5.3.2. Les races bovines dans le terroir
Une étude sur les pratiques et stratégies des
éleveurs mobiles se doit de porter une attention particulière aux
espèces et surtout aux races animales (notamment bovines) en
présence. Les races servent en effet souvent, de marqueur identitaire au
groupe pastoral (Boutrais, 1996). On observe une diversité relativement
grande dans les races bovines au sein des troupeaux d'élevage à
Kotchari. Les races les plus courantes sont la Barbaji et la
Gurmaji, cependant avec la forte fréquentation du terroir par
les transhumants, la race Jaliji (ou Djeli) y est
également importante à certaines périodes de
l'année, notamment pendant la saison sèche chaude de mars
à mai. À côté de ces races dominantes, on rencontre
aussi des Boboroji (ou Borheji), des Gudali et des
Kiwali.
Il faut toutefois noter qu'il existe un fort taux de
métissage entre ces races et qu'en l'absence de toute étude de
caractérisation génétique, il est impossible de juger de
la pureté de
celles-ci. On sait par exemple que la race Barbaji, ou
race Borgou, rencontrée au Bénin
d'oüelle a d'ailleurs été importée, est
issue du métissage entre le zébu Fulani et la race
taurine
Somba (taurin de petite taille à courtes
cornes) (Dehoux et Hounsou, 1993). Il est possible qu'il en soit de même
pour les autres races. Certaines des races rencontrées à Kotchari
ne sont peut-être que des écotypes locaux de races existantes ou
des hybrides entre elles. Nous ne cherchons pas ici à identifier et
à caractériser précisément les races localement
rencontrées. Un tel objectif aurait nécessité un
dispositif plus lourd avec des travaux de laboratoire assez coûteux et
des compétences en génétique qui sortent largement du
cadre du présent travail. Il s'agit ici uniquement d'identifier et de
comprendre les représentations que les éleveurs font
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des différentes "races" supposées de leur cheptel
et des stratégies qu'ils mettent en oeuvre en conséquence.
Les données présentées ici sur les
caractéristiques productives et reproductives sont issues
d'enquêtes auprès d'éleveurs expérimentés que
nous avons conduites avec D. Ouédraogo dans le cadre de son
mémoire d'ingénieur (2008) dont nous avons assuré
l'encadrement. Ces données ont été
complétées par la littérature. Ne résultant donc
pas d'études génétiques, elles doivent être
considérées avec précaution. Cependant, comme elles
résultent d'observations sur une longue période, la
hiérarchisation faite entre les races par les éleveurs pour
chaque paramètre peut être considérée comme à
peu près correcte. Malgré son caractère empirique, cette
classification suffit largement pour comprendre les choix qu'opèrent les
éleveurs dans les races bovines qui composent leurs troupeaux.
5.3.2.1. La race Barbaji
Elle est, avec la Gurmaji, la race la plus importante
du terroir. Originaire du Bénin, elle serait entrée dans le
terroir il y a plus de 60 ans. Son nom est dérivé de «
Bargoube », appellation gourmantché d'une ethnie du Nord
Bénin (les Bariba), propriétaire de cette race. Cette
race résulterait d'un métissage (Vissac, 1994) entre le
zébu White Fulani et le taurin Somba (Dehoux et
Hounsou, 1993) ou entre le zébu et le Muturu, une race taurine
rencontrée au Nigeria (Kagoné, 2000).
De petite taille, elle est caractérisée par une
quasi-absence de bosse, de petites cornes et une queue peu
développée. La couleur de la robe est variable. L'âge au
premier vêlage varierait entre 3 et 4 ans et l'intervalle de mise bas
serait d'un an dans les conditions de Kotchari.
Pour les éleveurs, l'intérêt de cette race
est lié à sa trypanotolérance, à sa
rusticité alimentaire qui lui permet de s'adapter à l'état
actuel des ressources et à sa prolificité. Elle est peu exigeante
en alimentation, et se déplace peu au pâturage. Cette
rusticité lui permet, par ailleurs, de garder sa production
laitière à un bon niveau à toute période de
l'année.
Cliché Sawadogo
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