimination liées au VIH
signifient également que les personnes vivant avec le VIH recevront
vraisemblablement moins de soins et d'appui. Même les personnes qui ne
sont pas infectées mais sont associées à des individus
infectés, telles que les conjoints, les enfants et les personnes qui
dispensent des soins, souffrent de stigmatisation et de discrimination.
Il est nécessaire de contrer la discrimination et la
stigmatisation.
Appliqué à notre objet, le stigmate
associé aux personnes vivant avec le VIH et à leurs proches peut
être transformé, voire disparaître, grâce à des
mesures d'information et d'éducation adaptées -
c'est-à-dire qui tiendraient compte des résultats de recherche
portant sur les interactions entre individus normaux et stigmatisés
(stigmate de caractère), entre groupes normaux et stigmatisés
(stigmate tribal) et qui s'attacheraient à produire des changements de
points de vue.
Ces changements pourraient contribuer à
déconstruire les faits de stigmatisation.
Il faut cependant souligner que les processus de
stigmatisation semblent avoir une fonction sociale plus générale
: mobiliser l'adhésion aux normes sociales des acteurs que la
société ne soutient pas.
Ces processus sont donc, de manière structurelle,
résistants aux changements. Ils doivent avoir pour fondements les textes
de loi qui régissent la prise en charge des PV VIH.
La réduction de la stigmatisation 11
induits à la connaissance des représentations
traditionnelles et culturelles de la maladie, le suivi des règles
éthiques et juridiques sont des prés - requis à cette
approche.
Les bénéficiaires principaux du «
Counselling 12 » sont la personne infectée ou à
risque, sa (son, ses) partenaire(s), la famille et les proches mais aussi toute
personne souhaitant connaître son statut sérologique.
La stigmatisation et la discrimination 13
associées au VIH constituent des obstacles majeurs à la
prévention de l'infection à VIH, à la fourniture de soins,
d'appui et de traitement, et à l'atténuation de l'impact de
l'épidémie.
Comme le souligne cette définition, la stigmatisation
est enracinée dans les attitudes individuelles et sociétales et
se traduit par des comportements qui portent atteinte aux droits comme à
la dignité des personnes qui en sont victimes.
La notion de stigmatisation ne peut être
appréhendée sans faire référence à la prise
en charge psychosociale.
_____________________
11 La réduction de
la stigmatisation à travers la prise en charge psychosociale
avec le «Counselling - conseil ou co-conseil» comme pierre angulaire,
vise à conseiller, informer et assister pour induire un changement,
soutenir face aux perturbations psychologiques et sociales, impliquer dans la
communauté et prévenir l'extension de la maladie. Au plan
technique, elle exige implication et une approche à la démarche
participative des populations, écoute attentive, pertinence et
clarté des réponses, précision des questions, respect de
l'autre.
12
Counselling : concept anglosaxone se
définissant comme une relation interpersonnelle d'écoute, d'aide
, d'attention, de dialogue visant à apporter au «client» ou
«consultant» un soutien dans les situations de crise, de permettre
aux personnes atteintes de se sentir mieux, de mobiliser et de
développer de manière autonome des aptitudes et des ressources
propres pour faire face aux situations difficiles, à faciliter une
démarche de résolution de ses problèmes et à
développer ses aptitudes au changement. Au plan technique, elle exige
écoute attentive, pertinence et clarté des réponses,
précision des questions, respect de l'autre.
13 La stigmatisation et la
discrimination sont une problématique, d'une part parce que les
PVVIH sont confrontés aux souffrances de rejet, des sentiments d'oubli
des êtres qui doivent témoignés à visage
découvert pour amener à une prise de conscience de fléau
parce qu'ils souffrent eux-mêmes de sentiments d'une crise
d'identité.
2 - Importance de la question
Depuis le début de l`épidémie de sida
dans le monde en général et au Sénégal en
particulier, la stigmatisation et la discrimination 13 ont
alimenté la transmission du VIH et ont largement aggravé les
répercussions négatives de l'épidémie. La
stigmatisation et la discrimination associées au VIH continuent à
se manifester et :
- constituent une violation des droits de l`homme car
partout dans le monde, on a observé des cas bien documentés de
personnes vivant avec le VIH qui se voient refuser, entre autres, le droit aux
soins de santé, à l'emploi, à l'éducation et
à la libre circulation...
Un informateur de Grand YOFF raconte :''Au
Sénégal, on a observé qu'avant l'avènement du SIDA
où quand un émigré était de retour, toutes les
familles étaient pressées de lui donner leur fille en mariage, la
veuve d'un riche émigré était aussi fortement
convoitée.
Mais maintenant on fait attention, on hésite, on va
même jusqu'à demander à l'infirmier ou au médecin de
faire les tests aux veuves d'émigrés qui restent sans se remarier
malgré leur beauté et les richesses qu'elles ont
héritées''.
- constituent des obstacles majeurs à la
prévention de nouvelles infections et à la fourniture d'une prise
en charge, d'un soutien et d'un traitement adéquats.
- Pour les pratiques traditionnelles et culturelles de la
maladie, le suivi des règles
éthiques et juridiques sont des prés -
requis à cette approche.
- En effet, le fait d'occulter le problème peut
conduire à nier l'existence d'un tel problème et à refuser
de reconnaître que des mesures doivent être prises rapidement.
- constituent des obstacles majeurs à
l'atténuation de l'impact de l'épidémie sur les personnes
vivant avec le VIH et celles dont on pense qu'elles sont infectées,
ainsi que sur leur famille et leurs proches. Ainsi, une personne
licenciée pour cause de séropositivité est
confrontée à bien d'autres problèmes venant s'ajouter
à la maladie elle-même, et notamment au manque de ressources
économiques pour les soins de santé, que ce soit pour elle ou
pour les membres de sa famille à sa charge.
- Les prêts bancaires ne sont souvent
qu'octroyés qu'à une infime partie des personnes vivant avec
le VIH alors que bien souvent elles en sont les plus nécessiteuses pour
subvenir aux frais médicaux.
- Plusieurs personnes ont témoigné auprès
de nous du mauvais accueil qui leur était notamment
réservé en tant que personnes séropositives au sein
même des structures hospitalières.
- Ceci semble être particulièrement
inquiétant dans le cas des femmes enceintes séropositives,
certains personnels de santé refusant tout simplement de les prendre en
charge (en dépit des programmes de formations mis en oeuvre).
Il est important que la lutte contre les discriminations
constitue un thème phare de la réponse nationale dans le cadre de
l'amélioration de la prise en charge et de la qualité de vie des
personnes touchées augmentent la vulnérabilité. Les gens
sont plus vulnérables à l'infection lorsque leurs droits civils,
politiques, économiques, sociaux et culturels ne sont pas
respectés.
- Par exemple, la vulnérabilité des femmes
à l'infection à VIH est renforcée lorsqu'elles n'ont pas
les moyens juridiques de faire des choix, et de refuser des relations sexuelles
non désirées, ou lorsque les enfants ne peuvent pas exercer leurs
droits à l'éducation et à l'information.
- Au niveau de la classe féminine, la stigmatisation
des personnes vivant avec le VIH est très élevée vu que
celle-ci est en rapport direct avec le degré de productivité de
cette classe vulnérable.
- `'Les livres saints dans leur ensemble réprouvent les
rapports sexuels entre hommes et cet état de faits nourrit le climat de
stigmatisation et de discrimination envers les MSM 14 `' propos
d'un leader d'une structure confessionnelle.
- Il demeure évident que le discours religieux reste
très hostile aux MSM. Pour beaucoup de religieux, l'homosexualité
est un acte contre nature d'où la nécessité de la
combattre.
`' Les gens disent que les MSM doivent être
tués et aussi à leur mort ils ne doivent pas être
enterrés dans les cimetières `'.
« Il y a de cela quelques années, des
jeunes d'un village traditionnel s'étaient catégoriquement
opposés à l'enterrement d'un MSM dans le cimetière du
village » s'exprimait un leader MSM.
Nous voyons là toute la complexité de la
prévention des IST/VIH/ sida au niveau des MSM.
Par ailleurs, l'accès quasi-impossible aux services de
prévention et de soins liés au VIH accroît la
vulnérabilité des autres groupes marginalisés, tels que
les consommateurs de drogues injectables, les réfugiés, les
migrants et les détenus.
Au Sénégal, le SIDA entraîne des
déplacements et des formes d'instabilité familiale qui peuvent
conduire à une intensification de la dégradation des conditions
de vie et d'études des enfants, des petites filles en particulier.
Il est aussi associé à des formes
d'instabilité matrimoniale et à la diminution des réseaux
de solidarité. Ce qui rend encore plus précaires les conditions
de prise en charge, l'image de soi, l'équilibre émotionnel et la
construction des identités individuelles ou familiales.
Etant donné l`étendue et la gravité du
problème, il s'avère très utile d`effectuer une recherche
afin de pouvoir contrer ces fléaux.
_______________________
14 Men having sex with
men : terme anglosaxone signifiant hommes ayant des relations
sexuelles avec des hommes.
3 - Etat de la question
La stigmatisation peut conduire à la discrimination et
à d'autres violations des droits de l'être humain, ce qui affecte
fondamentalement le bien-être des personnes vivant avec le VIH. Partout
dans le monde, on a observé des cas bien documentés de personnes
vivant avec le VIH qui se voient refuser, entre autres, le droit aux soins de
santé, à l'emploi, à l'éducation et à la
libre circulation.
Plusieurs initiatives ont été prises :
- La déclaration de Dakar du 1er Juillet
1994, souligne le principe de non-discrimination, le principe de la
confidentialité et du respect de la vie privée, le principe de
l'utilisation d'un langage adapté, le principe de l'interdiction du
dépistage obligatoire.
- La Déclaration d'engagement (UNGASS),
souligne le consensus mondial sur la nécessité de lutter contre
la stigmatisation et la discrimination liées au sida.
Au Sénégal, les mesures de la discrimination ont
été le plus souvent du type oui/non. «Est-ce qu'une loi
existe pour protéger contre la stigmatisation et la
discrimination?»
Certaines de ces mesures, une tentative est faite pour inclure
un jugement sur la mise en oeuvre ou non de la loi en question. Cela peut
être utile pour identifier les lacunes importantes et les domaines sur
lesquels les programmes doivent concentrer leurs efforts.
Par contre, l'utilisation de ces mesures est limitée
dans le suivi et l'évaluation régulière des programmes
sida nationaux, car les indicateurs composés du type oui / non sont
très difficiles à interpréter. Des progrès, suite
à une nouvelle loi dans un domaine, peuvent être
contrebalancés par un défaut d'exécution dans un autre
domaine.
Le pays dispose d'une politique interdisant le
dépistage du VIH dans le cadre global de l'emploi (recrutement,
affectation/mutation, nomination, promotion, licenciement).
Il existe :
- des institutions nationales indépendantes pour la
promotion et la protection des droits de la personne, y compris des commissions
pour les droits de la personne, des commissions pour la réforme des
lois, des observateurs et des médiateurs s'occupant des questions
relatives au VIH et au sida dans le cadre de leur fonction.
- des indicateurs de performance ou de référence
concernant la réduction de la stigmatisation et de la discrimination
liées au VIH notamment le réseau des parlementaires
pour la santé, le réseau pour la population, le RADHO, le RADI,
l'ONDH, le Réseau Siguil djigueen, des ONG intervenant
dans le domaine du VIH.
- un dispositif judiciaire et réglementaire en
matière de lutte contre la discrimination et la stigmatisation des PVVIH
et des OEV (PSLS 2008 - 2011).
Les membres du système judiciaire (notamment les
conseils de prud'hommes/tribunaux du travail) sont
formés/sensibilisés aux questions touchant le VIH, le sida et les
droits de la personne qui peuvent se poser à eux dans le cadre de leurs
fonctions.
- Des cabinets de conseil juridique du secteur privé ou
centres universitaires fournissant des services juridiques gratuits ou à
prix réduit aux personnes vivant avec le VIH.
- Des programmes radio diffusés et
télévisés suivis de pièces de théâtres
dont les buts sont d'amener le public à accepter et à comprendre
les personnes touchées par le VIH et le sida plutôt que de les
stigmatiser.
- Il existe une charte pour les pour les entreprises
- Il existe une charte de lutte contre le VIH/Sida pour les
journalistes
Cependant, il nous a été donné de
constater qu'il n'existe :
- Pas de points focaux au sein du ministère de la
santé et d'autres ministères ayant pour fonction de surveiller
les infractions aux droits de la personne et la discrimination liées au
VIH dans des domaines comme le logement ou l'emploi.
- Pas de systèmes d'assistance juridique pour la
prise en charge des personnes vivant avec le VIH / sida.
- Pas de programmes d'éducation et de
sensibilisation destinés aux personnes vivant avec le VIH au sujet de
leurs droits.
Toutefois, beaucoup d'efforts sont entrain d'être
développés mais la mise en application n'est pas aussi effective,
et en termes d'indicateurs, les résultats sont largement
supérieurs. Beaucoup de lois internationales ont été
ratifiées. Selon le responsable du service national de
l'éducation surveillé, les lois votées entre 2005 et 2007
seraient augmentées d'environ 30% témoignant les efforts
entrepris.
Il y'a un engagement politique à l'élaboration
des lois. Par contre la mise en application pratique pose quelques
problèmes.
Pour renforcer tous ces efforts, l'ANCS a définit un
programme intitulé : « projet de
renforcement des capacités dans la lutte contre le
VIH » financé par le Fonds
Mondial et dont le but est de changer les attitudes envers les
personnes infectées et leurs familles.
Ses objectifs sont les suivants :
- Combattre la discrimination en changeant les lois, de
façon à aider les personnes vivant avec le VIH et le sida, et en
s'assurant que ces lois sont appliquées.
Ils essayent de changer les attitudes envers les personnes
infectées et leurs familles.
- Rompre le silence entourant la maladie, en essayant en
particulier de faire participer les personnes vivant avec le VIH et leurs
communautés, dans une riposte active.
La mise en oeuvre de ce programme transformerait un monde
hostile en un monde plus constructif et basé sur la compassion. Une
discussion plus ouverte pourra diminuer les peurs et les idées fausses
qui renforcent les comportements à haut risque.
Les interventions visant à réduire la
discrimination peuvent avoir un effet plus rapide et/ou plus prononcé
sur les attitudes révélées que sur les attitudes
profondément ancrées dans l'individu et qui conditionnent son
comportement. Par exemple, des décennies de lutte pour les droits de
l'homme ont entraîné une diminution de la proportion de gens qui
admettent ouvertement avoir des préjugés raciaux. Cependant, on
peut douter que ce changement dans les attitudes révélées
se reflète par un changement similaire dans la discrimination active.
La situation est d'autant plus compliquée que la
discrimination active est souvent difficile à détecter.
Elle peut prendre des formes évidentes, comme lors d'un
licenciement. Mais elle peut également se faire ressentir par
l'impossibilité d'obtenir certains services normalement disponibles pour
tous dans la société, ou même par l'absence de compassion
et de soutien de la part des responsables religieux ou communautaires.
Il est difficile de collecter des informations sur les
comportements vis-à-vis des personnes infectées par le VIH. En
partie à cause de la stigmatisation elle-même, la
séropositivité des personnes infectées est rarement
reconnue ouvertement, même au sein de leurs propres familles.
Par conséquent, la plupart des questionnaires
utilisés pour mesurer la stigmatisation se basent sur des situations
hypothétiques.
Plusieurs pays sont entrain de tester une «approche
multisectorielle» de l'épidémie à VIH/ sida; ils
tentent d'impliquer dans la riposte au VIH d'autres secteurs que celui de la
santé.
La planification et, dans certains pays, la mise en oeuvre de
la prévention du VIH et des programmes de soins du sida, ont
été élargies pour inclure tous les secteurs sociaux et
économiques. Mais jusqu'à présent, cette approche a
surtout été l'objet de discussions et n'a pas été
vraiment mise en oeuvre.
Cependant, si effectivement une proportion importante de
programmes relatifs au VIH dépend de secteurs autres que celui des
Ministères de la Santé, le multisectorialisme apportera de
nouvelles opportunités pour collecter des données et pour
élargir la possibilité d'influencer l'élaboration des
politiques. Par exemple, des données provenant du Ministère de
l'Education renseigneront sur la scolarité des orphelins. D'un autre
côté, l'implication de secteurs multiples complique les
tâches de Suivi et d'Evaluation.
La diffusion de la riposte impose d'autant plus
l'établissement d'un système suivi et évaluation solide,
ayant une bonne coordination centrale et bénéficiant
d'informations en provenance des autres secteurs impliqués.
Des faits : discrimination, dépistage et prise
en charge du VIH
Tabous liés à l'infection
Par le fait qu'il est associé à la
sexualité, le Sida a été et reste toujours une maladie de
l'ombre dans la tradition africaine ou tout ce qui touche le sexe ne doit pas
faire l'objet d'un débat public.
C'est ce qui contraint certaines personnes vivant avec le VIH
(ou PVVIH) de cacher leur statut et les oblige ainsi à souffrir
intérieurement. Il est vrai que depuis un certain temps, des efforts de
sensibilisation sont faits, mais il reste beaucoup à faire.
Tant qu'on ne parviendra pas à lever ce tabou, les
actions de lutte contre le Sida connaîtront toujours des problèmes
récurrents liés à une information insuffisante ou
inappropriée.
La peur, la discrimination constituent des obstacles de taille
à l'application des politiques préventives.
Au début de la campagne nationale de prévention
lancée dans les années 1990, des messages destinés
à la population générale exploitaient le thème de
la peur pour susciter des conduites préventives.
Aujourd'hui, le risque de discrimination et de stigmatisation
envers les personnes infectées par le VIH, accru par la peur de la
maladie, est reconnu par les autorités. Des règlements officiels
condamnent les comportements et les discours discriminants.
Cependant, l'information reste rare, et l'offre de conseil et
de soins indisponible pour la grande majorité de la population. Dans ce
contexte, les « groupes à risques » deviennent facilement des
boucs émissaires.
La stigmatisation et la discrimination des personnes vivant
avec le VIH ont des conséquences tant au niveau individuel que
social.
Au sein même de l'association des PVVIH,
l'impossibilité des membres (notamment ceux du bureau) à parler
ouvertement de leur statut sérologique au sein de leur entourage montre
que le niveau de stigmatisation est très important.
La plupart de nos interlocuteurs ont expliqué cette
donnée par la relative faible prévalence du VIH dans le pays. Le
modèle des cellules a eu un impact très limité sur la
stigmatisation et par conséquent la possibilité pour les PVVIH de
vivre «normalement» dans leur famille et leur communauté.
Les activités de sensibilisation des cellules restent
semblables à celles menées par beaucoup d'autres associations
dans le domaine de l'IEC. Le public est informé sur la transmission et
la prévention du VIH / sida mais il ne change ni ses comportements, ni
ses attitudes vis à vis des PVVIH.
La valeur ajoutée que constitue l'expérience
concrète de la prise en charge des PVVIH est sous-utilisée pour
conduire des actions de sensibilisation mieux ciblées, que ce soit au
niveau des publics ou des contenus.
Reste que l'engagement des pouvoirs publics semble avoir
été jusqu'ici négligeable dans ce domaine. Ce n'est qu'en
2006, à la suite d'un plaidoyer mené par les ONG professionnelles
comme ENDA et l'ANCS que cette thématique a pu pour la première
fois entrer dans le cadre stratégique de la politique nationale de lutte
contre le sida.
3 - 1 Au niveau des PVVIH :
Au cours des entretiens, les personnes vivant avec le VIH ont
évoqué des situations de stigmatisation et de discrimination dans
pratiquement toutes les stations de l'existence du cercle familial
jusqu'à la communauté dans son ensemble en passant par le milieu
médical.
ü Dans le cercle familial
Elles se traduisent par des velléités de mise
en quarantaine des PVVIH, un refus de partager des toilettes et aussi certains
ustensiles de cuisine (assiettes, cuillères et autres).
ü Dans la communauté
Ces témoignages marquent la perception encore
négative qu'une frange de la communauté éprouve
vis-à-vis des personnes vivant avec le VIH et qui très souvent
prend forme sur la base de simples présomptions (rencontre dans
certaines structures de soins, amaigrissement et autres). Ignorance des
populations quant à la situation des PVVIH et au VIH/ Sida.
Les populations ont dans leur majorité, entendu au
moins une fois le mot Sida. Cependant beaucoup d'entre elles ignorent les
conditions dans lesquelles vivent les PVVIH, mais surtout la situation des
OEV.
Le fait de perdre un parent et d'épouser le
frère ou la femme de ce dernier (concept de lévirat ou de
sororat) est très dur, si l'on sait le rôle important que le
père autant que la mère joue dans la vie de l'enfant. Et ceux qui
ne sont pas proches de l'enfant ne savent pas forcement ce qui restent comme
vide autours de lui. Cet enfant-là est exposé à des
expériences douloureuses. Insuffisance de l'engagement des
communautés dans la prise en charge des OEV.
Depuis l'avènement de l'épidémie, la
communauté s'est engagée certes, mais cette lutte concerne
surtout la prévention, la prise en charge des adultes
infectés ; on a l'impression que les concepts d'OEV et de PVVIH ne
figurent pas en bonne place dans l'esprit de la plupart des intervenants, des
associations de jeunesses et des associations féminines.
ü Dans le milieu médical
Les personnes vivant le VIH ont évoqué des
situations diverses de stigmatisation et de discrimination dans le milieu
médical Le Manque de connaissance des professionnels de la santé
sur la problématique des PVVIH
Tout comme la communauté, beaucoup de professionnels de
la santé ne sont pas bien imprégnés de la prise en charge
des PVVIH.
Ils avaient l'habitude de traiter directement avec les
adultes. C'est pour cela qu'il est nécessaire de les sensibiliser sur
les difficultés spécifiques que rencontrent ces PVVIH, surtout
dans le cadre de leur prise en charge médicale et psychosociale.
Cette initiative qui participe de la réduction des
risques souffre des méfaits de la stigmatisation et de la
discrimination.
Plusieurs personnes ont témoigné auprès
de nous du mauvais accueil qui leur était notamment
réservé en tant que personnes séropositives au sein
même des structures hospitalières.
Ceci semble être particulièrement
inquiétant dans le cas des femmes enceintes séropositives,
certains personnels de santé refusant tout simplement de les prendre en
charge (en dépit des programmes de formations mis en oeuvre).
3 - 2 Au niveau des populations marginalisées
exemple des MSM
Le format épidémiologique du VIH au
Sénégal exige une vigilance accrue au niveau des populations
dites marginalisées notamment les travailleuses du sexe, les usagers de
drogues et les hommes qui ont des relations sexuelles avec des hommes.
Une étude menée par la division IST/sida chez
cette dernière population indique que le niveau d'infection à
VIH oscille à 21% contre 0.7% dans la population générale
(source Enquête Démographique et de Santé EDS4).
Ces données traduisent la nécessité de la
mise en place de stratégies de prévention et de prise en charge
des IST/VIH/sida au niveau de la communauté MSM.
Si au niveau officiel, les initiatives demeurent encore
timides (comme en témoigne l'absence d'interventions ciblées au
niveau du plan stratégique 2002-2006 en direction des MSM) la situation
est tout autre chez les acteurs de la réponse au niveau communautaire
notamment ENDA-Santé, ANCS... qui accordent une large place à la
composante MSM dans leurs programmes respectifs.
Une documentation établie sur les activités
menées par les groupes MSM laisse apparaître un certain nombre
d'enseignements :
- un risque d'exposition aux IST/VIH/ sida
- une concomitance de rapports homosexuels et bisexuels
- une faible couverture sanitaire.
Autant de facteurs qui fondent notre choix sur les hommes qui
ont des relations sexuelles avec des hommes en lieu et place des travailleuses
du sexe et des usagers de drogues.
A l'image des personnes vivant avec le VIH, les MSM ont
évoqué des situations de stigmatisation et de discrimination dans
différentes sphères au niveau du cercle familial, du cercle des
pairs MSM, du milieu communautaire et aussi du monde médical.
ü Dans le cercle familial
Cette répulsion au niveau familial de l'orientation
homosexuelle est très souvent à la base de comportement sexuel
à risque d'infection.
Les MSM en situation de précarité sociale,
acceptent plus facilement des rapports sexuels non protégés mais
aussi certaines pratiques à haut risque d'infection notamment le sexe
à plusieurs.
La peur de représailles au niveau familial limite aussi
l'envie chez les MSM de disposer de préservatifs et de lubrifiant
à portée de main.
ü Dans le groupe des pairs
Si le groupe des pairs constitue un havre d'expression et de
reconnaissance de l'orientation homosexuelle, des répondants ont
rapporté des cas de stigmatisation et de discrimination émanant
de pairs MSM.
ü Dans la communauté
La problématique des relations sexuelles entre hommes
selon les pays épouse des contours différents. Si en Occident,
les réflexions tournent autour des mariages entre hommes et de
l'homoparentalité, en Afrique les enjeux sont de nature
différente.
Au Sénégal, la situation des MSM reste
partagée entre stigmatisation et discrimination avec une
législation et des convictions culturelles qualifiant
l'homosexualité d'acte contre - nature.
ü Dans le milieu médical
Il est important que la lutte contre les discriminations
constitue un thème phare de la réponse nationale dans le cadre de
l'amélioration de la prise en charge et de la qualité de vie des
personnes touchées.
Toutes ces difficultés doivent pouvoir être
prises en compte pour l'amélioration effective des conditions de vie des
personnes touchées et l'efficacité des programmes de
prévention et de promotion du dépistage volontaire et gratuit.
ü Au niveau des pouvoirs publics
Faiblesses de l'engagement des décideurs pour
l'application des textes régissant la prise en charge des PVVIH.
Une mission d'un Etat est la protection des citoyens en leur
garantissant tous leurs droits.
Certains décideurs le savent et des textes de lois
existent, mais malheureusement, ces textes ne sont appliqués dans leur
totalité. C'est pour cela que certaines PVVIH rencontrent souvent des
situations difficiles caractérisées par des problèmes
économiques, un manque d'affection, un manque de soins, des
discriminations dans les écoles, des abus, des violences, des maladies
et la malnutrition. Il existe cependant des textes, mais leur application
demeure très insuffisante.
Ne pas utiliser des textes religieux et des croyances pour
justifier des pratiques néfastes.
Les enfants sont souvent victimes de certains agissements
négatifs des adultes. Innocents et ignorants, les enfants sont souvent
soumis à toutes formes d'abus et d'exploitation.
Les auteurs de ces forfaits s'appuient parfois sur la religion
et la tradition pour « étayer » leur thèse,
alors que la religion n'admet aucune forme d'exploitation d'un homme par un
autre, fût-il son père. D'où la nécessité
d'attirer à la fois l'attention des enfants et celle des grandes
personnes sur ces dérives.
4 - Objectifs de la recherche
La réduction de la stigmatisation et la discrimination
des personnes vivant avec le VIH à Dakar interpellent un engagement
hautement accru afin de combler ces lacunes et de prévenir sa
généralisation à travers le Sénégal.
L'objectif essentiel doit donc être de favoriser une
prise de conscience de la population qui la conduirait à se percevoir
comme « soi contaminant » au lieu de toujours voir « l'autre
contaminant ».
a - Objectif général
Notre souci dans le cadre de ce travail est de capter les
éléments de réflexion sur la stigmatisation et la
discrimination au niveau de certains acteurs clés.
Il se formule comme suit :
Garantir l'absence de discrimination chez les personnes
séropositives pour le VIH auprès des employeurs et dégager
le poids de la stigmatisation à travers les attitudes de
tolérance envers les personnes vivant avec le VIH.
b - Objectif à court.
ü Décrire le contenu et la procédure
(continuum) de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH ;
ü Evaluer les attentes des PVVIH et de leur entourage du
point de vue technique de réduction de la stigmatisation et la
discrimination.
ü Renforcer les attitudes et les formes de soutien
apportées par l'entourage aux PV VIH.
ü Evaluer les contraintes et besoins des ONG dans la
prise en charge des PVVIH.
ü Dégager le poids des manifestations de la
stigmatisation et de la discrimination dans le vécu des populations
marginalisées et des PVVIH ;
c - Les objectifs spécifiques
ü Recueillir les avis des religieux, des prestataires de
soins, sur les questions de stigmatisation et de discrimination ;
ü Identifier les stratégies de lutte contre la
stigmatisation et la discrimination.
ü Décrire les valeurs et attitudes personnelles en
rapport avec la prévention et la prise en charge du VIH/ sida,
ü Définir les stratégies de lutte contre la
stigmatisation et la discrimination dans le contexte de la
société Sénégalaise.
ü Mettre en évidence la notion des droits humains
internationaux et nationaux dans le contexte du VIH/ sida.
ü Renforcer les capacités des leaders
communautaires à une prise en charge totale des PVVIH dans les cercles
familiaux.
ü Développer la connaissance sur la prise en
charge des PVVIH auprès des employeurs.
B - METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
1 - Les indicateurs de mesure de la discrimination
et la stigmatisation
Sur le plan de la méthodologie, il s'agit d'un moyen
relativement facile pour l'élaboration d'un indicateur d'attitudes
envers les personnes séropositives. Il est utile de mesurer cet
indicateur, car un score bas indique de manière assez fiable des
degrés élevés de stigmatisation.
Cependant, l'interprétation d'indicateurs basés
sur des questions hypothétiques pose des problèmes, et il est
beaucoup plus difficile d'analyser les scores élevés de
l'indicateur. Cela peut signifier qu'il existe réellement peu de
stigmatisation liée au VIH. Ou bien cela peut vouloir dire que les gens
savent qu'il ne devrait pas y avoir de discrimination, et expriment par
conséquent des attitudes de tolérance, sans que cela influe sur
leur comportement discriminatoire à l'égard des personnes
séropositives.
Les changements observés dans l'indicateur peuvent donc
refléter une réduction de la stigmatisation ou seulement une
augmentation de la prise de conscience qu'il n'est pas bien perçu
d'avoir des préjugés.
Cette dernière possibilité peut cependant en
elle même constituer une première étape du succès du
programme.
Des scores élevés peuvent aussi refléter
un manque d'expérience des personnes interrogées concernant les
personnes infectées par le VIH.
L'indicateur proposé a des similarités avec une
mesure antérieure développée par l'OMS.
Cependant, certaines questions ont été
modifiées, à la suite de tests sur le terrain, pour permettre de
mieux refléter les situations de stigmatisation actuellement
vécues par les personnes VIH positives. Ces tests ont
révélé que les réponses dépendaient
fortement de la formulation des questions. Par exemple, dans l'un des pays,
lorsque le sexe de l'enseignant n'était pas précisé, le
score de l'indicateur pour cette question, a montré de hauts niveaux
d'attitudes de discrimination. Une enquête supplémentaire a
révélé que les attitudes négatives s'expliquaient
par des articles de presse citant des enseignants de sexe masculin transmettant
le VIH à des élèves de sexe féminin.
L'utilité de l'indicateur de l'OMS
précédent a été remise en question, car il a
été très peu utilisé le concept
« VIH ».
Une explication possible est que jusqu'à
présent, dans la plupart des pays, les programmes ont fourni peu
d'efforts pour la réduction de la stigmatisation contre le VIH.
A mesure que l'importance de l'influence négative de la
stigmatisation sur les efforts de prévention et de soins devient plus
évidente, il est probable que les responsables de programmes y porteront
plus d'intérêt. Il est donc probable que l'utilisation de cet
indicateur augmentera.
Il a été proposé que cet indicateur soit
utilisé pour mesurer les différences de stigmatisation ou de
discrimination entre les sexes. Certaines recherches ont suggéré
que les femmes étaient plus fréquemment mal vues et
traitées plus durement que les hommes, si elles étaient porteuses
du VIH ou si elles étaient atteintes du sida. Mais des études
plus récentes ont montré peu de différence dans les
réponses aux questions concernant la stigmatisation et la discrimination
lorsque les sexes étaient spécifiés.
2 - Méthodes d'enquête et techniques de
collecte de l'information
Notre étude s'inscrit dans le cadre d'une
résolution de problème. Le choix d'indicateurs devrait être
guidé par les objectifs, les buts et les activités constituant la
riposte nationale au VIH, ainsi que par l'épidémiologie locale,
la nature du VIH et les comportements à risque.
Nous utiliserons deux principaux indicateurs de
mesure :
a) Indicateur 1 : Attitudes de tolérance
envers les personnes vivant avec le VIH
· Définition
C'est le pourcentage de personnes exprimant des attitudes de
tolérance envers les personnes infectées par le VIH, parmi toutes
les personnes interrogées de 15 à 49 ans.
L'utilisation d'un indicateur basé sur des
réponses à des questions hypothétiques concernant les
hommes et les femmes vivant avec le VIH. Il reflète ce que les gens
sont prêts à dire concernant leurs propres comportements dans
différentes situations face à des personnes atteintes par le
VIH.
· Comment le mesurer?
Au cours d'une enquête auprès de la population
générale, une série de questions concernant les personnes
vivant avec le VIH est posée aux personnes interrogées de la
manière suivante:
- Si un membre de votre famille contractait le Sida,
accepteriez-vous de le prendre en charge dans votre maison?
- Si l'on vous disait qu'un commerçant a le Sida,
achèteriez-vous des légumes frais chez lui?
- Si une enseignante vit avec le virus du Sida, mais n'est pas
malade, peut-on la laisser continuer à enseigner?
- Si un membre de votre famille contractait le Sida,
voudriez-vous que cela reste secret?
Seuls ceux qui répondent par l'affirmative à
toutes ces questions sont comptabilisés dans le numérateur. Le
nombre de personnes interrogées représente le
dénominateur.
b) Indicateur 2 : Employeurs garantissant l'absence
de discrimination envers les personnes séropositives pour le
VIH
· Définition
Parmi les employeurs choisis dans le secteur de l'emploi
contractuel, c'est la proportion d'entre eux ayant des règlements et des
pratiques non discriminatoires pour les employés séropositifs,
concernant le recrutement, les promotions et les avantages sociaux.
· Que mesure cet indicateur?
L'utilisation d'un second indicateur qui permet de mesurer un
aspect limité mais concret de la discrimination liée au VIH: la
discrimination dans le secteur de l'emploi contractuel. L'indicateur doit
être désagrégé pour examiner
séparément les règlements et les pratiques des
entreprises.
Cet indicateur de discrimination sera influencé par les
opinions des personnes répondant à l'enquête, d'où
l'importance d'interroger aussi bien des personnes de la direction que des
employés.
Il est important de remarquer que les contradictions entre
politiques et pratiques peuvent être observées dans les deux
sens.
· Instruments de mesure
Une enquête est menée chez les principaux
employeurs du secteur de l'emploi contractuel, pour prendre connaissance de
leurs règlements et pratiques concernant les postulants et les
employés positifs pour le VIH. Au moment de la conception de notre
guide, le protocole était en cours d'élaboration et les tests sur
le terrain n'avaient pas encore commencé. Il est probable cependant que
l'enquête auprès des employeurs comprenne un mélange
d'employeurs provenant des secteurs du gouvernement, du secteur local
privé et de multinationales. Au sein de chaque société,
les personnes interrogées comprendront des syndicalistes aussi bien que
des représentants de la direction.
L'enquête vise à établir l'existence de
règlements officiels concernant le VIH, et à s'assurer que ces
règlements sont mis en oeuvre. Les règlements incluront ceux
relatifs à l'embauche et à l'emploi lui-même, aux
assurances maladies et de décès.
On a pu rencontrer par exemple des pratiques de
dépistage VIH dans les entreprises, la séropositivité
excluant l'embauche ou entraînant le licenciement des employés.
L'indicateur dépendra du choix des
sociétés et des employeurs inclus dans l'enquête.
Le protocole déterminera l'éventail d'employeurs
nationaux et internationaux, en incluant ceux du secteur public. Il faudra
obtenir l'autorisation préalable de la société pour mener
une enquête, même s'il s'agit de questionnaires anonymes remplis
par la personne enquêtée.
Les sociétés qui ont une mauvaise
réputation auront plus tendance à refuser de participer, ce qui
faussera forcément la mesure de l'indicateur. Il est aussi possible que
les réponses données par les travailleurs syndiqués
diffèrent de façon significative de celles de la direction. Pour
que les enquêteurs puissent s'adresser directement aux employés,
il peut être possible d'obtenir une autorisation globale pour les
sociétés membres de la chambre de commerce et d'industrie.
Les refus sont particulièrement préoccupants
s'ils changent de façon significative dans le temps.
Ceci peut être le cas lorsque de nouvelles lois sont
introduites, mais ne sont pas encore mises en pratique.
La deuxième technique d'étude utilisée
est l'étude ethnographique qui sous-tend une approche qualitative
essentiellement exploratoire.
La nature sensible du phénomène a fait qu'il
était essentiel d'élaborer une méthode d'approche
ciblée, adaptée à la nature de la question
étudiée. Nous sommes sortis des sentiers battus,
c'est-à-dire de la méthodologie classique pour élaborer
une méthodologie sous-tendue par une démarche raisonnée au
gré des situations qui se sont présentées lors de la
collecte des données.
Au début il nous a fallu bien expliciter les objectifs
de l'étude à notre informateur, négocier des rapports de
confiance, lui garantir l'anonymat et la confidentialité car, un
récit de vie devait être réalisé avec lui. Comment
le mettre en confiance ?
C'est à partir de cette interrogation que nous avons
été amenés à utiliser le jeu de rôle qui a
servi à la fois comme moyen pour le mettre en confiance et comme outil
de collecte d'informations.
Deux jeux de rôles ont été faits; dans un
premier temps, nous avons proposé à l'informateur de se mettre
dans la peau du chercheur. C'est une simulation qui a consisté à
l'amener à présenter le sujet de l'étude et à lui
demander de réfléchir sur la manière dont il devait
conduire l'étude s'il avait à le faire. Dans un second temps,
nous nous sommes mise à la place d'une personne « accro de la
drogue » et lui a joué le rôle d'une personne qui
connaît bien le milieu de la drogue et qui pouvait nous orienter ou nous
renseigner. Les jeux de rôle ont permis de collecter des informations sur
les drogués vivant avec le VIH, les associations d'affiliation, la
stigmatisation et la discrimination dont-ils faisaient l'objet.
A la suite de ces jeux de rôles, un récit de vie
a été réalisé avec lui ; il s'est fait en quatre
séances. Le récit de vie constitue un moyen
privilégié d'investigation anthropologique.
Il a été utilisé pour collecter des
données sur la vie des PVVIH ; ses comportements quotidiens, son
réseau de relations, ses interactions avec le reste de la
société (famille, entourage, forces de l'ordre, etc.).
Le recrutement des MSM a été très
difficile mais nous y sommes parvenus en fréquentant quelques bars et
night-clubs de Dakar.
Enfin, quant à la collecte des informations relatives
aux OEV, nous nous sommes rendus dans le village SOS du quartier
Sacré-Coeur mais aussi auprès des ONG faisant la prise en charge
des orphelins et enfants vulnérables vivant avec le VIH.
Sont exclus de notre étude, les personnes
interrogées mais ne vivant pas avec le VIH afin de ne pas biaiser nos
résultats.
En résumé, la population de cette étude
est composée :
- Des orphelins et enfants vulnérables vivant avec le
VIH ;
- Des Travailleuses du sexe vivant avec le VIH ;
- Des hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes
(MSM) vivants avec le VIH;
- Des Usagers de la drogue (UD) 13 vivant avec le
VIH ;
- Pour l'enquête par questionnaire, la taille de
l'échantillon a été de 250 personnes.
- Cet échantillon est établi à partir du
calcul par la méthode de probabilité proportionnelle à la
taille sur la liste de certaines associations établie au cours des mois
de Juin au mois d'Août 2007.
La méthode de calcul utilisée est la
suivante :
Proportion (exprimée en pourcentage) =
Population spécifique étudiée par classe x
100
Population
totale
Il est cependant important de souligner que pour la validation
de nos données, nous avons fait abstraction à certaines
réponses qui nous détournaient de nos objectifs.
3 - Les méthodes d'analyse de
l'information
3. a. Choix de la méthode d'analyse
Une étude a été réalisée
afin de vérifier l'hypothèse de recherche que l'analyse du
problème a permis d'émettre. Il s'agit, après avoir donc
identifié les déterminants de la stigmatisation et la
discrimination apparue chez les PVVIH, de tester l'influence ou non des
variables retenues comme étant les causes principales sur la survenue de
la stigmatisation et la discrimination.
Les techniques et instruments utilisés dans
l'étude varient du qualitatif au quantitatif.
· Ainsi pour la recherche qualitative il y' a eu
différentes étapes.
La phase d'exploration a consisté à cerner et
définir le contexte de la zone afin de circonscrire le cadre de
l'étude.
___________________
13 Usagers de
drogues : se dit des personnes qui consomment
régulièrement de la drogue.
Elle a permis de voir aussi les différentes
caractéristiques et composantes de la zone autrement dit une monographie
du milieu avec l'aide d'un chargé des programmes de santé de
l'ANCS, des orateurs traditionnels, des chefs des associations dans le cadre
d'une étude historique de la stigmatisation et la discrimination.
Il y'a eu aussi une phase de recherche qualitative sur le
terrain. Celle-ci a été rendue possible grâce à
l'aide d'un guide-interprète ou informateur pris dans la
société civile et qui connaît bien les sites à
enquêter.
Des entretiens libres avec des questions formulées
d'avance ont été effectués avec des personnes ressources
telles que les personnes vivant avec le VIH, des chefs des confessions
religieuses, des associations de jeunes, des associations féminines, les
réseaux de personnes vivant avec le VIH.
Les entretiens libres avec les Travailleuses du Sexe
effectués pendant les nuits du 2 Août au 17 Août 2007 (soit
quinze nuits à des heures tardives) cherchaient à avoir des
informations sur leurs vies en société et les moments les plus
intenses de leurs activités, ils visaient également à
collecter des informations sur leurs filiations aux associations des PVVIH pour
celles qui connaissaient leurs statuts sérologiques, et enfin leurs
degrés de stigmatisation et de discrimination dans la
société.
Les différentes ONG sous- récipiendaires ont
constitué de véritables sources d'information concernant les
chiffres et les statistiques sur la prévalence du VIH dans la
société Sénégalaise et les groupes
spécifiques victimes de la stigmatisation et la discrimination.
L'étude s'est déroulée dans la
localité de Dakar. Elle a suivi un plan de recherche comparative entre
cas et témoins présentant les mêmes principales
caractéristiques socio-économiques, mais étant dans une
situation épidémiologique différente.
- Les cas étaient représentés par les
personnes vivant avec le VIH/ Sida ou étant directement affectées
par le sida (enfants vivant avec le VIH/ Sida, orphelins du sida, adultes
vivant avec le VIH/ sida, parents d'enfants vivant avec le VIH/ Sida, personnes
ayant adopté des orphelins du sida).
- Les témoins sont les personnes ne vivant pas avec le
VIH/ Sida ou n'étant pas directement affectées par le sida
(enfants ou adultes ne vivant pas avec le VIH/ Sida, adultes n'ayant pas
d'enfants vivant avec le VIH ou n'ayant pas adopté des orphelins du
sida).
- Des chefs d'entreprise et certains employés des
dites entreprises ne vivant pas avec le VIH mais qui éprouvent des
images et des représentations imagées négatives à
l'image des personnes vivant avec le VIH dans l'entreprise.
3. b - Présentation de la
méthode
Les différentes techniques et instruments utilisés
ont été les suivants :
· Les entretiens semi structurés
(n=42)
Deux guides d'entretien avaient été
appliqués d'une part aux organes centraux des ministères, des
organisations internationales et des ONG impliqués dans la lutte contre
le VIH/ sida et d'autre part aux acteurs de terrain directement en contact avec
les enfants ou les adultes vivant avec le VIH et leurs familles.
· Les fiches épidémiologiques
(n=7)
Il s'agit de listes anonymes (ne comportant que des codes
chiffres) de personnes (adultes et enfants) vivant avec le VIH et suivies par
la structure médicale collaborant à l'étude. Les fiches
ont été remplies par le personnel médical (assistants
sociaux, infirmiers ou médecins) en contact avec les personnes vivant
avec le VIH/ sida et a servi de base de sondage pour l'enquête par
questionnaire.
· Les fiches médicales
(n=134)
Elles ont été élaborées pour
recueillir des données médicales et sociodémographiques
des personnes enquêtées (âge, sexe, statut
sérologique, présence de personnes vivant avec le VIH/ sida dans
l'entourage, actes de prise en charge médicale...).
· Le questionnaire centré sur les
enfants (n=64)
Il a été administré aux adultes devant
fournir des informations sur l'état de santé, la scolarisation et
les conditions de vie des enfants à leur charge.
· Le questionnaire centré sur les
adultes (n=200)
Il a pour objet de collecter des données le mode de vie
et le degré de stigmatisation et de discrimination de même que sur
les caractéristiques sociodémographiques des adultes vivant avec
le VIH dans les ménages.
· Les dessins d'enfants (n=14)
Les dessins ont été utilisés pour
contourner la difficulté d'administrer un questionnaire à des
enfants. Les dessins ont été réalisés par les
enfants (de 4 à 12 ans) vivant avec le VIH et par des enfants qui ne le
sont pas.
On avait demandé aux enfants de se dessiner
eux-mêmes, de dessiner leur famille et ce qu'ils aimeraient être
à l'avenir ainsi que de commenter eux-mêmes leurs propres dessins.
Le recrutement des enfants s'est fait avec la collaboration des médecins
traitant et l'autorisation préalable des parents ou tuteurs.
Chaque enfant avait reçu du papier et un jeu de crayons
de couleurs diverses.
· Les récits de cas (n=40)
Ils ont été effectués avec trois
catégories d'informateurs : les personnes vivant avec le VIH/sida en
entreprise, les personnes victimes de stigmatisation et ayant subis des abus et
les personnes ayant survécu après la mort d'un enfant ou d'un
parent du fait du Sida.
Tableau 1 : Répartition par
sous-groupe spécifique des PVVIH
Sous-groupe des PVVIH
|
Effectifs
|
Pourcentages (%)
|
Professionnelles du Sexe (PS)
|
53
|
36.05
|
Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres Homes (MSM)
|
29
|
19.73
|
Orphelins et enfants vulnérables (OEV)
|
34
|
23.13
|
Usagers de la Drogue (UD)
|
31
|
21.09
|
Total des PVVIH
|
147
|
100
|
Si les travailleuses du sexe sont les plus
représentées dans le groupe spécifique (36.05%), le
pourcentage des autres sous-groupes cumulé (63.95%) constitue un
indicateur qui permet de voir la diversité des personnes vivant avec le
VIH.
Autrement dit cela dénote la présence dans les
différents groupes des personnes vulnérables mais aussi
l'importance des actions à mener qui doivent être très
diversifiées.
Une étude statistique nous a aussi permis
d'établir des proportions relatives à la situation que vivent les
PVVIH dans la communauté Dakaroise.
Tableau 2 : Répartition selon la
situation domestique
Sous-groupe des PVVIH
|
Effectifs
|
Pourcentages (%)
|
Vit avec sa famille
|
18
|
12.25
|
Ne vit pas en famille
|
129
|
87.75
|
Total des PVVIH
|
147
|
100
|
En effet il apparaît que 87,75% ne vivent pas avec leur
famille. Cette situation s'explique par le fait que la plupart des personnes du
groupe spécifique vivant avec le VIH sont contraintes de vivre seules
pour plusieurs raisons.
Ces raisons sont étroitement liées à la
réalité des milieux culturels, où les personnes vivant
avec le VIH, vivent dans la précarité, le déshonneur et
manquent de soutien tandis que seuls 12.5 % sont parfois pris en compte en
association ou en famille.
Tableau 3 : Répartition de la population
selon la situation matrimoniale
Statuts
|
Effectifs
|
Pourcentages (%)
|
Célibataires
|
58
|
39.45
|
Mariés (es) ou fiancés (es)
|
33
|
22.45
|
Veufs (ves)
|
35
|
23.81
|
Abandonnés (es)
|
16
|
10.88
|
Divorcés (es)
|
5
|
3.41
|
Total des PVVIH
|
147
|
100
|
La répartition de la population selon la situation
matrimoniale montre que le pourcentage des célibataires est sensiblement
supérieur à la moyenne des mariés mais les veufs (ves)
sont aussi fortement présents (es), alors que le pourcentage des
divorcés (es) est relativement faible.
Le taux de célibataire (39,45 %) peut s'expliquer par
une instabilité familiale parfois déterminée par une forte
stigmatisation ou une discrimination dont ils font l'objet.
Au bout du compte les données fournies par les tableaux
montrent que la stigmatisation témoigne d'une pluralité
d'éléments ethniques, culturels, démographique, permettant
d'expliquer la spécificité des sous-groupes appartenant au groupe
spécifique des PVVIH.
Cette spécificité bien que constituant un
facteur de dynamisme économique, peut paradoxalement être un
facteur de vulnérabilité face à la stigmatisation et
à la discrimination du VIH.
Tableau 4 : Classement des causes de la
stigmatisation des PVVIH selon les interrogés et selon les
récits des cas (n=40)
Causes
Cibles
|
Nombre
|
Culture, religion et entreprises
|
Faible soutien psychosocial familial
|
Les conflits et ambiguïtés des ONG
|
Le poids économique de la prise en charge
|
La défaillance du système de santé
|
Professionnelles du Sexe (PS)
|
16
|
1er
|
2ème
|
3ème
|
4ème
|
5ème
|
Hommes ayant des rapports sexuels avec d'autres Hommes (MSM)
|
13
|
1er
|
3ème
|
2ème
|
4ème
|
5ème
|
Usagers de la Drogue (UD)
|
11
|
1er
|
2ème
|
3ème
|
4ème
|
5ème
|
Total des PVVIH
|
40
|
1er
|
2ème
|
3ème
|
4ème
|
5ème
|
Technique : un questionnaire a
été distribué aux personnes vivant avec le VIH (PS, MSM,
UD).Les enfants n'ayant pas été pris en compte pour raison de
communication difficile.
Cette étude montre la position des PVVIH dans la
société sénégalaise.
En effet, 100% des PVVIH interrogées classe en
première position la culture et la religion comme étant les
principales causes de leur stigmatisation. Selon eux, la culture
sénégalaise retient comme personne victime du VIH, toute personne
ayant en frein aux lois divines.
Le traitement des questions liées au VIH/ sida et des
groupes marginalisés particulièrement des MSM manque très
souvent de profondeur dans l'analyse et contribue à l'ancrage au niveau
des lecteurs d'un certain nombre de clichés.
« Le débat sur le traitement de
l'information relative au VIH/ Sida est une nécessité
impérieuse si nous ne voulons pas perdre nos acquis. En effet certaines
déclarations sur le Sida, l'homosexualité sont de nature à
freiner les initiatives de prévention et de prise en charge notamment
chez les MSM » responsable d'une structure travaillant avec les
travailleuses du sexe.
TABLEAU 5 : Perception des PVVIH selon
les ethnies sénégalaises
Ethnies
|
Effectifs
|
Perception
|
% Perception
|
Wolof
|
65
|
TG
|
44.21
|
Toucouleur
|
17
|
TG
|
11.56
|
Peul
|
23
|
TG
|
15.64
|
Sévère
|
9
|
TG
|
6.12
|
Diola
|
11
|
G
|
7.48
|
Mandingue
|
13
|
PG
|
8.84
|
Soninké
|
9
|
I
|
6.12
|
Total
|
147
|
|
100
|
Démarche : Nous avons
attribué des points allants de 1 à 5 selon la perception ethnique
des PVVIH dans une population de 200 personnes interrogées dans le cadre
de notre étude.
Très Grave : TG =5 Grave : G =
4 ;
Moins Grave : MG = 3 ; Peu Grave : PG =
2 ; Indifférents : I = 1
En considérant seulement les réponses positives
relatives à la perception des PVVIH dans la société
sénégalaise, nous obtenons les scores ci-dessus.
Dans l'échantillon étudié, 77.53 % des
interrogés trouvent cette maladie très grave, tandis que seule
l'ethnie Diola la trouve grave refusant l'exagération, les Mandingues la
trouvent peu grave faisant allusion à la prise en charge des PVVIH et
refusant la stigmatisation.
L'ethnie Soninké quant à elle reste
indifférente car les considèrent comme les malades ordinaires.
Diagramme des perceptions des PVVIH selon les
ethnies du Sénégal
(Voir diagramme d'ISCHIKAWA en page annexe
9)
|